L'un d'entre eux, et non des moindres, m'écrit par exemple (1)⇓:
" Cher Monsieur. Comme vous le savez déjà j'apprécie le travail de l'Insolent. Sur la question précise de Castorama et Leroy Merlin : Quelle est la vraie signification de la mesure du gouvernement ? Les deux étaient comme vous dites "condamnés a fermer le Dimanche. Pourquoi ? Elles n’avaient pas obtenu la permission spéciale que la loi stipule ? Seriez-vous par hasard en faveur d'une liberté générale pour tous les négoces d’ouvrir la porte les Dimanches ? Je crois vous connaître aussi comme un défenseur d'un équilibre entre les nécessités culturelles et cultuelles de nos sociétés, et la liberté du commerce. Peut-être vous pourriez y dédier une explication utile ? Cordialement Anton Smitsendonk".
Je précise donc mon affirmation : la bonne nouvelle me semble que les entreprises luttent contre la réglementation ubuesque votée par l'UMP en 2009. Le président actuel de ce parti déclare lui-même aujourd'hui : "On autorise l'ameublement, le jardinage, mais pas le bricolage ? Il faut voir comment on peut faire évoluer cette situation." (2)⇓ Certains, très optimistes, vont jusqu'à dire : "Les Français se rebellent. L'espoir renaît." (3)⇓.
Nécessités culturelles et cultuelles, me dit-on.
Je vais essayer d'aller au-delà du "culte" et de l'héritage culturel. En France, pour l'instant, la "tradition" se réduit à une loi de 1936, votée sous le front populaire, fixant l'obligation du repos dominical. Pourtant le travaillé est déjà pratiqué ce jour-là par un salarié sur 3, plus de 6 millions, et un salarié sur 2 dans le secteur du commerce, plus de 700 000. À observer d'ailleurs les catégories de personnes qui travaillent le dimanche, j'ai du mal à les considérer comme moins chrétiennes que les autres.
Car sur la question du repos dominical, en tant que chrétien-orthodoxe, je suis évidemment amené à recourir à l'Évangile :
Jésus fut interpellé par les Observants littéralistes de la Loi. Ceux-ci invoquaient ce que nous appelons le 4e commandement : "Pense au jour du Sabbat, pour le sanctifier" (4)⇓ et blâmaient notamment le fait de guérir ce jour-là un paralytique.
Or Il leur répond : "Le sabbat est fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat." (5)⇓. Le Seigneur ajoute d'ailleurs d'autres considérations non dépourvues d'humour à leur encontre.
Selon les époques, les métiers, les pays et les sociétés on peut apprécier différemment ce qui convient à l'homme.
Aujourd'hui, oui, dans le cas précis, je me prononce personnellement pour la liberté d'ouvrir ces magasins le dimanche ou en nocturne. La vraie condition me semble être celle d'un personnel explicitement volontaire et effectivement rémunéré en conséquence.
Dans une société chrétienne largement calviniste comme au Pays-de-Galles ou en Suisse quand j'étais jeune je conçois qu'on raisonne autrement. Les Anglais s'en moquaient, ils disaient que "rien n'ouvre le dimanche chez les Gallois, pas même les parachutes" : quant à moi, au contraire, je respecte évidemment le choix de ces protestants rigoureux, quand il s'agit d'une adhésion réelle de la société tout entière.
Le débat s'est récemment posé en Grèce. Dans ce pays 97 % des habitants sont orthodoxes et les églises sont pleines tous les dimanches (6)⇓, mais la Troïka a plus ou moins imposé la liberté de cette ouverture et un vote du parlement est intervenu ; cependant le débat continue.
Un excellent chroniqueur comme Panayotis Doumas y a très bien cerné la réponse aux objections.
Je la cite dans ma chronique retour de vacances "Jamais le dimanche" (7)⇓. J'ajouterai aujourd'hui à ses arguments d'autres observations : ainsi dans ce même pays, on avait loué et admiré Mgr Christodoulos (RIP) pour avoir institué dans sa cathédrale une deuxième messe, le dimanche, pour les jeunes ce qui est plus ou moins contraire aux canons de l'orthodoxie. Certes son audience était considérable : en fait, ce public allait "en boîte" le samedi soir.
Je crains fort que pour l'ardeur religieuse de la jeunesse ceci soit beaucoup plus néfaste que l'ouverture des magasins de bricolage le dimanche après-midi et celui des marchés d'alimentation le dimanche matin, sans parler des parfumeries en nocturne sur les Champs Élysées.
JG Malliarakis
Apostilles
- http://www.insolent.fr/2013/09/bravo-aux-entreprises-qui-luttent.html#comments ⇑
- https://twitter.com/jf_cope 7h49 le 1er Octobre 2013⇑
- http://www.contrepoints.org/?p=141000 ⇑
- Exode chapitre XX, verset 8, cf. traduction du rabbinat français ed. Colbo 1989 p. 100 ⇑
- Évangile selon saint Marc, chapitre II, verset 27⇑
- ce n'est pas le cas en France, dois-je le souligner ? ⇑
- le 9 septembre http://www.insolent.fr/2013/09/jamais-le-dimanche.html ⇑
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En bons latins, nous aimons rédiger des règles et des lois. Remplaçons les 29 pages du Code du Travail traitant du repos dominical par les quatre brefs articles cadrant ce repos en complétant la série par un cinquième comme suit : "Le travail dominical est payé double".
Et jetons tout le reste, la chose se réglera d'elle-même. Chiche.
Rédigé par : Catoneo | mardi 01 oct 2013 à 12:29
Il est quand même permis de douter que l'interdiction de travail le dimanche remplira les églises...
Petit réponse : j'en doute fortement en effet. JGM
Rédigé par : R. Hanlet | mardi 01 oct 2013 à 17:14
On n'empêche pas seulement par la contrainte juridique ou la taxe le travail.
Il existe environ 430 ateliers de reliure d'art en France. La plupart sont des entreprises d'une personne. Celui de Rambouillet va mettre la clé sous la porte, car avec deux enfants en bas âge, cet artisan n'a pas eu de salaire pendant un an, et ne peut plus faire face. Décidément, le "bourgeois" est l'homme à abattre.
Rédigé par : minvielle | mardi 01 oct 2013 à 22:36
Étant donné les prélèvements et obstacles sur le travail en France, (charges sociales exorbitantes, 35 heures, et autres contraintes légales et règlements), les grandes surfaces damment le pion aux moyens et petits commerces. Ceux ci ne pratiquant pas le libre service (ou bien pas à la même échelle), ils peuvent difficilement étaler leur offre jours et nuits. Ainsi le coût marginal de fonctionnement n'est pas prohibitif pour une grande surface qui ouvre le lundi et le dimanche ; et c'est alors jackpot lorsque la marge est élevée, comme sur les produits des marques et les produits manufacturés de grande consommation importés à très bas prix, souvent directement par la grande enseigne. Près de nous, les
Allemands ne connaissent pas ce phénomène qui a structuré notre secteur de la distribution : ils ont ainsi beaucoup de surfaces petites et moyennes dans les centres-ville, alors que nous avons de très grandes superfaces extra périphériques. C'est à mon avis le surcoût élevé du travail humain qui nous vaut en France le « succès » de cette forme distribution ... avec le moins possible de vendeurs et hors les villes !
L'ouverture le dimanche tuera donc encore plus le petit et moyen commerce ... qui, lui, se voit doublement privé de d'ouvrir le dimanche : par le coût du travail et par la loi. La liberté d'entreprendre et de travailler est une fois de plus bafouée. Il y a une rupture de la pseudo Égalité constitutionnelle. Au final les effets de tous ordres sont désastreux.
Rédigé par : Hermes | mercredi 02 oct 2013 à 10:33
Dostoïevski l'a bien dit :
"Si le Dimanche meurt, alors tout est permis".
Petite réponse
Cher Dubitatif, comme beaucoup de citations de Fiodor Mikhaïlovitch il faut savoir les situer dans leur contexte romanesque, sous peine de contre-sens grave.
Ce qu'il fait dire à ses héros [souvent négatifs] ne reflète pas nécessairement sa pensée qui, je me permets de le rappeler, a beaucoup évolué. Son testament politique est dans le roman "Les Démons" ["les Possédés"], où son personnage est celui de Chatov + probablement le Stavroguine de la fin. Ni l'un ni l'autre ne disent ce que vous dites. Quant aux Frères Karamazov, son testament spirituel, il faut se souvenir que les frères disent des choses radicalement différentes. Pour comprendre ce qui représente le point de vue de Dostoïevski il faut lire attentivement le Grand Inquisiteur qui exprime la différence entre le point de vue chrétiens-orthodoxe et celui de l'augustinisme ["la loi", "tu dois" = le chameau dans Zarathoustra].
Relisez éventuellement mon pauvre petit texte et vous en verrez un modeste reflet.
Cordialement à vous.
Amitiés à la Boîteuse
Rédigé par : Chatov | lundi 21 oct 2013 à 16:07
Si les magasins Leclerc ouvraient le dimanche, nous ferions globalement le même chiffre d’affaires mais sur sept jours au lieu de six… Soit un chiffre d’affaires inférieur si on le rapporte aux nombres de jours travaillés. Et ce d’autant plus qu’il faudrait ajouter : l’augmentation des charges - les salaires du dimanche payés double plus une journée de récupération - et la diminution de la productivité de nos magasins au mètre carré - le rapport entre le chiffre d’affaires et le nombre de mètres carrés du magasin étant à diviser par sept et non plus par six. Or, qui dit des charges plus élevées pour l’entreprise dit évidemment des répercussions sur les prix. Ainsi, s’ils l’ouvraient nos magasins le dimanche, c’est les consommateurs qui serait au final pénalisés !
Rédigé par : L'avis d'un praticien | mardi 19 nov 2013 à 11:10
Michel-Edouard Leclerc déclare à Famille Chrétienne : ouvrir le dimanche n'est pas rentable. Avec une démonstration.
Rédigé par : Un ami du Dimanche | mercredi 20 nov 2013 à 17:03
L'Allemagne exige dans sa Constitution le fermeture des magasins le Dimanche.
Rédigé par : Dubitatif | dimanche 24 nov 2013 à 11:22