En 2008 dans un entretien à l'Express, le Premier ministre avait évoqué l'hypothèse de le modifier une nouvelle fois. Celui-ci ayant donné en 2004 le pouvoir à une gauche pourtant minoritaire dans 20 régions métropolitaines sur 22, il fallait s'attendre à une protestation de l'ARF. Cette "association des régions de France" regroupe en effet les chefs de leurs exécutifs respectifs. L'opposition manifestée par ce syndicat des sortants, exprimée par M. Alain Rousset Président du Conseil régional d'Aquitaine depuis 1998, a bloqué tout retour à la normalité.
Il faut souligner en effet que l'on a fini par adopter en France un dispositif à peu près unique au monde. Ce scrutin de liste à deux tours prévaut également, dans l'Hexagone, depuis juin 2000 pour les élections municipales dans les villes de plus de 3 500 habitants. Il a donné les résultats que l'on sait en 2001 et 2008, artificiellement favorables à la gauche. La règle du jeu a été calculée pour que les listes de droite se trouvent obligatoirement divisées au second tour, de par leur maladresse. À l'époque, le front national obtenait sans difficulté entre 10 et 15 % des voix. On considérait donc qu'une liste à plus de 10 % pouvait se maintenir. En revanche les listes de gauche pouvaient impunément fusionner entre les deux tours, y compris avec les écologistes, les communistes, etc. dès lors qu'elles obtenaient plus de 5 %.
Évidemment les pourcentages prévisionnels ont évolué. Le glissement de l'UDF devenue Modem, la poussée de l'écologisme, les recompositions de l'extrême gauche, ont compliqué entièrement la donne. Les conséquences du mécanisme paraissent désormais impossibles à évaluer. Rappelons encore qu'il avait été exclusivement conçu, au départ, pour diviser les droites et regrouper la gauche dite plurielle de l'ère Jospin.
On entend donc dire actuellement, dans chaque camp, que telle liste n'est apparue en fait que pour interdire à telle autre de passer la barre des 10, et faire ainsi le jeu d'une autre. Cette accusation vise notamment le NPA de Besancenot, certes en perte de vitesse. Je supplie mes lecteurs de sécher leurs larmes et de mesurer toute la nuisance que ce parti déploie désormais contre le Front de gauche, alliance du grand humoriste Mélanchon uni à la toujours sémillante Buffet chef de ce qui s'appelle encore le parti communiste français.
On se perd dans le labyrinthe de cet écheveau. S'ajoute à cela la fronde interne au parti socialiste, qui vient d'exclure 50 amis de Georges Frêche, alors même que ce dernier reçoit le soutien de nombreux poids lourds, tel Georges Collomb maire de Lyon.
Contre toute attente, par conséquent, on peut tout imaginer quant au résultat politique de cette élection. Très ouverte puisque devenue incompréhensible elle n'interdit même pas d'imaginer un relatif succès d'une UMP créditée pourtant d'à peine 30 % des voix dans les sondages. Souvenons-nous qu'avec 28 % des voix aux européennes de 2009 le parti au pouvoir a été considéré comme triomphant.
Pour qui voter ? Tout dépend des situations locales. Car, en dehors d'une préférence de principe pour la droite, la meilleure règle de conduite demeure de voter en fonction de ce que l'on sait de la tête de liste régionale. La loi en vigueur ne reconnaît juridiquement qu'elle. Les "listes départementales" fonctionnent comme autant de "sections".
Il faut donc tourner le dos à tous les faux calculs du prétendu "vote utile".
On gagne toujours au contraire à se déterminer en faveur de la personnalité la plus proche de ses opinions.
Cela varie donc selon les interlocuteurs, bien sûr, mais aussi selon les lieux.
Si je votais, par exemple, en Languedoc, je ne voterais personnellement jamais pour Frêche, en aucun cas. Mais j'avoue que le pied de nez que cet affreux personnage fait actuellement à la bienséance parisienne ressemble à ce vin qui, à petite dose, "réjouit le cœur de l'homme" si j'en crois le psaume 104,15. Saint Paul le rappelle dans sa première lettre aux Corinthiens (6,9-10). Comme vous le voyez je prends appui sur les meilleurs auteurs et puisque l'intéressé se proclame "d'origine marrane comme Franco" (1) le voici, paraît-il, à l'abri de tout soupçon malséant.
Bien entendu ces considérations ne recouperont que très partiellement le vote effectif des Français.
Ce mode de scrutin absurde ne mérite cependant pas de réponse plus élaborée.
Il correspond hélas au niveau lamentable de notre débat politique. Il encourage l'irresponsabilité des collectivités locales, aggravé d'années en années et de réformes en réformes depuis 30 ans. Il reflète le déclin général de nos institutions. Déshonorant un peu plus le mot de "république", il caractérise notre régime post-démocratique.
JG Malliarakis
Apostilles
- cf. la Dépêche du Midi du 13 février
15.2 Les trois erreurs de Cohn-Bendit
3.2
Un échec des marxistes latino-américains
2.2
L'instrument Villepin décevra la gauche
29.1 Pourquoi Aubry accepte le prix du ridicule
28.1 Les magistrats veulent faire taire les critiques
27.1La collusion entre le pouvoir et la CGT
26.1 Ombres sur la libre expression
25. 1 La prochaine crise pourrait nous rendre intelligents
14. 1 La classe politique peut pleurer sur elle-même et sur sa propre impopularité.
13.1 La CGT Marseille et la rigueur des sectes
12.1 Situation du patriarche œcuménique Bartholomée
8.1 Batailles pour l'Histoire
5.1 Pourquoi la gauche fusille Camus en effigie
4.1 Comment les Turcs regardent leurs alliances
Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique
sur le site de Lumière 101
La représentativité de la classe politique varie dans chaque circonscription en fonction du taux de suffrages exprimés. Plus ce taux est bas, moins les heureux élus sont fondés à se rengorger. Si vous êtes mécontent, abstenez-vous ! Si vous redoutez d'être repéré, votez blanc !
Rédigé par : Pirée | mardi 16 fév 2010 à 06:06
Suggestion
Lors des élections , quelles qu'elles soient et où qu'elles se tiennent , on devrait obligatoirement afficher cette cruelle vérité : "L'électeur doit se souvenir qu'il est et sera toujours le contribuable de son vote"
Bien cordialement
Rédigé par : Jean-François Dufour | mardi 16 fév 2010 à 08:43