Les dirigeants politiques parisiens semblent avoir pris le parti de s'aligner, dans la crise actuelle, sur ce qu'ils présentent pour l'expertise médicale. On doit d'abord comprendre la peur panique qui commande cette attitude.
Tous craignent de se trouver débarqués comme le fut le malheureux professeur Mattéi, victime expiatoire au lendemain de la canicule d'août 2003, séquence pendant laquelle "Mattei était en vacances, son directeur de cabinet était en vacances, le directeur général de la Santé était en vacances". Dans une telle circonstance "c’est le directeur adjoint de la Santé qui avait donné [la] réponse dont on sait qu’elle coûta son siège de ministre à Jean-François Mattei." À savoir que "la Direction générale de la Santé l’avait rassuré, en lui disant que tout ça, c’étaient des bêtises"[1]
Jupiter a-t-il donc décidé de faire basculer le lieu du pouvoir des élus vers les experts ?
Un tel raccourci scandalise les intéressés eux-mêmes.
L'idéologie en effet ne perd pas ses droits.
Le successeur, au ministère de la Santé, de l'inodore et inconsistante Buzyn, marionnette de Big Pharma, représente en effet une couleur plus précise.
Celle-ci caractérise la Macronie et son prétendu nouveau monde. Olivier Véran, à la fois neurologue et homme politique, fut, en 2015, élu aux régionales sur la liste socialiste de l'Isère. On le retrouve en 2017, comme beaucoup de chevaux provenant de la même écurie, député macronien de Grenoble. En 2019, c'est sa compagne Coralie Dubost qui fit office de rapporteur de la loi dite bioéthique, tendant à permettre la fameuse PMA pour toutes.
Or, c'est en catastrophe, le 7 mars, que ce personnage au verbe un peu plus péremptoire que celui de pas mal de ses collègues a dressé la liste des 10 membres du comité d'experts qu'on appelle désormais conseil scientifique.
Il semble bien s'être exclusivement concerté avec Jean-François Delfraissy. Cet immunologue avait été bombardé en 2016, sous Hollande et Marisol Touraine, président du comité national d'éthique. Le nouveau ministre allait le nommer officiellement à la tête de la nouvelle instance le 11 mars. À noter que toutes les autres institutions qui régissaient jusqu'ici la santé, la médecine, les hôpitaux publics, la pharmacie, l'assurance maladie, etc. ont été priées de s'éclipser.
C'est cependant à la demande du chef nominal de l'État, que le spécialiste mondialement reconnu qu'est le professeur Raoult fut appelé en tant que 11e membre. Pièce rapportée, surnuméraire au sein de cet aréopage, ce cousin de province ne pouvait qu'incommoder la consanguinité parisienne. Au bout de deux heures, il fut amené à claquer la porte, recraché hors de l'entre-soi, tel un caillou dans l'omelette.
Peut-être ont-ils raison, ces experts : totalement incompétent dans leur domaine, votre chroniqueur se gardera bien de prendre position sous cet angle de questionnement.
Fallait-il cependant leur déléguer les pleins pouvoirs quant aux prises de décision ?
Jean-François Delfraissy lui-même s'est chargé de la réponse :"nous ne sommes,dit-il, que des experts, et nous n'avons pas de responsabilités politiques".[2]
Son point de vue n'est donc équilibré par la concomitance d'aucune instance de nature à éclairer les autres aspects de la situation, en dehors de l'immunologie.
Or, on doit observer que Jupiter, de son propre aveu, s'est cru obligé de calquer ses propres oukases, point par point, sur les avis médicaux et assimilés.
Sous l'emprise de la peur il n'a pas su, pas voulu paraître tenir compte des autres paramètres, ceux qu'un véritable politique doit pourtant savoir faire entrer en ligne de compte.
La mission prétendument de simple conseil de ce comité explique pourtant l'absence, en son sein, du moindre économiste, du plus insignifiant des juristes... Pas d'urgentiste, pas de pneumologue non plus... Certes il peut se targuer de la présence d'un spécialiste de la modélisation. Certes, depuis le XVIIe siècle, depuis Leibniz, on pose la mathématique comme langage propre à décrire les réalités physiques. Et, depuis le XIXe siècle, on a trop pris l'habitude de transposer cette hypothèse aux sciences sociales. La modélisation mathématique ne fait que traduire en équations les hypothèses qu'on lui a transmises, erreurs comprises. Sa présentation peut éclaircir les questions : elle ne résout aucun choix de fond.
Cette erreur dans la distribution des rôles caractérise, depuis des décennies ce que nous appelions, il y a un demi-siècle la technocratie. Ce terme péjoratif a perdu de sa vogue. Mais le phénomène qu'il désigne s'est considérablement aggravé, par la faute des politiques et la sottise des médias.
Que les courtisans se rassurent en effet : rien ne sera perdu pour les progrès de l'étatisme. L'État promet jour après jour de régler les problèmes d'intendance, il n'y parvient pas. Il appelle à faire la guerre, sans savoir faire livrer les armes et les munitions à ceux qui combattent. Incapable de répondre concrètement à la crise, encore moins de la prévoir, le pouvoir tentaculaire de la haute administration saura pourtant s'arroger le droit d'agrandir encore.
La peur incite nos dirigeants à se défausser de leurs responsabilités, mais non de leurs prébendes.
JG Malliarakis
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Apostilles
[1] cf. Le livre du Professeur Didier Raoult "Épidémies vrais dangers et fausses alertes", page 18, qui vient de paraître ed. Michel Lafon.
Cher JGM, vos commentaires sont lus en famille et soutiennent le moral. Cette dernière chronique est particulièrement éclairante sur la "défausse" généralisée des politiques sur les "experts". J'étais de manif rue de Varenne au siège du CNCE lorsque Delfraissy annonce qu'il ne suivra pas les résultats de la grande enquête sur la bioéthique, "faussés" par la mobilisation des conservateurs! Des irresponsables au pouvoir, calamité!
Rédigé par : Leveel Bernard | lundi 30 mar 2020 à 15:40
Vous pouvez dore et déjà vous emparez d'un autre sujet digne de la suffisance de ces dirigeants de pacotille, je voulais parler de la réduction des dividendes fortement souhaitée/contrainte par les ministres Le Maire, Pénicaud et Véran dont les qualifications économiques ne sont pas établies pour ce type de disposition et dont les effets seront à la hauteur comme de bien entendu. Mais qu’avons-nous fait au Bon Dieu pour avoir de telles nullités ?
Rédigé par : goufio | lundi 30 mar 2020 à 16:34
La Guerre,la Guerre...Mais comme il est d'usage depuis deux à trois siècles les gouvernements font semblant de la faire. la première: des vagues de pantalons rouges contre les mitrailleuses.la deuxième on accepte à regret de fabriquer des blindés mais pas de fabriquer les matériels du 2ème échelon.Crainte des politiciens que l'Armée motorisée prenne le pouvoir.
L'Indochine,une supercherie je crois qu'on livre des armes au deux camps.
L'Algérie:c'est la France on fait la guerre mais avec les règles du maintien de l'ordre.
Alors pourquoi croire que cela va changer avec la guerre contre le coronavirus!
Rédigé par : c.meisch | lundi 30 mar 2020 à 16:38
"Certes, depuis le XVIIe siècle, depuis Leibniz, on pose la mathématique comme langage propre à décrire les réalités physiques. Et, depuis le XIXe siècle, on a trop pris l'habitude de transposer cette hypothèse aux sciences sociales. La modélisation mathématique ne fait que traduire en équations les hypothèses qu'on lui a transmises, erreurs comprises. Sa présentation peut éclaircir les questions : elle ne résout aucun choix de fond."
Exact; tous les scientifiques dignes de ce nom le savent, et ce quelque soit leur spécialité respective.
"Jupiter a-t-il donc décidé de faire basculer le lieu du pouvoir des élus vers les experts ?
Un tel raccourci scandalise les intéressés eux-mêmes.
L'idéologie en effet ne perd pas ses droits.
Le successeur, au ministère de la Santé, de l'inodore et inconsistante Buzyn, marionnette de Big Pharma, représente en effet une couleur plus précise.
Celle-ci caractérise la Macronie et son prétendu nouveau monde."
M. Macron n'est qu'un affairiste cosmopolite au service du mondialisme dont la genèse a été retracée par Bordiot.
Idem pour une partie du "personnel politique" qui l'entoure, l'autre partie étant composée d'idéaliste tout autant cosmopolites. Son "opposition" ne vaut guère mieux.
Rédigé par : RR | lundi 30 mar 2020 à 18:26
Pour de faux dirigeants il convient de s'entourer de faux experts, rien que de plus normal et simple. Les experts se réfèrent à leur tour à des comités scientifiques et la boucle de l'irresponsabilité est bouclée. Mais sont ils intouchables devant la loi, tant les experts que les dirigeants ?
Le Conseil d'État semble donner déjà une réponse en déboutant les collectifs de médecins qui lui demandent d'annuler les restrictions gouvernementales à la libre prescription de traitements à base de chloroquine.
C'est une constante du C.E de ne pas juger les décisions des dirigeants politiques selon des principes pourtant constitutionnels comme la LIBERTÉ Individuelle. Elle devrait pourtant prévaloir devant cette instance.
Une autre attitude est celle des USA où le président avait déjà signé un décret du Droit À Essayer ( Right To Try bill ) permettant à chaque malade d'essayer un traitement non encore évalué par l'autorité administrative Food and Drug Administration, au nom de la Liberté Individuelle. En vertu de ce décret il a déclaré qu'il fallait essayer la chloroquine, et tout autre traitement non dangereux, malgré la résistance de l’expert médical au sein de la “ Task Force de la Maison-Blanche contre le virus “ le docteur Fauci.
Le principe de Liberté Individuelle si important aux Usa a ainsi permis aux personnes infectées d'être soignées immédiatement par la chloroquine et les laboratoires se sont lancées dans sa production massive, sans attendre l'accord de la FDA. Car c'est un sujet entre le malade et le médecin, hors l'État. ( Depuis la FDA a donné son accord s'agissant d'un médicament déjà existant, non dangereux, et efficace ).
Au nom de cette Liberté individuelle, Trump n'a également pas voulu décréter des mesures autoritaires de confinement, privatives du droit à se déplacer et à travailler. Il a justifié ainsi sa prise décision. ( D'ailleurs le gouverneur de New York vient de déclarer qu'il regrette de l'avoir prise, explications techniques à l'appui ).
Depuis longtemps cette république française nie la Liberté individuelle, notre chroniqueur préféré nous rappelle souvent toute son importance. Et je ne cite les Usa que pour souligner les différences entre nos systèmes politiques : le président Trump agit conformément aux institutions et ne s'abrite pas derrière ses experts ni la Cour suprême.
Non seulement nos gouvernants s'organisent pour ne pas prendre de responsabilités - je n'oublie pas le principe de précaution - mais " en même temps " ils détruisent le principe de Liberté. Alors qu'en l'appliquant ils pourraient de bonnes décisions ! Attitude stupide.
Souvenons nous avec quelle sauvagerie ils ont fait couler le sang de Français sur leurs gilets jaunes, et avec quel mépris ils ont traité le peuple, lors d'un nouveau refus de réfléchir ensemble, sur les retraites. C'était hier.
Ce sont des tyrans persuadés d'être intouchables.
Rédigé par : Dominique | lundi 30 mar 2020 à 20:17
J'ai consulté la liste des membres de ce Conseil Scientifique.
Il y a outre l'ancien président du Comité National d'Ethique qui déclarait " je ne sais pas ce qu'est le bien et le mal ", qui préside ce conseil scientifique du coronavirus :
Le modélisateur...
Une anthropologue ( source Le Figaro ) " le 18 février, elle a publié un article dans la revue scientifique britannique The Lancet, intitulée « Héroïsation et reproches en ligne en temps d'épidémie », sur les craintes, rumeurs et désinformations que suscite l'actuelle épidémie de coronavirus.
Un sociologue.
Plusieurs médecins, du Sida, de la grippe, et de maladies tropicales.
Je cherche en vain en quoi ces personnes sont des " scientifiques ".
Le pr. Raoult est le seul scientifique de haut niveau en exercice ( le caillou ne participe plus aux travaux, sans avoir démissionné ).
Vous nous apprenez que le pr. Raoult a été nommé à la demande du président de la république. Exit son candidat. C'est bien cela : la haute technocratie a la main. Toute la main. Ce comité sera chargé de dire la parole des technocrates.
Je mettai tous les torts sur nos médiocres dirigeants, et même si cela ne les absout pas, c'est encore pire. Une affaire de communication et de manipulation, comme le Comité national d'éthique.
Finalement la haute administration est diabolique ; il est impossible de la remplacer par de seules élections, et nous ne voyons que des comédiens incapables : président, ministres.
Il m'aura fallu ce détour pour comprendre la force de votre opinion sur l'étatisme.
Rédigé par : Dominique | mardi 31 mar 2020 à 01:11
Entretien très intéressant:
https://www.franceculture.fr/sciences/didier-sicard-il-est-urgent-denqueter-sur-lorigine-animale-de-lepidemie-de-covid-19
Rédigé par : RR | mardi 31 mar 2020 à 18:29
"Absence en son sein du moindre économiste" qui résoudrait avec son modèle mathématique "les choix de fond"...
Rédigé par : Dubitatif | jeudi 02 avr 2020 à 19:00