J'emprunte aujourd'hui au Monde et à l'AFP une info et une photo qui se passent l'une comme l'autre de commentaire et je les dédie à M. Mariani comme à quelques autres :
Des membres du Parti communiste russe et des partisans se dirigent vers le mausolée du fondateur de l'État soviétique et leader révolutionnaire Vladimir Ilyich Ulyanov, surnommé Lénine, pour assister à une cérémonie de dépôt de fleurs marquant le 152e anniversaire de sa naissance, sur la place Rouge, à Moscou, le 22 avril 2022. Voilà la présentation de la photo prise par Natalia Kolesnikova sous copyright AFP et dont les lecteurs de cette chronique trouveront la capture d'écran.
Les communistes russes ont exprimé vendredi leur soutien à l’offensive lancée par Vladimir Poutine en Ukraine, qu’ils voient comme une lutte entre Moscou et Washington, lors d’une cérémonie marquant le jour de la naissance de Lénine.
"Les Anglo-Saxons sont venus en Ukraine pour se battre afin de dominer la planète", a lâché le premier secrétaire du Parti communiste russe, Guennadi Ziouganov. "Aujourd’hui, dans les étendues ukrainiennes, est tranchée la question de savoir si le monde sera unipolaire sous leur commandement [celui des "Anglo-Saxons"] ou multipolaire", a ajouté le responsable de 77 ans.
"Il est nécessaire de défendre l’État", a insisté vendredi [ce 22 avril] M. Ziouganov, accusant l’OTAN et les États-Unis de combattre "le monde russe". M. Ziouganov participait à une cérémonie sur la place Rouge marquant le 152e anniversaire de la naissance de Lénine, premier dirigeant de l’Union soviétique et dont la figure reste révérée par les communistes.
Environ 200 personnes [!!!] se sont rassemblées dans la matinée près des murs du Kremlin, brandissant des portraits du dirigeant communiste et des drapeaux rouges frappés de la faucille et du marteau. Elles ont ensuite déposé des œillets devant le mausolée où le corps embaumé de Lénine, mort en 1924, est toujours exposé au public.
Voilà ce que mentionnait Le Monde à 16:49 dans son "Live" du 22 avril.
Après cela d'excellents esprits nous rappelleront sans doute doctement que les bolcheviks ne sont plus au pouvoir à Moscou.
JG Malliarakis
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On peut avoir raison à 77 ans. Zioughanov a raison de dire qu'il faut combattre les ingérences des États-Unis et leur prétention à dominer le monde.L'Ukraine russophone doit revenir à la mère patrie. A près tout on a bien fait la guerre de 14 pour récupérer une Alsace loin d'être toute francophone et à un coût bien plus élevé que l'intervention russe actuelle.
Rédigé par : Robert Neboit | vendredi 22 avr 2022 à 23:07
Une manif de 200 personnes...
Je préfère un monde multicolore à la domination yankee.
Occident (ne) vaincra (pas) !
Rédigé par : Fr | vendredi 22 avr 2022 à 23:17
Un monde multipolaire. Pas multicolore. Saleté de correcteur orthographique.
Rédigé par : Fr | vendredi 22 avr 2022 à 23:18
Certes, une manif de 200 personnes c'est peu si on croit que Poutine déchaîne les enthousiasmes. Pour répondre aux gamins qui (croient avoir) "fait (eux-mêmes) la guerre de 14" pour l'Alsace Lorraine, il y a clairement beaucoup moins d'adhésion à Moscou, pour cette guerre d'agression, qu'il n'y en avait à Paris en août 1914. Seuls manifestent aujourd'hui en Russie les jeunes staliniens. Lire, au contraire, Casse Pipe de Louis-Ferdinand Céline ou la Comédie de Charleroi de Drieu La Rochelle, qui tous deux ont effectivement combattu en 14-18.
Petite réponse
Sur l'enthousiasme d'août 1914, il existe bien d'autres témoignages que ceux de Céline et de Drieu, qui vont dans le même. D'autre part en dehors de cette dérisoire manif des jeunes staliniens, gamins en tête, les vraies démonstrations d'opinion en Russie, malgré la répression, ce sont celles des opposants à la guerre. Poutine le sait très bien qui vise une riposte le 9 mai avec sa sinistre mobilisation du "Régiment immortel".
Rédigé par : Emile Koch | vendredi 22 avr 2022 à 23:34
"Zioughanov a raison de dire qu'il faut combattre les ingérences des États-Unis et leur prétention à dominer le monde. L'Ukraine russophone doit revenir à la mère patrie."
Effectivement. C'est aussi ce que tous les Européens et les autres peuples libres devraient dire, y compris d'ailleurs le peuple américain qui lui-même n'a rien à y gagner; le sénateur Rand Paul est en la matière un exemple à suivre. Ce sont les organismes mondialistes ajoutés au néo-biblisme anglo-saxon qui sont à l'action.
Rédigé par : RR | samedi 23 avr 2022 à 00:12
Ce qui donne de l'espoir: Cette cérémonie, en soit disant vague de nationalisme Russo/soviétique, n'a pas pu rassembler plus de 200 personnes. Une denrée en voie de disparition?
Rédigé par : Laurent Worms | samedi 23 avr 2022 à 08:52
"Occident (ne) vaincra (pas) !"
Même si ça doit choquer quelques uns (je pense évidemment à Robert Marchenoir), j'affirme que nous combattons pour l'Europe et non en effet pour l'Occident. Il ne faut pas confondre les deux.
Rédigé par : RR | samedi 23 avr 2022 à 12:12
L'important, bien sûr, n'est pas que les communistes russes n'aient réuni que 200 personnes pour cette manifestation : il est qu'ils expriment exactement le point de vue de Poutine.
De même que le LDPR, parti libéral-démocrate dont on peut sommairement résumer l'orientation politique comme fasciste. Son dirigeant historique, Vladimir Jirinovski, qui vient de mourir, était célèbre et apprécié en Russie pour ses outrances dépassant largement les "dérapages" les plus commentés de Jean-Marie Le Pen ou Donald Trump.
Par exemple, il avait exprimé le souhait que la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, soit violée en groupe par des Spetsnatz (membres des forces spéciales russes) jusqu'à ce que le sperme lui sorte par les oreilles.
Au passage, Condoleezza Rice est noire, mais c'est bien sûr le racisme des Américains que la propagande russe passe son temps à dénoncer.
Le LDPR a longtemps été décrit, correctement, comme la caution d'extrême droite du régime poutinien, autorisée et encouragée à la fois pour servir d'exutoire au nationalisme russe extrême, et pour faire paraître Poutine modéré en comparaison.
Mais on est passé progressivement de "Jirinovski est beaucoup plus extrémiste que Poutine", à "Jirinovski dit tout haut ce que Poutine pense tout bas", puis à "Jirinovski dit à l'avance ce que Poutine dira demain", et enfin, aujourd'hui, à "Poutine dit à peu près la même chose que Jirinovski".
Entre autres choses, ils expriment tous deux la même haine rabique des Etats-Unis et de l'Occident en général. De même que les communistes russes. C'est pourquoi la distinction entre droite et gauche n'a pas grand sens en Russie. La vraie césure se situe entre le nationalisme impérialiste, autoritaire et anti-occidental, et le libéralisme démocratique et pro-occidental (pratiquement inexistant sur le plan politique).
Cette convergence entre communistes, fascistes et poutinistes n'est que l'un des multiples signes que le président russe a enfin révélé son Staline intérieur : son régime n'est ni plus, ni moins que le prolongement du régime soviétique (avec des emprunts au nazisme en matière de politique étrangère).
Certes, le poutinisme n'est pas exactement équivalent au communisme soviétique. De même que le communisme occidental contemporain érige le Noir comme nouvelle race messianique de l'humanité, tandis que le communisme d'hier érigeait le prolétariat en classe messianique de l'humanité.
Mais l'essentiel demeure la volonté de détruire l'Occident, ses réalisations et ses valeurs. Apparemment, tout le monde n'a pas encore compris cela parmi les défenseurs auto-proclamés des valeurs occidentales en France.
Rédigé par : Robert Marchenoir | samedi 23 avr 2022 à 13:15
1) La guerre en Ukraine peut se lire à plusieurs niveaux.
2) Le premier, le plus évident, et ressenti comme tel par les Ukrainiens (y compris les locuteurs du russe) est celui d'un combat pour la liberté.
3) Ce premier degré, élémentaire, prime sur tous les autres (intérêts financiers occidentaux, jeu pervers des Anglophones, fantasmes moscovites, subtilités fracassées par le réel, etc.).
C'est l'enjeu essentiel.
4) Beaucoup de Français sont tellement enfermés dans leur étatisme et leur mépris pour les questions de nationalités qu'ils courent instinctivement à l'imagerie du Kremlin ("valeurs traditionnelles", Mère-patrie, mission universelle et autres façades Potemkine).
5) Cette attitude est très portée "à droite". Il semble qu'on y est assez enclin à compenser ses échecs et ses impuissances politiques par Poutine interposé. On règle ainsi ses comptes avec le monde entier faute d'avoir prise sur son pays.
6) Lénine est assez mal vu de V. Poutine, qui lui reproche d'avoir laissé un droit théorique de sortie aux Républiques soviétiques. Le grand homme du guébiste Poutine, c'est Staline, dont le culte est bien relancé.
C'était un plaisir d'entendre le regretté V. Eidelstein, alias V. Jirinovsky, dépasser un Ilya Ehrenbourg dans son genre.
7) Le KPRF est coincé entre deux sièges : soit il soutient des revendications populaires (comme les manifestations contre la pollution à Shiyes, aux côtés des patriotes komis), soit il s'identifie toujours avec le pouvoir moscovite. Il semble que Ziuganov n'a pas d'autre choix que le ralliement. J'espère qu'on n'enverra pas ces gamins au casse-pipe comme on le fit pour notre classe 18.
8) Le parti communiste avait au moins une doctrine sociale et pouvait servir d'intermédiaire entre le citoyen et "les Organes". Le précédent président estonien l'a annoncé : "Quand les Russes reviendront, ils n'auront plus cette précaution idéologique, et ce sera pire."
9) Les dix premières années de l'après-URSS s'interprètent comme une sorte de NEP, permise par la Glasnost et la Perestroika (deux procédures soviétiques), tacitement acceptée. Yeltsine a posé les conditions d'une récupération, opérée par V. Poutine, qui a entrepris, comme Lénine et Staline après la NEP, de reconstituer l'Empire russe (non sans ralliements de la population urbaine).
10) Ce qui se tient derrière les Organes, c'est un impérialisme moscovite qui s'affranchit désormais de toutes distinctions ethniques (il n'y a pas d'Ukrainiens, tous les citoyens sont des Rossiyanin, dont les Russkie ne sont que le noyau), au grand dam des patriotes russes.
11) Pour un peu, on a l'impression que le Kremlin est prêt à sacrifier la Sibérie en la louant à Pékin pour mieux s'offrir la partie européenne de l'Empire. Et que l'Occident n'est pas mécontent de renforcer ainsi sa mainmise sur une Europe de l'Ouest toujours en tutelle.
12) Le monde "unipolaire" vs le "multipolaire" est une notion de géopolitique (cette métaphysique des capitaines en retraite, qui justifie toujours a posteriori CQFD) de plus en plus vide. L'Anglophonie financière n'est pas un "pôle" mais un vaste réseau en réplication constante. (Dix longueurs d'avance sur les statocentrismes comme celui de V. Poutine.)
La seule réalité dans la prévision historique, c'est la démographie.
13) 1914 : des braves gens, et des gens braves, qui pour leur immense majorité ignoraient tout de l'Alsace- Moselle, chauffés par les instituteurs ou excités par les ligues patriotiques, croyant rentrer chez eux pour les moissons, ont subi une procédure génocidaire dont la France ne s'est jamais relevée.
Déjà les Cosaques étaient "à cinq étapes de Berlin". Et les banques à nos portes. Mais il fallait faire la guerre du Droit...
Addendum : pour savoir ce que veulent V. V. Poutine et son ministre Medvedev il suffit de le leur demander. Ils l'ont transmis et exposé eux-mêmes.
Références :
(Pour l'objectivité, ne considérez que le texte traduit)
https://desk-russie.eu/2022/04/06/les-ideologues-russes.html
https://ria.ru/20220403/ukraina-1781469605.html
Rédigé par : Jegou | samedi 23 avr 2022 à 15:34
En quelques siècles, Moscou a fait main basse sur les immenses territoires voisins à l'ouest, à l'est et au sud. L'impérialisme tsariste à visée territoriale a été amplifié par l'impérialisme soviétique à visée mondiale.
Si Nicolas II a déclenché la 1ère guerre mondiale par son soutien agressif aux Serbes, de même Staline, fin tacticien, a su la déclencher une seconde fois à l'Ouest (Angleterre-France-Allemagne) et à l'Est (USA-Japon) par ses pactes d'amitié et de non-agression. L'impérialisme triomphant. Cette fois-ci, l'impérialisme moscovite n'en sortira pas victorieux mais durablement affaibli à l'ouest et avalé à l'est par la Chine. Le temps joue contre Poutine. L'impérialisme moscovite n'est plus de mise.
Rédigé par : charles culbert | samedi 23 avr 2022 à 16:21
@ RR
"Même si ça doit choquer quelques uns (je pense évidemment à Robert Marchenoir), j'affirme que nous combattons pour l'Europe et non en effet pour l'Occident. Il ne faut pas confondre les deux."
Oui, vous affirmez. De façon péremptoire. Sans vous sentir obligé d'argumenter le moins du monde.
Et puis vous vous comportez en petit Staline de poche. Vous dites : "nous", comme si vous étiez le chef du Parti. Vous ne l'êtes pas. Vous êtes tout juste Monsieur RR.
Dites donc "je", sans prétendre embringuer toutes les personnes présentes dans votre dogme. Et expliquez-nous en quoi l'Europe ne serait pas occidentale.
Tant qu'à faire, je vous conseille de lire aussi les propos dégoulinants de haine de Poutine et de ses affidés à l'encontre de l'Europe. Pour eux, elle est tout juste bonne à servir d'esclave à la Russie.
Rédigé par : Robert Marchenoir | samedi 23 avr 2022 à 18:25
@Robert Marchenoir
Vous savez, en soi l'Occident, la civilisation occidentale, on n'est pas contre. Pendant la guerre froide on étaient même atlantistes. A l'époque c'était l'URSS et le communisme. Aujourd'hui le communisme version marxiste léniniste a été remplacé par le marxisme culturel c'est à dire le communisme libéral version trotskiste. C'est Dany Cohn-Bendit, Alain Krivine, Marlène Schiappa au lieu de Maurice Thorez, Georges Marchais, André Lajoinie. Bref, c'est encore pire.
Macron représente ça, la négation de nos valeurs.L'OTAN veut imposer ça en Ukraine, en Pologne, partout, car le porteur du marxisme culturel, le seul marxisme dangereux qui subsiste aujourd'hui, c'est l'Amérique.
Voilà pourquoi, RR et moi sommes devenus anti-américains. Je ne l'étais pas quand j'étais jeune.
Si vous donniez au mot Occident la même définition que Henri Massis, nous serions d'accord avec vous. Mais nous sommes loin du compte, et pareil pour l'Union Européenne qui n'est pas l'Europe mais bien la négation de l'Europe.
Nous ne sommes mêmes pas pro Poutine ni prorusses, nous ne voulons pas que l'UE soit l'esclave de la Russie. Simplement les Russes ont le droit de faire la police dans leur arrière-cour, comme les USA le font dans la leur.
Nous aimerions que l'Europe soit gouvernée par des gens comme Orban ou Kaczinski et non comme Macron.
Rédigé par : Helveticus | dimanche 24 avr 2022 à 13:51
@Jegou
L'article que vous citez est très intéressant.
En somme, si c'est vrai, la Russie veut faire en Ukraine exactement ce que les vainqueurs ont fait en Allemagne après 1945. Umerziehung, rééducation du peuple. C'est vrai que c'est horrible. Mais comment se fait-il que personne n'a protesté depuis bientôt 80 ans que la peuple allemand est cruellement rééduqué, et alors que la rééducation se poursuit en Allemagne, qui est toujours un état sous occupation. Et en plus on peut dire que le peuple français aussi a été rééduqué, et l'est de plus en plus, génération après génération. On lui ment sur son histoire, en permanence. On cultive chez lui la haine de soi, comme en Allemagne.
Rédigé par : Helveticus | dimanche 24 avr 2022 à 15:53
Complément sur les phases successives de l'URSS et la période 1990-2022 : pause et reconstruction.
L'analyse de Andrei Kortunov, à mon sens la plus pertinente :
https://ip-quarterly.com/en/moscows-painful-adjustment-post-soviet-space
ou bien ici :
http://windowoneurasia2.blogspot.com/2022/04/the-real-collapse-of-ussr-is-taking.html
D'où le schéma :
-1917-1922 : de l'Empire à l'Union. Guerres pour le Centre.
- 1922-1927 : Consolidation de l'Union et absorption des confins (Aunus, Ingrie, Orient).
- 1925-1928 : NEP
- 1928-1939 : Expansion (pays Baltes, Carélie).
- 1945-1991 : reconstitution achevée de l'Empire moscovite et vassalisation des marches.
- 1991-1999 : nouvelle NEP.
-2000-2022 : refondation d'un pseudo-empire.
Rédigé par : Jégou | dimanche 24 avr 2022 à 18:16
@Jegou
Très intéressant. Mais qu'est ce qui vous permet d'affirmer que la période 1991-1999 ait été une NEP ?
Cela voudrait dire que pendant cette periode le parti communiste n'a jamais perdu les rênes. Il faudrait donner les preuves de ça.
Quand vous parlez de reconstitution d'un "pseudo" empire, pourquoi pseudo et pourquoi ne pas considérer qu'il s'agit simplement de la nation russe qui sous un régime nouveau, un peu bizarre, de démocratie contrôlée autoritaire, reprend sa force, sa place dans le monde et son cours normal? De même que la Chine le fait, quant à elle sous la houlette d'un parti communiste ayant perdu l'idéal marxiste et réduit à un appareil de gestion et conservation du pouvoir.
Votre théorie de la NEP pourrait donc s'appliquer à la Chine, non à la Russie. Car en Chine l'appareil communiste n'a jamais perdu les rênes. Je me demande souvent si les 40 ans de réformes initiées par Deng Xiaoping n'étaient pas une très longue parenthèse de NEP, que Xi Jinping tente aujourd'hui de refermer.
En revanche, même si on pourrait arguer que les réformes de Deng étaient une NEP, dans leur intention, il n'en reste pas moins qu'une NEP qui dure plus de 40 ans et qui a transformé à ce point la nation, laisse des traces irréversibles. Et c'est pourquoi Xi ne parvient pas à rétablir le communisme de guerre, si tant est qu'il en ait la volonté.
Il reste un contrôle étatique des grandes entreprises, un peu comme en France sous Mitterrand, mais elles sont gérées selon les règles de l'économie de marché. Et au dessous de ça il y a une classe grouillante d'entrepreneurs privés qui ont construit des très grosses PME. Il sera impossible de faire sans eux.
La seule chose que le gouvernement ne veut pas, c'est laisser faire des oligarques à la Jack Ma, ou Li Ka Sheng, qui prennent le pouvoir comme des Bill Gates aux Etats Unis et implantent en Chine le système des impérialistes, lui imposant à nouveau des traités inégaux.
Rédigé par : Helveticus | lundi 25 avr 2022 à 10:19
@Helveticus
Bien sûr, il n'y a pas identité avec la NEP mais si on formule autrement le parallèle, disons que l'Empire russe s'est défait puis reconstruit sous un autre nom, autour d'un centre de pouvoir (Moscou et pas Petrograd l'européenne), centre qui demeurait indispensable à tout nouveau régime. Tout dépendait évidemment des agents en place. Il y eut continuité étatique du Centre. Cela pose la question : "Quel est le degré de continuité entre l'Empire russe et l'URSS ? Pour Poutine et une bonne moitié des nationalistes russes, il est évident. Pas pour Soljénitsyne jadis (très mal vu par Moscou-officiel). Même question pour la France : la Révolution de Paris, rupture ou continuité ?
Situation ambiguë de l'URSS des années 1920, dont la vie et la musique d'un Chostakovitch témoignent douloureusement.
Un des meilleurs sites russes de l'actuelle émigration (trad. angl. proposée) :
https://harbin.lv/about
Ce qui a perduré durant ces années de libéralisation mal contrôlée (la Russie des années 1980-90), ce sont les organes de pouvoir, le KPRF ayant perdu sa consistance. Disons que, comme pour la NEP, une période de relâchement (privatisations, spéculations, fortunes rapides, mais constitution plus que fragile) a fait parenthèse avant la reprise en main. Ce qui, sur le long terme, réapparaît, c'est l'Etat moscovite. Les russophobes, dont je ne suis pas, pointent de vieilles habitudes du peuple russe (ils oublient que les bolchéviques n'étaient pas tous russes). D'autres négligent la vraie révolution russe (et celle des nationalités), celle de 1905. A cet égard les soviets furent l'opposé des zemstvos (communautés populaires, communes).
Un empire répond à une nécessité qui fédère less peuples, même conquis : l'Autriche-Hongrie a tenu tant que la menace ottomane a duré. Pas réformée à temps, elle a sombré. L'empire russe du XIXe siècle, achèvement d'une grande expansion coloniale, vivait à un rythme lent, ce que reflète la littérature russe. A cet égard la révolution fut synonyme de modernisation à marche forcée (d'où le génocide des nomades-éleveurs et des paysans "arriérés"). L'idéologie de la "russification", qui se développe vers la fin du XVIIIe siècle et s'aggrave au XIXe, a quelque peu désacralisé l'idée d'empire en la rabattant sur l'étatisme (vieille habitude moscovite). Les bolchéviques avaient bien compris qu'il fallait satisfaire trois demandes : 1) la terre aux paysans ; 2) libérer les nations ; 3) équité sociale. Au affaires, ils firent l'inverse : nouveau servage kolkhozien, récupération des nations fin de la "korenization" et liquidation de leurs élites (Volga, Turkestan, Biélorussie).
Par exemple, sur la rééducation en Biélorussie : https://naviny.belsat.eu/ru/news/sfabrikovannye-dela-beschelovechnye-pytki-kak-sovety-unichtozhali-belorusskuyu-kulturu-chast-1/
La Russie actuelle tente en effet de reprendre dans le monde la place que l'histoire impériale lui avait assignée, mais pas garantie. La Fédération de Russie n'est pas éternelle, surtout vu sa situation démographique (elle n'est pas la seule dans ce cas), vidée de tout fédéralisme. Elle m'apparaît bien plus comme une copie (certains diront 'une caricature') de l'Empire russe et de l'URSS. Le peuple russe est peut-être la première victime de son histoire, mais après tout, c'est son affaire.
On peut aussi dire avec V. Poutine que les Ukrainiens n'existent pas et que ces "Petits-Russes" doivent rentrer dans le tube. Ca ne marchait déjà plus en 1830, quand l'uniatisme fut interdit, ni en 1917, ni même en 1940. Le grand Staline expliquait ainsi comment il fallait diriger les peuples : "Battre, battre, battre". C'était un grand pédagogue.
Les points que j'ai listés demandent évidemment discussion et étude. Pour l'instant, les intentions des Occidentaux ne sont pas si claires que cela (Kiev serait tombée dans les trois semaines, ils n'auraient pas bougé : les Anglophones sont fiables, quand ça les arrange).
Quant à la Chine, le départ de la révolution maoiste avait une dimension nationaliste, contre les Japonais et les Occidentaux. Comme ce fut souvent le cas, la théorie marxiste-léniniste et l'idéal communiste ont servi de clé d'interprétation à tout autre chose. La démocratie occidentale fut assimilée à la colonisation, etc. air connu. Les entrepreneurs chinois s'affairent partout, le communisme de guerre a bien changé. C'est maintenant la Chine qui imposera des traités inégaux à ses alliés. on attend que Cuba devienne un nouveau Singapour ou Shangaï, avec sa Tour Fidel Castro de deux cents étages, siège de cent-cinquante entreprises internationales...
Le gouvernement de la Russie a choisi de se rattacher au bloc asiatique, comme fournisseur, d'où la rupture brutale avec l'Europe. Ca promet.
Rédigé par : PJ Jegou | lundi 25 avr 2022 à 14:50
Cher Jegou, c'est vraiment passionant de vous lire. Vous en connaissez un rayon. Ce n'est pas mon cas s'agissant de la Russie, mais le sujet m'intéresse beaucoup.
Ce que je ne comprends pas du tout c'est le refus de la part des atlantistes inconditionnels comme notre ami JGM de donner une chance au régime hybride qui s'est constitué tant bien que mal après la chute de l'URSS, de pouvoir se réorganiser en trouvant une zone d'influence naturelle lui permettant de se sentir en sécurité et non menacé.
Moyennant quoi on approuve toute la malveillance et la brutalité de l'impérialisme yankee dans sa volonté de poursuivre la destruction totale du monde russe.
Il est absolument évident, et aucune personne de bonne foi ne devrait pouvoir contester le fait que, depuis l'époque Eltsine, la politique occidentale n'a consisté qu'à encercler la Russie, la maintenir à terre avec un genou sur la gorge et lui interdire toute possibilité de se redresser.
Je ne vois pas comment on pourrait avoir autre chose que du mépris pour cette politique insensée et obtuse envers une grande nation historique, une politique qui ne peut qu'encourager les réactions revanchardes de la part des dirigeants de cette nation.
En plus, pendant tout ce temps, l'Amérique et ses caniches européens n'a fait que fomenter l'islamisme partout où cela pouvait nuire à la Russie comme à la Chine. (Tchétchénie, Daghestan, Sinkiang, pour ne pas mentionner l'opération atroce en ex-Yougoslavie avec l'aide de tous les BHL et Glucksmann de ce monde). On a fomenté des révolutions colorées dans toutes les républiques ex-soviétiques (par l'action du NED-National Endowment for Democracy, un repaire de gauchiste néocons) uniquement pour créer des foyers d'hostilité menaçant la Russie dans son coeur (et la Chine par la même occasion).
A aucun moment il n'y a eu l'ébauche d'une approche honnête, amicale, ni simplement décente et diplomatique, cherchant à harmoniser pacifiquement les intérêts russes, chinois et occidentaux. Il y a eu un tout petit peu de ça dans les exhortations de Henry Kissinger, mais il n'a pas été écouté et on n'a suivi que les vaticinations du frapadingue polonais d'origine frankiste Zbigniew Brzezinski, qui d'ailleurs avait fini par devenir un tout petit peu lucide à la toute fin de sa vie, quand il a écrit son dernier article intitulé "Towards a Global realignment"
https://www.the-american-interest.com/2016/04/17/toward-a-global-realignment/
où il prônait une politique un peu moins follement antirusse et anti-chinoise. Mais cet accès de lucidité d'un homme qui avait déjà un pied dans la tombe, n'a eu aucun effet.
Comment veut-on dans ces conditions ne pas susciter la méfiance et le recours à des solutions de force? Poutine n'a eu d'autre choix que de réagir énergiquement. Je n'ai pas de sympathie particulière pour lui, mais à sa place j'aurais été contraint de faire comme lui, n'importe qui aurait été contraint à cela.
Et on oublie de dire que pendant longtemps la Russie a été correcte, et coopérative, en offrant des facilités aux troupes américaines pour leurs opérations en Asie centrale, Afghanistan etc.
Ils ont été trop gentils.
Finalement la nullité congénitale des yankees, qui n'ont aucune des qualités requises pour être dignes de conduire un empire, a fini par produire ses résultats inévitables, c'est à dire que l'Amérique a été chassée honteusement d'Afghanistan ce qui a pour conséquence que l'Asie centrale est désormais libre de toute présence anglo-saxonne et européenne. Tant pis pour ces impérialistes. Ils sont vraiment trop nuls. Désormais la Russie et la Chine feront la police là bas et les vaches seront mieux gardées. La défaite de l'alliance occidentale n'est que trop méritée.
Maintenant, la Russie a décidé de faire le ménage en Ukraine pour éviter que ce territoire devienne une base d'opérations offensives contre elle. C'est horrible pour les populations qui souffrent, mais que ferait Washington si ses ennemis installaient un pouvoir anti US au Mexique avec des têtes nucléaires et des laboratoires d'armes biologiques pour exterminer les yankees?
Je ne sais pas si la soudure se fera entre le peuple ukrainien qui a ses traditions distinctes, et son peuple frère russe. Peut-être pas. Mais je pense à l'Alsace et à la manière dont elle a été rattachée par Louis XIV en 1697 au traité de Ryswick, tout à fait contre les sentiments des Alsaciens qui étaient clairement de nation germanique.
Aujourd'hui une majorité d'Alsaciens se sentent français, mais il n'en reste pas moins qu'entre 1870 et 1918, ainsi que pendant les cinq années du Grand Reich Allemand d'Adolphe Hitler, il y a eu pas mal d'Alsaciens qui se sont sentis allemands.
Donc ces choses là dépendent beaucoup de la durée d'occupation paisible d'un territoire par un hégémon ou par un autre.
Aujourd'hui, je pense que la Russie sera contrainte d'occuper l'Ukraine entière et faire ce qui est expliqué dans l'article que vous avez cité, c'est à dire russification de gré ou de force. Elle y sera contrainte (alors qu'au départ elle aurait pu se contenter d'une simple application des accords de Minsk), tout simplement parce que l'OTAN n'acceptera jamais aucune solution négociée porteuse de paix. Les chiens de guerre criminels à la Macron, continueront leur fuite en avant dans le jusqu'auboutisme, ne laissant aucune autre option à la Russie que la politique grand-russe consistant à rattacher l'Ukraine et la Biélorussie comme des provinces d'un nouvel empire russe reconstitué.
Cela pourra tenir assez bien, aussi longtemps que la Russie n'est pas vaincue dans une 3ème guerre mondiale, qu'hélas on sent que les mondialistes préparent activement.
Si la possesion russe dure deux siècles, alors l'Ukraine et la Biélorussie redeviendront incontestablement russes, comme l'Alsace est aujourd'hui française. Si la possession russe de l'Ukraine ne dure que cinq à dix ans, et que la Russie est vaincue dans la 3ème guerre mondiale qu'on nous prépare avec Macron, alors les nazis reprendront le pouvoir, en Ukraine et.... en Allemagne (si, si, vous verrez...) et l'Ukraine deviendra, pour de bon, le Lebensraum du nouveau Reich allemand, pour très longtemps.
Toute la question maintenant est de savoir laquelle des issues sera choisie par les maîtres du monde, fanatiquement antirusses, dont nous savons désormais qu'ils sont irrationels, assoifés de sang et fous furieux, contrairement à Poutine qui malgré tous ses défauts est un Realpolitiker froid et rationnel
Rédigé par : Helveticus | lundi 25 avr 2022 à 16:59
Cher Jegou, vous écrivez:
"Le gouvernement de la Russie a choisi de se rattacher au bloc asiatique, comme fournisseur, d'où la rupture brutale avec l'Europe. Ca promet."
Désolé mais vous inversez le rapport de causalité. Pour être conforme à la vérité il aurait fallu écrire:
"Les gouvernements des pays de l'OTAN ont choisi d'acculer la Russie et de la contraindre à se rattacher, contre son gré, au bloc asiatique".
Ce n'est pas la Russie qui a décidé de boycotter le pipeline Northstream II et de condamner les populations européennes à une récession profonde à cause de la hausse des prix du gaz et du pétrole - sans aucune considération pour les intérêts bien compris de l'Europe. C'est Victoria Nuland qui a dit que les USA avaient dépensé 5 milliards de dollars pour organiser un coup d'état à Maïdan en 2014, avec l'aide des milices ukronazies.
Rédigé par : Helveticus | lundi 25 avr 2022 à 17:33
@ à tous,
cordialement
Les Etats-Unis n'apparaissent plus guère comme phare de la liberté. Ils le sont encore pour de nombreux exilés, mais nous ne sommes plus en 1950, et ce qu'ils diffusent aujourd'hui peut déplaire, déplaît, ne plaît pas, séduit (nuancez à votre guise).
C'est toute la problématique de la domination "occidentale" que les Anglo-Saxons ont interprétée, pour leur part, comme une "destinée manifeste" vétéro-testamentaire.
Mais qui tient et configure le message occidental aujourd'hui ? Bonne question.
Il reste que l'appréciation, l'évaluation des 'USA'ne peut être globale : trop de tendances y sont à l'oeuvre et l'on ne peut en isoler une seule pour condamner le tout.
Si nous considérons les Etats modernes uniquement sous cet aspect de distributeurs de messages et de normes, alors nous dirons que les Etats-Unis sont les champions d'une vision progressiste et contraignante qui heurte de plein fouet les cultures et les peuples. Pauvre humanité !
Difficile de juger en bloc un régime, un pays, puisque les vérités qui s'affrontent sont inconciliables. Il y eut cependant une exception : c'était en 1945 à Nuremberg. Mais là, c'est de l'ordre du tabou.
Je ne suis pas sûr que le patriotisme français soit aussi général, constant et solide que les patriotismes ukrainien ou letton. Ou plutôt, j'ai quelques certitudes sur ce point, et je me les garde.
Si l'Ukraine est l'"arrière-cour" de la Russie, ne nous plaignons pas que la France devienne l'arrière-cour des USA, et que le "monde russe" fantasmé par V. Poutine devienne l'arrière-cour de la Chine. Ce genre de rapports de force se pare souvent des oripeaux du nationalisme ou d'autres -ismes, comme l'on veut.
Pour l'instant, ce sont les Ukrainiens qui donnent une leçon de résistance et de foi (même contre leurs gouvernements et leurs faux amis). Ils existent ; pourra-t-on en dire autant des Français dans vingt ans ?
Par quelque côté qu'on l'appréhende, la situation du monde naguère européen, nord-américain et russo-sibérien (je crois qu'un homme politique a récemment utilisé l'adjectif "boréen"), est catastrophique.
Rédigé par : PJ Jégou | lundi 25 avr 2022 à 18:35
A propos des remarques de Jegou sur la NEP, le communisme de guerre, qui a beaucoup changé, la tour Fidel Castro de 200 étages à La Havane, etc., je voudrais faire une observation. Elle horripilera certains, mais elle intéressera d'autres.
J'ai rencontré l'autre jour un Italien très sympathique, qui travaille à la direction financière de Pirelli à Bâle. Imaginez vous que cette extraordinaire société familiale comparable à Michelin, fleuron de l'industrie italienne, a été rachetée par une entreprise publique chinoise : ChemChina. Je dis bien, une entreprise d'état, dont le patron est membre du Parti.
Chose curieuse, ChemChina a également acheté Syngenta, ex Ciba (dont mon grand père était administrateur autrefois). On peut se demander quelle synergie existe entre la biochimie et le caoutchouc des pneus. Mais bon, c'est ainsi. Aujourd'hui ces deux sociétés géantes ont le même actionnaire. Et tout va très bien.
Pirelli est florissante avec le nouvel actionnaire, Syngenta aussi. Alors... Que demande le peuple ?
Le plus intéressant, c'est que mon ami italien m'a dit que pour lui rien n'a changé. Absolument rien. Toute la direction est restée la même. Le train train quotidien est toujours le même. Il dépend toujours du même dottore italien, à Milan, qu'avant l'OPA. Business as usual. Les Chinois leur foutent une paix royale et ils n'ont rien restructuré du tout. Résultat... Excellent. Tout le monde est content.
On n'ose pas imaginer ce qui serait arrivé si Pirelli avait été acheté par Goodyear !
Chez Syngenta, même remarque: ils se la coulent douce avec l'actionnaire chinois. Si ça avait été repris par Monsanto - il en était question - tout le monde aurait été viré, c'est une certitude. Monsanto aurait saigné ce concurrent.
Je ne sais pas pour vous, mais moi je trouve que ça fait réfléchir. Notamment sur le déclin irrémédiable du modèle américain, qui à mon avis ne sortira pas indemne de la crise actuelle. Et je ne vais pas pleurer sur son sort, car vraiment ces imbéciles l'ont bien cherché. Il faut vraiment en avoir une couche pour se suicider économiquement en prenant ces sanctions absurdes qui ne pénalisent que ceux qui les imposent.
J'aimerais inviter Jean-Gilles M. en Chine et lui présenter quelques personnes que je connais. Ce sont des 'business leaders' et ils ont tous, en gros, les mêmes conceptions politiques que lui si ce n'est qu'ils sont confucéistes et lui orthodoxe grec. Peut-être qu'il réviserait un peu sa vision des choses.
Rédigé par : Helveticus | mardi 26 avr 2022 à 14:55
@ Helveticus
On ne saurait reprocher au pouvoir chinois de s'emparer d'entreprises européennes. Il ne fait que profiter de "nos" faiblesses, à savoir la non-capacité ou plutôt la non-volonté des dirigeants européens de construire un puissant "espace économique européen" (allié à la Russie - je dis bien allié à la Russie, et peu m'importe si Robert Marchenoir me qualifie de stalinien). Ils préfèrent aider le "Tiers monde" (et se faire les larbins des officines mondialistes américaines quitte à déclencher une nouvelle guerre en Europe).
Rédigé par : RR | mardi 26 avr 2022 à 18:35
à tous,
rebonjour
Plus que jamais, il faut compter, au sein de chaque Etat, et dans les relations entre Etats, avec la multiplicité des acteurs sociaux (comme on dit), des logiques complémentaires ou antagonistes (militaires / financiers / producteurs / intellectuels / etc., et sous cet etc. se placent 80 % des administrés, qui ont peu ou n'ont guère de pouvoirs). L'enchevêtrement de ces logiques efface les anciennes vues-du-monde et rend la carte difficile à lire.
Il y a des dynamiques de fond : la régression des empires militaires et politiques ; l'entrée en lice de nouveaux concurrents (le Japon de l'ère Meiji, la Chine...), mouvements qui ont tous, de toute façon, leur socle culturel initial (donc aussi ethno-culturel) qui détermine les choix premiers, d'où des expansions spectaculaires mais peu productives sur le long terme (les Arabes musulmans, les empires turco-mongols), d'autres susceptibles de vastes renouvellements (les Européens, essentiellement). On compte aussi avec les mouvements transversaux ou capillaires (doctrines universalites, acculturations).
Pour ce qui est de la Russie, évitons les procès, les faits suffisent (et nous sommes tous tributaires de nos informations, bien sûr). Aucune raison de lui reprocher ses essais de contrer le projet mondial des Anglophones (comme ce mot est pratique !). Je constate que trente ans de l'actuel régime n'ont sauvé là-bas, ni même stabilisé, les secteurs qui auraient pu l'être (santé, démographie, communications), ni traité la question des nationalités de façon à proposer à la population un grand avenir, et de vrais succès. [Et chez nous ?, me direz-vous.] L'affaire de Crimée avait entraîné un ralliement assez large autour de V. Poutine ; aujourd'hui, ce n'est plus le cas, malgré la propagande.
Certains espéraient une Russie forte, patiemment reconstruite en trente ans, qui aurait eu un grand projet en lien avec l'Europe (autarcie des grands espaces). Illusions, car ce que nous avons là est un impérialisme classique accompagnée des habituels mensonges du Kremlin. Molotov à Mannerheim en 1939 : "Vous nous gênez."
V. Poutine aurait-il pu attirer à lui ce qu'il appelle "le monde russe" ? En séduisant, en offrant un recours contre la déliquescence occidentale ? Sans doute pas, Moscou avait un trop gros passif, et depuis très longtemps. Mais maintenant, ça n'est pas probable, même si on peut toujours se laisser prendre à cette idée, comme à celle de l'apocalypse atomique.
La digestion et l'assimilation sont un étrange idéal, comme l'est aussi, cela dit en passant, celui de "fabriquer du Français" avec tous et personne. Or, les peuples ne sont pas de la matière première malléable à merci.
De plus, que des manipulateurs habiles se mêlent de certains conflits, ils ne les créent pas ex-nihilo. Ils profitent des failles de la cible.
Dans ce genre de conflits, l'autre à toujours tort, on est toujours la victime. La Serbie a subi l'ignoble traitement que nous savons, mais qui dira la responsabilité de Belgrade dans les années qui ont précédé la crise ? (et celles d'un Tito ?) Les chauvinismes d'Etat ont toujours fourni de merveilleux prétextes aux profiteurs.
J'en arrive à penser que ce que nous vivons est une crise de l'Etat moderne et de la civilisation occidentale (incluant la Russie, le Japon, et autres) incapable de se réformer et n'appliquant que de vieilles recettes. Quel est maintenant le fond du "patriotisme" ? Comment est-il activé ? Quels intérêts recouvre-t-il ? Certains se le demandaient déjà en 1914.
A ce sujet, je retrouve un lien vers une analyse sans rapport avec l'immédiat, et vous en fais part :
https://windowoneurasia2.blogspot.com/2021/10/post-nationalist-world-may-not-be-multi.html
Quand aux Alsaciens et Mosellans qui se sentent presque tous français, n'oublions pas que ce résultat a été obtenu par dol et violence, et un "écolage" forcené depuis 1918 et surtout 1945.
Quant au "nazisme" ou au "fascisme" que se renvoient tous les camps, cet usage verbal, médiatique voire juridique, montre seulement que ce qui constitue le fond de la mentalité commune depuis 1945, c'est bien les mots d'ordre inculqués depuis cette date. Les deux-tiers de l'humanité s'en moquent, un petit dixième le reçoit encore comme un instrument de régulation morale, et l'Europe répète, sénile, les mêmes discours incantatoires qui ne la sauveront de rien.
Quant à la Chine, comment qualifier exactement son régime ? Engagée dans l'aventure de la déjà vieille modernité capitaliste, qu'en fera-t-elle ? En tout cas, joli coup : Pékin a passé un pacte de sécurité avec les Iles Solomon (en toute égalité des parties, comme de bien entendu), assez près de l'Australie. Les US pleurnichent : il y aurait des 'potential security implications', mais ils n'iront pas jusqu'à des 'military actions' si les Chinois n'installent pas de bases militaires. Pas contents de l'avaler, cette couleuvre.
Tout cela est sale, gris, les acteurs sont mauvais, la pièce est sinistre.
Rédigé par : PJ (Jégou) | mardi 26 avr 2022 à 20:14
En passant, Helveticus dit une énormité (parmi d'autres) en parlant de "communisme libéral", qui n'existe pas. Le marxisme culturel existe bel et bien (même si ce n'est pas du marxisme stricto sensu), mais n'a rien à voir avec le libéralisme. Sa généalogie et ses développements au fil du temps sont bien connus : schématiquement Gramsci, puis l'École de Francfort, puis Deleuze/Foucault/Derrida (et d'autres, voir http://www.leseditionsovadia.com/collections/719-abecedaire-de-la-deconstruction-2.html ), puis Bourdieu (http://fr.liberpedia.org/Pierre_Bourdieu ) et évidemment, depuis une trentaine d'années, un bon paquet d'universitaires américains illuminés et ayant plus ou moins intégré tout ça. Le marxisme, ce n'est pas seulement le marxisme-léninisme (qu'il soit troskiste, staliniste ou maoïste), c'est un poison, à sa racine, qui a engendré de multiples fruits, tous aussi pourris les uns que les autres. Que Marx lui-même, s'il observait le mouvement "woke" aujourd'hui, ne s'y reconnaisse pas, c'est très probable, mais ça ne change rien à la filiation. Voir également http://fr.liberpedia.org/Marxisme_culturel
Rédigé par : Chibounidia | jeudi 28 avr 2022 à 17:28