Depuis plusieurs jours les lecteurs du journal grec Kathimerini (1) connaissent le contenu du documentaire "Un an avec DSK" que s'apprête à diffuser la chaîne Canal + (2), du moins pour la partie essentielle à leurs yeux.
Celle-ci révèle la manière dont, dès l'automne 2009, le recours au FMI a été convenu entre le gouvernement d'Athènes, qui à l'époque s'en défendait mensongèrement, et le directeur général de cet organisme. On peut penser que dans cette affaire très délicate, M. Papandréou et son ministre des Finances, jouant une partie difficile, ont évité le pire pour leur pays. Souhaitons que leur habileté ne se retourne pas contre leur propos. Il faudra se souvenir en revanche que le patron du FMI agissait subtilement mais sciemment, subrepticement, contre l'Europe.
DSK semble cependant, à l'évidence, très heureux de passer aux yeux des naïfs pour le "sauveur du capitalisme". Depuis son accession aux bureaux de Washington, il cherche à diffuser cette image. Et depuis quelques jours de calculs autour des sondages et de spéculations autour des hypothèses, il aimerait bien aussi passer pour le garant futur de notre démocratie qu'on dit gravement menacée par le populisme.
Le même journal Kathimerini ce 9 mars au matin titrait à nouveau sur les propos tenus par DSK dans le cadre de cette émission, destinée au public français. Traduisons, en attendant de l'entendre "en français dans le texte" : [En Grèce] "il existe des gens qui n'ont rien [pas de pain] à manger, et d'autres qui font de l'évasion fiscale un sport national". Le titre réduit encore plus "les uns souffrent, les autres fraudent". Car on veut confondre, on juxtapose sémantiquement, la fraude et l'évasion fiscales.
Souvent désinformés par des Grecs d'extrême gauche, je ne doute pas que trop de Français se représentent ainsi la réalité de la Grèce. Je ne chercherai pas à redresser leur opinion, car je n'y parviendrai pas. Mais je tiens à dire à mes amis lecteurs que je la tiens pour fausse.
En revanche, ils peuvent être certains que le même remède de cheval sera tantôt appliqué à la France.
Par exemple, Romano Prodi avait commencé à mettre en place cette doctrine, d'une façon relativement modérée, pendant la courte période où il revint de Bruxelles pour "redresser les finances italiennes" entre 2006 et 2008, avant le retour de Berlusconi.
DSK et Papandréou n'ont évidemment rien inventé. Ils ont simplement accentué cette pratique de la "rigueur de gauche", adossée elle-même aux craintes pour l'Union monétaire. Les questions budgétaires ne sont confondues pourtant avec l'ordre monétaire que pour mieux enfumer les opinions. Signalons ainsi que la coalition libérale-conservatrice au pouvoir en Grande-Bretagne redresse ses propres comptes publics par des réformes au moins aussi radicales, que celles adoptées par la Grèce, tout en restant en dehors de la zone euro et sans faire appel à DSK.
Mais voila, une partie non négligeable de l'Europe continentale, et pas seulement les gens de l'Europe du sud, veut la sociale-démocratie.
L'argument démagogique de la séparation entre "ceux qui souffrent" et "ceux qui fraudent" fonctionne comme une forme nouvelle de la vieille lutte des classes.
Il rencontrera l'assentiment de tous les coupeurs de têtes jacobins. La recette marche toujours. Faisons confiance aux gauchistes et aux staliniens du syndicat national unifié des impôts pour l'alimenter en informations partiales. Les gens d'Attac ou de la revue "Alternatives économiques" distilleront de faux arguments, adossés à leurs chiffres biaisés. Ils rencontreront sur ce terrain le soutien d'autres forces du même genre, Tous répercuteront les mêmes slogans destructeurs.
L'affaire dite "Bettencourt" n'a pas été agitée en vain pendant toute l'année 2010. Elle a bien chauffé à blanc l'opinion dans ce sens.
Donc DSK devient un concept "socialiste keynésien". Le PS pourrait presque se reconvertir en "PSK", un sigle à faire rêver. L'important n'est peut-être même plus de savoir si "il" se présente, mais quel candidat "il" adoubera. Tous les subventionnaires, tous les fonctionnaires, tous les médecins intéressés à maintenir le malade sous cloche vous le garantiront : les finances publiques ne souffrent pas de leurs gaspillages et de leurs prédations mais de recettes jugées insuffisantes du fait de la fraude, du fait des niches et des riches, du fait de leurs évasions, confondues avec autant de tricheries, du fait des exilés fiscaux dont on parle comme les robespierristes parlaient des émigrés, etc.
Confondant les effets et les causes, on cherchera à camoufler à l'opinion que la fraude et le travail au noir résultent d'abord d'une pression fiscale et de charges sociales trop élevées. On justifiera de la sorte non seulement le contrôle accru et le durcissement des contentieux mais également la hausse de tous les taux d'imposition, pendant 5 ans encore de 2012 à 2017. Pendant la même période les pays concurrents renforceront leur compétitivité.
Voila ce que l'on doit redouter autour du concept DSK. La gauche dure y voit un libéralisme camouflé. Elle se trompe. Une certaine droite y voit un subtil complice des grosses entreprises monopolistes qu'elle affectionne et qu'elle courtise elle-même. Elle s'égare dans sa propre myopie. D'autres s'apprêtent à développer des campagnes de réfutations ontologiques ou moralistes du personnage. Elles lui rendent service, lui conférant une dimension humaine, sympathique et même victimaire, et discréditant ceux qui les manient.
Il reste quelques mois pour cerner sérieusement le danger.
Ne comptons sur aucun état-major politicien. Tous raisonnent au fond comme les détenteurs brevetés du concept DSK. Ils s'apprêtent à l'imiter. Tous se complaisent, parfois inconsciemment, dans leurs logiques de prédateurs. (3)
C'est bien de ce cercle infernal qu'il s'agit de sortir.
JG Malliarakis
Apostilles
- "Kathimerini" est l'équivalent "Figaro", version un peu moins turcophile.
- Canal+ diffusera ce 13 mars un documentaire inédit sur DSK : "Un an avec Dominique Strauss-Kahn", au cœur du FMI.
- Celle que dénonce Bastiat sous le nom de "spoliations" dans ses "Harmonies sociales".
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Vous pouvez entendre l'enregistrement de notre chronique
sur le site de Lumière 101
Gros contribuables, vous n'avez qu'une réponse, mais elle est sans réplique : l'émigration-sanction.
Rédigé par : Pirée | vendredi 11 mar 2011 à 08:44
Je suis prêt à parier que DSK ne se présentera pas...
Petite réponse : le danger n'est pas sa candidature mais son influence. Je doute comme vous qu'il soit physiquement capable de mener cette campagne.
Rédigé par : Christian Fournier | vendredi 11 mar 2011 à 14:44
Je crois comprendre que vous ne souhaitez pas l'avènement comme president de la République de DSK au motif de faire faire une cure d'austérité à la France. Le serait-il mieux dans le costume gris de DG du FMI?
Je suis pour ma part femrement co,vaincu que pour sortir de cet état providance à bout de soufle il faille pamlheureusement en passer par une vraie crise des nos finances publiques.
Par contre pour éviter aux riches de subir les foudres médiatiques il faut révèler ce qu'il représentent financièrement et ainsi faire cesser l'illusion de la réaprtition des richesses dont on entend trop le slogan et jamais la beauté de chiffres.
Ainsi M. Thomas PICKETTY économiste de gauche proche de S ROYAL a dans son ouvrage "L'économie des inégalité" précisé que les revenus des Français porvenaient pour 2/3 des revenus du travail, 30 % pour les revenus sociaux (dont 2/3 pour les retraites) et enfin le solde 5 % des revenus de l'épargne (enfin du capital comme ils disent tous), pas de quoi partager quoique ce soit puisque déjà ces flux sont taxéx à 30 %.
Du côté du stock d'épargne (capital), le 1% des Français le plus riche dispose de 13% du stock total soit 1 378 Mds EUR d'après le Conseil des prélèvements obligatoires, soit à diviser par 25,7 millions de foyers fiscaux 53 600 EUR ou par Français 20 350 EUR
Pas de quoi pavoiser vraiment.
Rédigé par : goufio | samedi 12 mar 2011 à 13:00
Très bon article et belle démonstration , qu'on ne peut qu'approuver. En revanche: comment fait-on pour sortir du cercle infernal? Vite une reéponse sil vous plait.
Rédigé par : Liberté015 | samedi 12 mar 2011 à 14:37