On pourra s'agacer de telle ou telle récupération, déplorer telle ou telle déformation des faits, mesurer le peu de place accordée aux vrais acteurs de l'ébranlement du système. Ce que les hommes de l'État déclarent aujourd'hui revêt d'ailleurs une importance relativement médiocre en regard de la leçon de l'Histoire, telle qu'elle s'est réellement déroulée.
Au-delà de l'événement que nous appelons "la chute du Mur", le plus souvent invoqué, on doit retenir la longue patience, et dans certaines circonstances l'héroïsme des nations demeurées captives à la suite des accords de Yalta. Le nom même de cette station de Crimée où Churchill, Roosevelt et Staline s'accordèrent en février 1945 sur les grandes lignes du système d'après-guerre semble s'estomper dans la mémoire collective. On nous a beaucoup trompés, ou désinformés, à ce sujet, notamment parce qu'à partir de 1946 progressivement et, à compter du printemps 1947, donc finalement assez vite, les occidentaux ont su geler toute complaisance nouvelle à l'endroit du monde communiste. Mais le plus grave était déjà scellé, et les années suivantes n'ont vu que la consolidation, par Staline d'abord puis par ses successeurs, de leurs acquis considérés comme irrévocables. Pendant de longues années le schisme sino-soviétique aura finalement fait plus de mal au bloc oriental que les véritables initiatives de l'Ouest. Puis vinrent Ronald Reagan (élu en novembre 1980), le gouvernement de Margaret Thatcher (1979), et d'abord l'élection du pape polonais Jean-Paul II (1978), puis les grèves des 17 000 ouvriers des chantiers navals de Gdansk dirigés par Lech Walesa (août 1980). N'oublions pas cette chronologie, ne l'inversons pas. Timidement d'abord, dans un discours auprès d'une association des Lituaniens des États-Unis, le président Reagan parlera pour la première fois depuis 1945, non plus de "contenir le communisme" (doctrine Truman de 1947 inspirée par le long télégramme de George Kennan de 1946) mais tout simplement de libérer les nations captives. Ce propos deviendra désormais, officiel un peu plus tard. N'oublions pas que Reagan, militant anticommuniste de toujours, sympathisant de la revue National Review, était portée par la vague dite "conservatrice" (1) en rupture avec le courant dominant de la politique américaine et occidentale. Quand, à Berlin en 1987, il osera lancer, devant la porte de Brandebourg, à l'attention de Gorbatchev son fameux "abattez ce mur", oui le système de Yalta avait enfin perdu, grâce à lui et grâce au courage de tous les défenseurs de la liberté, à l'est comme à l'ouest, sa principale composante : la complaisance occidentale. Le coup de grâce lui fut donné en 1991 par Boris Nicolaïevitch Ieltsine ordonnant à Gorbatchev de dissoudre le parti communiste de l'union soviétique, deuxième pilier mais principal bénéficiaire, de l'ordre institué entre 1945 et 1949 sur notre continent.
Ne perdons quand même pas de vue que les séquelles de la seconde guerre mondiale n'ont pas encore toutes disparu, loin de là. Le statut punitif de l'Europe demeure. Il semble évidemment légitime de proclamer l'Afrique aux Africains, mais non moins scandaleusement provocateur de vouloir l'Europe aux Européens. On présente encore les admirateurs de Staline comme de grands patriotes. La post-démocratie les intègre dans son paysage, comme elle bannit les gens qui ont toujours combattu le marxisme, le léninisme, le trotskisme, le maoïsme, le guévarisme et autres criminels associés proliférant dans le tiers-monde.
Pour ma part, je tiens à dire combien je partage aujourd'hui comme hier la joie de nos cousins germains, mais que je me méfie du phénomène récupérateur entrepris en France par la gauche-caviar, alliée du parti communiste, et même par les héritiers du gaullisme, qui boudaient tous visiblement il y a 20 ans et qui ne comprenaient même pas ce qui se passait. Aujourd'hui encore certains font mine de regretter l'époque de l'Allemagne de l'est. Ils requièrent notre vigilance. Ils ne gâcheront pas notre émotion.
JG Malliarakis
Apostilles
- À ne pas confondre avec les "néoconservateurs" souvent issus du monde trotskiste et qui connurent leur heure d'éphémère célébrité au début de la présidence de GW Bush.
6.11 Chirac au risque de la justice et sa connivence avec le socialisme
29.10 Communisme impuni et totalitarisme
20.10 Mireille dernière
19.10 Feux de pailles agricoles
12.10 Le faux accord turco-arménien de Zurich ne doit pas nous tromper
10.10 Les gaspillages publics ne sont pas perdus pour tout le monde
Vous pouvez entendre l'enregistrement de cette chronique sur le site de Lumière 101
Vous avez raison de mettre les gaulistes avec les communistes et la gauche caviar.Il y a eu tellement de gages donnés au parti communiste (une des dernières la lettre de guy moquet), non la deuxième guerre mondiale n'est pas finie dans les esprits. Vite relire la France aux ordres d'un cadavres de Maurice Druon.
Rédigé par : patrick perrin | lundi 09 nov 2009 à 13:16
Cet article est excellent.En février 1945, un buveur de wisky invétéré,un président malade, franc-maçon de surcroit et un dictateur se réunissent pour se partager le monde. Il ne faut surtout pas déplaire à l'oncle Joseph, plus grand dictateur du 20 ème siècle.
Voilà comment l'on scelle un destin de l'histoire. Ce n'est pas une fatalité, c'est la bêtise des grands qui prennent les peuples en otages.
Si en 1943, les franco-britanniques avaient débarqué dans les balkans, les troupes de Staline ne seraient jamais allées à Berlin.
Il était possible de traiter avec l'Allemagne mais pas avec Staline.
Rédigé par : gout | lundi 09 nov 2009 à 17:46