On aimerait savoir quelle recherche de cohérence ont pu développer, avec ces divers partenaires, les conseilleurs de nos politiques publiques hexagonales.
MM. Guaino, au plan économique et Soubie, sur les questions que l'on appelle "sociales", et qui regardent en fait les charges du même nom, – ne sont jamais passés pour bien attentifs à la cohésion continentale dans leurs sphères respectives. Mon impression personnelle en ferait même les porte-parole des groupes d'intérêts les plus hostiles à l'entente franco-allemande et, plus encore, au projet d'une véritable Europe confédérale. Mais, naturellement, j'aimerais me tromper.
Il m'a semblé remarquable de pouvoir lire, dès le 10 novembre, un texte comme celui d'Éric Le Boucher, l'un des meilleurs journalistes économiques de Paris (1). Son article tirait, à l'avance certaines conclusions. Il s'exprimait d'une façon tout à fait pertinente, aux yeux du rédacteur de ces lignes. Ses suggestions s'imposent encore plus face au spectacle de la réunion de Séoul.
Il soulignait d'emblée l'émergence de plus en plus évidente de la Chine, non seulement comme usine du monde, mais maintenant comme puissance. Cela se traduit désormais par une bipolarisation mondiale entre Washington et Pékin. On parle donc, à ce propos, d'un "G 2". Cette expression ne tient pas compte du fait qu'une telle instance demeurera strictement informelle. Et de fait, elle se garde bien de s'organiser institutionnellement. Cela étant posé, dans sa conclusion, le directeur de "Enjeux Les Échos" suggère un sursaut du Vieux Continent : "À l'Europe, dit-il, de sonner l'alarme et de prendre la tête du G18 contre le G2."
Sur le principe on peut déjà se demander si le projet d'un tel "front commun contre" ne contient pas une part de naïveté : en quoi faut-il nécessairement affirmer que nous préférons le Brésil ou l'Indonésie sous prétexte que la politique américaine nous laisse perplexe ?
D'abord faudrait-il que les dirigeants européens, à commencer par ceux de Paris, s'accordent précisément sur le constat dont M. Le Boucher fait l'accroche de son papier (2) :
"Angela Merkel a raison : « Le plus grand danger qui nous menace est le protectionnisme. » Le spectre d'une fermeture des frontières comme cela s'était passé en 1930, conduisant au résultat que l'on sait, a été repoussé depuis le début de la crise, il y a deux ans. Mais il réapparaît."Développant ce point de vue depuis plusieurs années, face à un public au départ sceptique et réticent, le chroniqueur de "L'Insolent" ne peut certes que souscrire à ce qui lui semble l'évidence même.
Le malheur veut hélas que la tendance dominante dans l'Hexagone accorde plus d'importance, à l'encontre des véritables intérêts français, aux sirènes hurlantes du camarade Mélanchon, qu'aux livres et aux lecteurs de Frédéric Bastiat ou de Vilfredo Pareto (3).
On se demande ainsi quelle leur semble aujourd'hui la question européenne essentielle. L'oligarchie monopoliste et jacobine saigne certes ce malheureux hexagone, mais cela ne lui suffit peut-être pas. Elle paraît, ces derniers temps, presque satisfaite à l'idée de s'approprier son "moignon de Belgique" comme au XVIIIe siècle d'autres puissances s'étaient emparés de leur "morceau de Pologne". Là aussi on aimerait se tromper.
On doit évidemment reconnaître, en dehors de la langue française, que nous aimons, un autre point commun entre l'État central parisien et la Belgique francophone. Les deux pays refusent de prendre acte du lien entre leur faillite industrielle commune et les charges du système social. Les exploiteurs politiciens de nos amis wallons auront, pendant un demi-siècle disposé d'une ressource particulière, aujourd'hui en voie de tarissement. Ils ont trop souvent imaginé faire financer leurs propres déficits par les entreprises flamandes. De leur côté, leurs homologues hexagonaux, conseillés par les cadors de Bercy, n'ont pas trouvé d'autres ressources que d'emprunter aux de Pékin et aux émirs du Golfe de quoi boucler leurs fins de mois.
Cette situation ne pouvant plus durer, ils commencent à trouver un peu pressantes les propositions de l'ami chinois installé dans la maison.
Cela ne les amène pas encore à concevoir comment ne pas dépendre des méchants usuriers, asiatiques, arabes ou autres. Le mieux consiste à cesser les gaspillages et à empêcher le recours de la nation toute entière au crédit de consommation.
La situation, d'autre part, n'a pas encore conduit, non plus, nos technocrates à considérer l'Europe comme autre chose que la prolongation de nos départements, une collectivité territoriale de la république en quelque sorte.
Il convient donc certainement de penser à une affirmation européenne dans le concert mondial. Cela supposera une nouvelle pratique au sein de ce que nous appelons, depuis l'accord négocié à Maastricht en 1991, l'Union européenne.
JG Malliarakis
Apostilles
- Il est directeur de la rédaction de "Enjeux Les Échos".
- En ligne le 10 novembre à 9 h 09.
- Sans aigreur, je constate le peu d'écho rencontré jusqu'ici dans les "bonnes revues" par mes rééditions de Frédéric Bastiat et de Vilfredo Pareto.
Vous pouvez entendre l'enregistrement de notre chronique
sur le site de Lumière 101
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méchants usuriers chinois et arabes ! elle est bonne celle-là ! le problème du G20 est effectivement les méchants usuriers mondiaux, ceux de la FED et du FMI, et si vous n'êtes pas irrémédiablement aveugle, ou aveuglé, ou autre, vous verrez qu'ils font bien partie d'une ethnie particulière, non occidentale, mais pas chinoise, ni arabe, et réputée pour ses talents de méchants usuriers, comme vous dites, depuis fort longtemps.
Rédigé par : François Torque | mardi 16 nov 2010 à 14:14
@F.TORQUE: cette découverte troublante que vous nous suggérez ne me semble pas le problème abordé dans l'article.
La question vraie est : comment échapper aux usuriers, quels qu'ils soient.
Rédigé par : Fred L | mardi 16 nov 2010 à 14:54