Ce 7 juin, on pouvait redécouvrir sur le site de L'Opinion la personnalité et les nouvelles aventures de Thierry Solère. On l'avait oublié, ce brillant homme de réseau. On croyait le personnage démonétisé, caramélisé, honteux et confus depuis une déplorable enquête pour fraude fiscale : "Je ne suis pas mis en examen, il n’y a eu aucune poursuite !", précisait-il en fait lors d'un entretien avec Nicolas Beytout en avril 2019.
L'homme de presse l'interrogeait surtout ce jour-là sur la philosophie laïque, dont il représentait une sorte de caution fraternelle, inspirant la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Ceux qui s'inquiéteraient de voir la France républicaine se passionner pour un monument représentatif de son identité chrétienne peuvent ainsi dormir sur leurs deux oreilles.
Député de Boulogne-Billancourt, il a donc porté les casaques de l'UMP, des Républicains qui lui ont succédé sous Sarkozy, et maintenant de La REM. Ce que souligne le quotidien de centre droit, c'est son rôle actuel de conseiller du chef de l'État, spécialisé dans le débauchage des anciens droitiers. Un métier fort honorable, assure-t-on ; on ne devrait pas, cependant, le confondre avec l'équarrissage.
Nous avons affaire ici à ce que Beau de Loménie appelait un grand habile, un héritier des grands ancêtres de l'alliance démocratique.
Ce parti, fondé officiellement en octobre 1901, grâce à la fameuse loi, a permis à ses compères, républicains-radicaux et radicaux-socialistes, de gouverner la France tout au long de la troisième république. Jusqu'au beau résultat de juin 1940. Son dernier président, en la personne de Pierre-Étienne Flandin, allait devenir, cette année-là, chef du gouvernement, après le renvoi de Pierre Laval le 13 décembre. Il joua un rôle presque paradoxal, et peu connu, celui d'imposer dans le cadre de la Charte du Travail, adoptée en 1941, ce qui allait devenir le monopole actuel de la sécurité sociale, liquidant tout concept de libertés corporatives. De la belle ouvrage…
Le Solère, de moindre envergure, ne semble pas appelé à d'aussi hautes fonctions. Il ne rencontre Jupiter en son palais de l'Élysée, qu'un vendredi sur deux. Tout ce qu'on lui demande consiste en fait à monter des opérations, des magouilles. La plus brillante s'incarne dans la liste chèvre-chou de Renaud Muselier en région provençale. Toutefois, les sondages consécutifs à la séquence parisienne de l'état-major LR puis de la composition effective de la liste en demi-contradiction avec les consignes du parti, ne semblent pas annoncer le caractère triomphal de cette manœuvre stratégique. Et, de toute manière, on croit pouvoir présumer par avance que les présidents de régions macroniens se compteront aisément sur les doigts d'une seule main.
La France demeurera cependant, pour son malheur, gouvernée depuis les mêmes bureaux parisiens, et la soupe y restera bonne pour tous les glorieux de la décadence.
Dans trois autres régions la république en marche a bénéficié des magouilles droitières du transfuge de LR : Grand Est, Pays de la Loire, Ile-de-France…
Mais qu'on se rassure, tout de même : la Macronie emploie un homologue symétrique, sur son côté gauche. Votre chroniqueur avoue qu'il ignorait jusqu'ici son glorieux patronyme : il s'appelle Stéphane Séjourné, venu des rangs strauss-kahniens du parti socialiste. Sa fiche Wikipédia l'affuble d'un conjoint nommé Gabriel Attal, mieux connu du grand public, car porte-parole du gouvernement.
Une quinzaine de ministres ont accepté de se confronter au suffrage universel dans ces élections régionales, et pas seulement le Dupont-Moretti et le Darmanin dans les Hauts-de-France. Ce dernier grand rendez-vous électoral avant les élections présidentielles et législatives ne mettra cependant pas en application la règle imaginée aux débuts de la cinquième république : un ministre battu démissionne.
Ça c'était l'ancien monde.
JG Malliarakis
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Avec un mouvement qui a perdu toute influence nationale, la REM ne peut prétendre gagner une élection basée sur les résultats locaux. Paris et encore moins l'Elysée, ne sont pas la France.
Rédigé par : Laurent Worms | mardi 08 juin 2021 à 10:42