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Nous apprenons ces jours-ci que notre jeune président, choisi au premier tour de 2017 par 2 Français sur 10, ne dispose plus en 2018 que de l'agrément de 3 sur 10. Cet affaissement surprend bien des gens. Il obéit pourtant aux lois de la logique.
Les jeux du cirque auraient dû nous satisfaire. renforçant les rangs de quelques Gaulois demeurés là par hasard, les fils de notre ancien empire colonial, avaient réussi le 15 juillet, pour la plus grande joie des foules chauvines et jacobines à vaincre les anciens sujets croates de la Transleithanie habsbourgeoise. Pouvait-on imaginer meilleure façon de ressusciter en temps de paix les affrontements sanglants du XXe siècle ?
Et puis patatras. Le coq n'aura guère chanté si longtemps que les images des frasques d'un obscur personnage sont venu gâcher la fête. Sorti tout droit des ergastules du parti socialiste, où il officiait au sein du service d'ordre, on le découvre monté en grade, en prospérités et en puissance au gré de la nouvelle Cour. Lieutenant-colonel à 26 ans ! Cette promotion napoléonienne ne pouvait qu'exciter la jalousie de nos égalitaires.
Revenons aujourd’hui sur cet épisode : il me semble avoir contribué à donner le coup de grâce à la prétention, affichée en 2017, de nous faire vivre dans un nouveau monde. Il ne s'agit pas de dire que d'autres dossiers n'auraient pas contribué à dissiper cette illusion. Il s'agit de se souvenir de l'adage romain : la femme de César ne doit même pas être soupçonnée.
Fallait-il vraiment tenir, dès lors, cette affaire Benalla pour un scandale d'État ? Non sans une pointe d'ironie salvatrice pour le journal Le Monde qui hébergeait son point de vue, celui d'un politologue de qualité, le professeur Philippe Raynaud nous assurait le 28 juillet du contraire[1] : à la bonne heure.
Reste que les affaires sont les affaires. On doit ainsi rendre grâce au refrain Benalla. Il a coupé court à la célébration nombriliste de cette victoire remportée, quelques jours plus tôt, ai-je besoin de vous l'apprendre, par l'équipe labellisée France du jeu de podosphère. La fête n'aura duré que quelques jours ce qui a permis de limiter, du moins officiellement[2] à 845 le nombre de voitures incendiées le soir même des festivités.
Et on doit, pour une fois, rendre hommage sur un point au quotidien Le Monde. Comme d'habitude ses collaborateurs court-circuitent les procédures judiciaires. Faisant fi du secret de Polichinelle, dit de l'instruction[3], ils obtiennent et extorquent, d'on ne sait qui, les déclarations qu'on refuse aux commissions parlementaires, de sorte que le 26 juillet on a pu lire dans un grand journal du soir[4], un long entretien présentant la version des faits du citoyen Benalla bien qu'ils soient visés par une enquête de justice.
Or, il se confirme une règle bien connue de ce genre de feuilleton. Dans ce qui était devenu, au début de l'été, une affaire, comme depuis celle qui se rattacha en 1785 au collier de la Reine en passant par le scandale de Panama, entre 1892 et 1895, la publication des fiches du Grand Orient en 1904, ou l’enlèvement d’un autre Marocain nommé Ben Barka en 1965, on pourrait multiplier les exemples, plusieurs débats s'imbriquent toujours dans la question centrale. Plusieurs mystères, plusieurs dossiers, plusieurs révélations ajoutent au scandale. Et elles en arrivent à éclipser le point de départ[5].
Il me semble que l'affaissement spectaculaire de la cote de popularité du pseudo Jupiter, doit donc beaucoup à cette ridicule affaire Benalla. Comme le souligna très vite sur RTL le président du Sénat, on ne peut plus parler de nouveau monde.
Alors peut-être pourra-on s’intéresser aux vraies questions qui devraient préoccuper les Français : à tout ce que l'on pressure aux collectivités locales ; à toutes les structures technocratiques, pour tous ces programmes sociaux dans lesquels d'après le maître des horloges, l'État gaspille un pognon de dingue ; aux folies énergétiques, écologiques, pédagogiques, etc. Les faux scandales peuvent être fabriqués pour servir de diversion[6], très utiles pour dissimuler au bon peuple les vrais scandales dont le pays crève. Ils peuvent servir aussi à réveiller l'opinion.
JG Malliarakis
Apostilles
[1] cf. Philippe Raynaud : "L’affaire Benalla n’est pas une affaire d’Etat"
[2] l'administration ne diffusant auprès du grand public que le nombre des départs de feux
[3] cf. article 11 du Code de procédure pénale : Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.
Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
[4] ainsi le désigne-t-on comme pour feindre de ne pas lui faire de publicité,
[5] Si l’on accepte de revisiter ce que Georges Sorel appelle "révolution dreyfusienne", la personne du capitaine et l’accusation précise portée contre lui à la suite des découvertes de Madame Bastian, femme de ménage patriote fouillant dans les corbeilles de papier de l’attaché militaire allemand, deviennent l’une comme l’autre infiniment dérisoires.
Ainsi, Maurras lui-même après avoir été si longtemps convaincu de la culpabilité de cet Alsacien supposé Boche, déclarera à la fin des fins, conclusion paradoxale de l'affaire : "s'il est innocent, il faut le faire maréchal de France", ce à quoi renonça la république, "et fusiller ses défenseurs", ce à quoi ils échappèrent. L'un de ses plus brillants disciples, le sculpteur et chef des camelots du Roy Maxime Réal del Sarte fut même confronté au centre d'un surprenant tour de passe-passe judiciaire. Un arrêt de la Cour de cassation en 1906 avait à la fois réformé les deux jugements condamnant Dreyfus, le premier datant de 1894, le second à Rennes en 1899 par le conseil de guerre et prétendu mettre fin à cette interminable affaire.
Or, en 1908, Réal del Sarte, à l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation, avait publiquement souligné qu'il s'agissait d'une forfaiture de l'institution gardienne du droit français puisque cette cassation n'avait pas été assortie d'un renvoi à un troisième tribunal compétent. Cet outrage à magistrats ne lui valut aucune condamnation... les autorités de la Troisième république avaient entériné l’idée qu’il ne fallait plus parler de cette affaire, quitte à ce que ne soit jamais condamné celui, – on a dit : Esterhazy, – qui avait livré aux Prussiens les plans secrets du canon de 75. L’imbrication des affaires avait produit un imbroglio inextricable.
[6] Beau de Loménie parlait de dérivatifs.
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Je ne suis pas absolument d'accord ! A mon avis cette affaire est bel et bien une affaire d'état, en ce sens qu'elle met en cause le fonctionnement même des mécanismes de nomination. J'ai d'ailleurs adressé à M. Philippe Bas , président de la commission d'enquête du sénat le courriel suivant :
Le plus choquant dans cette affaire Benalla, que le gouvernement et le Président tentent de ramener à l’anecdote, est à mon avis le suivant :
comment dans un pays réputé démocratique et doté d’un système politique et administratif sérieux et complet, le « fait du prince » peut il aboutir à la promotion, dans des proportions invraisemblables (passons sur les avantages matériels, mais lieutenant colonel, ayant apparemment reçu mission de concevoir et mettre en place un dispositif de protection nouveau et « indépendant » de l’existant de la présidence !), d’un individu n’ayant aucune qualification particulière justifiant une telle situation ? Mais, plus choquante encore à mon sens, est la servilité dont ont fait preuve plusieurs hauts responsables en acceptant sans broncher que le dit personnage se soit vu propulser à des responsabilités et des fonctions sans commune mesure avec ses capacités, sans aucun diplôme, résultat de concours ou je ne sais quoi encore, susceptible de justifier sa position, sinon parce qu’il avait – on se demande encore comment et pourquoi – « tapé dans l’œil » du Président. On peut en outre s’interroger sur la légitimité de la demande présidentielle en vue d’une réorganisation de son service de protection, et aussi sur l’éventuelle présence, dans d’autres instances, d’individus « sélectionnés » de la même façon.
Ce sont à mon avis les vrais problèmes, le reste, coups ou pas donnés à des manifestants, etc., est anecdotique. Et il m’apparaît indispensable que le Président soit appelé à rendre des comptes sur cette dérive inadmissible du rôle que lui ont confié les Français. Il en est de même pour ceux qui l’ont couverte sinon approuvée.
Que ne nous rapportent pas les historiens et autres commentateurs, à propos des favoris (ou favorites) de nos Rois ? Et pourtant, pour nombre d’entre eux, le choix s’est révélé plutôt judicieux !
Dans le cas présent, il n‘en est vraiment rien.
Petite réponse
Merci de votre intéressant commentaire : vous n'êtes pas d'accord, en l'occurence, avec Philippe Raynaud. Je le présente comme politologue pas comme père de l'Église. Je ne suis pas certain que le concept d'affaire d'État soit de nature à ouvrir une polémique. Le fait me paraît clair en revanche que les Français ont très mal perçu cette affaire et, sans être certain que cette [grosse] goutte d'eau ait fait déborder le vaste à elle seule [c'est le propre des gouttes d'eau de ne pas être seules], ma chronique va plutôt dans votre sens.
Rédigé par : Daniel Brun | vendredi 07 sep 2018 à 13:08
@Daniel Brun
Merci de votre intéressant commentaire : vous n'êtes pas d'accord, en l'occurence, avec Philippe Raynaud. Je le présente comme politologue pas comme père de l'Église. Je ne suis pas certain que la définition du concept "d'affaire d'État" soit de nature à ouvrir une polémique. Le fait me paraît clair en revanche que les Français ont très mal perçu cette affaire et, sans être certain que cette [grosse] goutte d'eau ait fait déborder le vaste à elle seule [c'est le propre des gouttes d'eau de ne pas être seules], ma chronique va plutôt dans votre sens.
Rédigé par : JG Malliarakis | vendredi 07 sep 2018 à 14:46
Qu'est-ce qui est le plus scandaleux ? Qu'est-ce qui agite les gazettes, mais aussi les Français ? Benalla ? et on pourrait ajouter : Françoise Nyssen, Agnès Saal et d'autres ? Ou ceci :
http://etudiant.lefigaro.fr/article/sur-parcoursup-des-etudiants-ont-ete-acceptes-dans-des-formations-qui-n-existent-pas_1a91b0a4-b1b8-11e8-9c2e-8cd135438702/
A mon avis, c'est ce dernier dysfonctionnement qui est le plus grave, et de loin.
Or, autant les Français sont d'accord pour couvrir d'ordure les "scandaleux" du jour que les médias leur désignent, autant ils sont singulièrement tolérants envers l'omniprésence de la fonction publique, qui produit cette seconde catégorie de maux, mais qui procure aussi de nombreux privilèges aux petits et sans-grade.
Rédigé par : Robert Marchenoir | vendredi 07 sep 2018 à 16:07
La France ne compte plus sur l'échiquier mondial. Tant qu'elle conserve des places dans les grandes institutions internationales, elle fait illusion. Mais viendra inéluctablement un jour où notre pays sera éjecté : sans armée, sans industrie et tertiaire associé, sans agriculture capable de nourrir ses habitants, sans spiritualité chrétienne suffisamment vivante. Avec près de 10 millions de chômeurs réels, un
système éducatif à la ramasse, des déficits et des endettement énormes nous rejoindrons les pays du tiers monde - d'ailleurs notre population tend à devenir celle de ces pays.
Aucune chance aujourd'hui de redresser la barre, avec un président qui n'a d'autre mission que d'accélérer la Globalization, et
court les gouvernements européens pour faire obstacle au résistances dites populistes. Macron chef de campagne pour les élections européennes ou président des Français
De ces faits est il un faux président de la République Française puisqu'il n'agit pas pour nous ? Ou un vrai usurpateur depuis le début ?
Rédigé par : dominique | vendredi 07 sep 2018 à 22:26
Apparemment Monsieur Brun est trop jeune pour avoir connu la Vè République gaulliste, sa milice et ses "services".
Les dérives actuelles sont un héritage de cette époque. Il ne faut pas pour autant différer leur condamnation. C'est ce à quoi s'emploie le Sénat, mais bien seul !
Rédigé par : Catoneo | dimanche 09 sep 2018 à 12:18
Malgré une propagande sans faille, soutenu par tous les médias, E. Macron a vite été rattrapé par les réalités.Le déclin et la décadence de la France commencés depuis 40 ans ne peuvent plus être masqués.Tous les artifices utilisés pour tromper l'opinion ne suffisent plus et désormais le roi est nu. La haute fonction publique qui tient le pouvoir nous a mené dans cette impasse.Dans quelque domaine que nous étudions, nous constatons une régression continue depuis des années.Le système scolaire, universitaire, de santé, la sécurité, l'endettement, les déficits, la bureaucratie, le taux des prélèvements,tout cela s'est dégradé pour avoir un chômage de masse important, un niveau de pauvreté en augmentation. Ajoutons l'immigration de masse qui fait que la France est en voie d’africanisation.Qui peut croire que Macron puisse relever ces défis. Personne. Mais qui peut le faire? Car hélas nous n'avons pas un D. Trump pour renverser la table.
Rédigé par : Liberte5 | dimanche 09 sep 2018 à 19:14