Moins d'une heure après l’ouverture de la séance, la très macronienne Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, se montrait déjà excédée par les cris et la fureur du petit peuple des députés. Et de s'écrier ainsi : "Est-ce que vous croyez que nous allons passer quinze jours comme cela dans l’Hémicycle ?" Et la réponse fuse alors, par dizaines, des rangs parlementaires, c'est : "Oui !!!"
Cette fois en effet le désordre ne se répandait pas dans la rue, mais au sein même du Palais Bourbon. L'opposition de gauche et d'extrême gauche, feignant de déposer des milliers d'amendements redondants provoque la thrombose de la procédure. Paradoxalement, peut-être consciemment, cette tactique récurrente, inventée au XIXe siècle par les députés irlandais au parlement de Westminster produit aujourd'hui un effet boomerang en France : son utilisation par LFI ouvre la voie à l'utilisation par le pouvoir exécutif d'une disposition trop souvent oubliée de la constitution de 1958.
L'article 47 a été modifié en 2008. Il impose en effet désormais des délais encore plus contraints, au bout desquels, s'agissant des projets de loi de financement de la sécurité sociale "si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de 50 jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance." Or, depuis la réforme constitutionnelle concoctée par Juppé en 1996, les questions relatives à l'assurance vieillesse entrent dans un tel cadre.
Non seulement la pagaille parlementaire attisée par l'extrême gauche accélère le recours à cette solution de dernière minute, mais elle le légitime quelque peu aux yeux de l'opinion. Sans cela, on crierait à la technocratie : grâce aux idiots utiles, grandes gueules de la NUPES, toute la frange des partisans de l'ordre, de l'ordre à tout prix, avec un petit o, peuvent se rallier sans trop broncher au projet du gouvernement.
Tel est sans doute le scénario le plus désirable pour les gens de Bercy. Et si un épisode violent, vrai black-bloc et faux gilets jaunes, venait à l'aggraver dans les manifestation programmées le 7 et le 11, la boucle se bouclerait encore mieux.
Les salariés du secteur privé et surtout les fonctionnaires modestes, lorsqu'ils manifestent leurs inquiétudes pour les perspectives de leurs droits à la retraite servent eux-mêmes d'infanterie au seul bénéfice des grands habiles super-privilégiés de la haute administration.
Cynisme total, le projet gouvernemental vise essentiellement à permettre à l'État central parisien de continuer à emprunter sur les marchés internationaux en dissimulant la réalité délabrée des finances publiques. En 2001, le gouvernement dirigé par Lionel Jospin mettait en place un prétendu Conseil d'Orientation des Retraites. C'est cet organisme qui établit et diffuse les comptes prévisionnels de l'assurance vieillesse. Au début composé exclusivement de hauts fonctionnaires il fut critiqué comme tel par quelques mauvais esprits, dont votre chroniqueur s'honore d'avoir fait partie au titre du CDCA et de la défense des travailleurs indépendants, il a été élargi, depuis, dans l'esprit d'un fonctionnement désormais synarchique, au sens littéral du mot : on y nomme donc, par décrets, divers bureaucrates requis pour applaudir aux travaux de la citadelle Bercy.
Une chose n'a pas changé depuis 20 ans dans les évaluations fluctuantes du COR : d'une part il refuse de prendre en compte le déséquilibre entre les cotisations de la fonction publique et les versements annuels du budget au titre de leurs pensions. Ce déficit inavoué était évalué à quelque 50 milliards en 2013.(1)⇓ La dernière réforme en date, portée par Marisol Touraine en 2014, se voulant "loi du 20 janvier garantissant l’avenir et la justice du système" n'y a strictement rien changé.
Il semble voué désormais à dépasser 70 milliards. Or, il se trouve fictivement ramené à "zéro" en vertu d'un adage qu'on rapporte, peut-être abusivement, mais on ne prête qu'aux riches, à François Hollande "ça ne coûte rien, c'est l'État qui paye".
D'autre part, corollaire de ce déni de déficit, on se refuse aussi à incorporer dans la dette du pays la valeur des paiements auquel l'État devra procéder vis-à-vis de ses propres salariés... Cet engagement bien réel figure, au titre de l'INPS, dans la dette nationale l'Italie : nos voisins transalpins, sont endettés à 140 % de leur PIB. On doit donc ajouter aux 2 917 milliards, calculés par l'Insee, soit113 % du PIB français, une estimation de cette dette cumulée des retraites de la fonction publique, soit une valeur actuarielle supérieure à 1 500 milliards : total 4 500 milliards, plus de 160 % du PIB.
Le jour semble s'approcher où les marchés financiers internationaux... comprenant que Paris est plus endetté que Rome, ... soupçonnant de tricherie les cadors de Bercy, ... prenant acte du fait que depuis plus de 30 ans l'administration hexagonale n'a jamais exécuté ses engagements de stabilité pris à Maastricht en 1991 puis confirmés à Amsterdam en 1997, ... observant que la Commission des Finances est présidée par l'inepte député LFI Éric Coquerel...qu'adviendra-t-il dès lors ? sinon qu'ils refuseront de prêter plus avant à l'État français pour solder ses comptes.
JG Malliarakis
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Apostilles
- cf. Les Échos du 26 novembre 2013 : "Cette année, les cotisations des fonctionnaires en poste ne représenteront qu'un peu plus de 25 % du montant des pensions versées aux anciens fonctionnaires à la retraite. (...) A titre de comparaison, à la CNAV, le régime de base des salariés du privé, les cotisations versées par les salariés et les employeurs représentent 83 % du montant des prestations versées."⇑
Et qu'adviendra-t-il à la France si le taux d'intérêt remonte de quelques points? Comme le fait remarquer très justement Luc Ferry, en parallèle à la dette et du "quoi qu'il en coute" aucun effort n'a été fait en matière de réduction des fonctionnaires, aucune économie de fonctionnement de l'Etat. Le mur n'est plus si loin.
Rédigé par : Laurent Worms | mardi 07 fév 2023 à 09:04
"Est-ce que vous croyez que nous allons passer quinze jours comme cela dans l’Hémicycle ?"
Typique de la féminisation à outrance des postes de direction, cette sortie de maîtresse d'école revêche et inefficace.
Qui se voit répondre "oui !", comme si ce n'était pas prévisible.
Rédigé par : Robert Marchenoir | mardi 07 fév 2023 à 13:02
Pourrais-je avoir le numéro de téléphone du service clients de ce blog ? En effet, je n'ai pas reçu, comme stipulé dans les conditions générales, une alerte livrée à domicile par motard, selon laquelle Jean-Gilles Malliarakis devait parler sur Radio Courtoisie.
En conséquence, je suis tombé par hasard sur l'émission correspondante, dont j'ai raté le début.
Serait-il possible, également, de conseiller à la prénommée "Evelyne", qui anime cette émission, de laisser un peu parler ses invités, et de mettre légèrement en veilleuse son débit hystérique de groupie trumpiste ?
Merci d'avance.
Petite réponse
Les service client vous prie de bien vouloir excuser une intervention de votre serviteur programmée un peu à la dernière minute. Je crois que RC rediffuse ce moment de génie(s) à 16 heures ce jeudi et l'installe sur son site.
Rédigé par : Robert Marchenoir | jeudi 09 fév 2023 à 12:45
Les Services spéciaux de la République populaire de Chine seraient reconnaissants à M. J.-G. Malliarakis de prévenir directement l'ambassade de l'heure de diffusion de ces émissions, et de leur contenu, pour éviter des heures de veille pénible à leurs fonctionnaires. Nous tenons en effet beaucoup à en étudier la teneur, si déconcertante pour nous, et que nous avons du mal à décrypter.
Nous serions honorés, en échange, d'accorder un droit de visite illimité à l'honorable J. G. Malliarakis dans un établissement de repos de son choix, en Chine.
M. Ming
Rédigé par : FU-Man-Chu | vendredi 10 fév 2023 à 18:39
Pour les Français, dans l'instant, cette affaire de réforme des retraites qui n'a aucune chance d'être acceptée par le peuple, et les troubles sociaux qu'elle va générer, c'est très important. Mais vu de l'extérieur, en comparaison avec la situation internationale, cela n'a aucun intérêt ni aucune importance. Bientôt la Russie va prendre l'Allemagne et l'OTAN n'a ni soldats, ni armement, ni munition pour l'empêcher. Toutes les ressources militaires disponibles sont mises à disposition de l'Ukraine et seront détruites lentement mais sûrement par la broyeuse du général Guerassimov. Les arsenaux de l'OTAN sont vides. Oncle Sam ne recourra pas à l'armement nucléaire car la Russie domine en ce moment en terme de dissuasion nucléaire. L'Europe occidentale et ses leaders bellicistes et antimilitaristes suicidaires, à plat ventre devant les néoconservateurs, qui ont refusé depuis 30 ans de négocier des garanties de sécurité collective raisonnables en Europe, réclamées à cor et à cri et légitimement par la Russie, sont responsables ou plutôt coupables de cette situation. Ici les hommes épousent des hommes et les femmes épousent des femmes. On change de sexe et il y a même des officiers supérieurs transgenres. Tous les ministères de la défense ont une femme comme ministre, qui n'a jamais tenu un fusil. Il n'y a plus de conscription. Les mini armées de l'OTAN ne sont plus homogènes ethniquement. En Russie il y a encore des soldats. Bonjour.
Rédigé par : Helveticus | samedi 11 fév 2023 à 02:42