"Seuls les commencements sont beaux" dit Heidegger. N'oublions donc jamais les bons moments. Grâce à eux la vie vaut d'être vécue. Le 19 décembre dernier, il s'était écoulé exactement deux mois depuis le 19 octobre, deuxième tour de la primaires de sympathisants de gauche. Depuis cette date, après qu'on l'eut abondamment lu, vu et entendu par la grâce de tous les gros moyens de communication, le président du Conseil général de la Corrèze s'était imposé une cure de silence relatif, de 60 jours. À la suite de cette accalmie, il tenait à Nantes la première réunion publique de sa campagne. Il bénéficiait ce soir-là du soutien du député maire de la ville son ami Jean-Marc Ayrault, président du groupe parlementaire, éminent représentant du peuple. Il allait s'exprimer devant quelque 300 personnes, réunies dans une salle de l'ancienne Manufacture de Tabac, la "Manu".
On reçut donc ce soir-là une révélation fulgurante : "L'électorat populaire a sa place au parti socialiste".
On doit tenir cette affirmation pour bouleversante. Car, quelques jours plus tôt, le 7 décembre un débat du secrétaire national du PS aux études d'opinion, François Kalfon avec les lecteurs du Monde (1)⇓ se concluait par ce mot d'ordre révélateur : "Il faut chasser des instances du PS les réflexes de prolophobie". Vous avez bien lu : "prolophobie", un concept nouveau mais qui dit assez bien, je crois, ce qu'il veut signifier.
Même les paranoïaques ayant des ennemis, il faut reconnaître à l'extrême gauche parfois, une certaine part de lucidité à ce sujet. Le camarade Jacques Nikonoff, l'ancien président d'Attac, dans sa chronique du 30 janvier 2012, en effet démolit ainsi les 60 propositions diffusées le 26 et sur la base desquelles va se dérouler la campagne des socialistes. Et de prendre ainsi la plume pour rappeler, à sa manière un peu lourdingue ce que tout le monde sait, sent ou devrait savoir.
"L’entourage de François Hollande le disqualifie d’emblée pour mener une politique de gauche, considère ce soutien critique de Mélenchon. Il n’est même pas utile de lire le programme du candidat du PS quand on sait qui l’a écrit, affirme-t-il en effet. Ceux qui ont tenu la plume, en effet, sont des agents du système, c’est-à-dire les obligés des milieux d’affaires."
Et il qualifie assez clairement pour des adversaires les deux inspirateurs :
"Pierre Moscovici, écrit-il, le directeur de campagne de François Hollande, ancien ministre des Affaires européennes, (...), est vice-président du Cercle de l’Industrie. Il s’agit d’un lobby patronal, notamment partenaire du Medef. Les milieux patronaux ont trouvé en Pierre Moscovici un excellent représentant de commerce, dévoué et travailleur."
Gentil, non ? Quant à son compère :
"Manuel Valls, député-maire PS d’Évry, est directeur de la communication de François Hollande. Il est membre du Groupe de Bilderberg, l’une des plus célèbres boite à idée patronale du monde. (...) Manuel Valls, effectivement, est un des agents des milieux patronaux les plus doués de sa génération au sein du PS."
Voilà sans doute qui est écrit sur le mode "conspirationniste naïf". Mais il suffit de regarder les images de la campagne Hollande, de ses déplacements, de ses points de presse, pour comprendre que sa garde rapprochée se compose des anciens strauss-kahniens. Leur favori d'hier étant malencontreusement empêché de se présenter, ils s'en sont trouvé un autre, bien sous tout rapport, estampillé en effet, quoique de manière plus discrète que le flamboyant DSK, des fameuses réunions socialo-capitalistes de Bilderberg.
Sans nul doute, cette parentèle sociale-démocrate effraie moins qu'un Mélenchon ou un Nikonoff, ou un Piketty, les agences de notation et les clients attentifs à leurs avis. Le fameux "mur d'argent" (2)⇓, auquel s'était heurté Herriot en 1924 (3)⇓ risque de se révéler plus conciliant.
Cette perspective doit-elle rassurer, au-delà de la droite, tous ceux que préoccupe l'avenir du pays ? Je ne le crois pas : car sur un point notre bon vieux Dékonoff, saint-jean bouche d'or de l'extrême gauche et communiste indécrottable a raison :"François Hollande [marche] sur les pas de Georges Papandréou, José Socrates et José-Luis Zapatero".
Non seulement, il conduirait la France à une ruine absolument certaine. Et l'UMP en tirera sans doute argument. Du reste, un récente sondage prouve que si beaucoup de Français ont été déçus du président sortant, 52 % ne veulent pas de Hollande comme chef de l'État.
Mais, bien plus encore, nos concitoyens doivent savoir qu'il enchaînerait le pays aux diktats, sinon de cette Finance qu'il prétend désigner pour son ennemie, mais, comme les autres nations de l'Europe du sud le subissent déjà, aux ordres d'une troïka de technocrates du Fonds Monétaire International, de la Banque centrale européenne et des bureaux de l'Euro-zone qui viendront lui dicter des programmes, assistés par ordinateur, inopérants et aggravants.
Le très strauss-kahnien Papandréou reste toujours à la tête de l'Internationale socialiste qui réunissait encore 130 délégués sous sa présidence au Costa Rica fin janvier. Les représentants du Tunisien Ben Ali et de l'Ivoirien Gbagbo empêchés n'assistent plus à ces fêtes. Le parti de François Hollande et Martine Aubry reste du nombre.
JG Malliarakis
Apostilles
- cf. Lemonde.fr | 07.12.11 à 18h03.⇑
- cf. Beau de Loménie"Les Responsabilités des Dynasties Bourgeoises" tome IV "Du Cartel à Hitler" (1924-1933).⇑
- On consultera à son sujet le livre que l'auteur de ces lignes a consacré à "L'Alliance Staline Hitler".⇑
En réponse au projet fiscaliste de la gauche... [et à certains errements de la droite]
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On ne dit pas "socialo-capitaliste", on dit "socialo-affairiste".
Rédigé par : Vincent Jappi | lundi 06 fév 2012 à 11:25