On trouve ainsi au hasard, parmi les petites nouvelles brèves, en page 2 "24 heures dans le monde" sur une étroite colonne, la rubrique "les chiffres". Pêle-mêle y voisinent ainsi entre le taux du livret A et le pourcentage de réussite au bac, la mesure suivante d'une opinion peu banale : 63 % des Français jugent "inévitable" [les guillemets viennent de la rédaction du journal] une réduction des dépenses.
Or, en pages centrales, le même sondage TNS Sofres réapparaît. Cette fois on le trouve présenté de manière entièrement différente. Et il figure en bonne place. On l'a aimablement colorisé. Le voilà désormais intégré aux feuillets relatant, – et critiquant, cela va sans dire, – l'intervention du chef de l’État le 12 juillet. Étalé sur 2 colonnes avec de jolies teintes vives de nature à égayer les enfants que nous sommes, il est écrit en grosses lettres "53 % des Français pensent que la hausse des impôts est inévitable". Seule une minorité de Français pense encore que l'on peut éviter d’augmenter les impôts et les taxes : ils sont 44 % à le croire.
Cette fois pas de guillemets à inévitable. Ce que le regretté, car regrettable, Seguin appelait de ses vœux comme une décision courageuse devient ainsi fatalité.
En dehors de ce point de détail typographique, on conviendra au besoin que la connotation des deux présentations ne ressort pas de la même logique.
Il existe une sorte d'accoutumance blasée à prévoir que dans les mois à venir, on ne risque guère de bénéficier d'une révolution fiscale libératrice. S'il s'agit d'un pronostic, chacun peut le partager. Et le rédacteur de cette chronique se sent presque obligé d'en convenir : il ne prendrait pas le risque de parier une trop grosse somme sur une baisse des taux des contributions et cotisations qui figureront dans le budget comme dans la loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2011. Si les services du quai de Bercy préparaient des projets dans un tel sens cela se saurait.
Comment ne pas succomber à la tentation d'ironiser sur l'inéluctable, sur l'unanime et sur le faux bon sens des valeurs ainsi cotées à la bourse républicaine, laïque et obligatoire.
De manière circulaire, la presse et la gauche se citent elles-mêmes.
Au lendemain des déclarations du chef de l'État, on ne change pas les bonnes habitudes. On découvre donc, sans surprise, une opposition de gauche qui ne trouve rien de bon dans le propos du pouvoir, et une majorité présidentielle qui approuve.
Benoît Hamon, par exemple, saint-jean-bouche-d'or du sectarisme socialiste qualifie le président de la république de "principal obstacle à la vérité dans l'affaire Bettencourt-Woerth". Parfait. Mais en quoi peut-on parler sérieusement, jusqu'à présent, d'une "affaire Bettencourt-Woerth" sinon dans les élucubrations médiatiques et gauchisantes ? Aucun délit, aucune plainte, aucune autre victime sans doute que cette dame traînée dans la boue pour en salir ses proches. Le seul procès en cause est une affaire entre l'héritière réservataire de la fortune d'Eugène Schueller et le vilain François Marie Banier.
De son côté Martine Aubry juge l'intervention présidentielle entachée "d'auto-persuasion et d'auto-satisfaction". "Je l'ai trouvé vivant dans un autre monde, très loin des Français et aussi très loin de la vérité, sur le chômage, les retraites, la sécurité". Quelle novation dans la critique.
Xavier Bertrand, au contraire, joue la partition inverse. Le chef a, selon lui, "montré que sa seule priorité ce sont les Français". Quelle surprise.
Mais ne serait-il pas nécessaire d'appeler les citoyens et les contribuables à donner vraiment leur avis.
63 % d'entre eux savent que l'on doit réduire les dépenses. Cela sans doute déplaît à la classe politique et aux médiats (1). Nos énarques et nos maîtres, nos donneurs de leçons, vivent du gaspillage systématique. Leur influence se nourrit de subventions. Leur pouvoir se régénère de promesses démagogiques. Ils propagent une étonnante horreur de ce qu'ils appellent du populisme. Tant pis. Tant pis pour eux. Être à l'écoute du peuple, en effet, cela devrait s'imposer à tous ces gens gui se gargarisent si volontiers du mot démocratie. Cela implique, ou plus exactement cela impliquerait, que l'on allège le tribut infligé à ceux de nos compatriotes qui daignent encore travailler. Diminuer les impôts, diminuer les dépenses, diminuer les déficits, d'autres pays le font. Ils ne s'en portent que mieux. Pourquoi pas la France ?
Retenons bien ceci : 53 % de nos concitoyens redoutent un accroissement du fiscalisme de la part de nos spoliateurs (2) mais 63 % désirent la baisse de la dépense publique. Je trouve ces Gaulois fort raisonnables, plus que leurs dirigeants.
JG Malliarakis

- J'écris ce mot avec un "t", à l'occitane, pour renvoyer à leur fonction putride de "médiatisation". Merci à mes amis lecteurs de leur indulgence pour cette coquetterie.
- cf. On se reportera à la dénonciation de la spoliation dans l'œuvre de Frédéric Bastiat.
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