Il existe plusieurs manières de mesurer le recul d'une nation. Elles se révèlent hélas largement convergentes.
Sans doute, pourra-t-on déplorer la triste déroute récente de la présence française dans plusieurs pays d'Afrique. Le monde de Tintin au Congo n'existant plus, se morfondre ne relève plus que de nostalgies elles-mêmes minoritaires.
À tort ou à raison il semble aux yeux de beaucoup, qu'Emmanuel Macron a joué plus mal encore que d'habitude. Même un François Hollande, pourtant bien médiocre, semblait agir moins lamentablement. Dans une prochaine étape, on risque de tâter de déconvenues comparables dans l'Océan Pacifique. La stratégie expansionniste chinoise y a parfaitement identifié le maillon faible du dispositif occidental. Des anciennes possessions abandonnées, ne tient-elle pas déjà, avec Djibouti, sa principale base maritime.
On gagnerait donc à s'interroger d'abord sans tabou sur la société française. Observons ainsi, dans l'Hexagone, la crise spectaculaire que déplorent ces jours-ci Les Restos du cœur. Avec les autres institutions caritatives du type des Banques alimentaires elle tient à des causes simultanées multiples. On peut mentionner à la fois : la diminution des capacités contributives des petits donateurs ; la hausse de 11 % en un an des prix des produits alimentaires ; l'augmentation considérable des besoins de secours au sein d'une population, dont le taux statistique de pauvreté est évalué à quelque 14 % des familles françaises ou immigrées, etc.
Cette situation sociale ne marque-t-elle pas bel et bien le recul d'un peuple ? De ce point de vue, persister à dissocier la question sociale de la paupérisation, de la question du déclin national se révèle une erreur.
La conscience d'une telle situation dépasse en ce sens les vieux clivages droite / gauche. Et l'on se trompe assez lourdement si l'on cherche à s'y cantonner à tout prix. Les débats franco-français ne s'enferment pas seulement en effet dans des équations électorales.
De générations en générations, la sociologie politique a vu s'agréger à droite, les sédimentations successives des refus, des indignations légitimes contre les outrances de l'absurde idéologie égalitaire, et contre leurs conséquences. Ainsi les vieux radicaux-socialistes, quintessence du camp adverse sous la IIIe république, sont aujourd'hui comptabilisés avec les héritiers des conservateurs. De même, lentement mais sûrement, 50 ans après le congrès d'Epinay on voit réapparaître, dans les rangs socialistes un courant qu'on ne dit même plus social-démocrate, et qui refuse, notamment mais pas exclusivement, la dérive islamo-gauchiste et le communautarisme.
Sur ce terrain, un Manuel Valls a certes échoué, notamment pour des raisons qui tiennent à son personnage. Mais on pourrait s'intéresser, sans en faire pour autant un référent philosophique, au cas du maire socialiste du Mans Stéphane Le Foll. En 2021, il s'opposait à la ligne, désastreuse pour son parti, qui conduisit à la candidature de la Mégère Hidalgo. Dans ce contexte, il appelait sa famille politique à ne pas se laisser dominer par les wokistes, les décroissants et les anti-progrès. Il ira même jusqu'à déclarer : « On a tort de prendre Zemmour pour un guignol ».(1)⇓
Deux ans plus tard, en cette rentrée des classes 2023 le psychodrame monté par le ministre-communicant Attal autour de l'abaya, – affaire qui peut sembler superficielle – permet de distinguer des clivages profonds au sein de l'opinion populaire.
À plus ou moins court terme on peut concevoir un schéma nouveau, où les hommes qui s'insurgent aussi bien contre l'abdication nationale et européenne, que contre la dissolution communautariste de nos pays, aient vocation, un jour ou l'autre à converger.
Autant faut-il se féliciter de voir naître une conscience de durcissement au sein des forces politiques classées à droite, – et qui, désormais assument cette référence, – autant on se souviendra, par exemple, qu'aux heures les plus dominatrices du parti gaulliste sous la cinquième république, celui-ci se voulait la "majorité". Pourtant, sous ses noms successifs, son noyau dur n'a jamais drainé directement plus de 20 % des voix. Ses victoires électorales se réalisaient avec l'appoint de ceux qui misaient sur lui pour enrayer le déclin, considéré comme caractéristique de la défunte IVe république.
Demain un nouveau partage mériterait de s'opérer entre les forces qui le nient mais qui, en fait, concourent toutes au déclin industriel, démographique, financier, militaire ou culturel de la France et de l'Europe, et les forces de redressement et de liberté.
JG Malliarakis
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Apostilles
- cf. entretien publié par Le Point le 18 décembre 2021 .⇑
Il me semble qu'en France la liquidation des classes moyennes a accentué les clivages sociaux.Ce ciment qui faisait le lien entre le haut et le bas de la société manque grandeent. Par ailleurs la paupérisation des immigrés (et encore ceux du bidonville de Nanterre étaient ils plus riches que ceux des banlieues actuelles???)et surtout des retraités sont des phénomènes qui accentuent les clivages sociaux. De plus en plus le tissus social de la France se délite.
Rédigé par : Laurent Worms | mardi 05 sep 2023 à 09:18
Géopolitique, où es-tu?
Les "élites" de la France acceptent la domination d'intérêts étrangers souvent contradictoires : immigration, agriculture, élevage, industrie, carbone, nucléaire, monnaie, diplomatie….
Lorsque la France déclina, une personne forte stoppa la déchéance : Jeanne d'Arc, Napoléon, de Gaulle... Qui sera le suivant ? Zemmour ?
En tout cas, osons constater que le déclin s'accélère pour le malheur des Français.
Rédigé par : Alain Charoy | mardi 05 sep 2023 à 10:05
Refuser la notion de "communauté" me paraît absurde et nuisible : son contenu est positif, et il l'est d'autant plus que nous en avons besoin pour nous-mêmes. L'illusion d'une France universelle et assimilatrice nous a conduits où nous en sommes. Les distinctions entre intégration et assimilation sont balayées par les faits, par le nombre, par des réalités humaines bien plus anciennes que les théories politiciennes et les idéaux de batteurs d'estrades.
(Echo de la mode : Remplaçons l'abaya par l'uniforme : nous aurons l'uniformisation extérieure, le contenant. La French touch)
Rédigé par : Jegou | mardi 05 sep 2023 à 13:45
Un mot sur la paupérisation. Je lis souvent qu'il y a x % de pauvres en France, donc c'est la preuve que la France va très très mal et qu'elle s'appauvrit à grand pas.
Cependant, les pourcentages annoncés me paraissent faibles. 14 %, ça ne semble pas beaucoup.
De plus, la présence de pauvres est une nécessité statistique. Vu la façon dont ce taux est calculé, il est obligatoire qu'il y en ait. Sauf, je suppose, si tout le monde avait le même revenu -- le rêve érotique des gauchistes.
Il s'agit donc d'une notion relative. Ces prétendus pauvres peuvent parfaitement être riches.
En l'absence d'élements comparatifs (avec d'autres pays, dans le temps...), il est impossible de tirer des conclusions pratiques d'un tel chiffre.
Concernant les Restaus du Coeur, les chouinements ambiants me paraissent représentatifs, non pas d'un appauvrissement de la population, mais du scandaleux régime d'assistanat en vigueur, dont tout le monde semble désirer le maintien.
Il suffit d'une hausse minime des denrées alimentaires (oui, minime : nous sommes très loin d'une situation d'hyper-inflation) pour que les dirigeants de "l'assoce" en question hurlent au meurtre : annonce apocalyptique de fermeture prochaine, etc.
Ben, mon gars, c'est un peu ton boulot, de prévoir que la bouffe peut devenir un peu plus chère.
Aussitôt, l'Etat se précipite, donne je ne sais combien de millions, et la réaction des chefs des Restaus, ce n'est pas : merci, je vous baise les pieds, amis contribuables, c'est : scandaleux ! tout à fait insuffisant !
Bernard Arnault a aussi donné des millions, si j'ai bien compris, et lui aussi s'est fait insulter, je n'ai pas bien compris pourquoi.
Comme d'habitude, à l'occasion de cette mini-crise, on découvre l'un des innombrables scandales qui restent cachés en temps ordinaire. Les chefs des Restaus nous disent : c'est la fin du monde, nous allons être obligés de fixer une limite de ressources pour nos bénéficiaires.
Autrement dit, depuis les dizaines d'années que ce racket existe, n'importe qui pouvait franchir la porte des Restaus, et remplir son cabas gratos. Quel que soit son revenu.
Etonnez-vous, après cela, que les médias se tordent les mains année après année en déplorant le nombre des "clients" des Restaus du coeur qui augmente.
Car si l'on peut admettre que les Blancs de souche qui n'ont pas réellement besoin de la charité pour vivre évitent de la réclamer, par honte ou par décence, qu'en est-il des populations immigrées qui considèrent l'assistanat comme un dû, dès qu'elles posent le pied sur notre territoire ?
La bouffe gratuite des Restaus, pour une bonne partie de ses "clients", c'est tout simplement un drouâ, qui permet d'augmenter le revenu disponible.
Que l'alimentation de ce tuyau percé se fasse par la charité volontaire (à grands renforts d'exonérations fiscales, tout de même), ou directement par subventions étatiques, c'est tout aussi scandaleux.
Il est temps d'ôter son auréole à saint Coluche.
Rédigé par : Robert Marchenoir | mardi 05 sep 2023 à 21:43
"Lorsque la France déclina, une personne forte stoppa la déchéance : Jeanne d'Arc, Napoléon, de Gaulle... Qui sera le suivant ? Zemmour ?"
Napoléon Bonaparte et De Gaulle stoppant la déchéance ???
Le premier a saigné la France par ses guerres (des millions d'Européens et en premier lieu de Français y ont laissé leur vie) avec pour conséquence un pays ruiné plus petit qu'avant sans parler de la perte de la Louisiane et des lois criminelles envers les femmes et les enfants.
Quant au second, tout ce que nous dénonçons (politique migratoire, rêgne de la haute finance mondiale cosmopolite notamment) a commencé sous sa gouvernance.
Zemmour (ou Le Pen) ? L'opposition controlée, on connait.
Rédigé par : RR | mercredi 06 sep 2023 à 00:22
C'est la plou-belle Marianne jamais vue! De là à en faire tout un sac!
Rédigé par : minvielle | mercredi 06 sep 2023 à 10:26
Pour répondre au post, toujours intéressant, de Robert Marchenoir. Si j'ai bien lu l'article de L'Insolent il est parlé, en matière de pauvreté, d'une évaluation officielle, sur laquelle l'auteur ne prend pas parti. En réalité le taux de 14% serait celui des ménages disposant de moins de 1 000 euros par mois.
Rédigé par : Émile Koch | mercredi 06 sep 2023 à 12:50
@ Émile Koch
Je ne connais pas les détails. Mais ce qu'on désigne communément par le taux de pauvreté, c'est le pourcentage de la population (ou des ménages, je ne sais) dont le revenu se situe en-dessous d'un certain seuil, lequel est déterminé par une fonction statistique appliquée sur l'ensemble des revenus.
Il se peut que ce seuil soit actuellement de 1 000 euros, je l'ignore.
Je voulais simplement souligner que telle que cette statistique est habituellement employée dans le discours politique, elle sous-entend : il y a des pauvres, or il ne devrait pas y en avoir du tout.
Imaginons un pays très prospère, où tout le monde vivrait au moins dans l'aisance (donc pas la France), alors les pauvres officiels ne le seraient pas au sens conventionnel du terme.
D'autre part, 1 000 euros n'est pas très éloigné du salaire minimum.
Plus significatifs que le taux de pauvreté, me semblent des indicateurs rattachés à la capacité de se procurer des biens et des services nommément désignés.
Rédigé par : Robert Marchenoir | mercredi 06 sep 2023 à 18:57