La crise d'Air France se confirme. Elle s'apprête à se durcir, peut-être à s'enliser. C'est pour beaucoup un vrai drame. Presque culturel. Autrefois, au terme d'un séjour un peu long à l'Étranger, monter dans un avion d'Air France c'était déjà comme retrouver le pays. Et puis cette compagnie s'est lentement banalisée, soumise à une concurrence à laquelle il faut bien s'adapter. Mieux que s'adapter : tirer son épingle du jeu. Ou mourir.
Telle est la réalité. On pourrait l'illustrer par des chiffres, ce serait presque dévaloriser le dossier. Quand il n'y a plus de foin au râtelier, dit le proverbe, les chevaux, ou les ânes se battent. Les diverses catégories de personnels, via leurs syndicats, reportent les unes contre les autres le prix de leur acharnement à ne rien céder.
Le paradoxe tient, non seulement à une offre potentielle de travail énorme et compétente, mais aussi à une flotte considérable, 344 avions dont 107 long-courriers à fin juin. Cette combinaison de capital et de travail, confrontée à une demande mondiale en hausse actuellement constante devrait permettre de bénéficier, précisément au groupe, à condition de procéder aux adaptations nécessaires. C'est précisément ce que les conservatismes syndicaux cherchent à empêcher, dans une optique qui ressemble beaucoup à la lutte des classes. Résultat : tout le monde, naviguant dans le même bateau, risque fort de couler ensemble. Seule subsistera, en partie du moins, une technostructure de dirigeants interchangeables, systématiquement recasés vers le haut, tant que notre système consanguin durera protégé par l'État.
Il est significatif et pas seulement symbolique que la nouvelle de cette crise ait éclaté au grand jour ce 30 septembre, au jour même où le pouvoir socialo-fiscaliste de MM. Hollande, Sapin et Eckert présentait leur budget.
Seul chiffre témoignant d'une sorte de petite réussite: celui des régularisations négociées par la cellule dite de "dégrisement" des contribuables qui ont rapatriés des avoirs détenus sur des comptes non déclarés à l'étranger : 5 milliards. S'il fallait dire bravo, par conséquent, il faudrait féliciter le gouvernement précédent, et plus en l'occurrence à Éric Woerth, qui avait mis en place cette procédure et certainement pas à l'équipe actuelle. En mai 2013, en effet, lorsqu'il devint ministre du Budget, Bernard Cazeneuve avait prétendu désormais "exclure toute amnistie fiscale pour les fraudeurs" et tout retour à un mécanisme ressemblant à la cellule de régularisation.
Sur tout le reste en revanche le projet de loi de finances confirme l'immobilisme profond dans lequel, en dépit des petites phrases de M. Macron et des grandes tirades, un peu soûlantes à la longue, de M. Valls, s'est enlisée depuis trois ans la république présidée par "Pépère".
La dette publique s'est encore aggravée en 2014, elle a dépassé 2 000 milliards, et cela sera pire encore fin 2015. La France est le seul pays surendetté qui ne prend aucune mesure de redressement, encouragé par les taux d'intérêt trop bas.
La politique de "Pépère" n'a engagé aucune politique véritable d'économies dans l'État, au contraire, une nouvelle vague de recrutements de fonctionnaires, etc. Et cela se double d'un transfert d'obligations vers des collectivités locales qu'on subventionnera par force de moins en moins.
L'irresponsabilité est aggravée par la diminution du nombre de Français qui, redevables de l'impôt dur le revenu, ont vaguement conscience du coût de la démagogie. La majorité des électeurs, en étant dispensés, reste persuadée de la formule "c'est pas cher c'est l'État qui paye", sans doute l'une des plus belles perles attribuée à François Hollande. Les "décodeurs" du Monde ont tenté de la désamorcer. (1)⇓ Peine perdue : on ne prête qu'aux riches, c'est le fond de sa pensée, et l'enregistrement existe encore. (2)⇓
Or c'est bien cet exemple qui se répercute dans l'attitude des syndicats de culture monopoliste et subventionnaire. Croient-ils encore que notre État pourra continuer de subventionner, renflouer, dorloter les anciennes "entreprises nationales"… Air France… la SNCF… sans parler de la SNCM… l'assurance-maladie… Les faiblesses de la classe politique sont autant d'encouragement à l'irresponsabilité des bureaucraties syndicales. Puisque l'ère des économies et de la concurrence ne s'est pas imposée au gouvernement et au parlement, certaine croient pouvoir s'en dispenser chez les anciens protégés de la subvention publique.
Il est temps de les rappeler au réel, tout atermoiement se révèle comme une faute contre le pays.
Apostilles
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Cette photo est l'occasion d'attirer l'attention sur l'extrême beauté du logo d'Air France sur la queue de ses avions.
Symbole d'un souci d'excellence révolu qui cache désormais bien des laideurs.
Rédigé par : Robert Marchenoir | jeudi 01 oct 2015 à 15:30
Bien evidemment que les hommes-de-l'etat continueront puisqu'ils ne savent faire que cela et sont [tres bien] payes pour cela.
Rédigé par : hermes | jeudi 01 oct 2015 à 18:09
Belle queue mais petite sonde.
Rédigé par : Homo-Orcus | vendredi 02 oct 2015 à 07:01
En ce moment, au mois d'octobre 2015 :
des vols Paris-)Athènes hebdomadaires à 45 euros, mais et très très peu de vols retour dans le mois jusqu'à 250 euros (!) avec Easy Jet ;
l'offre de Transavia la filiale bas-prix d'Air France est à 70 / 250 euros l'aller et idem au retour, pour des liaisons qui sont quotidiennes,
et l'offre d'Air France est à 160 euros l'aller retour (sauf quelques vols autour de 200 et plus) pour Air France, les vols étant quotidiens (quelque soit le remplissage ?)
Entre EasyJet et les deux compagnies d'Air France, ce n'est donc pas qu'une question de niveaux de prix : Easy Jet pourrait - à juste raison - se retirer du vol lorsque la fréquentation devient insuffisante (ou fait payer un prix fort sur ces vols peu fréquentés pour garder la ligne.)
Les modèles économiques sont certainement complètement différents : l'un collerait au marché, et l'autre assurerait une présence ? Le poids syndical se situe (peut être)là également : à savoir "du travail pour nous" tout au long de l'année ... avions remplis ou pas "on s'en fiche" ? MDR
Ajoutons à cela la parfaite gestion britannique, et hélas la culture de gestion syndicalico-étatique d'Air France ... je ne donne pas cher, à terme, de la compagnie administrative française. Elle s'écroulera un jour, comme d'ailleurs tout ce qui est encore soutenu par 6 à 8 MILLIARDS d'emprunts d'état contractés toutes les semaines.
Pour information Aegean la compagnie hellénique assure des vols quotidiens, et se situe très bien avec des prix (les plus bas) autour de 150 € AR efharisto !
Rédigé par : Hermes | lundi 05 oct 2015 à 11:56
Petite illustration : http://www.artprecium.com/images/photos/11/5604209f370bb.jpg
Rédigé par : Philippe Josselin | jeudi 15 oct 2015 à 18:34