La France vient de vivre, une fois de plus une séquence agitée particulièrement significative. Un pouvoir qui ne se préoccupe que de communication, une violence qui ne cesse de s'aggraver, des forces de l'ordre trahies par la magistrature syndiquée, composent les ingrédients de plus en plus repérables de l'immobilisme macronien. Du Beauvau de la sécurité au Ségur de la santé, les annonces comme les feuilles mortes se ramassent à la pelle. Las, voyez comme en peu d'espace, le vent les a dispersées.
Naguère, pour caractériser la période grise, de 1964 à 1982, pendant laquelle le sinistre Léonid Brejnev régna sur l'empire soviétique on parlait de l'ère de la stagnation. Au terme de ces quelque 20 années, les bureaucrates qui lui succédèrent, Andropov, Tchernenko et enfin le réformateur velléitaire Gorbatchev ne firent qu'aggraver le déclin et l'Union soviétique s'effondra : non par la conjuration des [très méchants] Occidentaux, mais sous son propre poids de corruption, de misère et d'oppression spécifique du communisme.
Le parallèle entre la stagnation de l'URSS hier et celle de notre pays aujourd'hui peut certes paraître osé. Sans doute, en France, le régime ne met [pas encore] les opposants dans des asiles psychiatriques et nos technocrates ne parlent pas de dictature du prolétariat. Ils se gargarisent seulement d'Égalité – c'est-à-dire de quelque chose qui n'existe pas dans la nature, mais dont la devise de la république française revendique, seule au monde, un émouvant monopole ;
Après les quinquennats décevants de Chirac, Sarkozy et Hollande, après les phases socialistes funestes et illusoires, qu'il avait connues sous Mitterrand et Jospin, le pays avait besoin de renouveau. Dans cet esprit, Macron, qui faisait office depuis 2014 de ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique dans le gouvernement Valls II, avait publié en 2016 un livre intitulé "Révolution". Le titre seul faisait illusion : car les 257 pages découpées en 16 chapitres, sans rien promettre de concret, témoignaient déjà d'une superficialité et d'une immodestie verbeuse, que les 7 années suivantes n'ont pas démentie. Sur ce point au moins le règne du "en même temps" et du "quoiqu'il en coûte" a tenu ses promesses : la France recule partout, en Europe comme en Afrique, en Méditerranée comme en Océanie.
Aujourd'hui, le président de notre république ne s'affuble plus du titre ridicule de maître des horloges. S'il a pris la parole ce 24 juillet c'est pour compenser par quelques accents droitiers, presque sécuritaires la consolidation de l'aile gauche du gouvernement d'Élisabeth Borne au gré du savant dosage de ses 40 ministres.
Mais, au cours des journées précédentes, qui viennent de s'écouler la messe a été dite, dans les faits. Le remaniement ministériel, tant attendu, tant annoncé depuis 100 jours, n'a rien changé et ne changera pas grand-chose. Sans doute personne de sensé ne regrettera ni le pathétique M. Pap Ndiaye, ni la malheureuse Mme Schiappa. Certains anciens élèves de l'École Alsacienne investissent peut-être quelques espoirs sur leur condisciple Attal : ils se contentent de sa bonne mine et de ses costumes de bonne coupe, autant dire de peu.
Plus inquiétante, et combien caractéristique, se profile l'ascension d'Aurélien Rousseau, technocrate aux attributions successives interchangeables. Venu du PCF, il passait pour la conscience de gauche, en même temps que le bras doit, de la Première ministre. Après un temps à la direction de la Monnaie de Paris, il se trouvait à la tête de l'Agence régionale de santé Île de France au moment de la pandémie et du grand confinement. Directeur de cabinet d'Élisabeth Borne après avoir servi sous Manuel Valls, on avait annoncé sa prise de fonction à la Caisse des dépôts : eh bien, non : il se retrouve bombardé ministre de la Santé. Cet impressionnant zigzag rassurera sans doute les tenants du tout-hôpital. Pas sûr que la médecine et la cause de la liberté y trouvent leur compte. (*)
Nous réagissions dans notre chronique du 24 juillet, exclusivement en fonction du faux soutien macronien aux forces de l'ordre. Il est à craindre que l'étatisme rampant du régime nous donne bientôt d'autres motifs d'insatisfaction.
JG Malliarakis
Pour recevoir les liens du jour de L'Insolent,
il suffit de le demander en adressant un message à
[email protected]
Apostilles
(*) cf. aussi à son sujet notre chronique du 22 juin : "La gauche case ses pions"
Lire l'insolent est rassurant par son perpétuel optimisme! Si au moins nous étions en stagnation, tout irait mieux. En réalité, nous sommes en stagflation, et même en récession économique avec, "en même temps", une forte inflation des prix.
Bravo à la zone euro qui devait nous protéger de l'inflation en faisant pièce au dollar et à l'UE qui devait nous protéger de toute guerre en Europe.
Nous ne pouvons que rêver de stagnation!
Rédigé par : Alain Charoy | mardi 25 juil 2023 à 17:25
"(...) l'Union soviétique s'effondra : non par la conjuration des [très méchants] Occidentaux, mais sous son propre poids de corruption, de misère et d'oppression spécifique du communisme."
On ne le dira jamais assez.
Rédigé par : RR | mardi 25 juil 2023 à 17:26
Au début du XXIè Siècle,avec 10 euros on avait 15 à 16 francs suisses (un changement drastique comparé au rapport Franc français et suisse). Depuis peu le change s'est inversé et avec la même somme on obtient environ 9,7 Francs suisses. Entre temps la (dite) seconde économie de la Zone Euro à une dette de 300 milliards d'euros élevant ainsi à 112,5% du PIB. Un pays en faillite. Il est fort à penser que c'est un facteur déterminant de cette inversion de tendance. Un beau résultat pour la macronie.
Rédigé par : Laurent Worms | mardi 25 juil 2023 à 18:28
Ne soyez pas timide, Monsieur Worms, la dette visible du pays est de trois mille milliards d'euros.
Rédigé par : Catoneo | vendredi 04 août 2023 à 18:26