L'effondrement de l'Union soviétique n'a été sanctionné par aucune conséquence officielle dans notre pays. Dans la pratique aucune flétrissure politique ne s'est abattue sur les sectateurs de l'économie planifiée. On ne doit pas s'étonner de la sorte si la frange des adeptes du marxisme et des continuateurs des utopies quarante-huitardes se redresse et s'unifie. Elle retrouve en ce moment l'étiage de Georges Marchais en 1981. Rappelons qu'à l'époque le candidat du PCF obtenait 15,4 % des voix, alors que la candidate trotskiste Arlette Laguiller rassemblait sur son nom 2,3 % et celle du PSU 1,1 %. Le fond d'extrême gauche en France, au moment même de la plus grande poussée historique du parti socialiste représentait donc alors plus de 18 % des voix.
Qu'elle retrouve aujourd'hui un pourcentage approchant, quoique moindre à ce jour, reflète seulement une tradition hélas très forte dans ce malheureux pays : elle s'est retrouvée le 18 mars place de la Bastille, héritière du robespierrisme, continuatrice des utopies soixante-huitardes admiratrice de la commune de Paris, la dimension patriotique et l'absinthe en moins.
On doit évidemment prendre en compte le déplacement sociologique de cet électorat. Les catégories ouvrières l'ont déserté les rangs depuis, au moins, les élections législatives de 1997. Elles ont été remplacées par des couches beaucoup moins prolétariennes.
On doit noter aussi que l'essor de ce rassemblement doit beaucoup à la mobilisation antifasciste. Elle devint quantifiable le jour, à partir de la mi-février, où le candidat du front de gauche a annoncé sa résolution de "pourrir la campagne" d'une candidate avec laquelle on avait soupçonné, quelques instants, des convergences improbables. (1)⇓
Un mois plus tard dans son discours du 25 mars à La Réunion le Mélenchon réaffirme un espoir : "Placez le FN loin derrière !", qui n'exprime à nouveau qu'un rejet, lequel au second tour se transformera en un autre rejet.
Deux rejets construisent-ils la renaissance d'une doctrine que l'on croyait elle-même condamnée aux "poubelles de l'Histoire" ? (2)⇓
Aujourd'hui, cette idéologie a été recyclée par l'oubli des crimes commis en son nom. On la retrouve requinquée par la bassesse médiatique. On la sent toute revigorée par les discours mensongers sur la crise. Mais ne nous trompons ni sur son porte parole du moment ni sur la permanence du parti stalinien : ils ne représentent plus que des ouvriers métaphoriques et une réalité de bénéficiaires des régimes spéciaux de retraites et du statut de la fonction publique. Les affiliés de la FSU, Fédération syndicale unitaire de l'Éducation nationale, y pèsent plus que ceux de la CGT : espérons qu'au moins cette campagne inspire cette réflexion à nos dirigeants frivoles qui se berçaient de l'illusion d'un dragon rouge disparu, alors qu'il n'était qu'endormi.
N'en doutons pas non plus : son report de voix, quoique présenté pour automatique sera négocié contre des concessions dangereuses pour le pays, pour les finances publiques comme pour les libertés.
Jean-Luc Mélenchon rappelait cependant le 8 avril que son objectif ne se limitera pas à un soutien sans participation à Hollande. Lui et les diverses composantes du front de gauche ont certainement en vue beaucoup plus grand (3)⇓ : "ce qui est en mouvement c'est davantage qu'un courant électoral autour d'un personnage" car "la révolution citoyenne aura lieu dans ce pays." De toute évidence le gouvernement de gauche ne pourra pas tout, car "il y a un conseil constitutionnel qui est toujours là pour veiller sur l'intérêt des riches".
Son "conseiller spécial", le camarade Éric Coquerel réaffirmait donc le 9 avril (4)⇓ que le front de gauche appellerait, au second tour à voter "pour faire battre Nicolas Sarkozy" mais "qu'en l'état son programme était incompatible avec celui de François Hollande", et qu'il ne devrait donc pas y avoir "de participation au gouvernement", "ni des communistes, ni du Front de gauche" en général.
Ayant ainsi les mains libres vis-à-vis du pouvoir des sociaux-démocrates qu'ils exècrent, et aux côtés d'autres forces, notamment les islamistes, les petits camarades de Jean-Luc Mélenchon travailleront donc surtout à la désagrégation, de la société française et à l'affaiblissement du pays.
Nous consacrerons donc une prochaine chronique à la convergence de ces forces à cette sorte de nouveau programme commun.
Un très beau programme n'est-il pas vrai ?
JG Malliarakis
Apostilles
- cf. particulièrement le débat sur France 2 du 23 février⇑
- Cette expression de Trotsky dont Méluche, comme tant d'autres, fut l'adepte dans sa jeunesse, est supposée s'appliquer à la droite… elle devrait se retourner contre ses auteurs… ⇑
- sur Canal +, il était ce soir-là l'invité d'Anne-Sophie Lapix⇑
- sur RTL au micro de Jean-Michel Apathie.⇑
Rappelons que Mélenchon a réaffirmé, lors de son meeting à la Bastille, qu'il était "pour le maintien du droit du sol".
Il expliquait ainsi aux éventuels chômeurs qui l'écoutaient qu'ils seraient mis en permanence en concurrence avec toujours plus de gens sur le marché du travail. Lui, il s'en moque, il est fonctionnaire.
Rédigé par : Monsi | mardi 10 avr 2012 à 01:56
Chronique particulièrement bien sentie comme toutes les autres. Une petite remarque sur la candidate dite " nationale" . Il semblerait que son manque de culture et l'influence de son entourage lui aient fait partiellement tenir un discours de gauche( voir les grands hommes qu'elle cite).De telle sorte qu'une partie de l'opinion ait préféré cette fois, l'original à la copie selon une formule chère à son père.Erreur stratégique grave!
Rédigé par : me.yahoo.com/a/VdWKX8Yf0ISA4KzFttUq6L.b6FhU | mardi 10 avr 2012 à 09:10
Le trotzkisme, le stalinisme, ne seront jamais réduits, il s'agit d'un mal éternel, comme le malin, et ils sont comme l'alcoolisme que le moindre petit verre de vin fait repartir de plus belle.
Au delà des % que vous évoquez, Mélenchon n'est il pas ce verre de pinard ?
Rédigé par : Dominique Dutour | mercredi 11 avr 2012 à 09:16