Quoique moins dramatique, la mise à l'écart de Gremetz de l'Assemblée nationale, jusqu'en mai, se justifiait sans doute autant que la mission assumée par les aviateurs et les marins principalement français et britanniques en Cyrénaïque et en Tripolitaine. Dans ce dernier cas, les Nations unies ont jugé légitime de préserver, au moins en partie, le peuple libyen de la démence manifeste de son dictateur. Et d'une manière générale on sait combien nécessaires, face aux cas psychiatriques urgents, se révèlent certaines interventions : en contrepartie de ces entorses à la procédure ordinaire l'internement administratif autoritaire ne peut se prolonger.
Certes le cas Gremetz, plus bénin dans ses conséquences, remonte à plusieurs années. Déjà en 1998 ce butor extravagant avait agressé en voiture une manifestation du Conseil régional de Picardie. Chirac l'avait, naturellement, gracié. Mais on doit noter qu'il avait été réélu depuis lors, et régulièrement, avec le soutien mécanique des socialistes locaux.
Faut-il s'interroger sur la manière dont aurait été traité le même problème venant d'un bord opposé ? Quel écho médiatique aurait-il reçu ?
On ne l'aurait sûrement pas considéré comme anecdotique, mais au contraire comme emblématique.
Car finalement sur cette affaire qui dure depuis un mois, les grands moyens de désinformation ont brillé par leur sobriété. N'importe quelle petite phrase d'un ministre ou d'un homme de droite est passée à un crible infiniment plus rigoureux, et à une censure plus durable.
Il existe donc, au-delà de ce personnage et de ses excès une complaisance particulière à l'endroit des communistes. L'incident du 16 mars qui a valu au député de la Somme d'être suspendu de son mandat parlementaire pour quelques semaines, aura entraîné au moins une conséquence prophylactique au sein du groupe auquel il était apparenté : il n'en fera plus partie désormais et devra s'asseoir aux côtés de non-inscrits. Ceux-ci ordinairement estimables et indépendants d'esprit trouveront peut-être la mesure saumâtre et le voisinage nauséabond.
Mais à la vérité, on se demande quand même pourquoi l'appareil stalinien ne l'avait pas exclu plus tôt.
Car la vraie question demeure, comme invariante et toujours sans réponse : pourquoi quand on décide de mentionner le cas d'un jeune résistant on choisit le fils du député stalinien Môquet ? Pourquoi, lorsqu'on veut honorer un homme de lettres antillais on panthéonise Aimé Césaire qui attendit 1956 pour découvrir que Staline était un criminel ?
Au moment de l'attaque allemande contre la Pologne, la Chambre des députés tint une séance solennelle le 2 septembre 1939.
Deux éminentes figures du parti radical socialiste, Édouard Herriot président de l'Assemblée et Édouard Daladier chef du gouvernement prirent la parole au nom de la république.
Voici comment la très bourgeoise "Illustration" (1) décrit "la séance historique du 2 septembre à la chambre des députés":
"… On sent pleinement combien, à cette heure, M. Édouard Daladier incarne la France et sa volonté.
"Que vont faire les communistes qui s'étagent en une masse profonde sur la gauche de l'assemblée ? Ils demeurent muets et vainement tous les autres députés leur crient-ils : 'debout !'
"Cependant M. Herriot ouvre la séance par un discours, à la fois mesuré et vibrant, où au passage – allusion acclamée par tous les groupes, de l'extrême droite aux socialistes – est flétri le pacte germano-soviétique. Puis le président du conseil monte à la tribune (…)
"L'unanimité française s'affirme (…)
"D'aucuns se sont étonnés de ne pas trouver dans les paroles de M. Édouard Daladier une allusion au pacte fameux qui a dévoilé la secrète collusion de la Russie des Soviets et de l'Allemagne. Il semble, considère 'L'Illustration', que le président du Conseil ait eu raison (…)"
Le numéro du 16 septembre présente encore, sur une grande carte d'Europe l'URSS parmi les "pays neutres n'ayant pas mobilisé".
Hélas le 17 septembre les troupes soviétiques pénètrent en Pologne.
Et le même journal précise dans sa livraison suivante : "Depuis quelque temps les renseignements les plus sûrs laissaient prévoir cette éventualité. La Russie avait procédé à une mobilisation massive – d'après le correspondant du Daily Telegraph à Moscou elle aurait quatre millions d'hommes sous les armes – et concentré la majeure partie de ses forces toute le long de ses frontières depuis la Finlande jusqu'à la Roumanie". (2)
C'est seulement le 26 septembre que Daladier signera le décret de dissolution du parti communiste (3) et que ses élus furent démis de leurs fonctions par la Troisième république gouvernée par les radicaux socialistes.
JG Malliarakis
Apostilles
- N° 5036 du 9 septembre 1939
- N° 5038 du 23 septembre 1939
- Décret abrogé par De Gaulle.
Sous ce titre paraîtra un ouvrage de l'auteur de ces lignes retraçant le contexte de la politique soviétique pendant toute l'entre deux guerres. Il comprend en annexe, et expliquant, plus de 80 documents diplomatiques, caractéristiques de cette alliance. Il sera en vente à partir du 15 mai au prix de 29 euros. Les lecteurs de L'Insolent peuvent y souscrire jusqu'au 30 avril au prix de 20 euros, soit en passant par la page spéciale sur le site des Éditions du Trident, soit en adressant directement un chèque de 20 euros aux Éditions du Trident 39 rue du Cherche Midi 75006 Paris. Tel 06 72 87 31 59.
Puisque vous avez aimé l'Insolent
Aidez-le par une contribution financière !
Les plus récentes chroniques :
• "Les planches pourries du radicalisme" L'annonce de la candidature hypothétique de Jean-Louis Borloo président des radicaux valoisiens a manifestement réjoui certains journaux monopolistes régionaux. (...)→ Texte et notes → Version vocale
• "Staline pas si génial que cela" →Texte et notes → Version vocale
• "Peugeot le poids des charges et le prétendu pacte social" Le 5 avril Jean-Michel Apathie recevait Philippe Varin. Le président du directoire de PSA Peugeot-Citoën rappelait certaines réalités de l'industrie française et il réitérait ce matin-là son cri d'alarme (...) →Texte et notes → Version vocale
•"Clefs pour comprendre Katyn" On projette donc le très beau film "Katyn" ce 14 avril sur la chaîne franco- allemande Arte. Au-delà de l'œuvre de Wajda elle-même, de son scénario, tiré d'un roman mais aussi de l'expérience du cinéaste lui-même dans la Pologne communiste d'après-guerre, il faut considérer l'Histoire. (...) →Texte et notes → Version vocale
• "Les socialistes aux risques du déclin" Prenons acte, avant même que d'examiner en détail son esquisse de programme, de la construction intellectuelle sur la base de laquelle Mme Aubry l'échafaude. Son propos de "redresser le pays" (…) → Texte et notes → Version vocale
Un fossile de pithécanthrope éructeur du néanderstalien bientôt au musée des horreurs? :-)
Rédigé par : Tonton Cristobal | jeudi 14 avr 2011 à 09:03
Ouf ! Quelqu'un ose faire un petit rappel sur Césaire. J'ai posté ceci ailleurs :
Césaire était un homme de multiples talents. Mais évitons l’embaumement. Il est arrivé à Aimé Césaire de procéder à des affirmations un peu rapides, si ce n’est carrément des inepties, et même des plus gratinées. Je trouve sur Wikipedia cette citation :
“Oui, il vaudrait la peine d’étudier, cliniquement, dans le détail, les démarches d’Hitler et de l’hitlérisme et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXe siècle qu’il porte en lui un Hitler qui s’ignore, qu’Hitler l’habite, qu’Hitler est son démon, que s’il le vitupère, c’est par manque de logique, et qu’au fond, ce qu’il ne pardonne pas à Hitler, ce n’est pas le crime en soi, le crime contre l’homme, ce n’est pas l’humiliation de l’homme en soi, c’est le crime contre l’homme blanc, c’est l’humiliation contre l’homme blanc, et d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les arabes d’Algérie, les colonies de l’Inde et les nègres d’Afrique”.
A cette époque (1950), Césaire était communiste, d’où le “bourgeois”. En outre, conformément à la bonne doctrine du communisme, le bourgeois, le capitaliste, est intrinsèquement fasciste, voire nazi. Les masses laborieuses, elles, aspirent de tout leur être à la dictature du prolétariat.
La citation de Césaire montre, pour la millionième fois, que l’intelligence et l’instruction ne suffisent pas pour se garantir de la stupidité. Il peut arriver que ces hauts esprits, par leurs concoctions intellectuelles, fabriquent, ou propagent et glorifient, ces idéologies meurtrières dont justement Césaire nous entretenait à propos de Hitler, avec une grandeur morale qui en impose.
Trois ans après cette citation, Aimé Césaire, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, agrégé de lettres, prenait sa plus belle plume pour écrire ceci :
http://www.lefigaro.fr/livres/2010/02/18/03005-20100218ARTFIG00563-quand-aime-cesaire-chantait-staline-.php
Rédigé par : Curmudgeon | jeudi 14 avr 2011 à 17:11
Une expertise psy s'impose :-)
Rédigé par : Xavier Collet | vendredi 22 avr 2011 à 10:55