C'est désormais pour la France, que les choses sérieuses du nouveau quinquennat vont commencer. Car la situation financière et monétaire est grave. Les médias, les instituts de sondages, les commentateurs agréés ratiocinent dans le vide autour du concept de pouvoir d'achat, expression qui ne veut pas dire grand-chose : de même qu'il ne faut parler de guerre mais de "conflit de haute intensité", – ce qui ne sauve pas la paix, – de même que l'on évite de voir la mort, on se refuse à envisager un effondrement monétaire.(1)⇓
On annonçait donc pour 11 heures ce 15 juillet une rencontre entre Emmanuel Macron et Pierre Moscovici consacrée à la remise du rapport de la Cour des Comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques. Or, 24 heures plus tard, on recherche vainement les échos médiatiques de cette entrevue annoncée – a-t-elle même eu lieu ? Elle figurait à l'agenda officiel de la présidence mais ne fait encore l'objet d'aucun communiqué.(2)⇓
Nous ne connaîtrons de cet entretien même pas les comptes rendus probablement hypocrites des intéressés. Leurs carrières se sont croisées depuis l'époque de François Hollande. Leurs relations demeurent nimbées d'ambiguïtés et de mystère : le subtil Moscovici ne voyait-il pas juste, lorsqu'il estimait l'ambitieux collaborateur de Hollande, au début de son ascension, capable de gagner l'élection, mais pas de gouverner ?
Ce jugement, doublement prophétique, le président élu de 2017 a mis très longtemps à le pardonner au commissaire européen… avant de le nommer à la tête de l'institution la plus redoutée, puisque chargée d'évaluer nos désastreuses finances publiques.
On ne doit jamais oublier non plus que l'approche critique de l'organisme d'État, désormais dirigé par Moscovici, mais toujours composé de hauts fonctionnaires de l'État central parisien, s'arrête à l'entre-soi inhérent à notre haute administration. On ne verra jamais ces citoyens, super-protégés eux-mêmes, mettre en parallèle le poids effarant de l'étatisme qui les nourrit accompagnant le déclin corrélatif de la nation qui les alimente de ses impôts.
Reste qu'en s'en tenant à sa seule méthodologie, et aux chiffrages synthétiques connus depuis le 4 juillet, la condamnation de la gestion macronienne s'impose. Après deux années à peu près convenables du point de vue arithmétique c'est dès 2019, en effet, que la trajectoire financière de l'État a commencé à se dégrader. La crise sanitaire et son délirant "quoi qu'il en coûte" de 2020 n'ont fait qu'aggraver la dérive.
La plus surprenante rumeur, qui se répand pourtant comme la calomnie de Don Basile dans Les Noces de Figaro, fait de Bruno Le Maire un successeur possible de Macron II puisqu'il n'y aura pas de Macron III. Espère-t-on transformer en "sauveur" ce déplorable ministre, ancien candidat qui n'obtint, en 2016 que 2 % des voix aux primaires "de la droite et du centre", puis qui, rallié en 2017 à la Macronie, en aura géré toutes les erreurs financières ?
Rappelons les données les plus cruciales du problème de nos finances publiques après 5 ans de sa gestion.
Les dépenses de l’État ont augmenté de 91 milliards d’euros sur les deux années 2020-2021, mais les dépenses hors mesures de soutien et de relance ont progressé, à elles seules, de 18 milliards d’euros. Et l'on nous annonce en 2022 tout un ruissellement de dépenses démagogiques nouvelles. C'est en temps de Covid qu'en 2021, le déficit public a atteint 161 milliards d’euros ; or, il devrait se maintenir au-dessus de 160 milliards d’euros en 2022. La croissance des dépenses publiques sans lien avec la pandémie est au bout du compte considérable. La dette publique se maintiendra donc au-dessus de 110 % du PIB en 2022 comme en 2021.
Quant aux hôpitaux de l'État, dont on veut faire la pierre angulaire des politiques sanitaires, rappelons que les administratifs représentent en France 33 % de leur personnel, contre 22 % en Allemagne, soit une pléthore de plus de 120 000 ressortissants de la "fonction publique hospitalière".
Tout ceci va se révéler d'autant plus grave que les fonctions régaliennes, paupérisées par des décennies d'erreurs, de négligences ou de démagogie, aussi bien la justice, que la défense nationale ou les missions de sécurité, vont exiger un redressement impossible sans une prise de conscience de leur urgence prioritaire.
L'équation sera d'autant plus dure à résoudre qu'il est devenu impératif, à la fois, de réduire les impôts, les déficits, le niveau global des dépenses, tout en relançant précisément ces dépenses régaliennes. Or, c'est d'abord la hausse des prix de l'énergie, composés à plus de 50 % par des taxes, qui alimente grandement la dégradation ressentie, et réelle, du "pouvoir d'achat". Ainsi en 2022, en France, la consommation réelle d'électricité d'un particulier ne représente que 49 % de sa facture, la part principale résultant de l'abonnement et des taxes. Entre 2010 et 2021, le coût de l'abonnement au réseau électrique a augmenté de plus de 58 % et les taxes de plus de 20 %. Le prix de l'essence à la pompe sert de vache à lait aux finances de l'État.
Au terme d'un réquisitoire implacable l'économiste Christian Saint-Étienne conclut donc à juste titre que "la performance de l’économie française est catastrophique avec une croissance moyenne de 1,1 % depuis vingt ans. L’inefficacité de la dépense publique est un des principaux freins à notre développement." (3)⇓
JG Malliarakis
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Apostilles
- A cet égard, je déplore [presque] d'avoir ironisé, autour du 14 juillet, — c'était la fête nationale, – évoquant la reconnaissance par la Corée du Nord de "l'indépendance" de deux territoires, qui ne la désirent aucunement. La véritable aspiration de ces "républiques", du moins celle de ceux qui s'en sont emparé, est certainement le rattachement de ces anciennes possessions des tsars moscovites, à la [pacifique] Fédération de Russie, au mépris des accords d'Helsinki que nous avait imposés, il y a 50 ans, la défunte (?) URSS. Poutine n'a pas seulement consolidé un sentiment national ukrainien jusque-là fragile et sous-évalué, il a sorti l'Otan de ce que Macron appelait sa "mort cérébrale"......⇑
- cf. site de la présidence de la république.⇑
- cf. L'Opinion du 7 juillet
Je suis frappé de voir à quel point la partie de l'opinion censée être la plus libérale, en France, reste nourrie aux mamelles de l'étatisme. Je pense, une fois de plus, à BFM Business, vouée aux gémonies par les Gilets jaunes au nom d'un ultra-libéralisme présumé.
L'opinion prépondérante des économistes et experts s'exprimant à cette antenne, qu'ils soient employés par BFM ou invités, consiste à réclamer une meilleure efficacité du service public.
A dépense constante ou accrue, tel est le persistant sous-entendu. Je ne sais quel éminent intervenant disait, il y a peu : le poids considérable de la dépense publique ne me gênerait pas, si nous avions le meilleur service public du monde.
Un peu sur le modèle du fameux "je ne suis pas raciste, mais...", censé marquer la soumission du locuteur à la doxa ambiante, et qui ne se dit d'ailleurs plus.
"Je ne suis pas libéral, mais..." semblent dire tous ces augustes personnages. Il semble leur échapper que si l'école, l'université, l'hôpital ou la police sont si mauvais, c'est précisément parce qu'ils ont trop de "moyens", et non l'inverse.
J'ignore comment on peut obtenir cette "efficacité" magique que réclame tout un chacun, si l'on persiste à nourrir les responsables avec des torrents d'argent public qui les dispensent, précisément, d'être efficaces.
C'est par la réduction de la dépense publique qu'on obligera les fonctionnaires à être meilleurs.
Réduction de la dépense publique, mise en concurrence, privatisation, suppression pure et simple d'activités et de postes inutiles voire nocifs. C'est pourtant simple.
Les politiciens un tant soit peu libéraux ont un boulevard pour l'expliquer. Il ne devrait pas être difficile de faire comprendre qu'un euro d'argent public dépensé, c'est un euro pris de force dans la poche des Français, un euro retiré du fameux "pouvoir d'achat".
En Grande-Bretagne comme au Canada, actuellement, les conservateurs ne se privent pas pour tenir ce discours. Les Tories qui se bousculent à la succession de Boris Johnson font la course à celui qui se réclamera le plus fort de Margaret Thatcher. Au Canada, Pierre Poilievre, candidat francophone à la direction du parti conservateur et au poste de Premier ministre, fait une percée remarquée.
https://www.telegraph.co.uk/news/2022/07/16/found-perfect-new-prime-minister-what-shame-already-got-job
https://www.ledevoir.com/pierre-poilievre
Rédigé par : Robert Marchenoir | samedi 16 juil 2022 à 22:21
À noter qu'en 2013, Moscovici déclarait un patrimoine de 268.000 €, inférieur de 100.000 € à celui moyen des ménages français, et ce après une carrière de député national, européen, président de conseil général, et même déjà ministre pendant 7 ans. Votre banque prêterait-elle un sou à un gars qui présenterait un tel bilan ? On en a pourtant fait un ministre de l’Economie et des Finances !
https://www.journaldunet.com/economie/magazine/1110175-patrimoine-pierre-moscovici-a-decouvert/
Rédigé par : Andy Vaujambon | dimanche 17 juil 2022 à 01:11