Les mêmes causes produisant souvent des effets analogues, observons en effet qu'aucun véritable remède n'a encore été apporté à la folie des financiers et à l'outrecuidance des banquiers. Bien au contraire on s'est empressé de consolider leurs prédations. On a voulu sauvegarder, par priorité, leurs intérêts. L'aggravation de leurs comportements irresponsables, adossés à l'aveuglement des agences de notation, autorise donc à envisager le pire.
En dehors toutefois de telles considérations un peu abstraites, et d'ordre mondial, on se permettra de revenir aux réalités plus spécifiques de l'Hexagone. Dans tous les cas de figure, on peut présumer que les pays qui s'en sortiront le mieux devront leur salut au nombre moins élevé des sottises démagogiques commises par leurs dirigeants.
Or ces derniers temps, un certain nombre de déconvenues convergentes auraient pu donner un signal des difficultés du modèle exportateur dirigiste français. L'échec de la filière nucléaire nationale à Abou Dhabi est commenté dans le quotidien Le Monde (1) par sa principale responsable, la géniale patronne d'Areva, Mme Lauvergeon. Celle-ci l'attribue à la concurrence déloyale du méchant Coréen Kepco.
Dassault en 20 ou 30 ans, n'a pas su exporter un seul Rafale. Le "meilleur avion du monde", vanté comme un "couteau suisse", se révèle, pour tous les utilisateurs possibles démarchés, moins attractif et plus cher qu'un traditionnel laguiole. Mais Challenges (2) ose donner la version suivante de ses plus récents déboires : "Noyautées par les Américains, les forces aériennes brésiliennes semblent décidées à tenir tête au gouvernement : il leur suffit de gagner du temps, alors que Lula quitte le pouvoir en octobre prochain."
L'Inde vient d'annuler sa commande pour six Airbus A330 ravitailleurs, au profit sans doute du russe Iliouchine, bêtement moins cher. Même le TGV d'Alsthom est doublé en Chine par Siemens qui construit entre Canton et Wuhan, la ligne la plus rapide (350 km/h) et la plus longue (1 068 km) du monde. EADS et sa filiale Astrium se voient même concurrencées pour le marché de Galileo par la PME familiale allemande OHB retenue pour fabriquer 14 satellites des 22 prévus.
Tout cela devrait faire normalement partie des aléas d'une activité industrielle et commerciale fondée sur la libre concurrence. On ne gagne pas quand on ne sait pas perdre, et tirer les leçons de ses insuccès.
Mais voici le diagnostic que Challenges hebdomadaire économique du groupe Perdriel, propriétaire du Nouvel Observateur, propose à ses lecteurs. Le recul généralisé des groupes français à l'international "est surtout dû à l'absence de réel soutien des politiques, désormais plus soucieux de communication que d'efficacité."
Restons polis, et disons que ce petit règlement de comptes à usage interne ne semble pas à la hauteur de la situation.
La finance de gauche et la bulle médiatique si intelligente qui lui cire les chaussures n'ont pas compris l'urgence de changer de paradigme.
L'économie française ne souffre pas d'un manque de soutien, mais d'une pléthore d'interventions supposées la protéger.
On demeure par exemple perplexe devant le discours franchement décalé, pour ne pas dire déplacé, tenu par le ministre Estrosi autour des délocalisations industrielles programmées par Renault.
Envisage-t-on de subventionner encore plus les grosses industries sous prétexte de contrarier leurs logiques transnationales ?
Que veut dire "volontarisme" quand la volonté de résoudre les problèmes de fond n'existe pas. Rappelons que les entreprises de notre pays se trouvent toutes, les grandes comme les petites, les moyennes comme les très petites, pénalisées par les prélèvements sociaux et fiscaux et les excès de la réglementation bureaucratique.
Ne serait-il pas temps, par ailleurs de constater que les vrais gisements de l'emploi et de l'activité ne se trouvent plus dans les très grandes entreprises, mais au contraire dans les petites ? Que le financement de l'économie ne doit plus reposer sur des banques, de plus en plus prédatrices, de plus en plus technocratiques, de plus en plus autistes mais sur les ressources propres des unités de production et sur la mobilisation de l'épargne de proximité ?
À la dérisoire démagogie de ministres en quête de suffrages et de promotion, qu'on nous permette de préférer les propos de leur collègue Hervé Novelli, simple et discret secrétaire d'État au commerce : "Les Français sont encore plongés dans la crise, l'identité de la France ne parle pas aux gens. Cela ne fait pas partie de leur priorité. L'agriculteur, l'artisan, le petit entrepreneur, le salarié menacé de fermeture veulent entendre un discours, non pas de protection, mais d'ambition." (3)
On appréciera aussi la détermination affichée par Mme Lagarde qui, interrogée sur une possible hausse des impôts pour réduire le déficit public record prévu pour l'instant à 8,5 % du PIB en 2010, a su redire que la "priorité absolue" serait la réduction de la dépense publique (4).
Certes, en contradiction avec le discours dominant, on préfère de beaucoup entendre cela. Mais on aimerait encore plus que la sympathique logique verbale de M. Novelli ou de Mme Lagarde entre dans les faits.
JG Malliarakis
Apostilles
- "Nucléaire : 'La Corée était prête à tout à Abou Dhabi'… Entretien avec Anne Lauvergeon." Le Monde en ligne le 18.01.10 à 14 h 49
- Challenges, vendredi 22 janvier 2010
- cf. "Le Monde" du 20 décembre 2009.
- cf. Reuters du 15 janvier
14. 1 La classe politique peut pleurer sur elle-même
et sur sa propre impopularité.
13.1 La CGT Marseille et la rigueur des sectes
12.1 Situation du patriarche œcuménique Bartholomée
8.1 Batailles pour l'Histoire
5.1 Pourquoi la gauche fusille Camus en effigie
4.1 Comment les Turcs regardent leurs alliances
1er.1 La fin du Père Noël
30.12 La jurisprudence Julien Dray petit-fils d'horloger
23.12 Nora Berra doit présenter des excuses ou quitter le gouvernement
22.12 La pression mondialiste peut devenir totalitaire
21.12 Copenhague entre gauchistes et financiers
18.12 La nuisance Séguin a encore frappé
14.12 Le fiscalisme hexagonal instrument du jacobinisme
10.12 La victoire caricaturale de l'affreux Frêche
7.12 Remettre Croizat à sa place.
5.12 Le coût de la pré-adhésion turque
27.11 La redécouverte du risque souverain
Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique
sur le site de Lumière 101
Dans le monde ouvert dans lequel nous vivons (heureusement), la clé du succès est la compétitivité. Pas l'interventionnisme public.
L'Etat doit se borner à rendre l'environnement des entreprises propices à leur compétitivité: cadre juridique et fiscal stable et favorable.
Le reste suivra.
Inutile d'accuser la méchanceté des coréens des brésiliens et des chinois. Eux se préoccupent de leur compétitivité.
Rédigé par : Jacques Peter | lundi 25 jan 2010 à 16:33
Nous savons que le système social français agit sur les emplois comme un véritable serial killer.
Après les artisans, commerçants, agriculteurs, professions libérales, pmi-pme qui ont été saignés à blanc depuis des décennies, sans que cela émeuve l'opinion dite publique trompée par les médiats et les politiciens, ce sera au tour des grands groupes quasi étatiques que vous citez.
Comment veulent il vendre aux pays étrangers des produits dont les prix ont été rendus exorbitants par les charges sociales et fiscale françaises ? Ces entreprises ont jusqu'alors monopolisé, par des privilèges accordés des hommes-de-l'état-français, des marchés rendus juteux (trains, avion, énergies ...)ici seulement, en France, et au détriment des consommateurs (voyez les prix énormes des billets chez AIR FRANCE et à la SNCF !).
Les véritables fleurons de notre économie passée sont soit dans les cimetières des entreprises mises en faillite par les urssaf, soit partis à l'étranger pour échapper à une mort lente et certaine ; cette fuite est appelé improprement "délocalisation".
Rien, il ne restera rien des emplois français et ce massacre est une tragédie nationale : agriculteurs, ouvriers, techniciens, ingénieurs, tous auront été victimes du système social français. Et il n'y a toujours pas de BAC pour arrêter les criminels responsables, ni de Cour pour les juger. Car il s'agit bien d'un crime contre les hommes, contre une nation et un peuple européens. On doit donc regretter que les Directives de 1992 de la C.E.E. en matière de libération des assurances sociales (maladie, prévoyance, retraite) aient été ignorées ici, en toute impunité.
Il est encore temps, car "en politique le désespoir n'est pas permis", d'exiger de Bruxelles que les Directives de 1992 soient appliquées en France. Mais faudra-t-il pour cela que des désespérés s'immolent par le feu comme des bonzes le faisaient au Vietnam, pour que cette question de fonds parvienne sur la scène nationale, au lieu d'être restreint à des débats entre économistes authentiques, méprisés par les hommes-de-l'état, en dépit de tout principe de Liberté ? Beaucoup d'entre nous, qui n'ont pas la mémoire courte, pourraient d'ailleurs faire la liste des morts, connus, qui ont disparu tragiquement pour avoir voulu se battre contre les monopoles étatiques sociaux français. Et on pourrait même lever une stèle à la mémoire des inconnus morts de désespoir ou d'une maladie par somatisation ; car il s'agit d'un drame national encore plus grave que le cancer ou la maladie d'Alzeimer, c'est peu dire : la fin d'un peuple et d'une civilisation.
Rédigé par : Dominique Dutour | mardi 26 jan 2010 à 11:10
Houlà, que de pessimisme!
Mais je ne pense pas en outre que la prophétie de Lagarde se vérifie, elle aussi fait des phrases. Les dépenses de l'état sont ignominieuses et parfois insultantes pour le contribuable.
Rédigé par : minvielle | mercredi 27 jan 2010 à 11:07
Cher Minvielle
Beaucoup de mes clients fréquentent les salons industriels, ou de biens de consommation, voire de produits du luxe. Ils sont effarés de voir que les stands sont majoritairement occupés par des entreprises non françaises, ou françaises mais ... produisant dans un pays étranger.
D'autres me disaient il y a quelques années que j'étais " pessimiste ", ils me disent maintenant que j'étais en dessous de ce qui s'est passé. L'économie française est en train de mourir et le scepticisme n'est pas un remède. Des secteurs économiques ont disparus, des métiers, des entreprises de dimension mondiale, la paysannerie etc. La désinformation qui est absolue sur l'état de notre économie mais chacun peut, sur internet, chercher et trouver des documents sur l'état réel de la France ( plus de 6 millions de chômeurs réels, un déficit commercial vs un excédent allemand, etc.)Le Titanic coulait et l'orchestre jouait encore ... c'est ainsi.
Est ce être pessimiste que voir en face la réalité et de dire sinon la vérité, mais au moins quelques vérités ?
En toute sympathie
Rédigé par : Dominique DUTOUR | mercredi 27 jan 2010 à 17:42