Après un an, perdu pour les vraies réformes dont la France a besoin, gaspillé en loi Taubira et autres joyeusetés festives, le gouvernement se retrouve à pied d'œuvre et au pied du mur
Ce 29 mai le conseil des ministres fait semblant d'aborder le projet Cuvillier d'une soi-disant réunification de la "famille ferroviaire". Il faudra certes attendre le texte [provisoirement] définitif du projet pour se prononcer vraiment. Cependant, sa description, par Le Monde, nous semble en elle-même significative de la confusion prévisible de ce chantier. Lisons :
"Selon une source proche du dossier. Cette structure serait elle-même dotée d'un directoire composé des présidents de la SNCF, Guillaume Pepy, et de RFF, Jacques Rapoport, sans lien hiérarchique entre les deux. Elle disposerait d'un conseil de surveillance dont le président, nommé par l'État, jouerait le rôle de "juge de paix". Ce conseil serait composé de parlementaires, de salariés du secteur et de représentants des régions." (1)⇓
Qui fera quoi ? Qui décidera ? Qui payera ? Attendons encore.
Au lendemain de la conférence de presse présidentielle du 17 mai, M. Henrik Unterwelde livrait, de ce point de vue, une analyse fort significative de la situation. Voici en effet ce que le responsable de l’Institut franco-allemand de Ludwigsburg déclarait :
"En Allemagne, le décrochage économique de la France inquiète. On attendait une clarification de la part de François Hollande. Sa façon d’affirmer son autorité et de maintenir son cap me rassure, comme le fait, son refus de faire 'aucune défausse, ni pour le passé ni sur l’extérieur.'
Son engagement à poursuivre les réformes, à commencer par celle des retraites, est un bon signe. Il a eu des mots justes pour rappeler la responsabilité commune de la France et de l’Allemagne face aux défis européens, et la nécessité de trouver des compromis.
Son initiative européenne, surtout son appel à des emprunts européens, suscitera des critiques, mais constitue une base de discussion. Je forme un espoir : plus le président réussira à passer des réformes difficiles mais nécessaires pour revitaliser l’économie française, plus il maîtrise les dépenses publiques, plus l’Allemagne sera prête aux compromis européens.
Maintenant, après les paroles rassurantes, place aux actes !" (2)⇓
Place aux actes, donc, mais quels actes ?
Le mot européen apparaît quatre fois dans ces quelques lignes. Soulignons en l'occurrence qu'il s'agit là de la seule réaction étrangère parmi la vingtaine recensée par "Les Échos".
À cet égard, on doit envisager, sans les confondre, des concepts convergents : "rétablissement des comptes budgétaires de l'État", "diminution des dépenses publiques" et enfin "réformes structurelles".
Remarquons aussi que les problèmes de la France de 2013 différent largement de ceux de l'Allemagne dix ans plus tôt. Au moment où le chancelier Schröder manifesta le courage de mettre en place son fameux Agenda 2010, remettant largement en cause l'État-Providence, on commentait encore de ce côté-ci du Rhin, depuis 20 ans, les difficultés de la réunification, etc.
Les recommandations de réforme communiquées le 3 mai au gouvernement de Paris par la commission de Bruxelles laissent certes une latitude non négligeable quant aux voies de mise en œuvre.
Les déclarations non équivoques du président Barroso du
15 mai ont explicitement souligné, à l'intention de François Hollande, la
préoccupation des partenaires européens : nécessité de dispositions et de
décisions urgentes et "crédibles" dans les domaines indiqués :
- retraites, mais aussi
- libéralisation des marchés de biens et services et<
- droit du travail.
Le deuxième point va d'ailleurs s'impacter de façon très significative en vue des prochaines échéances électorales de 2014 : municipales de mars, puis européennes en mai.
On se demande dès lors combien de candidats et de listes
incorporeront positivement dans leurs plateformes programmatiques certaines propositions
concrètes allant dans le sens des réformes. Celles-ci devraient réaliser le
tour de force de se révéler à la fois :
- demandées par les instances communautaires
- tout en diminuant la pression fiscale et l'intervention
financière des collectivités locales
- et, au crible des idées de l'opposition, comme celles des
socialistes, il faudrait qu'elles paraissent profitables au bien-être des
Français.
On risque fort de ne trouver qu'un seul type de solutions : le développement d'une offre privée de services, concurrentielle et sans subventions.
Un problème, en France très différent des pays voisins, tient au millefeuille administratif. Loin de se voir simplifié il a d'ailleurs été aggravé par l'intercommunalité. En même temps, système entièrement pervers, l'État central se décharge d'un certain nombre de missions sur les collectivités locales, à coûts grandissants.
On rappellera au besoin que, depuis une évolution remontant à une loi funeste de janvier 1979, la moitié du financement des collectivités locale est alimentée par les dotations de fonctionnement versées par l'État central. L'article 38 de la loi de finances 2013, évalue à 55,6 milliards d'euros les prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales, dont 41 milliards au titre de la DGF proprement dite.
Cette usine à gaz comptable se révélera bientôt explosive : on se demande comment le président "Norma"l tranchera.
Ce 28 mai le socialiste Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, intervenait devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale. Ce 29 mai il s'exprime devant les Sénateurs. Son regard sur l'action gouvernementale de ses amis peut se résumer à ceci : "pratiquement aucune mesure de réduction de déficit structurel n'a été réellement engagée".
L'urgence frappe à la porte. Il serait bon que la gauche comprenne que la récréation est terminée.
JG Malliarakis
Apostilles
Si vous appréciez le travail de L'Insolent
soutenez-nous en souscrivant un abonnement.
Pour recevoir régulièrement des nouvelles de L'Insolent
inscrivez-vous gratuitement à notre messagerie.
Les commentaires récents