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Dans un entretien, publié le 1er novembre par Ouest France, le chef de l'État a cru pouvoir exhiber ce qui lui tient lieu de culture historique. Et il n'a pas manqué l'occasion qui lui était offerte de déclarer : "Je suis frappé par la ressemblance entre le moment que nous vivons et celui de l'entre-deux-guerres".
Il ne suffit pas de convoquer le passé pour construire l'avenir. Encore faut-il ne pas laisser de côté l'essence même de l'Histoire, tissée de conquêtes.
D'un tel point de vue, toutes les périodes se ressemblent en ce sens que les États prédateurs s'emparent trop souvent, surtout par la force, parfois par la séduction hypnotique, de peuples proies. On pourrait donc, sans craindre, à ce stade, le ridicule, jouer à la comparaison de notre temps avec celui des fameux dictateurs de XXe siècle. Ils étaient issus de la décennie 1920, celle de Lénine, Mussolini, de Primo de Rivera, Kémal, Horthy, Salazar etc. plus encore que de sa suivante.
On ne saurait donc trop conseiller au jeune Macron, puisqu'il n'en finit pas de repasser un grand oral, la lecture d'un petit livre de Paul Valéry. Ce recueil a été publié, sous le titre de Regards sur le monde actuel, précisément à l'époque à laquelle notre faux-lettré prétend faire référence. Poète, l'auteur s'était senti fasciné en 1920 par "la mer toujours recommencée"[1]. Essayiste, il conviendra prosaïquement en 1931 que "l'histoire justifie ce que l'on veut, n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient des exemples de tout et donne des exemples de tout".
On sait que la loi de Mike Godwin conduit au point du même nom. Elle applique en effet le principe selon lequel "plus une discussion se développe, plus il est probable qu'elle aboutisse à évoquer Hitler." Apparu en 1979, le premier réseau de forum Usenet a ouvert la voie à ces mécanismes de discussion automatique des internautes. Depuis lors la toile a donné la parole à n'importe qui pour dire, de façon anonyme, n'importe quoi, sur une échelle qui relègue au rayon du bricolage l'invention de l'imprimerie par Gutenberg. Tout le monde se croyant désormais autorisé à donner son avis sur tout, et à dévier les débats, sans se voir rappeler à l'ordre, certains pourraient se résoudre à subir ce grave et significatif déclin de la raison.
À partir de 1990, cependant, certaines personnes sensées ont commencé à se reconnaître et à faire face au phénomène, en attribuant des points dits Godwin. Ceci intervient lorsque la fameuse loi se confirme au cours d'une discussion. Et bénéficie, dès lors, de cette attribution, celui qui vient de se discréditer en s'éloignant du sujet d'origine. Depuis les années 2000 s'est introduit, chez les meilleurs, l'usage bienséant de ne pas en rester au virtuel. On commence ainsi à donner un véritable mauvais point, matérialisé à la manière, inversée, des images pieuses que les enfants sages recevaient autrefois quand ils avaient bien appris leur catéchisme.
L'espoir qui inspire les déclarations présidentielles tendrait redresser une popularité plus que déclinante. Tel un habile joueur de bridge qui "squeeze" ses adversaires, c'est-à-dire qui les force à jouer contre leur intérêt, le chef actuel de l'État s'emploie donc à forcer le vote futur des électeurs. La manœuvre binaire se présente plus grossière encore que celle de 2017. "Moi ou le chaos" suggérait le fondateur de la cinquième république. S'adressant à un peuple qu'il pense effrayer, Jupiter Macronien leur dit aujourd'hui :"moi ou le croque-mitaine". Il conçoit ainsi son invocation historique comme lui conférant un sordide avantage stratégique. La rhétorique vise les méchants du film, ceux auxquels personne ne souhaite être identifié, les super méchants. Pas besoin, j'imagine, de vous faire un dessin pour savoir qui se cache derrière le masque du populiste Zorro.
Tel a toujours caractérisé le recours argumentaire que stigmatise l'attribution d'un point Godwyn.
JG Malliarakis
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Apostilles
[1] cf. Le cimetière marin. (…) La mer, la mer, toujours recommencée !/Ô récompense après une pensée / Qu’un long regard sur le calme des dieux !
Il y a au moins un point commun entre l’´époque actuelle et les années 30 : la nullité du personnel politique (je ne cite que Mitterrand).
Rédigé par : Emmanuel Trogneux | dimanche 04 nov 2018 à 14:49
Bonne et fine analyse. Si içelui regrette les années trente, il devrait y aller mais en Allemagne, ou en Russie, il aimera moins. Mais il me semble que certains "politiciens" (Mélenchon, Besancenot, et autres nostalgiques) s'identifient aussi un peu à cette époque? C'est pas si bête finalement de remarquer par exemple que les trotskos (artistes compris, Torreton, Tavernier, Arditi) et les stalinos se font encore la guerre ... la revanche du piolet disais-je un jour, ou soir, je ne sais plus vraiment.... la vodka sans doute.
Rédigé par : minvielle | dimanche 04 nov 2018 à 19:03
Il y a pourtant de nombreuses ressemblances avec les années trente. Macron n'est pas le premier à les relever. Elles sautent aux yeux.
Crise financière, chômage, menaces de régimes autoritaires impéralistes (mais la Russie et l'islam ont remplacé l'Allemagne -- quoique certains, au contraire, accusent cette dernière), résurgence du marxisme, anti-occidentalisme, anti-christianisme, anti-sémitisme, anti-libéralisme, fanatisme, désarroi et capitulation, collaboration avec l'ennemi...
Quant au point Godwin, j'aimerais de mon côté créer le point Robert, décerné à quiconque brandit le point Godwin pour mettre fin à un argument.
On va finir par croire qu'Hitler n'a pas existé, que tout cela n'était qu'un mauvais rêve, que le nazisme n'était qu'une fake news. Eh bien ! ce n'est pas le cas, et il est parfaitement légitime -- au hasard -- de voir des analogies entre le nazisme et le poutinisme, que de nombreux observateurs russes ont relevées.
Après tout, Vladimir Poutine a publiquement réhabilité le pacte soviéto-nazi à au moins deux reprises -- pour la première fois, à ma connaissance, depuis... eh bien, depuis que Hitler l'a déchiré en envahissant la Russie.
Et la Russie est bien ce pays où des internautes sont condamnés simplement pour avoir rappelé l'évidence, à savoir que la Seconde Guerre mondiale a commencé avec l'invasion de la Pologne par la Russie. Et avec la fraternisation des troupes soviétiques et nazies, une fois la jonction faite au milieu du pays rayé de la carte.
Rédigé par : Robert Marchenoir | dimanche 04 nov 2018 à 21:02
" The Europhobic forces will decide to change the EU from within instead of destroying it. "
https://www.ecfr.eu/article/commentary_european_election_2019_can_we_cry_wolf_one_more_time
Effectivement ils sont loin d'être des imbéciles. Ils ce sont les experts du think tank officiel de l'europe-de-bruxelles : Le COUNCIL OF FOREIGN RELATIONS DE L'EU.
L'article dresse un état des lieux très complet des forces Europhobes, en comparant les élections de 2014 et de 2019 à venir.
La fin est piquante et donne à réfléchir : si les forces Europhobes devaient être suffisamment fortes pour pouvoir changer la politique de Bruxelles, il faudrait se poser la question de la responsabilité de ceux-qui-les-ont-laissé-entrer (dans l'UE). Au second degré cela signifie qu'il faudra les en faire partir !
C''est pourquoi ZORRO-jupiter évoque un risque de guerre.
La situation serait plus que tendue avec - par exemple l'Italie - si le gvt italien reste sur un budget avec 2,4 pour 100 de déficit, refusé par Bruxelles. Étant entendu que ce refus n'est pas économique (la France annonce 2,8) mais politique étant donné le refus de la politique migratoire de Bruxelles par Rome. Ce prendrait du temps mais l'Italie pourrait à la fin être exclue de l'UE, et de ce fait sortie de l'euro.
Pourquoi Zorro tonne t il si fort contre les Europhobes ? D'une part parce que c'est dans la feuille de route qui lui a été remise par le CFR de l'UE et d'autre part pare que la seule chance qu'à la France d'être aidée, lorsque nous irons vers le défaut de peiement, est de s'accrocher à l'UE de Bruxelles. Il ira jusqu'à partager notre siège à L'ONU et notre arme nucléaire avec l'Allemagne. ( Je m'aperçois que je parle au futur, comme auparavant Geneviève Tabout pour ceux qui l'ont connu sur les ondes de la radio.MDR )
Zorro-jupiter se voudra plus Bruxellois que le président de la Commission. Il oublie que nous sommes devenu un pays du SUD et que ceux qui commandent sont les pays du NORD.
Rédigé par : Dominique | lundi 05 nov 2018 à 00:43
@ Dominique
C'est très bien, le Councile of forenne reulacheunzes. Qu'est-ce que vous avez contre le Councile of forenne reulacheunzes ? C'est le Hitler de l'extrême-droite, une autre forme de point Godwin ? C'est synonyme de Juifs ? C'est quoi, votre problème ?
Rédigé par : Robert Marchenoir | lundi 05 nov 2018 à 06:56
@Dominique
Devenue "un pays du SUD" la France est désormais considérée comme la "Reine des Gitans".
Mark Rutte ne l'a pas envoyé dire quand notre fringant président déroulait à Bruxelles les conditions de la solidarité européenne. En français on pouvait traduire par: "Ta gueule, réforme chez toi !"
Rédigé par : Catoneo | lundi 05 nov 2018 à 10:01