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Le livre de l'universitaire tunisienne Hela Ouardi[1], éclaire d'un jour nouveau la question des origines réelles historiques de l'islam. Consacré aux derniers jours de Muhammad et à la période 630-632 d'un gouvernement installé à Médine depuis 622, il nous instruit en effet sur la genèse de conflits plus que millénaires. La Communauté des croyants, l’Oumma, sans doute mondiale était fracturée selon des lignes de fracture durables, repérables dès le trépas supposé de son fondateur.
À la fin de son parcours le lecteur occidental, invité par l'auteur elle-même, s'interrogera sur une étrange contradiction.
Nous avons, ou nous croyons connaître, avec une exactitude assez stupéfiante à plus de quatorze siècles de distance, non seulement le jour précis, un lundi 8 juin 632 où Mahomet rendit l’âme. Nous sommes même impressionnés par les événements du jeudi[2] précédent, 4 juin, autour de son lit de mort quand ses successeurs, ses femmes et surtout sa 9e épouse, la jeune Aïcha, âgée alors de 19 ans et qui partageait son existence depuis 10 ans, ne purent, pour les uns, ne voulurent, pour les autres, recevoir ses dernières volontés.
Les quatre premiers califes, en effet, manifestent déjà des déchirements qui se répercutèrent au cours de leurs 4 règnes successifs : Abou Bakr as-Siddiq (632-634) puis Omar ibn al-Khattâb (634-644) puis Othmân ibn Affân (644-656) et, enfin, Ali ibn Abi Talib, cousin et gendre de Mahomet qui, à son tour, sera assassiné, en 661, comme l'avaient été ses deux prédécesseurs.
Les sources du VIIe siècle n'existent pas concernant la péninsule arabique. En revanche on sait que le roi franc Dagobert (603-639) et l'empereur grec Héraclius, régnant de 610 à 641, contemporains de la prédication mahométane, signent en 631 un traité d'alliance perpétuelle pour faire face à une menace venue de Syrie.
Or, il est également établi que Moawiya s'empara du pouvoir à Damas succédant, comme calife, aux quatre illustres rachidoun, éclairés. Il fonda la dynastie des omeyyades, et ses descendants gouvernèrent jusqu'en 750, avant de se réfugier en Espagne.
On peut regretter que l'historicité de tout cela se révèle inversement proportionnelle à la précision des détails. Les sources arabes reposent exclusivement sur ce que l'on appelle la Tradition, autrement dit les fameux hadiths et la Sira. Cette biographie controversée[3] est supposée retracer les faits et gestes mais aussi les idées d'un homme, qui se disait l'Envoyé, rasoul, le Messager de Dieu. Les chrétiens et les juifs ne sauraient l'assimiler à ceux qu'ils nomment un prophète, nabi.
En 1964, le roi du Maroc soutint l'édition en français de l'une des plus éminentes autorités en matière de hadiths, el-Bokhari (810-870). Son recueil[4] est considéré comme l'une des sources principales de la Tradition. Il aurait examiné plus de 200 000 récits, n'en retenant pour fiables que 7 000. Sur ce dernier contingent le pourcentage des faits attestés semble devoir subir, à son tour, une réfaction du même ordre. Ainsi, le commandement terrible : "celui qui change de religion tue-le", peut être dénoncé comme totalement incompatible avec la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1949[5]. Il fait cependant jurisprudence dans les 57 pays membres de la Conférence islamique. Or, sa chaîne de transmission (sanad) apparaît comme fort fragile.
Au total, par conséquent, si ces récits nous enseignent beaucoup de choses sur les conflits internes au monde mahométan leur vérité, ne devrait pas être prise au pied de la lettre par les historiens. Pas au-delà de la créance que nous accordons aux mythes de l'Antiquité païenne. Par exemple, la virginité supposée d'Athena confrontée aux assiduités de Poséidon, auxquelles elle résiste, nous éclaire sur l'histoire de la cité terrienne d'Athènes. Celle-ci, dans les faits, ne deviendra résolument une puissance maritime qu'avec la construction du Pirée et l'édification des Longs Murs par Thémistocle (524-459) fils de Néoclès. Mais on ne confondra pas sur ce point l'histoire et la mémoire.
L'islam des origines n'échappe pas à de telles réserves.
JG Malliarakis
Apostilles
[1] Hela Ouardi Les Derniers Jours de Muhammad éd. Albin Michel, Ed. Poche nov.2017, 368 pages.
[2] cf. chapitre XII La Calamité du jeudi, le testament non écrit pp. 130-146 op.cit.
[3] En page 332 note 90, notre auteur souligne que : "le souci des rédacteurs de la Sîra semble moins l'exactitude chronologique que la création d'une hagiographie basée sur des considérations symboliques".
[4] cf. El Bokhari "L'Authentique tradition musulmane" traduit par GH Bousquet, éd. Fasquelle 1964, 348 pages.
[5] Que seule l'Arabie saoudite refuse de reconnaître.
En nous présentant le livre d' H Ouari, vous vous lancez ce que j'interprète comme un message d'espoir : Cela prendra un certain temps et les hadiths violents tomberont. La charia avec ?
Donc c'est toute la Tradition basée sur des considérations symboliques, et non des vérités avérées comme dans la Bible, qui à la fin s'effondrera ?
En réduisant les vrais hadiths à portion congrue, et évoquant leur RELATIVITE HISTORIQUE : vous concluez en effet qu'il ne faut pas les prendre les hadiths à la lettre. Ainsi le commandement " celui qui change de religion : tue le " tombera un jour puisque 56 sur 57 des pays membre de la
Oumma ont signé la Déclaration Universelle des Droits de l'homme. Estimez vous donc que de ce fait l'islam est réformable, comme on l'entend parfois ?
Alors que le pape Benoît 16 dans son discours de Ratisbonne a évoqué la violence consubstantielle à l'Islam ... selon un ancien dialogue byzantin. Et que M T Urvoy arrive à la conclusion que le dialogue avec l'Islam n'est pas possible. Ces deux points n'étant pas incompatibles avec votre message d'espoir à mon avis, (au delà des guerres et des attentats contre lesquels nous devons combattre). La Tradition s'effondrera, et quant au Livre nous savons ce qu'il en est (1)
Logiquement, l'intelligence humaine tournera les musulmans vers le Christianisme - c'est à dire l'Amour et la Vérité. Cela c'est moi qui le dit.
( Et à condition que l'Occident chrétien n'instrumentalise pas le terrorisme islamiste pour déclencher des guerres nouvelles. Il faudra que le complexe militaro-industriel US se trouve un nouvel ennemi. On sait que Ben Laden fut instrumentalisę par la CIA. Je n'ai pas dit qu'il ne faut pas réduire
les islamistes actuels et futurs).
* * *
( 1 ) dans sa thèse soutenue auprès de la chaire d'islamologie de Mme M T Urvoy, M. J P Kaufmann a démontré que le Coran a été construit à partir de la Bible :
Comme si des versets de la Bible avaient été découpés, mélangés dans un chapeau, puis recollés dans un nouveau livre. J P Kaufmann a sollicité l'aide de mathématiciens pour démontrer que la " signature " des textes est restée la même. Cette thèse est stupéfiante puisque c'est un fait avéré désormais scientifiquement : le Coran n'a pas été dicté par un Archange à un terrien, en une seule fois !
Par ailleurs la confection de ce livre dura plusieurs siècles : certains ont écrit qu'il fut réalisé par une secte juive pour faire obstacle au développement du
Christianisme :
Le Coran connait Abraham, ... , Marie, et Jésus mais en tant que prophète et non Dieu qui s'est fait Homme. Il nie l'existence du Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai Homme. Il nie le Saint Esprit. Il nie les miracles et les saints.
J'en étais là : le Coran est une version édulcorée et ... inachevée de la Bible qui ne reconnaît pas Celui qui est Venu pour Accomplir les Prophètes. Votre Bulletin est pour moi comme un immense message d'espoir, selon ce que j'ai compris de vos propos. Mais ai je bien compris ?
Rédigé par : Dominique | lundi 07 jan 2019 à 23:53
Deux points très différents :
1)Les « imperfections » de la chronologie et des récits la naissance de l'islam sont maintenant bien connus, y compris chez certains musulmans, mais malheureusement seulement dans la frange érudite (tout comme de nombreux chrétiens sont conscient des imperfections historiques de certains passages de la Bible). Le problème est de faire passer cette connaissance relativement scientifique et consensuelle (dans ce milieu restreint) à la masse des croyants, cela à une époque où les chaînes de télévision wahhabites matraquent les banlieusards de Casablanca à Bagdad en passant par Paris !
On retombe notamment sur l'éducation des imams, dont la plupart sont très loin de ces connaissances, ainsi que sur les programmes scolaires en France bien sûr, mais surtout dans les pays musulmans
2) le commentaire de Dominique ci-dessus tombe dans le même défaut que celui reproché à l'histoire des débuts de l'islam, à savoir que la Bible est une « vérité avérée » ! Je parle bien sûr des descriptions historiques de la Bible et non de son message spirituel.
Petite réponse
Je vois que le débat ne fait que commencer.
Rédigé par : Yves Montenay | mercredi 09 jan 2019 à 10:08