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On vient d'apprendre que le chef de l'État accepte la démission du ministre de l'Intérieur. Ceci ne fait que confirmer l'affaiblissement et l'effritement du pouvoir. Or, les rejets dans l'opinion d'une image présidentielle française dégradée ne peuvent que se retrouver dans les urnes des élections européennes à venir.
On se permettra ici d'en anticiper les conséquences. L'influence de la France officielle, déjà singulièrement en recul depuis les précédentes présidences, mais aussi le prestige du pays lui-même, risquent ainsi de se retrouver encore plus abaissés.
Comment se présentent-elles, en effet, ces huitièmes élections européennes depuis le premier vote en 1979 au suffrage universel direct ? En France le système de répartition de 2014, par euro-circonscriptions complètement artificielles, ne sera pas conservé en 2019. Chaque formation conduira une seule liste nationale pour tout le territoire de l'Hexagone et de l'Outremer. Et le résultat brut du rapport de forces s'imposera.
Le scrutin doit se dérouler fin mai, soit après la date fatidique du Brexit, elle-même fixée à fin mars. Le Royaume-Uni, précision de la date mais imprécision des conditions, quittera l'Union européenne le 29 mars 2019 à 23 heures. Dans le court délai de deux mois séparant les deux événements les conséquences négatives que ne seront sans doute guère perçues par les électeurs.
On peut penser en revanche que la question migratoire et, parallèlement celles du terrorisme islamique et de l’insécurité urbaine influenceront les votes populaires dans un sens prévisible, ceci dans la majorité des pays restés au sein de l’Union européenne.
Si l'on excepte le groupe de Nigel Farage, qui disparaîtra du fait du Brexit, les adversaires les plus résolus de l'immigration et de l'islam resteront et, très probablement s'amplifieront. Classés à l'extrême droite, ils avaient obtenu en 2014 : pour le groupe ENL 7 % environ + 5% pour des petits partis qui ne l'ont pas rallié. Ces scores ne sauraient en rester là cette fois-ci.
Le RN par exemple, après sa déconvenue à la présidentielle de 2017 pourrait ainsi paradoxalement retrouver un score analogue à celui des européennes précédentes qui en avaient fait le premier groupe français. Mais, bien plus, le phénomène général du populisme plus ou moins nationaliste ne paraîtra plus cantonné à une poignée d’États-Membres et sera partagé par la majorité d’entre eux. On peut d'avance le créditer autour de 20 % des suffrages environ sur la base des plus récents résultats et sondages, lesquels évolueront encore bien évidemment dans les six mois qui nous séparent de l’échéance.
On sait aussi que, sur l'échiquier parlementaire, devrait se répercuter un mouvement de glissement pour les 75 ou 80 % d'autres électeurs. Essentiellement composé autour des conservateurs britanniques le groupe dit CRE, qui regroupe 71 élus et qui dispose du 3e contingent, avec 19 tories britanniques et un unioniste irlandais risque de se voir réduit au seul groupe significatif, celui du parti polonais Droit et justice, mais le groupe pourrait recevoir l'appoint du Fidesz hongrois, parti de Viktor Orban, actuellement affilié au PPE lequel renâcle.
Les mouvements telluriques profonds, – et surtout en gros l'effondrement des sociaux-démocrates constaté dans toute l'Europe –vont empêcher de reconduire, sous sa forme actuelle, la coalition socialo-centriste. Or, c'est l'alliance du PPE et du PSE, reflet de la große Koalition allemande, qui soutenait la commission Juncker. Ce dernier d'ailleurs a fait savoir en février 2017 qu'il ne sera pas candidat à sa propre succession.
Les élections de 2014 avaient donné la composition suivante, sur un total de 751 membres du Parlement européen : centre-droit PPE 219 ; sociaux-démocrates 189 ; conservateurs CRE 71 ; libéraux-centristes ADLE 68 ; verts 52 ; communistes GUE 51 ; eurosceptiques ELDD 44 ; nationalistes ENL 36 ; Non-inscrits sortants 20.
La majorité actuelle était ainsi composée des 219 PPE et des 189 sociaux-démocrates PSE soit 408 eurodéputés en tout. Elle avait investi Juncker, candidat proposé par la Conseil des États à la présidence de la Commission, et élu Martin Schulz à la présidence du parlement. Ce double choix de l'insignifiance convenait à l'Europe des États figée par les traités de Maastricht, Nice et Lisbonne. On ne le regrettera pas.
Plus problématiques demeureront les conséquences des griefs et des ressentiments, paradoxalement convergents, de l'Europe du sud appauvrie et de l'Europe du nord qui se considère comme une vache à lait. En France, s'agissant du parti macronien, et en supposant que son chef habite toujours au palais de l'Élysée et continue ses facéties, il ne reculera pas par rapport à 2014, puisqu'il n'existait pas il y a 5 ans. S'il franchit la barre des 5 %, ce que l'on peut encore concevoir, même dans la pire hypothèse, ils disposeront d'au moins 3 ou 4 députés soit une progression que Castaner nous présentera comme triomphale.
On pense ici à la définition attribuée à Drieu La Rochelle de l'intellectuel de gauche : "un homme qui lorsqu'il reçoit un coup de pied au cul, sait intelligemment démontrer que son cul est plus fort que ton pied".
JG Malliarakis
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