Avoir osé dénoncer l’islamo-gauchisme place Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, depuis le 14 février, au cœur d'une polémique qui nous paraît cruciale.
Crânement, elle a réitéré son propos dans Le Journal du Dimanche du 21 février.[1] Entre-temps, le président de la république, dont ce n'est pourtant pas le rôle constitutionnel, l'aurait "recadrée" comme un collaborateur subalterne.
À elle seule, la réaction indignée de 600 pétitionnaires, dont la longue liste ne surprend personne, et au nombre desquels trône par exemple l'inévitable Piketty, prouve par elle-même le bien-fondé du propos. Qui se sent morveux qu'il se mouche dit la sagesse française depuis Molière.
Commençons par rappeler ici que c'est à un des poids lourds du gouvernement actuel, le ministre de l'Éducation nationale, que l'on doit la première dénonciation du phénomène, le 22 octobre [2]. Jean-Michel Blanquer avait osé dire qu'il "fait des ravages à l’université, [qu']il fait des ravages quand l’UNEF cède à ce type de chose, [qu']il fait des ravages quand dans les rangs de La France insoumise, [que]vous avez des gens qui sont de ce courant-là et s’affichent comme tels".
Quatre mois avant sa collègue chargée de l'enseignement supérieur, il avait déjà ainsi lui-même, par de tels propos, provoqué une levée de boucliers du même ordre.
Mais personne n'avait alors entendu parler d'un désaveu public, ni de la part du chef de l'État, ni du chef du Gouvernement.
En assistant, au contraire, au recadrage de la ministre par Macron, on mesure donc les progrès de cette forme si particulière de schizophrénie politique, qui s'était elle-même annoncée dès la campagne présidentielle de 2016-2017 sous la fameuse formule "en même temps", "et de droite et de gauche". Or, au départ, cette équation se voulait attrape-tout. Héritière des radicaux-socialistes de la Troisième république, elle s'est révélée séduisante pour les héritiers du défunt MRP de la Quatrième : faire une politique de gauche avec des électeurs de droite, tout en siégeant au centre.
L'une des raisons pour lesquelles, malgré ses défauts, la Cinquième république avait jusqu'ici perduré, réside justement dans le rejet populaire de ce qu'on appelait jusqu'en 1958 "les délices du système". La Macronie tendant à les restaurer, son mécanisme "un coup à droite un coup à gauche" ne produit que de l'écœurement.
Céder sur la question de l'islamo-gauchisme, ou plus exactement de l'utilisation de ce concept par Frédérique Vidal, à la suite de Jean-Michel Blanquer, serait une erreur supplémentaire à celle de la dissolution annoncée de Génération identitaire.
Le seul reproche que l'on puisse faire aux deux ministres, c'est de situer leur propre critique au-dessous de la réalité. Le concept qu'ils dénoncent, et dont tout le monde comprend la nuisance, recouvre d'un néologisme, inventé par Pierre-André Taguieff, une réalité que l'on a vu constamment à l'œuvre, depuis un siècle, depuis le congrès de Bakou de 1920, depuis le partage soviéto-turc du Caucase, depuis l'attribution du Haut-Karabakh à l'Azerbaïdjan par Staline en 1921, etc... Jusqu'au soutien au FLN de l'extrême gauche hexagonale pendant la guerre d'Algérie de 1954 à 1962, et, 50 ans plus tard, aux œillades de Mediapart ou de la France insoumise à Tarik Ramadan et aux franges les plus nauséabondes du salafisme métropolitain…
Cette alliance impure se retrouve dans tous les courants actuels "décoloniaux" etc. Ce n'est pas un mythe c'est une évidente réalité.
On pourrait aussi parler d'islamo-bolchevisme, d'islamo-trotskisme, d'islamo-stalinisme malgré l'apparent oxymore idéologique de tels rapprochements, a priori obscènes, auxquels Marx et Engels, en leur temps, n'auraient pas songé.[3] Rien n'est au départ plus antimarxiste en effet que l'islam… et le mépris de Marx pour les Orientaux était total…
Quant au procès du CNRS, il ne fait légitimement que commencer. Cette institution porte une grande part de responsabilité dans le déclin de la Recherche française, déconnectée de la pratique et de l'utilité sociale en raison même de l'idéologie dominante en son sein. On l'a vu, de manière éclatante, dans la bataille du vaccin : perdue par la France par absence de partenariat de la recherche publique avec le secteur privé abhorré. Il ne s'agit pas d'islamo-gauchisme mais tout simplement de la nuisible survivance marxiste dans l'intelligentsia hexagonale.
Pas question, pour ces vaches sacrées, de rendre des comptes comme de vulgaires capitalistes. Pour les mettre au pas, une Frédérique Vidal ou un Jean-Louis Blanquer auront d'autant plus de fil à retordre que le principe démocratique de la solidarité ministérielle ne semble pas étouffer la Macronie régnante.
JG Malliarakis
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Apostilles
[1] cf. article "Vidal persiste sur l'islamo-gauchisme : Je veux une approche rationnelle et scientifique du sujet"
[3] Votre chroniqueur s'est efforcé d'en démonter le mécanisme, documents l'appui, dans le petit livre "La Faucille et le croissant" consacré à "islamisme et bolchevisme au congrès de Bakou".
La complicité d'une certaine gauche avec l'islamisme est une conséquence de ses positions idéologiques immigrationnistes d'une part, et d'autre part de sa volonté de capter un nouvel électorat conformément aux conseils du "think tank" Terra Nova.
Rien de marxiste ni de stalinien dans cette démarche.
Il est peu probable que Marx et Staline aient été immigrationnistes s'ils avaient vécu de nos jours. Comme vous le précisez, Marx n'avait que mépris pour les Orientaux (et hostilité pour les gens de couleur; certaines de ses correspondances bien connues ne laissent planer aucun doute là-dessus). Quant à Staline, il était hostile à tout cosmopolitisme et bien que marxiste-léniniste, par certains cotés nationaliste (ce qui explique que certains disciples de Jean Thiriart aient fini par s'en réclamer, allant jusqu'à reprendre à leur compte les arguments en défense de Ludo Martens).
Rédigé par : RR | lundi 22 fév 2021 à 01:26
L'islamo-gauchisme qui se développe dans les université n'est rien d'autre que la mise au goût du jour du marxisme qui sévit sous diverses formes dans cette institution depuis les années 60. A cette époque que ce fût en sciences sociales, lettres ou sciences éco., l'étude du marxisme était le centre de l'enseignement universitaire.
Rédigé par : Laurent Worms | lundi 22 fév 2021 à 09:54
Tous les sujets évoqués ici sont très importants, y compris les sujets économiques. On ne peut en dire autant partout ailleurs, et surtout au gouvernement ; est ce pour ne plus jamais parler du désastre économique dans lequel est plongé notre pays ?
Lentement nous nous dirigeons vers une situation économique de pays sous-développé par rapport à tous les pays européens. Le déficit de la balance commerciale a augmenté en 2020, avec - 65 milliards d'euros malgré une baisse énorme de la facture du pétrole. L'Italie, tant moquée, et les petits Pays-Bas ont chacun un excédent de 60 milliards, et l'Allemagne de 180 milliards. J'ai fait un calcul : le différentiel entre France et Allemagne représenterait une file de voitures faisant le tour de la terre.
Or les partis qui pensent aux élections ne se préoccupent d'aucun des secteurs de l'économie, qui sont tous défaits. Les programmes politiques sont ailleurs.
La Macronie n'aura rien fait évidemment pour enrayer le déclin économique. Au contraire. l'étatisme jacobin ne connaît plus de limites, abrogées explicitement par le pouvoir usurpé de LREM.
Et, encore plus grave car cela augure mal de l'avenir, et il n'y a personne dans notre pays pour incarner le bon sens : proposer de rebâtir toute l'économie. Quarante années après Margaret Thatcher, ils n'ont toujours pas compris !
Alors qu'aux EUA les questions économisues furent centrale dans les élections, ( même concernant les questions d'immigration, avec 20 millions de clandestins), par la volonté d'un candidat, presque hors partis, et elle valut à Trump la victoire.
Dans notre pays, atteint par une situation économique plus que grave, et finalement ruiné, les islamo-gauchistes trouvent d'autant plus facilement, à mon avis, un terrain de prédilection.
Rédigé par : Dominique | lundi 22 fév 2021 à 23:07
À propos de "mise au goût du jour du marxisme", voir également : http://fr.liberpedia.org/Marxisme_culturel
Rédigé par : Chibounidia | mardi 23 fév 2021 à 18:36