Donnons un échantillon de ses remarquables fusées.
Aux yeux de ce gourmand observateur (2), GW Bush a doublement permis l'élection d'Obama.
Par ses erreurs penseront les hypercritiques ? Pas du tout !
Premièrement "pas encore ministre", l'expert contredit joyeusement presque tous les journalistes parisiens, presque tous les diplomates du quai d'Orsay, et presque tous les correspondants français. Les Américains, affirme notre auteur, après deux ou trois années très difficiles, ont gagné en Irak. J'eusse, dans un tel registre, aimé l'entendre plus élogieux pour le général Petraeus. Mais la nature a configuré autrement notre impertinent chroniqueur. Sa formation l'incite à considérer que les militaires ne servent qu'à perdre les guerres. Je dirais pour ma part que, comme pour les avocats, cette loi se vérifie une fois sur deux.
Au bout du compte, dès 2008, il était, toujours selon lui, devenu parfaitement plausible de programmer, comme l'a fait le candidat des démocrates, le retrait progressif du corps expéditionnaire, et de proposer qu'il soit redéployé en Afghanistan. De la sorte, le courageux sénateur Mac Cain se trouva privé de l'argument patriotique qui eût permis sa victoire.
Secondement, préparant le terrain à la possibilité, peu crédible jusqu'alors, de l'élection d'un homme considéré comme "de couleur" à la Maison Blanche, les républicains avaient nommé aux plus hautes fonctions gouvernementales le général Colin Powell d'abord, puis Condoleezza Rice.
En rentrant de la préfecture des Hauts-de-Seine, où la gare voisine toujours, après qu'on s'est éloigné de l'avenue Benoît Frachon, avec une avenue Maurice Thorez, une rue de Stalingrad et une avenue de la commune de Paris je feuilletais son livre en méditant ses stimulantes assertions.
Le conférencier ayant donné de fort intéressants éclairages sur la question iranienne (3), je ruminai notamment l'un d'eux. À propos de la prise de position, habilement flexible, de la France des droits de l'Homme, il l'avait assimilé à celle de ce qu'il appelait "tous les pays civilisés".
Certes, dans une première approche, brièvement, chacun comprend, ou croit comprendre, de quoi il s'agit. Pourtant comme lorsqu'on entend parler de "la communauté internationale", ou bien l'interlocuteur s'exprime de manière sincère, croyant sérieusement aux critères diplomatiques de la civilisation, ou bien on utilise de tels concepts un peu creux pour légitimer des communiqués vains et vagues. On le fait alors afin d'aboutir à des manipulations de l'opinion, qui, elles, se révèlent fort précises.
Je ne peux pas croire notre subtil Alexandre assez retors pour chercher à s'exprimer de la sorte, et avec de telles arrières pensées, devant quelques dizaines de personnes.
Je n'imagine pas non plus de sa prescience qu'elle lui ait permis d'anticiper, le 16, le titre totalement mensonger du quotidien "Le Monde" daté du 18 juin affirmant en première page : "la Russie et la Chine soutiennent Ahmadinedjad", simplement parce que, président sortant de l'Iran, il participe à la conférence de l'organisation de Shanghaï aux côtés des deux superpuissances précitées et des républiques d'Asie centrale. Le quotidien "Le Monde", on doit s'en souvenir, ne se trompe jamais, mais il trompe ses lecteurs. Alexandre Adler, lui, écrit dans le Figaro qui, à défaut de vrai lectorat, peut se prévaloir de n'induire plus personne en erreur.
Son raccourci sur les "pays civilisés" me semble donc relever de la première hypothèse évoquée, celle de la sincérité, rapide.
Quand on parle en effet de civilisation, comment en exclure la Chine, la Perse ou l'Inde sans s'exposer à l'accusation de confusion entre l'occident et le judéo-christianisme.
Un turcophile aussi convaincu, et parfois convaincant, que l'orateur ne commet pas cette erreur.
Il ne saurait confondre non plus les pays et les régimes. J'ignore s'il existe vraiment des nations amies. Cette notion est trop souvent invoquée pour se voir récuser les conséquences les plus immédiates. Remarquez par exemple combien on parle en général d'amitié franco-américaine, franco-turque, ou franco-n'importe-quoi, dans un premier mouvement rhétorique quand on s'apprête à en désavouer les conséquences, au balancement de phrase suivant. La tradition gaulliste, dont je ne me préoccupe guère qu'a contrario, proclame volontiers l'absence d'affinité transfrontalière. "Une nation n'a pas d'amis", cette phrase de Michel Debré résonne encore dans mes oreilles et la lecture du livre de souvenirs de Maurice Couve de Murville le démontre, peut-être même inconsciemment.
J'éprouve donc naturellement un certain plaisir à contrarier cette antidiplomatie : je crois par exemple qu'un Français "normal" aime naturellement l'Italie, malgré tout le mal qu'à certaines périodes de l'Histoire nos armées aient pu commettre dans la Péninsule. Ce pays nous a donné notre langue, nous lui avons donné son drapeau. Bien sûr il nous arrive réciproquement de sourire les uns des autres, puisqu'un Français, ce n'est jamais qu'un "Italien de mauvaise humeur".
Dans le monde actuel, la véritable géopolitique se trouve entièrement renversée par rapport à l'époque de Vidal de la Blache et de ses adversaires de l'est. Il ne s'agit plus de faire la guerre à son voisin mais de regrouper des peuples sur la base de leurs proximités culturelles, puis au-delà des cultures, légitimement différentes, d'établir un front commun de la civilisation en lutte contre la barbarie.
La vraie question à laquelle m'invite à réfléchir la petite remarque anodine entendue ce 16 juin suppose de mesurer la part de l'héritage et des valeurs du christianisme dans l'idée que nous nous faisons de la civilisation.
En espérant ne pas abuser ainsi de la patience de mes indulgents lecteurs, j'essaierai, dans les jours à venir, de rassembler quelques éléments de réponse à cette question, au gré de cette libre chronique de l'Insolent.
Apostilles
- 4 avenue Benoît Frachon à Nanterre.
- cf. son livre "Le monde est un enfant qui joue" (Grasset)
- résumés le lendemain dans sa chronique du 17 juin sur France Culture, chronique courageusement et intelligemment conclue par "c'est une question à laquelle je n'ai pas de réponse".
JG Malliarakis
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Un "Cahier de l'Insolent" consacré à "La Question Turque" parîtra le 15 septembre. Il formera un petit livre de 128 pages et coûtera 10 euros à l'unité. Conçu comme un outil argumentaire, contenant une documentation, des informations et des réflexions largement inédites en France, vous pouvez le commander à l'avance, au prix franco de port de 8 euros (valable jusqu'au 31 août expédition le 15 septembre) pour un exemplaire, 35 euros pour la diffusion de 5 exemplaires. Règlement par chèque à l'ordre de "l'Insolent" correspondance : 39 rue du Cherche Midi 75006 Paris.
Vous pouvez écouter l'enregistrement de cette chronique sur le site de Lumière 101
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