L'avalanche sans précédent des dispositions fiscales nouvelles arrêtées par le gouvernement de Paris et adoptées par le parlement au cours de l'année 2011, comme celle qu'on s'apprête à nous annoncer le 29 janvier à propos de la TVA, entraînent deux sortes de conséquences.
La première semblera sans doute secondaire au lecteur. Elle concerne d'abord le rédacteur de ces lignes auquel elle occasionne un surcroît de travail, assez stimulant doit-il l'avouer. Elle contristera à peine, du moins nous l'espérons, à un certain égard, les souscripteurs du petit livre dont nous avions programmé la publication pour le 31 janvier. Ces lecteurs amis y gagneront à trouver des chiffres encore actualisés.
Notre petit livre bleu, tendant à répondre au petit livre rouge de l'équipe Piketty, paraîtra de ce fait avec deux ou trois semaines de retard. Voila, d'une certaine façon, une bonne nouvelle pour ceux qui n'ont pas encore souscrit et qui peuvent donc encore le faire.
À la relecture en effet il se révèle impossible de ne pas le remanier pour répondre, justement et à ces mesures en elles-mêmes, et, plus encore à l'attitude globale qu'elles reflètent.
La fameuse notation AAA ayant été dégradée par Standard & Rich en janvier en dépit des contorsions des autorités publiques, il ne paraît plus nécessaire d'esquiver pudiquement certaines réalités parfaitement intériorisées par les prêteurs, bien avant la fatidique décision.
En effet dès octobre l'écart des taux d'intérêt supportés respectivement par les produits du Trésor français et par ceux de son homologue allemand s'était considérablement creusé, et multiplié par 5 au cours de l'année 2011. L'usage obscurcissant de l'anglais amène les commentateurs agréés à parler du « spread », en perdant de vue que l'on se trouve en présence d'un « renchérissement » provoqué précisément par la perte de confiance. Ceci veut dire que les opérateurs de marchés ont une fois de plus précédé les agences. La finance tant décriée par un Sancho Pança nommé Hollande, lequel feint soudain de se prendre pour Don Quichotte, aurait rendu un signalé service aux pouvoirs publics s'ils avaient bien voulu tenir compte de ce qui se passait réellement, au lieu d'imaginer impressionner des rédacteurs de rapports.
Nous nous demanderons plutôt, légitimement, si la multiplicité des mesures adoptées, en même temps que leur mesquinerie, leur complication technique et le choix de l'obscurité, loin de rassurer les investisseurs internationaux sur la solvabilité future de l'emprunteur hexagonal, ne tendent pas plutôt à le convaincre de sa faiblesse politique. Ne l'oublions jamais en effet : les finances de l'État reflètent la qualité du mode de gouvernement d'un pays.
Comment apprécier, de ce point de vue le nombre extravagant desdites "mesures", que "Valeurs actuelles" pouvait évaluer à 130 pour l'année 2011, ceci dans son édition imprimée en date du 15 décembre. Sont intervenus, depuis, d'autres petits aménagements. On les jugera incompréhensibles, sachant qu'au bout du compte le budget de l'État central parisien, comme celui des collectivités locales, comme celui des caisses sociales demeurera ultra-déficitaire. Si l'on divise leur effet global par 130, chacune d'entre ces "mesures" devrait recevoir plutôt l'appellation de "mesurettes". Autant de cautères sur une jambe de bois, autant d'aveux de faiblesse par conséquent.
Donnons ici un seul exemple, celui d'une toute petite gratte : le non-relèvement des tranches d'imposition.
Cette non-décision va frapper 200 000 foyers fiscaux modestes. Citons ainsi l'exemple d'un célibataire sans enfant ayant touché en 2010, 11 800 euros de salaire net (983 euros par mois). Pas d'impôt sur le revenu à acquitter en 2011. S'il a seulement bénéficié d'une hausse de salaire de 2,5 %, il a encaissé nominalement 12 100 euros, il devra donc payer 68 euros en 2012. Ceci amputera son augmentation nominale de 23 % de sa valeur. Mais en réalité l'inflation étant estimée par l'Insee à 2,1 %, ‑ et chacun la sait très supérieure, – son revenu net d'impôts a diminué en termes réels.
Cet effet se retrouve du haut en bas de l'échelle fiscale.
Si on examine le détail des modifications des taux d'imposition, on observe d'autre part qu'elles portent beaucoup sur la réglementation fiscale des profits rapportés au "capital".
De plus en plus compliquée, et de ce fait de plus en plus rémunératrice pour les avocats et conseils spécialisés, donc de plus en plus coûteuse pour les contribuables cette fiscalité devient de plus en plus favorable aux plus puissants et aux plus riches d'entre eux, tout cela sous un discours toujours plus égalitaire.
Mais parallèlement cette évolution, évidemment ruineuse pour les classes moyennes et pour les petits entrepreneurs individuels, se veut de plus en plus "sociale". On le mesurera par exemple à la hausse continuelle de la CSG, et de l'ensemble des cotisations sociales prélevées sur les revenus supposés du "capital". Elles sont passées de 1,1 % lors de la création de ce monstre par Rocard à 13,5 % pour ce début d'année 2012.
Au fur et à mesure que le taux en augmente, l'assiette s'en élargit.
Rappelons d'ailleurs que, dès 2008, les recettes globales de cette même CSG, supérieures à 80 milliards cette année-là, avaient dépassé en produit les recettes réelles de l'impôt sur le revenu. C'est sans doute cette situation absurde qui inspire à la gauche, et très précisément à l'équipe Piketty, l'idée encore plus illégitime de faire absorber celui-ci par celle-là.
Remarquons que tout ceci ne sert même pas à équilibrer le déficit des comptes de la sécurité sociale, ce pourquoi avait été créée la CSG par Rocard, multipliée par 12 en 20 ans. Le fameux trou augmente d'année en année malgré les dispositions constitutionnelles du plan Juppé adoptées lors la réforme de février 1996. Le besoin annuel de financement des administrations dites de Sécurité sociale a battu tous les records en 2010, à 22,8 milliards d’euros et 1,2 % du PIB.
À la même époque, était instituée une petite annexe de la CSG : la CRDS. Le propos visait à "rembourser" la dette sociale. Or, celle-ci s'est multipliée par 4,4 en 10 ans. La dette portée par la CADES, caisse dite "d'amortissement", se montait à 147 milliards en 2011, contre 33 milliards en 2001.
Or tous ces prélèvements nouveaux pénalisent certes ceux qui, dans le cadre national, les supportent mais qui, au fond acceptent encore, avec plus ou moins de grâce l'idée de solidarité nationale qui les fonde.
Malheureusement ils discréditent aussi le pays auprès des investisseurs que l'on sollicite et qui, du simple fait de l'évolution constante des repères, et, par ailleurs de l'alourdissement de toutes les dettes éprouvent une impression d'enfer fiscal.
Le sentiment très dommageable d'une insécurité juridique hexagonale aggrave ainsi la certitude d'une effroyable pesanteur de notre fiscalité.
JG Malliarakis
En réponse au projet fiscal de la gauche...
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Standard & Rich
j'adore !
merci J G pour cet éclat de rire
Rédigé par : Dominique Dutour | lundi 30 jan 2012 à 23:29
Standard & Riches, of course!
Rédigé par : VXLV | dimanche 06 mai 2012 à 20:57