La condamnation par un tribunal de Shanghai d'une ex-avocate de 37 ans à 4 ans de prison n'a pas vraiment bouleversé jusqu'ici les médias occidentaux. On peut le regretter. La courageuse Zhang Zhan, en effet, a été jugée coupable de "provocation aux troubles" pour avoir simplement relaté, en tant que "journaliste citoyenne", le confinement dans la bonne ville de Wuhan.
Elle a fait état en particulier de la pagaille dans les hôpitaux. Ceci ne surprendra que les gens qui ne connaissent pas la Chine : le totalitarisme politique communiste et la brutale répression policière n'y empêchent ni la négligence, ni l'incompétence, ni la saleté.
Le mensonge statistique ne trompe que ceux qui y croient. Ainsi, une première imposture du gouvernement de Pékin a consisté à évaluer à 4 634 cas dans tout le pays, dont 4 000 à Wuhan le nombre de victimes du Covid-19 du printemps de 2020. Depuis lors, à vrai dire, et on le remarque à peine, les autorités de Pékin ne reconnaissent plus d'autres contaminations que celles venant de l'étranger.
La boucle de la désinformation est ainsi bouclée.
Cela fonctionne, oui : à condition d'accepter d'être pris pour des imbéciles ; à condition de ne pas riposter…
Car à la vérité, depuis l'opprobre oublié de la répression de la place Tian Anmen en 1989, le gouvernement communiste chinois est parvenu à trouver des partenaires complaisants. Leurs relais d'opinion dans le monde capitaliste commencent par tous ceux qui refusent de voir l'évidence : la Chine Rouge est bel et bien la continuatrice du stalinisme, elle n'a jamais cessé de se réclamer de Mao, stalinien assumé lui-même et dictateur totalitaire.[1]
Sans la complaisance intéressée d'une partie du monde des affaires occidental, notamment celle de la grande distribution américaine et européenne la position du gouvernement de Pékin se trouverait singulièrement affaiblie.
Dans une tribune publiée le 17 décembre sur le site du Figaro, Thierry Wolton en appelait à un soutien à Hong Kong de la part de l'opinion démocratique occidentale.[2]
Partageant certes son indignation, l'auteur de ces lignes souhaiterait mettre l'accent sur les ripostes matérielles efficaces possibles, de nature à faire reculer l'adversaire.
L'édifice sur lequel la dictature de Xi Jinping développe aujourd'hui sa nuisance mondiale repose essentiellement sur les conditions particulières dérogatoires dans lesquelles en décembre 2001 le Chine communiste est devenue le 143e Membre de l'OMC. Pratiquant le contrôle des changes, la banque de Chine ne permet pas la libre conversion de sa monnaie nationale le Ren min bi "la monnaie du peuple", couramment désignée comme le "yuan", sous-évalué de façon autoritaire ce qui dope les exportations et la sous-traitance à bas prix. Les capitaux ainsi accumulés, et strictement contrôlés par la banque centrale constituent à la fois :
1° un instrument de puissance mondiale, via sa filiale Eximbank "Export-Import Bank of China" finance aussi bien le chemin de fer Budapest-Belgrade, que les routes du Mozambique ou le Pont de l'amitié Chine-Maldives.
2° et de chantage vis-à-vis des États-Unis, dont elle détient la plus grande partie de la dette extérieure.
Cette situation contredit de façon flagrante les principes du libre-échange sur lesquels on a prétendu fonder l'OMC en 1995. Il s'agissait en théorie de substituer une organisation mondiale du commerce, laquelle comptera 20 ans plus tard, en 2016, 164 membres au bon vieux GATT. L'ancien Agrément général sur les tarifs extérieurs et le commerce international avait été conclu entre 23 pays civilisés en 1947 dans le cadre des accords consécutifs à la seconde guerre mondiale. À l'époque on prétendait, technocrates français en tête, ès-Balladur, ès-Juppé, plus tard ès-Pascal Lamy, que l'OMC favoriserait mieux le libre-échange.
En réalité le type d'échanges que cela permit de développer concrètement, de façon monstrueuse, reposait sur la sous-traitance légale, et sur la contrefaçon. Elles sont pratiquées par des pays sans aucun droit social, comme la Chine, que l'on admit en 2001 dans l'OMC, ou comme la Turquie que Juppé réussit en 1993 à imposer dans l'union douanière, contre l'avis et malgré un vote du Parlement européen.
S'agissant du régime communiste chinois, ce ne sont pas seulement, d'ailleurs, les droits sociaux les plus élémentaires des travailleurs qu'il bafoue : c'est aussi le droit tout court, le droit des contrats, le droit de propriété et naturellement celui des brevets qu'il pille sans vergogne sur une échelle sans précédent.
Le plus inquiétant dans cette affaire s'observe avec le surendettement des grandes entreprises et des grosses banques chinoises qu'on évalue à hauteur de 10 % du PIB du pays.
Il est vrai que le taux correspondant d'un pays comme la Turquie, laquelle joue exactement le même rôle sur une échelle plus petite, est évalué à 46 %.
Il est donc temps d'en finir, de retirer la base de l'échafaudage, afin qu'il s'écroule.
Sans prendre parti dans l'élection américaine qui vient de se traduire par la défaite de Trump, mais non nécessairement par la disparition de toutes les idées du 45eprésident : son mandat aura été ainsi marqué par la prise en compte au plus haut niveau, et pour la première fois, du danger chinois. On peut comparer ce tournant avec le constat de la menace soviétique, qui ne devint une donnée de la politique occidentale qu'après les élections intermédiaires américaines de 1946. Le sursaut remontait en fait, dans les cercles de réflexion américains, au début du XXIe siècle, mais il ne s'est manifesté qu'au cours des quatre dernières années.
Les Européens, de leur côté, ont exactement les mêmes intérêts n'en déplaise à ceux qui sous-traitent ou délocalisent en Chine, comme les trafiquants du Far West qui vendaient des winchesters aux Indiens. Ne sous-estimons pas le poids de ces intérêts malodorants : dénonçons-les au contraire et affirmons la nécessité de riposter aux États voyous en enrayant leurs agissements.
JG Malliarakis
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[1] Dans la partie qui lui incombait du livre La Terreur rouge, l'auteur de ces lignes concluait en désignant la Chine de Xi Jinping comme l'héritière du communisme au XXIe siècle.
La toute puissance économique de la Chine réside en ses exportations massives de produits notamment vers l'Europe. Ces produits la plupart du temps de mauvaise qualité et souvent dangereux (notamment beaucoup de jouets pour les tout-petits et de vêtements qui ne sont pas conformes aux exigences de sécurité) revendus à bas prix ont ruiné des pans entiers de l'industrie française. D'où la nécessité comme je l'ai déjà dit dans un message précédent de la construction d'un espace économique européen (protectionniste à ce niveau) mettant en avant la qualité et la mise en commun des savoirs, mais aussi de rompre avec la politique socialiste consistant à écraser fiscalement le travail au bénéfice du fameux "modèle social français" communisant que le monde entier soi-disant nous envie mais que comme par hasard personne n'adopte.
Le drame est que personne ne propose ce programme.
Petite réponse:
À noter qu'outre les exports et la contrefaçon, la Chine esclavagiste nous inonde aussi des produits qu'un certain capitalisme occidental sous-traite à bas prix.
Rédigé par : RR | mardi 29 déc 2020 à 01:04
Ce n'est pas aussi simple. Prenons la Société d'emboutissage de Bourgogne, par exemple. Plus connue sous le nom de SEB, elle est le numéro un mondial du petit électroménager.
Si tout le monde a oublié ses origines bourguignonnes, c'est parce qu'elle rachète des entreprises à tour de bras : en Allemagne, aux Etats-Unis, en Italie, au Brésil, au Vietnam, en Colombie, en Suède, en Inde, en Suisse, en Bretagne... et en Chine.
Si elle s'installe en Chine, c'est certes pour fabriquer à destination des autres pays, mais c'est aussi, et surtout, pour vendre aux Chinois.
Et SEB ne fait pas que du bas de gamme. Au contraire, l'entreprise possède dans son portefeuille plusieurs marques bien connues d'équipement culinaire haut de gamme.
Autre exemple : Essilor, numéro un mondial de l'optique. Quand Essilor s'est implanté en Chine, les Chinois ne portaient pas de lunettes. Le but d'Essilor était non seulement d'atteindre des économies d'échelle, en construisant une usine géante à même d'alimenter le monde entier, mais aussi d'introduire le verre organique en Chine (qui, à l'époque, ne connaissait que les verres de lunettes en verre), et de faire des lunettes un produit de consommation de masse pour les Chinois (avec des verres de milieu de gamme).
Rédigé par : Robert Marchenoir | mardi 29 déc 2020 à 12:23
"À noter qu'outre les exports et la contrefaçon, la Chine esclavagiste nous inonde aussi des produits qu'un certain capitalisme occidental sous-traite à bas prix."
Oui, dans un domaine que je connais à savoir l'outillage, des marques pourtant réputées et d'excellence (… enfin à l'époque) telles que AEG (perceuses électriques notamment) et FACOM (clés et pinces notamment) sous-traitent avec la Chine. Conclusion: Si vous voulez du bon outillage, achetez d'occasion !
Rédigé par : RR | mardi 29 déc 2020 à 12:31
@ RR
Si vous voulez du bon outillage, achetez de la camelote allemande. Il y a encore de nombreuses et excellentes marques qui sont fabriquées sur place.
Facom, c'est très surfait. Non seulement ce n'est plus français (l'entreprise a été rachetée par un industriel américain), mais c'est hors de prix pour ce que c'est.
En 1918, à sa création, la boîte s'appelait Franco-américaine de construction mécanique. C'était du snobisme américain pur et simple, l'entreprise était entièrement française.
En 2006, elle est vraiment devenue américaine, ayant a été vendue à Stanley Black & Decker. En 2017, la société a disparu : elle n'existe plus qu'en tant que marque.
La dernière fois que j'ai vérifié, les produits Facom n'étaient même pas vendus aux Etats-Unis. Stanley considère, apparemment, qu'ils ont tout ce qu'il leur faut à la maison, et que Facom est tout juste bon pour les sauvages français.
Achetez allemand. Le haut de gamme allemand est meilleur et moins cher que Facom. Et il est fabriqué en Allemagne.
Rédigé par : Robert Marchenoir | mardi 29 déc 2020 à 14:48
@ Robert Marchenoir
Heureusement, j'ai déjà pratiquement tous les outils qui m'intéressent dont deux perceuses, l'une Bosch "Jumbo" achetée dans les années 70, l'autre AEG 1000W réversible achetée dans les années 80 ou 90).
Oui, vous avez raison, il y a encore d'excellents outils fabriqués en Allemagne. J'ai dernièrement acheté une des rares pinces qui me manquait en KNIPEX (moins cher et meilleur en effet que FACOM dont vous avez tout à fait bien décrit l'évolution).
Rédigé par : RR | mercredi 30 déc 2020 à 01:59
A destination des professionnels et des amateurs "chevronnés", je précise que si FACOM n'est plus valable depuis déjà quelques temps (voir le message de Robert Marchenoir), en revanche les outils de cette marque fabriqués antérieurement aux années 80, eux, sont d'excellente qualité; ils (pinces, clés, tournevis) m'ont toujours donné entière satisfaction.
Rédigé par : RR | mercredi 30 déc 2020 à 12:37
Désolé pour ce petit intermède bricolo, qui nous fait redescendre des hauteurs intellectuelles auxquelles nous a habitué Jean-Gilles Malliarakis... mais bon, un peu d'économie pratique, de temps à autre...
Rédigé par : Robert Marchenoir | mercredi 30 déc 2020 à 14:04