Sur un point au moins on s'autorisera à donner raison au secrétaire général de la CGT. Il le fait remarquer à juste titre : "Aucun gouvernement européen engagé dans une réforme des retraites ne s'est comporté comme l'exécutif français en verrouillant d'emblée toute discussion." (3)
Essayons d'éclairer le contexte de cette anomalie.
Après le bilan des 220 défilés de l'après-midi, rassemblant plus d'un million de piétons, un peu moins qu'en mai, un peu plus que fin juin, il reprend son attitude arrogante : "nous n’avons pas, dit-il, l’intention de lâcher" et même "on peut aller vers une crise sociale d’ampleur" déclare-t-il très sérieusement au Monde (4). Son fond de commerce se gère sur un mode d'apparente radicalité : il doit apparaître, à la fois comme le représentant de la tendance la plus dure et, en même temps, celle avec laquelle on peut et on doit négocier. Cette deuxième donnée de l'épure tend à laisser sur le carreau les ex-maoïstes de SUD, et les ex-trotskistes de FO, pour lesquels l'objectif ultime resterait la révolution prolétarienne.
Une telle comédie misérable ne peut que s'essouffler. Elle ne devrait plus tromper personne.
Et pourtant "elle tourne".
Disons simplement que la date du prochain rassemblement fixé au 23 septembre permettra de dessiner un accord dominés par deux partenaires principaux. Entre les débats préfabriqués en septembre de l'Assemblée nationale et l'obscure navette sénatoriale d'octobre, ils apparaîtraient en vainqueurs au sein de leurs camps respectifs. Le chef de l'État, éclipserait à la fois un chef du gouvernement, signataire de la loi de 2003, un ministre du Travail démonétisé et une majorité parlementaire de façade. Au sein de la gauche, la force sociale l'emporterait sur le sérail politique, la bonne vieille centrale stalinienne marginaliserait la CFDT sociale-démocrate et la survivance de Force ouvrière.
La question de la pénibilité n'intervient pas pour faire pleurer les chaumières sur le sort des mineurs de fonds, des manœuvres du bâtiment ou des pêcheurs en haute mer, et autres durs métiers imposant le respect.
Elle obéit à un seul objectif : il s'agit de pérenniser, peut-être même en incorporant au passage leurs bénéficiaires actuels dans les caisses du régime général, les avantages des branches auréolées d'une minorité de soutiers. Les permanents cégétistes d'EDF, de la SNCF ou de Gaz de France et leurs soutiens bureaucrates continueront quoiqu'il advienne à s'appliquer à eux-mêmes les privilèges attribués aux électriciens, gaziers, cheminots etc. Si un accord entre la CGT et le président intervient qui osera ergoter sur ces points de détail ? Qui souhaite une crise majeure ?
Autrefois les choses se présentaient plus simplement. Pour comprendre les bizarreries de la politique française, et pas seulement à gauche, il suffisait d'observer de façon linéaire la presse du parti communiste. On disposait de la sorte d'une clef pratiquement constante de tous les comportements aberrants, ceux des compagnons de route, ceux du grand orient, mais aussi ceux des barbouzes du gaullisme, des réseaux tiers-mondistes, des théologiens de la révolution et autres petites succursales du bloc soviétique.
La chute de l'URSS a plus ou moins diminué le périmètre d'intervention directe et visible d'un parti désormais squelettique. Son fantôme ne représente plus guère que 2 à 3 % de l'électorat. Le tirage de L'Humanité ne peut même plus baisser. Cet effondrement n'a apporté cependant ni la moindre rétractation, ni la plus petite démarche de repentance, ni aucun soupçon d'opprobre. Un Français ayant obéi aux ordres de son gouvernement ou porté l'uniforme de son armée doit toujours s'en disculper. Un militant ayant osé dans sa jeunesse dénoncer les crimes et les mensonges du communisme demeure idéologiquement un paria. Mais celui qui a servi de marionnette au KGB ou à la Stasi, de porteur de valises du FLN, de pourvoyeur ou de propagandiste du Goulag, du Lao-gaï chinois, des camps vietminh ou des Khmers rouges peut toujours se placer en situation d'accusateur de ses compatriotes. Parallèlement, staliniens et trotskistes ont, comme chacun s'en félicite, mis leurs piolets au vestiaire.
Quant au camarade Thibault, une énigme biographique demeure entière : quand donc cet ancien dirigeant du parti a-t-il véritablement quitté les rangs communistes ? Et pour quelles raisons de conscience ? Doit-on cette hypothétique rupture à une lecture tardive de Soljénitsyne, à une découverte salutaire des œuvres de Frédéric Bastiat ou, plus probablement, au projet de se révéler la plus forte composante au sein de la gauche le jour où, par malheur, Mme Aubry accéderait à la présidence ?
Tout cela ressortit par ailleurs des données permanentes des dérives politiques subies par l'Hexagone. Les métastases du cancer bolchevik se sont répandues fort loin de leur épicentre naturel. Une certaine droite gobe pour argent comptant les désinformations distillées par Marianne et tous les gros médiats se gargarisent de conceptions dont ils ne savent même plus l'origine marxiste et la déformation léniniste.
Il serait temps que les partisans de la Liberté se réveillent et qu'ils ouvrent les yeux.
JG Malliarakis
Apostilles
- M. Eric Fottorino Le Monde en ligne le 8 septembre à 11 h 34
- Il intervenait, sur Europe 1, lors de l'émission du Matin dirigée par Fogiel à 7 h 39. Le passage auquel nous nous référons ici figurait sur le site de la station dès 8 heures. Une dépêche AFP, ô lenteur du service public !, le reprend et le diffuse à 12 h 48.
- cf. Le Monde en ligne du 9 septembre à 12 h 07
- cf. Le Monde édition papier datée du 10 septembre.
Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique
sur le site de Lumière 101
J'ai commencé à travailler en atelier mécanique générale à 14 ans à peine passé : 50 heures et souvent 6o par semaine. Jusqu'en 1981 pour moi, retraite, c'était 65 ans, sans problème, alors (oui je suis parti à 60 mais avec près de 47 ans de cotisation "en usine") que penser des démagogues de gauche qui ont décrété : retraite à 60 ans/35 heures par semaine, alors que "les 30 glorieuses" étaient déjà derrière nous et si gouverner c'est prévoir, qu'elle imprévision du gouvernement socialiste de l'époque. Mais hélas, peu importe la qualification "droite/gauche", l'important pour nos "démocrates" c'est de rester le plus longtemps possible se gaver de "l'assiette au beurre" et comme paraît-il disait Louis xv .........!
Rédigé par : Gérard CANALI | vendredi 10 sep 2010 à 10:35
L'histoire qui, dit on ne se répète pas, va-telle se répéter en 2012 ?
Mitterrand est arrivé au pouvoir en 1981 avec comme programme la baisse de l'âge du depart à la retraite à 60 ans.
Les députés viennent de repasser celui ci à 62 ans.
En 2012, si les socialistes reviennent au pouvoir, comme c'est plus que probable, on repassera à 60 ans.
En 31 ans il n'y aura eu aucune réforme digne de ce nom.
Et on s'étonne que la place de la France dégringole?
Rédigé par : MOHIKIAN | vendredi 10 sep 2010 à 22:50
Notre président semble fasciné par Bernard Thibault...
Chérèque, le plus pragmatique et le moins idéologique, semble banni...
Pour moi, c'est un mystère!
J'aimerais comprendre!
Quelqu'un a-t-il la clé?
Rédigé par : Mennessier Claude | samedi 11 sep 2010 à 21:22