La petite opération de ravalement gouvernemental donne lieu à une avalanche de commentaires. La place des "laïcs", des "hommes de réseaux", des "amis de Xavier Bertrand", autant d'expressions qui permettent d'éviter les gros mots. Personne n'entend attaquer trop frontalement la bienfaisance philosophique qui structure le régime républicain. Depuis la victoire des radicaux socialistes en 1902 et celle de Mitterrand en 1981, on appelle cela la gauche
On a pourtant étrangement insisté, à l'occasion du passage de témoin – on hésite écrire de faux témoins – sur la qualité d'hommes de "droite" qui aurait caractérisé Édouard Philippe en 2017 puis son successeur Castex en 2020. Au rebours en effet de l'idéologie fondatrice de la cinquième république, on communique en effet de plus en plus en France sur l’existence d'une droite.
Rappelons à ce sujet que ce mot n'appartenait pas au vocabulaire de référence du fondateur lequel raisonnait essentiellement en terme de rassemblement. Cette appellation se retrouve d'ailleurs dans le seul parti qu'il n'ait jamais constitué lui-même, le RPF de 1947. On chercherait vainement sous sa plume pourtant féconde une réfutation du marxisme en tant que tel, ni même une franche condamnation du stalinisme, tout au plus parlera-t-il du régime affreux de l'Union soviétique alors qu'il justifie de nouer avec elle en 1944 une belle et bonne alliance. A ses adversaires intérieurs du parti communiste français il reproche leur séparatisme. De 1954, date à laquelle, selon l'expression de l'homme de Colombey "le rassemblement était devenu une débandade", à 1977, quand le RPR fut fondé à Égletons où Jacques Chirac se revendique d'un "travaillisme à la française", aucun parti d'obédience gaulliste n'a jamais utilisé le mot "droite".
Il faut attendre Sarkozy pour voir apparaître franchement le concept.
Il est désormais devenu courant et personne ne semble contester vraiment dans les rangs du parti continuateur LR. Reste qu'entre temps était apparue l'UMP, union pour la majorité présidentielle de 2002, créée dans la foulée de la victoire ambiguë d'une coalition hétéroclite dirigée contre la présence au second tour de Jean-Marie Le Pen. Le nouveau parti était supposé fusionner, ou plutôt agréger autour de l'épine dorsale chiraquienne les restes du giscardisme, du centrisme et même ceux de l'éphémère démocratie libérale revendus par l'intermédiaire Raffarin qu'on nomma Premier ministre.
Or, pour apprécier l'ensemble de ces évolutions, on doit observer qu'il existe en regard, de façon massive et même grandissante au sein de l'électorat des aspirations constitutives de diverses clientèles "de droite".
Nos vaseux communicants et autres sondeurs, si prompts et si empressés à se tromper eux-mêmes, si habiles à induire le grand public en erreur, ne s'y méprennent pas sur ce point.
Dès les travaux de Deutsch Lindon et Weill[1]de 1966, et les premières critiques de la Bipolarisation institutionnelle qui semblait caractéristique dans les débuts de la cinquième république, il apparaissait de façon parfaitement claire, avec un demi siècle d'avance qu'il existait un "marché", une demande de droite au moins au départ, et depuis les années 1980 de plus en plus forte d'un grand parti non pas travailliste mais conservateur en France.
Faut-il dès lors accuser de "tromperie sur la marchandise" tous les hommes politiques qui s'emploient depuis lors à répondre à cette demande par une offre plus ou moins inadaptée à cette demande ?
Une telle accusation se révèle en partie naïve.
Cette rhétorique des dénonciations réciproques de la "fausse droite" et de "l'extrême droite" a commencé à poindre en effet dans les années 1990. Elle se trouvait dans les propos et sous la plume de "nationaux" qui, 20 ans plus tôt, avaient eu pourtant l'intuition volontariste, aussi bien chez les frères ennemis du FN et du PFN, d'une "droite nationale et populaire", voire au plan philosophique une "nouvelle droite", etc... Ils n'avaient rassemblé au départ qu'un nombre très limité de suffrages. La première poussée électorale s'était produite, à la faveur de l'ère Mitterrand, aux élections européennes de 1984.
Ce n'est qu'à partir de 1990, et sur la base d'un montage provocateur, pourtant assez grossièrement fabriqué à Carpentras par une officine liée aux renseignements généraux, qu'il est devenu constant, et obligatoire, d'ostraciser de façon définitive toute notion d'union des droites.
Et 30 ans plus tard cela dure encore.
Et tant que cela durera, la nécessaire reconstruction de la France attendra.
JG Malliarakis
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Apostilles
[1] Deutsch, Lindon et Weill, "Les Familles politiques en France" 1966, 128 pages Editions de Minuit
"(…) tout au plus parlera-t-il [De Gaulle] du régime affreux de l'Union soviétique alors qu'il justifie de nouer avec elle en 1944 une belle et bonne alliance. A ses adversaires intérieurs du parti communiste français il reproche leur séparatisme."
La bonne entente avec l'URSS n'était pas le pire; ce qui était en revanche inadmissible, c'est l'alliance intérieure nouée avec les communistes français. Je dirais même qu'une alliance avec l'URSS aurait parfaitement pu se conjuguer avec une neutralisation politique de "nos" communistes.
"(…) une demande de droite au moins au départ, et depuis les années 1980 de plus en plus forte d'un grand parti non pas travailliste mais conservateur en France."
Dans ce cas-là, parti de droite = parti conservateur. Oui, mais qu'entend t-on par là. Un "thatchérisme français" ?
"Cette rhétorique des dénonciations réciproques de la "fausse droite" et de "l'extrême droite" a commencé à poindre en effet dans les années 1990. Elle se trouvait dans les propos et sous la plume de "nationaux" qui, 20 ans plus tôt, avaient eu pourtant l'intuition volontariste, aussi bien chez les frères ennemis du FN et du PFN, d'une "droite nationale et populaire", voire au plan philosophique une "nouvelle droite", etc..."
La direction du FN des années 80 était assez proche des milieux disons "nationaux-catholiques" voire pour certains cadres de la mouvance royaliste. Le Pen qui lui n'a jamais été formé politiquement se réclamait de Thatcher et de Reagan. Le PFN lui, récusait tout passéisme et souhaitait un rapprochement avec la ND, même si et à juste titre et contrairement à cette dernière, il n'était nullement hostile à la religion catholique.
"Ce n'est qu'à partir de 1990, et sur la base d'un montage provocateur, pourtant assez grossièrement fabriqué à Carpentras par une officine liée aux renseignements généraux, qu'il est devenu constant, et obligatoire, d'ostraciser de façon définitive toute notion d'union des droites."
Exact. Mais on ne peut nier les propos provocateurs de Le Pen qui non seulement n'apportaient rien au FN et freinaient même son ascension, mais en plus interdisaient tout rapprochement. Mais tout cela était voulu par ce pitre qui n'a jamais voulu en fait d'une quelconque alliance ni avec la "droite classique", ni avec le PFN; cela l'aurait obligé à partager la "direction des affaires".
Rédigé par : RR | mardi 07 juil 2020 à 14:28
Dans ce blog j'ai été pris à partie, parce que je suis un ami de la Chine. Je voudrais quand-même attirer l'attention des autres lecteurs sur le fait qu'il y a beaucoup plus de similitudes qu'on ne pense, entre le régime chinois et le régime français.
En Chine il existe une sorte de ministère appelé 'Frontline unification' en traduction anglaise: unification de la ligne de front. C'est un organisme officiel du parti communiste, dont la mission est de veiller à ce que toutes les tendances soient harmonisées en une seule "ligne de front" avec la direction du parti communiste. Même celles des partis non gouvernementaux, et il y en a plusieurs, qui ont une voix consultative et sont nettement plus écoutés (ce n'est pas difficile) que ne le sont en France les partis d'opposition.
Ainsi, on unifie la ligne de front, mais en tenant compte des remarques des autres partis - et on le fait sans pseudo démocratie, donc ça marche.
Bref il s'agit que tout le monde emboîte le pas à la ligne du parti qui est: "socialisme avec des caractéristiques chinoises dans la pensée Xi Jinping". En pratique, c'est plutôt du nationalisme, ou du national socialisme pour être plus précis.
Moyennant quoi, si on ne conteste pas ce principe - et on n'a pas intérêt - tout va bien et on peut vivre très heureux. En plus, c'est moins la pagaille qu'en France.
En France tout le monde doit marcher aligné couvert derrière la "République en marche". Il y a aussi un état profond que l'on pourrait aussi appeler "unification de la ligne de front". Et tout cela est maçonnique de bout en bout, le programme ayant été toujours le même depuis la Révolution.
Je ne sais pas ce qui vaut mieux. La méthode chinoise est plus rude et le style plus monolithique, mais à mon avis ça vaut presque mieux que l'infecte hypocrisie républicaine maçonnique française.
Rédigé par : Helveticus | mardi 07 juil 2020 à 15:27
Il faudrait lire ce livre des trois Juifs Deutsch Lindon et Weil sur les familles politiques de la France. Il est sûrement très intéressant.
Mais je recommande aussi un ouvrage beaucoup plus ancien: celui de Thibaudet sur Les idées politiques de la France.
On peut y lire qu'au temps de la IIIe république, personne n'osait se dire de droite. Les gens de droite se disaient "modérés" et on les appelait "petits pois mi-fins", comme dans l'épicerie où aucun épicier ne voudrait proposer des "gros pois pas fins".
C'est vrai que le vocabulaire a un peu changé depuis que Sarkozy a remis à la mode le mot droite, pour parler de la fausse droite, bien entendu.
On a apparemment inversé le faux-semblant de Thibaudet, mais ce sont toujours des petits pois mi-fins, puisque que l'on taxe de droite ce qui est en fait un centre gauche.
Ainsi, prophylactiquement on délimite le périmètre de la droite licite. N'est licite que la droite qui est en réalité de gauche.
Moyennant quoi, ce qui serait à la droite de cette droite de gauche là, donc disons ce qui serait en fait au centre ou au centre droit, pourra être qualifié de "droite de la droite", et ce qui serait à la droite du centre droite sera carrément désigné comme l'extrême droite horribile dictu.
La droite est honteuse en France, et infâmante, parce que c'est un pays qui est tenu par la franc-maçonnerie, et la franc-maçonnerie a un grand principe philosophique qui s'énonce: "pas d'ennemis à gauche". Ca ne date pas de 1990 ni de Carpentras.
Rédigé par : Helveticus | mardi 07 juil 2020 à 15:55
Depuis la victoire des radicaux socialistes en 1902
Oui tout commence là l'Affaire Dreyfuss et les Radsocs bousillent les deux principale forces de la de la nation d'abord le clergé avec la séparation de l'église et l'état avec la loi de 1905 aujourd'hui même la droit applaudi en disent le Christ dit bien donnez à César ce qu'est à César et à Dieu ce qu'est à Dieu, Bravo résultat faits un tour dans les églises le dimanche aujourd'hui .
L'armée tombe sous la politique et on regarde avec l'affaire des ficher pas celui qu'est compétant mais si il est Catho super pour démarrer un premier guerre mondial et même la suivante.
J'espère que la prochain président soit un homme issu de l'armée ou appuyé exemple De Villiers Philippe et on rentabiliserait en grand parti notre triparti armée - chef, clergé -tiers état .
Une société dirigé par exclusivement le Tiers état dit démocratie avec en plus la parité et bientôt en fonction couleur ou race ou ethnie on voit ce que ça a donné en Ruanda ou Irak comme écrivait Volkoff pourquoi je suis moyennement démocratique.
Vaste débat quelle démocratie et pour quelle peuple?
Rédigé par : wijngaards | dimanche 19 juil 2020 à 17:27