Il est à remarquer que la fille de Jacques Delors a opéré cette annonce, avec le soutien des strauss-kahniens, au moment même où l'homme politique le plus strauss-kahnien de l'internationale socialiste, M. Georges Papandréou soumettait au parlement de son pays le plan de rigueur non moins strauss-kahnien. Cela lui est imposé par la situation catastrophique des finances publiques athéniennes. Et celle-ci résulte de dépenses excessives gaspillées depuis des années.
Le véritable débat, celui que l'on cherche à dissimuler à l'opinion française, revient en effet exactement à la situation que la gauche grecque a trouvé dans les cartons de ses prédécesseurs à l'automne 2009.
Dès septembre 2007, du reste l'actuel Premier ministre François Fillon avait lâché, en Corse : "Je suis à la tête d'un État qui est en situation de faillite sur le plan financier". Déjà en 2006, durant la campagne présidentielle, un candidat avait manifesté le courage de rappeler la gravité de ce déficit chronique. Cette audace ne lui avait pas porté tort puisqu'il avait obtenu le score inattendu de 18,6 %. (1)
Dans plusieurs pays du monde l'occurrence banqueroutière s'est récemment rencontrée. Au Mexique (1994–1995), en Russie (1998), en Argentine (1999-2002), en Roumanie (2008) des crises de même nature sont apparues. Elles se sont soldées par un grave marasme de l'économie. Dans l'Histoire de France, deux banqueroutes, sous la Régence en 1718 (2) et sous le Directoire en 1797, ont été décrétées par l'État lui-même au détriment des prêteurs nationaux. On peut aussi assimiler le cours forcé définitif des billets de banque. Après une brève tentative en 1928 de retour à la convertibilité, cela engendra la même ruine des épargnants français qui avaient mis leur confiance entre les mains du ministère des Finances. Dans toutes ces situations, les titulaires de revenus fixes se sont trouvés spoliés de 20 à 80 %. Soulignons aussi que, dans le cas de la France, plus de 70 % de sa dette est aujourd'hui détenue par des prêteurs étrangers.
Ne prétendons donc pas que la crise du risque souverain, conséquence de la faillite de l'État Providence, s'arrêtera à nos frontières comme le nuage de Tchernobyl. Elle a déjà commencé ses ravages dans l'Hexagone, de manière discrète en imposant une réforme des retraites votée en 2010 mais qu'il faudra renforcer dès 2013.
Mme Aubry ne nous explique pas comment elle compte s'y prendre pour résorber sans drame ce déséquilibre entre les recettes et les dépenses de l'ensemble de nos administrations publiques. Pour camoufler les fausses solutions qu'elle proposera, elle disposera du temps de la campagne et des à peu près qu'elle a toujours cultivés, par ses expressions si souvent approximatives.
Gagnons du temps ici et soulignons les orientations qu'elle représente : elle milite et militera en faveur d'une plus lourde et d'une plus sévère fiscalité.
Or, parmi les monceaux de stupidités entendues à propos de la crise grecque, l'une au moins mérite l'attention des Français. En effet, comme beaucoup de choses auxquelles cette affaire donnera prétexte, elle s'apprête peser sur les discours politiques européens et sur les actes de tous nos dirigeants.
Le mensonge récurrent consiste à placer, au cœur du problème, la "fraude", véritable ou supposée, des contribuables locaux ; et l'on entend, à l'envi, des gens qui ne connaissent rien à ce pays, décliner la certitude que personne n'y payerait d'impôts. Cette rumeur ne vise évidemment que les contribuables disposant des plus hauts revenus et des plus importants patrimoines.
Or ceux qui répètent cette antienne devraient réfléchir à cette simple question : connaissent-ils des Grecs fortunés ? Oui, non, rayez la mention inutile. Savent-ils où ces [très méchants] Européens ont élu financièrement et fiscalement domicile ? La réponse varie entre Londres et Genève. Autrement dit : si la Grèce était un paradis fiscal cela se saurait. En aggraver le fiscalisme n'y résoudra aucun problème, mais entraînera au contraire une plus grande paupérisation.
Et il en va de même pour la France.
L'innocence des pauvres demeurant un des postulats de base de tout bon propos misérabiliste, la légende urbaine suggère, dès maintenant, à tous les adeptes du socialisme que la recette qui sauvera les finances de tous les pays de l'Europe du sud appliquera le mot d'ordre défini en 1935 par Thorez, lors de la campagne conduisant à la victoire du Front populaire : "faites payer les riches". (3)
Ce slogan ayant à l'époque assuré ce que le parti communiste et le parti radical appelaient "l'unité invincible du front populaire" ne doutons pas que nos socialistes d'aujourd'hui, en quête d'efficacité à défaut de modernité, s'en emparent demain comme d'un viatique.
Nous avons lu dans un commentaire de lecteur abonné du Monde, publié par le site de ce journal, la proposition suivante : "il faut faire de l'évasion fiscale un crime contre l'humanité".
Dans un tel contexte si l'on érigeait la bêtise en une infraction de cette nature, souhaitons à nos chers socialistes de ne pas passer à l'acte et de relever trop vite du Tribunal pénal international.
JG Malliarakis
Apostilles
- On ne s'en étonnera que plus de le voir s'abstenir le 15 juin face à la proposition provocatrice et décadentielle du PS tendant à instituer une forme de "mariage" contraire au principe désormais sacro-saint de la "parité", et au code civil. N'avait-il pas déclaré le 28 septembre 2006 : "Le mariage, pour moi, c’est un homme et une femme" ; et "je ne suis pas favorable à une adoption plénière par deux personnes du même sexe, car l’adoption, c’est la filiation, et ce serait donc accepter qu’un enfant ait deux pères, ou deux mères, ce qui pose un problème."⇑
- Contrairement à ce que la "Mémoire" a retenu de cette crise, elle fut la cause et non la conséquence de l'adoption en 1719 du système Law qui fit faillite à son tour.⇑
- cf. L'Humanité du 28 octobre 1935.⇑
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