C'est le 16 octobre que s'est conclu, entre bureaucraties syndicales et patronales, un accord sur les retraites complémentaires. Signé par le MEDEF, la CFDT et ce qui reste de la CGC-CFE, il doit être entériné par un vote du 30 octobre. La décision prise consistera dès lors à allonger modestement d'un an, à compter de 2019, la durée des cotisations. Le système français de retraite par répartition s'achemine de la sorte vers un âge de départ de 63 ans en moyenne. Pour toucher une pension complète, celui qui avait ainsi prévu de partir à l’âge légal, c’est-à-dire 62 ans, devra par l'effet de cette nouvelle réformette attendre 63 ans.
Sauvera-t-on de la sorte le système des retraites dites par répartition : la réponse est non. Tout simplement parce que ce système, comme tous les héritages du Welfare State et des dispositifs mis en place par Roosevelt en 1935, copiés d'ailleurs par Mussolini, puis en France par la charte du travail de 1941, est totalement périmé, en déclin programmé.
Certains voudront peut-être voir dans ce jugement d'apparence péremptoire un préjugé dogmatique. C'est, bien au contraire, l'observation des faits qui y conduit.
Le mécontentement affiché par la CGT pourrait conduire à une relative indulgence à l'endroit de l'accord. Le négociateur de la centrale communiste, le camarade Éric Aubin, a en effet déclaré : "C'est un jour très triste pour les retraités actuels et futurs. Pour toucher une retraite pleine et entière il faudra travailler un an de plus." Ceci a servi de prétexte à Philippe Martinez, dont a décision de fond était déjà prise, pour ne pas se rendre à la conférence sociale du 19 octobre.
Et on éprouve le sentiment de devoir lui rétorquer qu'il s'agit très exactement de la logique dont il se réclame : la répartition. Quand il y a moins de richesses à répartir chacun se retrouve avec moins.
Plus profondément cependant il faut remarquer que la conception qu'on se fait à la CGT de la protection sociale continue d'influencer ce qui nous tient lieu de dialogue social. En effet, pour toute une école du syndicalisme, marquée par le marxisme, il revient au [très méchant] patron de payer. Le grand patronat institutionnel a d'ailleurs largement intériorisé ce raisonnement : il "abonde" ainsi, en déduction d'impôts, les œuvres sociales, les "mutuelles" complémentaires, les avantages d'entreprises, etc. Au départ cette attitude était présentée comme toute à l'honneur des industriels catholiques du Nord et de l'Est qui furent ainsi à l'origine de la politique familiale française, en instituant par exemple les compléments de salaires en faveur des pères de familles nombreuses, embryon des allocations familiales.
Hélas, au bout du processus, une lourdeur terrible s'est ankylosée dans le droit social de ce malheureux pays. D'autres expériences peuvent être mesurées comme celles de l'industrie automobile américaine, ruinée par les avantages créés il y a plus d'un demi-siècle et autrefois tant vantés.
Au lieu d'alléger ce fardeau, l'accord du 16 octobre s'est employé à l’alourdir, les entreprises étant supposées payer à 0,7 milliards supplémentaires pour en financer l'équilibre.
Broutille penseront certains : toutes branches confondues, en effet, pour l'année 2014 l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ont officiellement généré 472 milliards d'euros de dépenses. N'ayant encaissé "que" 463 milliards de recettes, ce système a aggravé le déficit public de 9 milliards. Pour l'année 2015 sont prévues des recettes de 467 milliards et des dépenses de 476 milliards. Qu'est-ce donc que ces 0,7 milliards supplémentaires, qui pèseront sur les entreprises ? Pfuiit...
Eh bien précisément c'est la caractéristique des dernières années. On n'ose plus réformer en profondeur, on sait qu'en théorie il n'est plus possible de créer de nouveaux prélèvements obligatoires trop visibles : on en croit par conséquent toutes les semaines, petits, invisibles, mais additionnés, ils contribuent, pas à pas, à une évolution vers de plus en plus de dépense publique, et par là même de stagnation générale de l'économie du pays.
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Detroit, en robotisant et en répondant à la demande en (sub)compacts, comme les Japonais, serait restée aussi généreuse avec ses ouvriers à la chaîne, ah non, en ligne.
La retraite par capitalisation amène la Veuve écossaise à exiger des résultats à 2 chiffres.
Petites corrections...
Petite réponse : 1. merci pour la vigilance typographique. Corrections faites
2. le choix n'est pas nécessairement ou plutôt pas seulement entre "répartition" et "capitalisation". La logique des "retraites par répartition" a fait son temps. Sur la base du libre choix, et en partenariat avec des syndicats responsables on peut imaginer autre chose que ce que vous appelez "la Veuve écossaise" laquelle n'obtiendra jamais durablement des "résultats à deux chiffres". L'épargne en vue de la vieillesse relève, comme la propriété, du droit naturel, telle est en tout cas ma conviction. Et puis : "entre les deux cents familles et le parti de Moscou, il y a du monde en France."
Rédigé par : Dubitatif | mardi 27 oct 2015 à 12:39
Pour avoir été employeur pendant de nombreuses années, je crois pouvoir dire qu'un des problèmes fondamentaux réside tout simplement dans la façon dont sont rédigées les feuilles de paye. En effet, pour une entreprise, la masse salariale est la somme de tous les frais correpondant aux salaires, charges sociales comprises; Pour le salarié, il y a les fameuses part salariale et part patronale, cette dernière étant revendiquée "conquise" par la CGT. En réalité, toutes ces cotisations appartiennent au salaire et sont donc prélevées sur le salaire de l'employé, mais celui-ci ne les voit pas. Il en résulte que le salarié ne connaît pas le montant de ce qui part de sa poche et va alimenter les caisse de retraite. S'il le connaissait, il serait en droit de se faire beaucoup, beaucoup de mauvais sang, et de demander que l'on change ce système stupide.
Rédigé par : Pierre Allemand | mardi 27 oct 2015 à 22:34
Je ne suis pas choqué par un résultat net après impôt à 2 chiffres :
Une retraite de 40.000 euros - montant réaliste pour un couple âgé qui ne serait pas propriétaire et qui devrait payer ses frais de santé courants (hors frais périodiques ou exceptionnels à couvrir par des assurances santé dignes de ce nom), viendrait d'un capital de 400.000 euros placé à 10 %, à la portée d'un ménage
Ce qui serait d'autant possible que ce ménage aurait travaillé 40 ans sans être ponctionné autant qu'actuellement par les charges sociales extraordinaires françaises.
Ramenons ces charges sociales aux niveaux raisonnables, avec une assurance santé pour les besoins non courants et une retraite de base :
actuellement pour un salaire net de A, les prélèvements sociaux "employés + salariés" s'élèvent à B, et B = A,
ainsi pour un salaire net de 2.000 (brut = 2.500), les cso sont de 2.000 alors qu'elles pourraient se situer vers au maximum 1.000
1.000 euros de moins par mois x 12 mois = 12.000 euros par employé, de trop confisqués chaque année (pour un salaire net de 2.000 euros par mois)
Cela fait 120 milliards d'euros par an ( sur une base par exemple de 10 millions de salariés, pour ne prendre qu'une partie des actifs). Ou encore : 1.200 milliards en 10 ans, soit la moitié de la dette accumulée par l'état !
Même si ces chiffres sont indicatifs, on devine que l'on peut assainir le poids des charges sociales, pour à la fois restaurer la profitabilité, et permettre aux ménages d'économiser ; un capital de 400.000 n'étant pas inaccessible au ménage ayant travaillé 40 années et qui en outre n'a pas dilapider ses héritages, même modestes.
Rédigé par : Hermès | mercredi 28 oct 2015 à 12:27
@JG Malliarakis,
Tout à fait d'accord :
"L'épargne en vue de la vieillesse relève, comme la propriété, du droit naturel."
La balle est partiellement dans la classe moyenne américaine.
Rédigé par : Dubitatif | mercredi 28 oct 2015 à 15:19