Dans le Figaro en date de ce 12 octobre, Valérie Pécresse, candidate à la candidature de la droite classique a présenté son programme pour l'école. Or, dès l'annonce de sa future campagne, elle avait insisté sur l'importance que son projet entend accorder à l'éducation.
D'emblée, elle décline sa doctrine :"La crise que traverse l'éducation impose un sursaut national, ce que j'appelle le projet de 'nation éducative'. L'école, c'est la fabrique de la France, à travers la transmission de nos savoirs, de notre histoire."
Que faut-il entendre par "nation éducative" ?
Quel rôle pour les familles ?
Le mot n'est prononcé que d'un point de vue punitif. À la question "Faut-il aller vers une sanction des parents d'enfants perturbateurs ?" la présidente de la région Ile-de-France répond : "Absolument. La situation serait examinée dans les conseils des droits et devoirs des familles, présidés par les maires, qui devraient redevenir obligatoires dans les villes de plus de 15 000 habitants. Ils pourraient aller jusqu'à sanctionner financièrement les parents manifestement défaillants en suspendant leurs allocations familiales. L'école ne peut pas seule élever des enfants, les parents en sont les premiers responsables."
Le droit au libre choix des familles entre diverses formes d'éducation et d'instruction, car ce n'est pas la même fonction, n'est nulle part considéré.
Le constat concerne d'abord le primaire, car la journaliste du Figaro rappelle que beaucoup d'enfants finissent l'école primaire sans savoir ni lire ni compter. Comment prévient-on dès lors le décrochage scolaire ? Réponse : "J'instaurerai un examen avant la 6e, non pas pour bloquer leur entrée au collège, mais pour créer des classes de 6e de consolidation. Les enfants ayant échoué à l'examen y feraient massivement du français et des maths pour se remettre au niveau. Aujourd'hui, on laisse entrer au collège des jeunes qui ne pourront pas y réussir et vont inexorablement décrocher."
La candidate ne veut pas seulement un examen d'entrée en sixième, elle entend "casser la spirale du décrochage scolaire (...) source d'échec mais aussi d'indiscipline et de délinquance. L'enfant qui n'a pas les fondamentaux commence sa vie avec un lourd handicap."
Si on lui objecte qu'on manque de professeurs pour créer de nouvelles classes, elle répond "Je créerai une réserve éducative nationale, composée de professeurs retraités rémunérés, qui accompagnera les élèves avec de l'aide aux devoirs gratuite, dès le primaire jusqu'au lycée. Cette réserve permettrait aussi d'aider au remplacement sans délai d'un professeur absent."
Tout le reste à l'avenant.
Une telle vision bonapartiste, quasi militaire, de l'instruction publique peut sans doute convenir à une campagne électorale et à cette frange de l'opinion française qui aspire à une remise en ordre sans trop s'interroger sur les raisons profondes du désordre.
Très clairement pourtant la faillite globale de l'Éducation "nationale" étatique rend d'autant plus légitime la résistance des familles et la nécessité du libre choix permis aux parents.
La Macronie a fait voter deux lois extrêmement dangereuses sur ce terrain : la loi Blanquer de 2018 et la loi du 24 août 2021 qui, au départ, devait combattre le séparatisme islamiste, et à l'arrivée prétend "conforter le respect des principes de la république". Ces lois bafouent l'héritage de la loi Falloux qui depuis 1850, par-delà les régimes successifs, avait établi la liberté de l'enseignement.
Ne nous focalisons même pas sur le critère réaffirmé, y compris par Le Figaro, de la "laïcité". Ce vieux rogaton du radical-socialisme est devenu le mantra par laquelle on imagine exorciser et endiguer le flot de l'islamisme. Mme Pécresse, qui passe pour catholique, n'a pas la présence d'esprit, ni peut-être même la culture, de rappeler que la fameuse loi de 1905 se réclame de la liberté religieuse… On peut lui pardonner, elle n'est pas seule dans ce cas.
En revanche, si même la droite classique accepte de démissionner dans la cause de défense de la famille éducatrice et de la liberté scolaire, on ne peut que constater l'urgence de réponses et de propositions moins conformistes.
JG Malliarakis
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Cela peut vous paraîtra sans doute périphérique, mais je me souviens de Valérie Pécresse expliquant qu'à trois ans, certains enfants devaient être fichés comme de futurs délinquants potentiels. Il est vrai que la misère attire la misère, mais on peut dire sans être bourdieusien que l'honneur de l'école est de casser les déterminismes. C'est le cadet des soucis de Valérie Pécresse, qui ne dénonce pas un autre aspect de ce qui fait du mal à l'école: son enseignement est spirituellement vide. La laïcité est une valeur négative, un moins-disant. Les valeurs de la République sont à peine définies et Frédéric Rouvillois a montré qu'on cherche en vain les traces d'un "pacte républicain", dans la ligne du Contrat social dont Rousseau dit qu'il est une convention entre les contractants, mais il ne doit pas être signé pas plus qu'il n'est écrit. La République est une société contractualiste et la société contractualiste est une fiction. Les "apprentissages"sont "séquencés" (ils font l'objet de "séquences pédagogiques") de telle manière qu'il n'y a plus d'orthographe et de grammaire selon les instructions officielles de l'enseignement du Français, mais seulement de l'orthographe et de la grammaire dans le cadre de la séquence où l'on étudie la tératologie (en sixième) ou la poésie symboliste je ne sais pas quand (pourquoi pas en quatrième où on étudie également le lyrisme et la correspondance, des lettres de Madame de Sévigné à la lettre qu'on apprend à écrire en ne sachant pas aligner deux mots dans une phrase bien construite par suite de l'incurie de la pédagogie), la poésie symboliste constituant un centre d'intérêt fugace où le symbolisme dans l'histoire littéraire n'est pas située chronologiquement. Tout cela est navrant. "Quand il ne reste que la chasse, faut-il tuer les oiseaux qui passent?", chantait Jean-Marie Vivier. Quand il ne reste que la casse, faut-il se priver de jargonner et de prétendre à la "refondation de l'école" comme Vincent Peillon ou de parler de "nation éducative" comme Valérie Pécresse, qui se proposait de ficher de futurs délinquants de trois ans sans même avoir la pitié qu'Hitler concevait pour la condition sociale dépourvue d'éducation, pitié qui l'amenait à vouloir éliminer les "tarés"? Au moins Valérie Pécresse laisse-t-elle vivre les prédélinquants qu'elle fiche sans les "rééduquer".
Rédigé par : Julien WEINZAEPFLEN | mercredi 13 oct 2021 à 06:58