Les points de tensions et de crises se multiplient dans le monde. Leur nombre grandissant mériterait de faire passer au second rang des préoccupations citoyennes aussi bien les enjeux du scrutin présidentiel qui se dessine, et plus encore les législatives qui suivront – ceci sans parler de la prétendue guerre que M. Macron prétend conduire contre le virus.
La guerre à balles réelles pointe à l'horizon, aux lisières de l'espace même de l'Union européenne. À cet égard, un premier paradoxe voit s'y impliquer la Grande-Bretagne. Quelques mois à peine après la conclusion du Brexit, qui vient de la séparer juridiquement du Continent, elle s'engage plus que tout autre dans la défense des intérêts stratégiques, d'une communauté qu'elle vient de quitter.
Les alliés de l'OTAN ont prévu de réunir leurs ministres de la Défense dans le cadre du Conseil de l'Atlantique Nord au QG bruxellois de l'organisation militaire les 16 et 17 février. Auparavant, le 24 janvier, le secrétaire général norvégien Jens Stoltenberg a confirmé l'entrée dans un partenariat actif de la Suède et de la Finlande, traditionnellement neutres.
Or, ce 29 janvier, Boris Johnson le premier a annoncé, sa détermination précise de se porter au secours de l'Europe orientale. Il procède ainsi à un engagement sans précédent depuis la seconde guerre mondiale. Face à ce qu’il appelle "l’hostilité russe" il propose un déploiement majeur d'infanterie, de navires de guerre et d’avions de combat. Londres doublerait son contingent de 1 150 soldats actuellement engagés en Europe de l’Est et fournirait des armes à l’Estonie, où sont déjà présents, depuis 2015, 900 soldats britanniques. "Cet ensemble de mesures enverrait un message clair au Kremlin : nous ne tolérerons pas, souligne-t-il, leur activité de déstabilisation, et nous serons toujours aux côtés de nos alliés."
Ces annonces d'une grande fermeté ne tranchent pas seulement avec les tergiversations de la présidence française. Ces dernières elles-mêmes convergent, malheureusement dans la cacophonie, avec les incertitudes d'une Allemagne que les choix énergétiques désastreux d'Angela Merkel en 2011 ont rendue, depuis, dépendante de Gazprom. On doit rappeler d'ailleurs, aux thuriféraires de la Macronie, que, contrairement à ce que semblent penser, et impriment, L'Opinion comme Le Monde, Emmanuel Macron, candidat encore inavoué à sa propre réélection en France n'est absolument pas président de l'Union européenne(1)⇓ .
Aux États-Unis même, l'aile droite du Parti républicain critique vent debout la politique étrangère américaine et le soutien officiel bipartisan qu'elle reçoit. La chaîne Fox News, au premier chef son présentateur Tucker Carlson, développe par exemple une rhétorique constante en faveur de la Russie et contre l'intervention étrangère. Le représentant démocrate du New Jersey Tom Malinowski a fait savoir que son bureau recevait des appels téléphoniques d'électeurs reprenant les arguments de Carlson. On l'exhorte à soutenir les revendications de la Russie poutinienne présentées pour "raisonnables", lorsque Moscou demande le retrait de l'OTAN d'Europe de l'Est. Un sondage YouGov a révélé que 62 % des électeurs républicains considèrent ainsi Vladimir Poutine comme un leader plus fort que Joe Biden.
Depuis l'élection, certes controversée de Biden à la présidence des États-Unis, les conservateurs américains, largement nostalgiques des années Trump, font valoir, à tort ou à raison, que la question centrale du trouble international résulte de la crise du pouvoir à Washington. Celle-ci se répercute à l'évidence sur l'ensemble de l'occident.
Radicalement opposés au gouvernement actuel du parti démocrate et à sa majorité au sein de la chambre des représentants, ces mêmes milieux font valoir que la [relative] fermeté américaine relativement à la crise ukrainienne, quelques mois à peine après la débâcle de Kaboul, vient elle-même avec 8 ans de retard.
C'est dès 2014 en effet que le Kremlin s'est emparé de la Crimée. Un discours flamboyant de son président vint alors relayer la rupture qu'il avait annoncée à Munich en 2007, et confirmée contre la Géorgie en 2008.
Paul Gosar, élu de l'Arizona à la Chambre des représentants, l'un des républicains qui suit la ligne de Trump, a déclaré que "pas un seul soldat américain ne devrait mourir en Ukraine. Nous venons de perdre l'Afghanistan au profit de bergers avec des sandales. L'armée russe n'est pas n'importe quel adversaire." Et il impute cette désastreuse situation aux carences politiques du gouvernement. Nos soldats sont les meilleurs, écrivait-il le 30 janvier, nos dirigeants sont les plus mauvais."(2)⇓
À l'inverse, le sénateur démocrate du Connecticut Chris Murphy, peut prétendre, quant à lui : "Il n'y a absolument aucune dichotomie entre républicains et démocrates. Si Poutine envahit, il paiera un lourd tribut."
En dépit de telles mises en garde, les puissances adverses retiennent surtout, comme autant d'encouragements, l'indécision et les divisions des Occidentaux.
[à suivre…]
JG Malliarakis
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- Une fois n'est pas coutume, recommandons vivement ici, pour ceux de nos amis lecteurs qui auraient besoin, sur ce point, d'éclaircissements sur les institutions européennes un enregistrement du souverainiste pro-Frexit François Asselineau sur Youtube, repris [sans pub] sur le site royaliste Je Suis Français⇑
- cf. Paul Gosar : "We Have No Dog in The Ukraine Fight"⇑
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Psychologie de la Guerre par Gustave Le Bon
L'auteur s'inscrit en faux face aux explications matérialistes et marxisantes. Derrière les événements dont nous voyons se dérouler le cours, écrit-il ainsi, se trouve l'immense région des forces immatérielles qui les firent naître. (...) Les phénomènes du monde visible ont leur racine dans un monde invisible où s'élaborent les sentiments et les croyances qui nous mènent. Cette région des causes est la seule dont nous nous proposons d'aborder l'étude. (...) La guerre qui mit tant de peuples aux prises éclata comme un coup de tonnerre dans une Europe pacifiste, bien que condamnée à rester en armes. Tout conspirait donc, en dépit de l’autorité de l’auteur, pour que cet écrit soit relégué dans l'oubli des textes maudits, politiquement incorrects... ••• un livre de 374 pages au prix de 29 euros ••• à commander par carte bancaire, sur le site de l'éditeur ou par chèque en téléchargeant un bon de commande
Cette crise montre l'impossibilité d'une défense commune européenne: les pays scandinaves et ex.pays de l'Est qui ont rejoint l'Europe voient le danger du côté russe. La partie sud de l'Europe (France, Italie, Grèce, etc..) regarde plutôt du côté de la Méditerranée. Sans compter que face à une armée russe, centralisée, entrainée, que pourraient faire les diverses armées européennes, aux armements hétéroclites et commandements divers.
Seule l'Amérique à travers l'OTAN est capable de tenir la dragée haute à Poutine et montrer l'inefficacité de l'Europe dans se domaine.Biden veut démontrer qu'il y a 3 grandes puissances: USA, Chine et Russie et les autres, allez jouer aux billes.
Rédigé par : Laurent Worms | lundi 31 jan 2022 à 12:24
Si Poutine a pu s'emparer facilement de la Crimée, c'est que sa population n'y était pas hostile ; il n'en serait pas de même avec l'Ukraine où il existe un réel sentiment national .Les ukrainiens résisteront et Poutine perdra médiatiquement ce qu'il aura gagné militairement.
Rédigé par : Saint Surge | lundi 31 jan 2022 à 15:07
"(...) la prétendue guerre que M. Macron prétend conduire contre le virus"
Ne sous-estimez pas la dangerosité de ce virus. Ce n'est pas une simple grippette comme osent le prétendre certains.
"À cet égard, un premier paradoxe voit s'y impliquer la Grande-Bretagne. Quelques mois à peine après la conclusion du Brexit, qui vient de la séparer juridiquement du Continent, elle s'engage plus que tout autre dans la défense des intérêts stratégiques, d'une communauté qu'elle vient de quitter."
Pas si paradoxal que ça. Le Royaume-Uni a toujours été plus proche des États-Unis que de l'Europe dont il fait pourtant partie.
"Radicalement opposés au gouvernement actuel du parti démocrate et à sa majorité au sein de la chambre des représentants, ces mêmes milieux [conservateurs nostalgiques de Trump] font valoir que la [relative] fermeté américaine relativement à la crise ukrainienne, quelques mois à peine après la débâcle de Kaboul, vient elle-même avec 8 ans de retard."
Ni Trump, ni Biden. La seule position honorable et salutaire pour les États-Unis est celle de Rand Paul:
https://eu.courier-journal.com/story/opinion/2022/01/26/rand-paul-how-we-prevent-war-ukraine-opinion/9226398002/
La Russie (qui ne l'oublions quand même pas est une nation européenne) doit être pour nous une alliée.
Rédigé par : RR | lundi 31 jan 2022 à 15:07
@ Saint-Surge
"Si Poutine a pu s'emparer facilement de la Crimée, c'est que sa population n'y était pas hostile ; il n'en serait pas de même avec l'Ukraine où il existe un réel sentiment national."
Plusieurs erreurs dans cette phrase. Tout d'abord, je rappelle que la Crimée faisait partie de l'Ukraine quand elle a été envahie, et qu'elle en fait toujours partie. Seule la Russie et deux ou trois pays du genre zazakstan reconnaissent son annexion. Même la Chine ne la reconnaît pas.
La Crimée est un territoire ukrainien occupé par la Russie. Tout comme les pays baltes ont été occupés pendant 51 ans, avant d'être libérés de l'oppresseur soviétique.
Mais surtout, il est à la fois faux, et insultant pour les Ukrainiens, de prétendre que la Russie a pu facilement s'emparer de la Crimée parce que ses habitants étaient d'accord.
L'armée russe s'est facilement emparée de la Crimée, d'abord parce qu'elle possédait une base sur place, à Sébastopol.
Ensuite, parce que l'armée ukrainienne était en piteux état à l'époque. Le sabotage des communications a été si complet, que le commandant local a dû téléphoner à sa femme, à Kiev, pour lui demander à son tour de téléphoner au ministère de la Défense : c'est le seul moyen qu'il avait trouvé pour prévenir ses supérieurs de l'invasion.
Et enfin, parce que l'armée russe a procédé exactement comme l'armée soviétique dans les pays baltes, en 1940 : les troupes sans insigne, spécialement réunies pour l'invasion, se sont emparées du parlement, et ont obligé les députés présents à nommer, sous la menace des fusils, un gouverneur à la botte des Russes.
Pour finir, l'armée russe a organisé une parodie de référendum, en violation de toutes les règles démocratiques, qui a conduit à l'annexion que l'on sait.
S'il est certain qu'une bonne partie des Criméens avaient des sympathies pro-russes (mais pas tous, et en particulier pas la minorité tatare, présente sur la péninsule bien avant les Russes), rien ne permet de dire, encore aujourd'hui, qu'ils se seraient prononcés pour le rattachement à la Russie s'ils avaient pu voter de façon démocratique.
En fait, une bonne partie de ceux qui aspiraient à l'absorption par la Russie le faisaient essentiellement dans l'espoir, fort prosaïque, d'obtenir de meilleures pensions de retraite.
Espoir qui a été cruellement déçu deux ans plus tard, avec la célèbre gaffe de Dmitri Medvedev, premier ministre, interpellé lors d'une visite en Crimée par une retraitée se plaignant de sa pension misérable, et répondant avec un cynisme totalement poutinien : "Il n'y a plus d'argent dans les caisses, tenez bon en attendant" :
https://meduza.io/en/news/2016/05/24/medvedev-to-crimean-pensioners-there-s-no-more-money-but-hang-in-there
@ RR
"La Russie (qui ne l'oublions quand même pas est une nation européenne) doit être pour nous une alliée."
Toujours ce slogan péremptoire, jamais expliqué sinon par d'autre slogans, et asséné avec la régularité d'un tam-tam fasciste -- ou communiste.
Rédigé par : Robert Marchenoir | mardi 01 fév 2022 à 19:58