On nous assomme chaque jour en France, du mantra de république, répété en boucle, affublé d'un prétentieux R majuscule. Et pourtant nous subissons le gouvernement d'une sorte d'autocrate absolu, faisant et défaisant selon son bon plaisir les instances de pouvoir, les équipes ministérielles, le calendrier des élections, les lois qu'enregistre sa majorité docile, et les règlements dont nous gave sa bureaucratie.
En notre Hexagone, à vrai dire, il semble qu'il faille toujours du neuf, car depuis Héraclite l'Obscur, c'est-à-dire depuis vingt-six siècles, nous ne saurions l'ignorer : la seule chose qui ne change pas c'est le changement.
Quel contraste avec l'heureuse Angleterre, attachée à ses traditions et à ses institutions issues d'une Charte remontant au XIIIe siècle. Elle porte aujourd'hui, à l'unisson le deuil de son prince consort. Son travail, finalement énorme, sur plus de 50 ans, s'est traduit par plus de 22 000 manifestations, plus de 600 visites à l'étranger, plus 5 000 allocutions. Duc d'Edimbourg, il était issu de la dynastie gréco-danoise des Glucksbourg, premier chevalier d'une Reine, héritière elle-même de la maison allemande de Victoria et Albert, devenue Windsor en raison de la funeste guerre de 1914. À sa façon, il incarnait ainsi lui-même la vieille Europe, dont nous pourrions porter en commun la nostalgie et l'espoir d'une Renaissance (1).
S'il nous était donné de pouvoir choisir entre une constitution monarchique vivante, garante des libertés et de la séparation des pouvoirs – et la république jacobine, laïque et obligatoire, le bon sens, instruit par l'expérience des deux derniers siècles, n'hésiterait guère.
Hélas en l'absence de roi, tel les grenouilles de La Fontaine, nous nous sommes affublés d'un ersatz d'hybride entre les deux régimes. Nous subissons donc le pouvoir d'un seul, certes, tributaire d'une hantise de sa réélection, voire de la crainte des cours de justice comme on en perçoit l'ombre catastrophique dans la gestion de l'actuelle pandémie.
Nous croyons parfois avoir hésité, dans la longue et hasardeuse série de nos constitutions si souvent changeantes, entre celle du consulat de 1799 et les actes additionnels de 1815, caractérisant le bonapartisme. Celui-ci ne pouvait conduire, le premier qu'à Waterloo, le second à Sedan. Leur continuation actuelle, apparue sous les auspices de l'Algérie française imposa les accords d'Évian qui nous conduisent, quelque 60 ans plus tard, à la France algérienne.
Depuis la république romaine, les dictatures prétendent toujours sauver les peuples. Or, en fait, les pouvoirs plébiscitaires qu'elles génèrent dans les temps modernes, ne peuvent vraiment produire, à terme, que du malheur, de la misère et de la médiocrité.
Sortir royalement du tunnel relève sans doute, à vue humaine, actuellement, de l'utopie.
Il nous reste donc, à mesurer la voie d'une première abrogation : celle de l'article 7 réformé en 1962. Il substitua, rappelons-le, au mode d'élection initialement prévu et appliqué en 1958, la désignation du président par un scrutin au suffrage universel direct. Ce dispositif de type sud-américain n'a fonctionné depuis son adoption que dans un sens catastrophique. Chaque élu successif est à peu près parvenu à nous faire regretter paradoxalement son prédécesseur. Le premier bénéficiaire de cette procédure en retira lui-même une déception certaine dès 1965. En effet contrairement à son espoir d'une victoire éclatante il fut mis en ballottage. Depuis, les choses n'ont cessé d'empirer. Et les unes après les autres, les innombrables retouches successives, y compris le quinquennat, n'ont cessé d'abîmer l'édifice.
Sans aspirer par conséquent à une nième constitution, les Français gagneraient à revenir tout simplement à la lettre et à l'esprit de celle conçue au cours de l'été 1958, séparant les pouvoirs, équilibrant un pouvoir exécutif, vraiment dirigé par le Premier ministre, chargé d'appliquer les lois rédigées et votées par des assemblées vraiment représentatives.
JG Malliarakis
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Ce qui est quand même paradoxal, c'est que les deux seules organisations avec lesquelles j'ai encore de (bons) contacts sont toutes les deux royalistes (Action française - celle de la rue Croix des Petits Champs - et Nouvelle Action Royaliste), toutes deux récusant l'appartenance à l'"extrême-droite".
Le fait que ce soient des organisations non-électoralistes composées de militants sincères et désintéressés ne cherchant pas "à faire carrière" n'y est sans doute pas pour rien.
Rédigé par : RR | dimanche 11 avr 2021 à 23:46
La constitution gaullienne est une cote mal taillée. Une fausse démocratie parlementaire aux ordres de Gaulle se vivant entre Jeanne d' Arc et un monarque républicain.
L'incapacité de la IV. République à gouverner et à résoudre les crises coloniales à favorisé cette constitution hybride à la limite d'une dictature présidentielle.
Rédigé par : Laurent Worms | lundi 12 avr 2021 à 09:55
Le dernier éditorial de Bertrand Renouvin arrive à point pour complèter cette chronique:
https://bertrand-renouvin.fr/le-pouvoir-de-decider/#respond
(tout de même, n'étant pas royaliste, je ne devrais pas relayer ça)
Rédigé par : RR | lundi 12 avr 2021 à 13:05
"On nous assomme chaque jour en France, du mantra de république, répété en boucle, affublé d'un prétentieux R majuscule."
Pourtant depuis début 2020 j'ai plutôt le sentiment de "l'Arrêt Public" bof...
Ils nous assomment aussi avec leur laïcité qui leur sort de la bouche avec de la bave...
Rédigé par : Delphine | lundi 12 avr 2021 à 14:35
La citation de Gambetta est extraordinaire. Pourriez-vous nous en dire l'origine ?
Petite réponse
Elle figurait ce 11 avril sur le site [royaliste] de "Je suis français" sous la référence Lettre du 12 août 1882 à Auguste Gérard
https://www.jesuisfrancais.blog/2021/04/11/ce-fut-tres-tot-que-les-valeurs-de-la-republique-lasserent-lire-ces-reflexions-etonnantes-de-gambetta/
Rédigé par : François | mardi 13 avr 2021 à 22:19