À propos du personnage, commençons par corriger une désinformation typique de notre actuel système d'intoxication : la fiche Wikipedia de l'intéressé telle qu'elle apparaissait ce 7 décembre.
On y trouve deux contre vérités révélatrices :
- Non Ambroise Croizat n'a pas été "député communiste de la Seine de 1936 à 1940", mais de 1936 à 1939.
Le point de détail me semble essentiel et une fois de plus on repère un autre mensonge.
- Non le parti communiste n'a pas été "interdit sous le gouvernement de Vichy", et notre héros n'a nullement "purgé une peine de prison pour son appartenance au PC."
Les faits se déroulent chronologiquement de la manière suivante.
En août 1939. L'Union soviétique s'allie avec Hitler Les deux compères vont se partager la Pologne, cas le plus connu mais également tout un arc de pays d'Europe orientale : l'URSS avalera ainsi la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie, un morceau de Finlande (république de Carélie), un autre de Roumanie (actuelle "république de Moldavie") et même une partie de la Tchécoslovaquie (Ruthénie subcarpathique qui deviendra Ukraine subcarpathique) (1). L'une des capitulations occidentales les plus écœurantes lors des accords de Yalta en 1945 laissa à Staline l'ensemble des territoires acquis dans le cadre de son alliance d'août 1939 à juin 1941, avec l'Allemagne hitlérienne.
En septembre 1939 le parti communiste est interdit par le gouvernement radical et socialiste d'Édouard Daladier, pour avoir approuvé ce pacte. Les dirigeants députés sont incarcérés comme dangereux pour la sécurité nationale. Ainsi le député Croizat. [La dramatique histoire du jeune et malheureux Guy, fils du député stalinien Prosper Môquet, résulte de cette situation glauque. Le parti communiste accepte le rôle d'un jouet dans sa complicité avec l'Union soviétique. Il ne s'affublera d'un faux nez "patriotique" que beaucoup plus tard].
En juin 1940 les Allemands arrivant à Paris emmenaient dans leurs fourgons un certain nombre de leurs alliés du moment. Il semble bien que Jacques Duclos par exemple soit arrivé fin juin venant de Bruxelles. Pendant toute l'occupation dirigera l'appareil stalino-communiste. Au même moment Maurice Thorez, ayant déserté de l'armée française "résistait" courageusement, mais confortablement à l'abri, en Union Soviétique. (2)
Si le camarade Croizat est libéré en 1943, ce ne peut donc pas être "après avoir purgé une peine de prison". C'est plus probablement parce que, après l'occupation de la zone sud, tous les agents et espions allemands que le gouvernement de Vichy continuait de détenir, de juger, et parfois de fusiller ont été libérés par les occupants désormais les maîtres de tout le territoire français. Voilà un point qu'une historiographie sérieuse devrait préciser. Il passe alors en Afrique du nord, nous dit-on : s'il s'était évadé, on nous le claironnerait certainement.
On retrouve donc notre homme dans les gouvernements successifs, de 1944 à 1947, jusqu'à l'expulsion des staliniens par Ramadier.
Remercions le site communiste "Camarade" de nous retrouver dès lors une mâle citation de Croizat : "Jamais nous ne tolérerons que soit rogné un seul des avantages de la Sécurité sociale. Nous défendrons à en mourir et avec la dernière énergie cette loi humaine et de progrès." Allez camarades, au moins avec vous on ne s'embarrasse pas de fioritures. Et puis, vous mettez au bon endroit, la bonne illustration, celle qui vous fait vibrer, celle des vaillants soldats soviétiques.
Répondons en effet à Croizat que les "avantages de la sécurité sociale" n'existent pas. Totalement illusoires et ruineux, ils pourrissent d'eux-mêmes par l'impasse économique et financière qu'ils provoquent. La retraite par répartition a bénéficié aux générations fondatrices. Les derniers pensionnés à en profiter s'y accrochent. On les comprend. Mais, après eux, elle s'écroulera sous le poids de la démographie. Elle a d'ores et déjà provoqué la faillite virtuelle des finances publiques.
Remercions aussi les promoteurs de cette pauvre petite manif passéiste du 2 décembre, seul coup d'État dont ils demeurent vraiment capables. Ils nous ont montré à nouveau que la sécurité sociale ne doit aucunement être considérée comme une expression de "l'identité nationale" – ce que proclamait le misérable Chirac en septembre 1995. Elle ne résulta pas non plus des "ordonnances signés par le général De Gaulle". (3)
Dédier une place à Croizat en un lieu que personne n'habite (4), ou plutôt remettre Croizat à sa place ? Oui. Celle d'un stalinien. Quand je vais fleurir les tombes familiales aimées au Père Lachaise, je pousse jusqu'au Mur des Fédérés. Y reposent les restes de certains patriotes de la Commune de Paris. Eux, au moins, ont manifesté le courage de mourir vraiment les armes à la main pour leurs idées fausses mais généreuses. Et je vois, en face, ces rangées de dignitaires impunis de l'appareil communiste qui leur font face. Dans un sens : ils se trouvent déjà à leur place.
JG Malliarakis
Apostilles
- Ce simple fait élimine l'argument bien connu, tant de fois ressassé, et refourgué par leurs lèche-bottes, des staliniens qui justifient l'alliance de 1939-1941 par la tentative, mal inspirée sans doute, de sauver la paix européenne marchandée à Münich en 1938. L'URSS n'était évidemment inspirée par aucune "solidarité slave" à l'endroit de la malheureuse Tchécoslovaquie puisqu'elle en annexera sa petite part.
- À lire sur ce point la remarquable biographie de Philippe Robrieux "Thorez vie secrète, vie publique" (Fayard 1975). Je tiens personnellement ce livre pour le plus éclairant tableau du communisme "à la française". À dénicher d'occasion, bien évidemment.
- Ce point historique est intelligemment démêlé dans le livre de Georges Lane.
- À l’intersection de l’avenue Paul-Appel et de la rue Monticelli (14e). Métro Porte d’Orléans.
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Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique
sur le site de Lumière 101
Vous pouvez faire la même chose avec Guy Môquet qui fut tout sauf un résistant !
Arrêté alors qu'il distribuait des tracts pro-allemandes ; le PC et les nazis étant en pleine idylle grâce au pacte germano-soviétique.
Rédigé par : Simon95 | mardi 08 déc 2009 à 13:26