La présentation médiatique du projet de loi de finances 2012 a donc été schématisée le 28 septembre. (1)⇓ Plusieurs points faibles en émergent d'emblée. L'exercice constitutionnel ne laissera malheureusement aux deux chambres qu'une faible marge de correction et seulement un espace de débats. On ne peut même pas le comparer à ceux du Tribunat bonapartiste inventé jadis par la constitution consulaire. À partir de 1799 la dictature républicaine avait accordé un espace aux seules joutes oratoires, qui permit à l'époque d'intéressantes confrontations d'idées. Depuis 1958 en revanche non seulement l'invasion des énarques a singulièrement réduit les questions à leur dimension administrative. Mais, de plus, la formalité des ordres du jour est devenue largement artificielle puisque l'opinion publique n'en reçoit plus que de rares bribes minuscules et caricaturales. Les journaux télévisés n'y accordent évidemment aucune importance.
Les passes d'armes au sein des deux assemblées ne changeront donc en fait pas grand-chose. L'une d'elle vient, paraît-il, de "basculer dans l'opposition" du fait d'un scrutin intervenu le 25 septembre : cela nous ramène à un cas de figure manifesté pendant 31 ans sur les 53 qu'a duré cette cinquième république plus minable encore qu'interminable. Les journalistes post soixante huitards qui nous désinforment ont oublié jusqu'au nom de Gaston Monnerville, sénateur radical-socialiste du Lot. Cet estimable Français d'Outremer, alors président du Sénat, n'avait-il pas qualifié en 1962 de "forfaiture" la pratique référendaire de "l'illustre général De Gaulle" assisté par son Premier ministre Pompidou ? (2)⇓
Autres temps autres mœurs.
Une grise procédure aboutira dès lors, inéluctablement, à faire voter et à promulguer au plus tard le 31 décembre 2011 les deux lois financières desquelles on légalisera le budget de l'État pour l'année 2012 et le faux équilibre des prétendus comptes de ce qu'on appelle la sécurité sociale.
Mais un peu d'attention permettra au libre chroniqueur d'observer l'attitude des diverses forces politiques face à ce long pensum dont le Palais Bourbon et le Palais du Luxembourg abriteront l'examen.
Dès aujourd'hui on peut remarquer le caractère fallacieux de pas mal de suppositions, en matière de recettes et de dépenses.
On peut certes approuver ici certains efforts annoncés, notamment dans les crédits alloués à la justice, parent pauvre des fonctions régaliennes, en hausse de 11 %.
Mais comment croire, pour ne citer qu'un exemple, que le poids des "engagements financiers de l'État" se verra ramené à 1,15 milliard en diminution de 25,68 % par rapport à 2011 ?
Comment accepter, alors que les dangers se multiplient, que l'on diminue de 4 % les dépenses militaires alors qu'un pays aussi pacifique que la Suisse vote leur augmentation ?
Comment ne pas remarquer une fois de plus que toutes les prévisions de recettes se fondent sur des prévisions de croissance parfaitement irréalistes ?
Notons que l'agence France-Trésor prévoit d'émettre au cours de l'année à venir 179 milliards d'euros de titres d'emprunt, à comparer avec le déficit annoncé, déjà énorme, de 84 milliards. Ceci intervient alors que la différence de coût des intérêts supportés respectivement par l'Allemagne et par la France se creuse de manière significative ?
Le plan Juppé de 1996, appuyé sur une réforme constitutionnelle, avait annoncé un "amortissement de la dette sociale". Son échec total a conduit au contraire à une explosion de celle-ci à hauteur de 189 milliards qui s'ajoutent bien évidemment au passif de l'État central parisien. La dette officielle des administrations publiques s'élevait ainsi à 1 693 milliards. [Or cette somme n'est guère éloignée de la dette italienne alors que le système transalpin tient compte des retraites.] Ceci porte le ratio à 86,2 d'endettement de l'Hexagone évalué à la fin du 1er semestre, en hausse de 1,7 par trimestre. Rappelons qu'à l'époque du gouvernement Jospin sous la présidence Chirac, assurément immobiliste, calamiteux et démagogique, ce taux se situait encore à 59 %.
On doit regretter d'avoir à dire par conséquent que ce qui tient lieu de droite et de ce qui fait office de gauche se conjuguent à construire un désastre intérieur qu'aucune opération extérieure ne peut excuser.
Mais on doit encore plus se préoccuper de la convergence pathétique des programmes, tous fiscalistes, esquissés par les grands partis institutionnels, lamentablement relayés sur ce point par les imprécations qui se veulent non conformistes. Nous pensons notamment, mais non exclusivement, au discours d'un Mélenchon.
La voie des augmentations de taux d'impositions, annoncées par le gouvernement Fillon le 23 août, aggravée par les discours de la gauche, est hélas présentée aux Français comme la seule susceptible de redresser les Finances. C'est bien ce type d'errements qu'il s'agit de corriger.
Que penser par exemple de la doctrine et de l'influence de M. Henri Guaino conseiller spécial du président de la République, qui annonçait si péremptoirement le 8 septembre : "les baisses d'impôts, c'est fini" ! (3)⇓
C'est pourquoi il me semble grand temps de proposer une alternative crédible au fiscalisme. C'est à cela que je m'attacherai de plus en plus dans cette libre chronique, tout au long du débat budgétaire, et en esquissant des propositions crédibles et indispensables dans un livre à paraître fin janvier et quel je vous propose de souscrire. (4)⇓
JG Malliarakis
Apostilles
- À noter un "visuel interactif" assez bien fait [dès lors qu'on en comprend le fonctionnement] sur le site du Monde.fr le 2, en vue d'une première approche, réalisé le 28 septembre.⇑
- Le 29 septembre 1962 à Vichy, Gaston Monnerville expliquait en quoi le chef de l'État violait la Constitution. Il ajoutait : "Si le Chef de l’État a décidé en connaissance de cause, je me permets de l’affirmer, de la violer, le Premier Ministre n’avait qu’à ne pas signer, il n’avait qu’à ne pas dire oui au référendum, et le référendum donc n’aurait pas été possible (...) Laissez-moi vous dire que la motion de censure m’apparaît comme la réplique directe, légale, constitutionnelle, à ce que j’appelle une forfaiture."⇑
- cf son entretien publié par Le Monde du 9 septembre. ⇑
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Le titre de ce livre bleu "Pour une libération fiscale" en fera, notamment, une réponse au livre rouge de l'équipe de gauche dirigée par Thomas Piketty "Pour une révolution fiscale". Il soulignera les voies de réformes possibles de l'archaïque fiscalité française, en fonction des réductions nécessaires de la dépense publique. Ce livre de 190 pages environ paraîtra fin janvier 2012, pour tenir compte de la loi de finances et de la loi de sécurité sociale qui auront été promulguées le 31 décembre 2011. Son prix de vente sera de 20 euros. On peut y souscrire dès maintenant au prix de 15 euros, port compris.
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