Il existe évidemment deux thèses très différentes à propos du resultat de l'élection présidentielle.
Pour les uns, M. Macron a été triomphalement plébiscité par 66,6 % des Français, séduits par sa jeunesse, par sa nouveauté, par son élan réformateur. C'est probablement ce que voudraient croire certains opérateurs à la hausse sur les marchés financiers.
Vu de Shanghaï ou de Doha on peut en effet, d'ailleurs, se représenter ainsi la situation de la France.
L'autre thèse extrême, à l'inverse, se fonde d'abord sur les résultats chiffrés les plus officiels.
Ceux-ci sonnent d'une manière légèrement différente quand on les observe dans le détail. Le 23 avril, certes, au soir du premier tour, le candidat Macron arrivait en tête. Mais il ne recueillait sur son nom que le quart des suffrages exprimés.
Pour le second tour, sa victoire, ou plutôt la déroute de sa très incompétente rivale, se peut observer à partir de nombreux autres clignotants chiffrés. Outre les 10,6 millions d'abstentions, 25 % des inscrits, 3 millions de votes blancs, un million de votes nuls, contre 950 000 blancs et nuls du premier tour : cela veut bien dire qu'au-delà du prétendu choix rhétorique entre "diabolisation" et "dédiabolisation", étiquetage usé jusqu'à la corde, il reste une très forte réserve pour l'opposition nouvelle, celle qui a commencé le 8 mai au matin.
Ceci sanctionne notamment l'erreur stratégie majeure de son adversaire et de ses conseillers. Ces immatures et arrogants petits oligarques, se prétendant les aruspices d'un "peuple" dont ils osent interpréter les entrailles, sans en avoir jamais partagé la vie professionnelle ou familiale, avaient voulu à tout prix transformer le second tour en un choix binaire à la mesure de leur sectarisme.
À les entendre, il fallait se prononcer pour ou contre l'Europe, – identifiée à ses institutions, celles de l'union européenne, – et à sa monnaie, l'Euro. Les Français dans ce qui leur reste de bon sens, de vision de l'avenir et de connaissance du grand passé de leurs ancêtres francs, burgondes ou gallo-romains ont répondu en corrigeant le tir de 2005 : oui, ceux qui ont voté pour l'Europe, pour ce que représente le programme Erasmus, pour l'entente franco-allemande – appelons les choses par leur nom – ont été deux fois plus nombreux que ceux qui se sont laissés prendre aux vieilles lamentations soi-disant "patriotes", "résistantes", "souverainistes", etc. Toutes les études sérieuses démontraient qu'à froid nos compatriotes rejettent ce refrain hideux dans une proportion située entre 65 et 70 %, et ce jour-là on ne s'étonnera donc pas d'un taux de 66 %.
Ayant moi-même déposé dans l'urne du 7 mai un bulletin identique à celui du 23 avril, et comptabilisé comme "nul" par les scrutateurs, je ne cherche pas à chanter victoire. Je n'y vois pas nécessairement la revanche de Robert Brasillach et de Drieu La Rochelle. Je constate.
Dans Figarovox Ivan Rioufol qualifie "l'élection de Macron", de "farce démocratique". (1)⇓ Sans chercher à contredire ici ce chroniqueur de qualité, sans mobiliser Platon et Aristote, n'y a-t-il pas au moins une petite part de pléonasme dans l'expression "farce démocratique" ?
Les conséquences en ont commencé à s'observer dès cette semaine. Tout le monde semble avoir perdu la tête dans tous les partis, y compris les deux partis vainqueurs, la République en marche et le Modem, qui se révèlent déjà cafouilleux s'agissant de présenter aux électeurs les heureux investis porteurs de leur casaque dans 450 circonscriptions législatives sur 577.
Certains y voient déjà le retour aux délices des IIIe et IVe républiques.
Reste pourtant en place ce que l'on considère, depuis la réforme de 1962, comme la clef de voûte de l'édifice du régime, l'élection du p. de la r. au suffrage universel. Mécanisme désormais désuet, cette forme perverse de l'électoralisme n'en constitue plus la sauvegarde, il risque bientôt d'en être considéré comme la tare.
JG Malliarakis
Apostilles
- Le Figaro édition du 12 mai. ⇑
L'UE n'en finit pas d'importer des envahisseurs en méditerranée.
Rédigé par : Dubitatif | vendredi 12 mai 2017 à 10:17
Si on s'adosse au fond du fauteuil pour prendre du recul, l'élection du "démon-Macron" se justifie déjà par tout ce qu'elle interdit, et apporte à l'imaginaire collectif, appelé peuple, l'impatience de la nouveauté. C'est beaucoup pour une opération de trucage comme une élection présidentielle.
Qui aurions-nous eu sinon ? ce n'est pas la bonne question. Que serait-il advenu si Nicolas Sarkozy était resté peinard au Cap Nègre ? Il n'y aurait pas eu des primaires à droite pour le sortir du jeu et le candidat naturel désigné par les enquêtes d'opinion, Alain Juppé, aurait fait jeu égal avec le candidat de la haute bourgeoisie socialiste. Le résultat aurait été serré comme dans une démocratie à la mode de Westminster.
Il est amusant de voir aujourd'hui le programme législatif de M. Baroin décalqué sur celui d'Alain Juppé avec quelques ajustements à la marge. Ils ont perdu beaucoup de temps avec le jouet "primaires".
Pour le reste, l'état-major du Front national a marqué sa déconnexion complète des réalités ; on peut en attendre le reflux en juin puisqu'il n'aura pas un seul candidat en face de lui mais une multitude. Son socle était à 20% avant démonstration de son impéritie. Il pourrait finir à 15% ou moins, avec une petite trentaine d'élus arrachés aux 45 circonscriptions où Marine Le Pen a battu Emmanuel Macron.
Rédigé par : Catoneo | vendredi 12 mai 2017 à 12:45
Oui, bien sûr, les chiffres... 66,6 de suffrages pour Macron, 666 soutiens pour Mélenchon, si j'ai bien le compas dans l'œil! Reste, cher Monsieur, un espoir, c'est que les députés deviennent des medias réels des électeurs et le portent à la chambre, deviennent justes et pragmatiques, à l'écoute. Le poisson pourrit par la tête, mais l'humus donne des arbres.
Rédigé par : minvielle | vendredi 12 mai 2017 à 12:58
Personnellement je suis écoeuré et confus. Je n'y vois plus très clair.
J'espérais, malgré tous ses défauts, l'élection de MLP pour mettre le bazar puisque de toute façon ce système est pourri et qu'il faut le bazarder. Si j'avais été français j'aurais voté MLP pour casser la baraque, en étant pleinement conscient de son incompétence. Mais ça ne peut pas être pire, alors, pourquoi pas elle?
Macron a un certain brio mais je lis son élection comme l'allégeance de la masse face au vrai pouvoir en place. De fait, la soi-disant démocratie c'est que le peuple sent où est le vrai pouvoir (ici les médias, la finance) et il manifeste rituellement, par le truchement du suffrage universel, son consentement à se soumettre à ce vrai pouvoir, qui est un pouvoir de fait. Et les gens accomplisse ce rite d'allégeance parce qu'ils n'ont pas la force, ni l'énergie, ni le courage, ni le goût de défier le désordre établi.
C'est ce qui s'est passé: Macron est adoubé par les Rothschild, par l'écrasant unanimisme des grands médias appartenant à la finance. Ce message a été lancé à l'opinion qui l'a décrypté 5 sur 5. Et les gens se sont dits: comme nous n'avons pas les couilles de faire la révolution pour nous libérer de cette oligarchie, prosternons nous devant le champion qui nous est proposé par nos maîtres.
C'est ainsi que, dans cette confusion écoeurante, je lis le résultat de cette élection.
Certains avaient espéré que la souffrance du peuple français soit telle que les gens, comme on se retourne dans son lit parce qu'on ne trouve pas le sommeil, élisent MLP pour que ça change. N'importe comment, mais que ça change. Mais les Français n'ont pas osé le changement. On leur a dit que ce serait 'renverser la table', on leur a fait peur, on les a intimidé, on leur a dit: "faites ce que vous voudrez mais votez Macron", et ils se le sont tenu pour dit.
Ils se sont soumis, car ils sont timorés.
Ce que nous dit Jean-Gilles Malliarakis qui semble extrêmement sceptique sur les chances de succès de ce mannequin, me semble bien vu. Le mécontentement va aller croissant. Il y aura des troubles sociaux, une pétaudière parlementaire. Le pays peut devenir ingouvernable.
Personnellement j'aimerais que dans tout ça un césariste intelligent, porteur d'un projet conservateur, (une sorte de 'Marion Maréchal nous voilà', ayant l'étoffe d'un homme d'état apparaisse et profite de tout cela pour saisir le pouvoir et remettre le pays sur les rails. Mais cela n'est pas possible, s'il n'y a pas vacance du pouvoir. D'ailleurs je ne vois pas de Bonaparte dans le personnel politique actuel, sauf, peut-être, ce petit Macon avec sa Joséphine rigolotte. (Elle est vraiment rigolotte cette petite femme là, toujours en minijupe à son âge! Très française.) Malheureusement ce qui me débecte chez Macron c'est qu'il est un Napoléon post-moderne, sans frontièriste, immigrationiste, métisseur, gay friendly et tout.
Donc je pense que la France va s'enfoncer encore un peu plus dans la décadence, avec des troubles sociaux, des violences, et si elle doit s'en sortir ce ne sera pas par des élections mais peut-être dans la douleur, à cause de l'anarchie causée par des émeutes incontrôlables, à la suite d'une guerre mondiale peut-être, avec occupation du territoire, désorganisation totale, perte de contrôle de l'état, exodes, ou à la suite d'un soulèvement populaire ou de tout celà en même temps.
Je doute beaucoup de la possibilité d'une issue modérée et raisonnable. Le pape Pie XII, dont j'ai cité une prophétie sur ce blog récemment, me parait avoir été très réaliste quand il disait: "...pour ne pas mourir, la France changera de régime sans douceur."
Rédigé par : Zwingli | vendredi 12 mai 2017 à 17:49