À trois mois du premier tour de scrutin, et après deux ans de messages sanitaires volontairement anxiogènes, l'horizon civique commence à se dégager. Les vraies batailles vont émerger. L'auteur de ces lignes n'est pas loin de considérer, à cet égard, la question de l'éducation comme l'une des premières, sur le terrain des idées comme des réalités sociales.
Par sa procédure même, comme dans les pouvoirs qui vont être conférés à l'heureux élu, l'élection présidentielle à la française ne se prête guère, reconnaissons-le d'abord, à la solution des vrais problèmes. Cette procédure de désignation développe surtout son lot de polémiques passionnelles. Elle mobilise, par nature, plus d'opinions préfabriquées et de bons sentiments que de réflexions approfondies et d'engagements crédibles. On rappellera même, au besoin, qu'un principe constitutionnel, essentiel à la démocratie représentative, figure dans le texte de 1958, inchangé sur ce point. Article 27 : "tout mandat impératif est nul". Ceci vaut, d'abord pour les parlementaires, mais plus encore pour les promesses présidentielles.
Dans la séquence actuelle, parmi les marqueurs qui vont diviser et répartir l'opinion, on peut évidemment prévoir un rôle central pour les trois "i" : insécurité, immigration et islamisme.
Et comme tout lecteur de l'indispensable Dictionnaire des Idées reçues, adjoint par Flaubert à son immortel Bouvard et Pécuchet, on pourra, sans doute, tout à loisir le temps d'une campagne, évoquant chacune de ces trois nuisances "tonner contre".
Sans récuser, bien au contraire, l'importance de ce débat on ne peut que rappeler l'existence d'autres enjeux. On ne devrait donc pas manquer de souligner éventuellement celui de l'éducation comme question prioritaire, sachant que la manière dont on elle sera abordée déterminera aussi la solution de bien des problèmes liés à l'insécurité, à l'immigration et à l'islamisme, mais aussi au déclin industriel de la France, à l'inculture envahissante, etc.
Si le syndicat des destructeurs ne s'y trompe guère, si la gauche multiplie les facteurs concrets d'abaissement du niveau général de la culture, la droite française actuelle ou ce qui en tient lieu semble avoir perdu, sur ce sujet, sa boussole quant au diagnostic et quant aux remèdes.
Un candidat de combat et de témoignage comme Éric Zemmour ne pouvait que s'exprimer radicalement sur un tel terrain. Il répond ainsi à l'une de ses plus anciennes prises de position connues. Dès 2016, par exemple, il observait que "le niveau de nos élèves ne baisse pas, il s'effondre"(1)⇓.
Et, 6 ans plus tard, lors de son entretien centré sur ce sujet, lorsqu'il souligne ses conceptions éducatives, on retrouve une logique constante, conforme à ses idées de "révolution conservatrice". Les bons esprits, moralistes à peu de frais, n'en retiennent bien sûr qu'une dimension polémique, assez sordide, à propos des enfants handicapés.(2)⇓
Jean-Paul Brighelli fait lui aussi partie de ces auteurs qui nous mettent en garde contre la décadence de l'instruction, ne parlons même pas ici d'éducation, en France. Or, ce 13 janvier, il entrait lui-même en controverse, dans Causeur, avec le polémiste-candidat auquel il "conseille de revoir sa copie".(3)⇓
Or, là où le bât blesse, on notera que ni Brighelli dans Causeur, ni Zemmour sur BFM, ni même une Valérie Pécresse dans Le Figaro, où elle s'exprimait quelques semaines plus tôt en tant que candidate à la candidature, ne mettent en cause l'étatisme monopolistique de l'administration appelée Éducation Nationale.(4)⇓
Tous entendent mettre de l'ordre dans la maison, aucun n'a semblé disposé jusqu'à présent à invoquer clairement et franchement le principe de droit naturel. Il figure pourtant dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme. L'article 26.3 de cette charte mondialiste le reconnaît : « Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants ».
Ceci suppose évidemment que la création d'écoles doit être reconnue pour libre, incluant la formule quantitativement marginale sans doute, mais dont le principe doit être respecté, de l'école à la maison. Si l'État souhaite financer un meilleur accès de tous à l'instruction, cela s'appelle le chèque scolaire, l'allocation d'études versé aux familles lesquelles peuvent alors choisir librement. Nous en sommes bien loin.
JG Malliarakis
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Apostilles
- On peut écouter son intervention du 1er décembre 2016 sur RTL⇑
- Le 12 janvier 2022 sur BFM⇑
- cf. in Causeur du 13 janvier "L’École selon Zemmour"⇑
- cf. L'Insolent du 12 octobre 2021. Dans le Figaro en effet, Valérie Pécresse, candidate à la candidature de la droite classique présentait son programme pour l'école. Or, elle insistait sur l'importance que son projet entend accorder à l'éducation...⇑
Retenez la date
La prochaine réunion du Cercle du Pont Neuf se tiendra le Lundi 24 janvier de 18 h à 20 heures, au Café du Pont Neuf, 14 quai du Louvre, Paris 1er, métro Pont-Neuf ou Louvre.
Thème de notre débat du 24 janvier :
"La Liberté scolaire"
Tout est dit je pense dans cet excellent éditorial.
Comme je l'ai mentionné récemment, Louis-Auguste Blanqui disait que l'instruction du Peuple est essentielle; un peuple non-instruit est faible, maléable par les forces nuisibles. Bien évidemment, cette instruction ne doit pas être biaisée comme elle l'est actuellement dans un sens républicain cosmopolite. C'est bien pourquoi elle doit être libre, non étatisée. C'est tout le contraire de ce que nous avons en France où l'école est devenue une machine d'endoctrinement des enfants et adolescents.
Tout ceci se fait enfin au détriment des matières fondamentales que sont notamment le Français et les Mathématiques.
Il faut voir la descente en pente raide en comparant les épreuves du bac actuel et celles proposées encore dans les années 70-80. Pour ma part, j'ai préparé l'épreuve de mathématiques du bac C avec comme support les ouvrages de la collection Aleph; ces ouvrages étaient considérés à l'époque et à juste titre comme "costauds". Les élèves actuels ne pourraient jamais s'y faire. Ils ont des avantages - notamment l'accès à d'excellentes vidéos pédagogiques sur Internet - que nous n'avions pas, et pourtant ils ne parviennent pas à se hisser à notre niveau; pire, ils en sont loin, c'est dire la dégringolade.
Rédigé par : RR | samedi 15 jan 2022 à 16:35
Bien sûr, une partie de la solution c'est le chèque éducation qui permet aux familles de choisir l'école de leurs enfants et par là d'introduire plus de concurrence dans le système.
Rédigé par : Saint Surge | samedi 15 jan 2022 à 16:57
Eh oui ! Il n'y a aucun candidat libéral... Tous étatistes ! C'est la France...
Rédigé par : Andy Vaujambon | samedi 15 jan 2022 à 16:58
Ouais, l'écolle c'es pa encor sa, c'et le Blues obligatoire!
Rédigé par : minvielle | samedi 15 jan 2022 à 17:52
Le monopole d'État dans l'éducation nationale à, parmi ses multiples conséquences, le fait que beaucoup d'institutions privées sont basées sur un communautarisme et non sur des valeurs universelles.
Rédigé par : Laurent Worms | samedi 15 jan 2022 à 18:14
Je suis tout à fait d'accord sur le principe, en donnant aux parents « le chèque éducation » ou tout autres système de financement. Mais il y a un problème pratique : la liberté que cela induit pour l'instruction islamiste demandée par certains parents. Voir les débats sur la loi contre le séparatisme.
Rédigé par : Yves Montenay | samedi 15 jan 2022 à 19:03
attention MM., les 3 i de MLP sont devenus depuis Villepinte avec EZ les 5 i ie.: Immigration, Instruction, Impots, Industrie, Indépendance. Le "serment de Villepinte" comprend le changement de l'EN en IP, en csq l'éducation reviendra aux parents, conformément aux grands principes et l'école redevenue le sanctuaire de la transmission des savoirs redeviendra libre, tt en restant obligatoire, question d'application et d'esprit.
Rédigé par : BL | mercredi 19 jan 2022 à 10:47
https://www.lepoint.fr/politique/pecresse-regrette-la-fin-de-la-filiere-s-celle-des-bons-eleves-au-lycee-19-01-2022-2461172_20.php
Évidemment. Mais la dégénérescence au nom de l'égalitarisme qui provoque nécessairement le nivellement par le bas ne date pas d'aujourd'hui.
La décision de fusionner les séries C et D dans une nouvelle série date de 1989 (Jack Lang), elle est mise en oeuvre en 1993 (François Bayrou). Dans les faits, la nouvelle série S s'aligne sur le niveau mathématiques et physique qui était celui de la série D (donc nettement inférieur à celui de la série C) et sciences naturelles de la série C (donc nettement inférieur à celui de la série D).
Quant aux séries littéraires valables, dégringolade générale de niveau.
Rédigé par : RR | mercredi 19 jan 2022 à 15:00
@ BL
Le vrai Front national (1972-milieu des années 90) que j'ai soutenu préconisait le chèque éducation à travers une école libre (et l'inversion des flux migratoires, et le recours à la peine de mort, et la démocratie économique,...). Tout le contraire de la secte de Marine Le Pen.
Rédigé par : RR | mercredi 19 jan 2022 à 15:08
@ Andy Vaujambon
"(...) Tous étatistes ! C'est la France..."
En effet, c'est malheureux mais c'est comme ça. Les Français sont dans leur immense majorité dotés d'un cerveau encrassé qui les empêche de se prendre en main, ils sont étatistes tout en se plaignant "paradoxalement" de payer trop d'impôts. Bref, ils attendent tout de l'État (socialiste de fait) mais rechignent à lui en donner les moyens.
Comment déterger ces cerveaux déficients (et pas seulement dans le domaine économique et social), là est la question auquel il conviendrait de trouver une réponse.
Rédigé par : RR | mercredi 19 jan 2022 à 15:42