Dans les situations les plus tragiques, et malheureusement, ni la société française, ni le continent européen n'y échappent en ce moment, il existe parfois des occasions de sourire. La déroute de Manuel Valls, naguère chef du gouvernement parisien, nous en offre un exemple. Candidat officiel, étiqueté macronien, il se pressentait dans l'une des 11 pseudo-circonscriptions dessinées pour les titulaires de passeports français résidant à l'Étranger, la sienne se promenant entre Monaco et Portugal.
Avec 15 % des voix, malgré l'investiture de La République en Marche contre 25 % au sortant devenu macronien dissident et 27 % au mélenchoniste, le voilà contraint au retrait. Sommes-nous enfin débarrassés de ce personnage surfait ? On pourrait l'espérer, sauf à se souvenir, quand même qu'un homme politique peut toujours, jusqu'à son dernier souffle, faire du mal.
Or, cette péripétie s'inscrit dans un contexte à la fois morose pour ce qu'on appelle la majorité présidentielle, et artificiellement tonique pour Mélenchon, et pour la mainmise de son parti sur le reste de la gauche. Depuis quelques jours, le candidat d'extrême gauche, arrivé troisième du premier tour de l'élection présidentielle, répète à l'envi : "je crois que ça sent bon pour nous".
Prend-il ses désirs pour des réalités ? Se félicite-t-il de son rôle d'épouvantail ? Il lui sied si bien et permet au pouvoir actuel de miser sur le rejet de l'hypothèse, effectivement sinistre, de "Mélenchon à Matignon" à l’occasion de ce qu'il affecte de présenter comme un "troisième tour" de la présidentielle" ?
Toujours est-il qu'il a su en faire, dès le soir du 24 avril, l'axe central de sa nouvelle campagne. Il se plaît à croire que cette trouvaille rend "drôlement jaloux ses adversaires [qui] enragent parce qu’ils n’ont pas trouvé un coup aussi bon".
Catastrophique pour le pays, et même pour l'Europe, le cas ne doit cependant pas être tenu comme le plus probable. On a cependant vu apparaître en ce début juin, des sondages, Elabe et Ifop, qui ne donnent plus systématiquement, au sein de future Assemblée une véritable majorité absolue aux inconditionnels du président.
Nous évoquions cette hypothèse et le précédent de 1967 dans notre chronique du 1er juin "le parlement pendu" [https://www.insolent.fr/2022/06/parlement-pendu.html]. Elle dépend de plusieurs facteurs. Du fait même de la démobilisation de l'électorat, sur laquelle misent depuis le début le chef de l'État et son équipe gouvernementale, l'opacité de leur projet a atteint un niveau contre-productif. L'effet "pochette surprise" est devenu excessif, inquiétant et irritant. Le niveau de l'abstention, dans l'ensemble du corps électoral, et dans chaque camp, jouera ainsi un rôle décisif. Certains conseillers et courtisans pensent et affirment que "le Président a bien raison de laisser les oppositions s’épuiser." "Les oppositions", voilà un élément de langage qui nous ramène à l'époque de la cinquième république où les campagnes électorales étaient fabriquées par "Services et méthodes", époques où cependant les résultats ne se révélaient pas, à l'arrivée, à la hauteur des honoraires perçus par les cabinets de conseil…
Autre dimension de la campagne : 15 ministres ont accepté le risque de la candidature, les spécialistes calculant que seulement 4 d'entre eux sont réellement menacés, en ce sens que les voix de Macron dans les circonscriptions où ils se présentent ont été moins nombreuses que celles de la gauche. Parmi eux, Clément Beaune, ministre délégué à l’Europe, se présente dans un territoire parisien particulièrement bobo, sa circonscription couvrant les IVe et XIe arrondissements. Il s'y trouve particulièrement menacé face à une candidate, très engagée dans la cause LGBT. "Mais pour les électeurs c’est un ministre macroniste", objecte un Patrick Bloche, spécialiste en la matière.
Beaucoup pensent ainsi qu'Édouard Philippe pourrait se trouver l'arbitre de la prochaine majorité. Son ersatz de parti, apparu en octobre 2021, sous le sigle Horizons, comptera 58 candidats investis par la coalition officielle "Ensemble" dont 20 sortants, parmi lesquels 8 sont issus du groupe Agir. Il peut également compter sur le soutien de maires amis, comme Arnaud Robinet à Reims, Christophe Béchu à Angers, Jérôme Baloge à Niort ou Christian Estrosi à Nice, lesquels ont lancé leurs adjoints dans cette bataille. Leur chef de file, se pensant probablement en nouveau Giscard d’Estaing multiplie les déplacements de campagne.
Reste à savoir jusqu'où les Français qui ne veulent ni de Macron ni de Mélenchon se laisseront séduire, et une fois encore, berner.
JG Malliarakis
Pour recevoir les liens du jour de L'Insolent,
il suffit de le demander en adressant un message à
[email protected]
"Sommes-nous enfin débarrassés de ce personnage [Manuel Valls] surfait ? On pourrait l'espérer, sauf à se souvenir, quand même qu'un homme politique peut toujours, jusqu'à son dernier souffle, faire du mal."
Espérons bien que nous sommes débarrassés de ce nuisible.
"Beaucoup pensent ainsi qu'Édouard Philippe pourrait se trouver l'arbitre de la prochaine majorité."
J'ai déjà écrit ici même qu'il avait un avenir faute de quelqu'un de valable en face (Wauquiez ?).
Rédigé par : RR | mardi 07 juin 2022 à 00:40
Le jeu commence à être lassant: Macron ou le chaos. Hier Marine le Pen, aujourd'hui "l'épouvantail" Mélanchon. La ficelle est grosse. De fait c'est une nouvelle illustration de la crise des hommes politiques en Occident, tout comme aux USA où le choix se situe entre Trump et Hilary Clinton puis Biden. Résultat, le parti de la majorité est celui des abstentionnistes.
D'autre part, il existe une catégorie de narcissiques manipulateurs qui sont d'habiles stratèges pour arriver au sommet et une fois aux commandes s'avèrent de piètres capitaines. Macron en est un bel exemple.
Rédigé par : Laurent Worms | mardi 07 juin 2022 à 09:05