De toute évidence l'unité fait recette dans la mesure, presque partout, les huit principales organisations de salariés – CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC, FSU, SUD-Solidaires et UNSA – ont défilé en commun. A Paris, on a vu les trois chefs concurrents mais néanmoins unis, les camarades Thibault (CGT), Chérèque (CFDT) et Mailly (FO) défiler bras dessus, bras dessous. Et cela s'est traduit par la plus importante "Fête du Travail" depuis bien longtemps.
Quantitativement cependant le concept de défilé du 1er mai, traditionnelle démonstration de force des luttes sociales, marque encore le pas. Tenons-nous aux chiffres de la police et mettons entre parenthèses les évaluations cégétistes, la comparaison demeure proportionnellement du même ordre. Ce vendredi 1er mai, on a dénombré sur toute la France 465 000 manifestants (1,2 million selon la CGT). Ce rassemblement représente le quadruple de l'année précédente où 120 000 personnes avaient défilé. Mais il se révèle 2 à 3 fois moindre par rapport à l'évaluation des renseignements généraux le 19 mars à hauteur de 1 200 000 (3 millions selon les staliniens).
À faire défiler leurs troupes comme des choristes d'opéra, les dirigeants des centrales risquent de lasser. Et ils le savent.
Ils gèrent aussi une fonction d'opposition désertée par les deux forces politiques de gauche, le parti socialiste en crise durable et le vieil appareil stalinien, usé jusqu'à la corde, en coma prolongé, toujours crédité de 2 % des voix dans le dernier sondage.
Quand, à 13 h 59 ce vendredi, les chiffres de la mobilisation sont tombés, il a bien fallu en effet se rendre à l'évidence. Globalement, Jacques Voisin, chef de la CFTC, doit reconnaître "une mobilisation pas terrible, moitié moins que le 19 mars" (1) mais il ajoute paradoxalement "c'est difficile de comparer". François Chérèque, terne mais honnête patron de la CFDT, croit habile de tempérer le jugement : "C'est certainement le 1er mai le plus important qu'on ait eu ces dernières années. En province, la mobilisation est moins importante que le 19 mars, mais on s'y attendait (1)."
Bien évidemment, nos chères bureaucraties syndicales demeurent dans ce monde, heureux de vivre, où le cul qui reçoit le coup se veut plus fort que le pied qui l'a donné. Dans le langage de cet univers, les défaites s'appellent des victoires morales et les indifférences des succès d'estime. Le relais journalistique se retrouve dans Le Monde qui donne la parole en ligne à son collaborateur Rémy Barroux à 20 h 25 : ayant suivi le cortège, il estime qu'il s'agit "indéniablement d'un succès pour les syndicats". Mais désormais, doit-il constater, les organisations se trouvent maintenant confrontées à un "véritable casse-tête" pour trouver un accord sur les suites à donner au mouvement.
Et dans ce jeu de trompe l'œil, le chef cégétiste Thibault donne désormais, indiscutablement, le ton : "Il faut qu'il y ait un consensus sur une nouvelle journée d'action" Réagissant à une pancarte en tête de manifestation portant l'inscription "1789-2009", il ose considérer que "c'est une pancarte qui montre l'ampleur des modifications attendues. Il faut qu'il y ait une première étape au mois de mai. Il y a déjà eu des échanges pour quelque chose en mai et quelque chose en juin, et tout ça on va en discuter lundi [le 4 mai]". (1)
Or la montée en puissance des forces syndicales se déroule en fait dans un étrange et paradoxal partenariat avec le gouvernement.
Ainsi le 18 février le leader de la CGT, apparaissait comme la vraie vedette du sommet social, devenant ainsi l'interlocuteur privilégié du chef de l'État et de ses conseillers social et économique, MM. Soubie et Guaino.
Empruntons son impression de cette journée clé à Mme Corinne Lhaïk, rédactrice en chef du service politique de l'Express (2).
La rencontre entre le président de la République, les syndicats et le patronat ressemblait à une pièce où chacun tenait un rôle. L'Élysée n'a rien cédé sur le fond (pas d'augmentation du Smic, pas de remise en cause du Tepa, ni des suppressions d'effectifs dans la fonction publique, pas de relance massive de la consommation) mais a intégré à ses mesures plusieurs propositions syndicales, comme la création du fonds d'investissement social demandé par la CFDT, ou la modulation des échéances d'emprunt pour les salariés en chômage partiel.La contrepartie d'une telle mascarade suppose une rupture entre les syndicats et les gauchistes, et on doit remarquer que les centrales jouent parfaitement le jeu.
Objectif : montrer que Nicolas Sarkozy écoute et entend. D'ailleurs, le chef de l'État est allé au-delà des 1,4 milliard d'euros annoncés le 5 février : le dispositif arrêté s'élèvera à 2,6 milliards d'euros.
Le patronat, lui, s'est vu infliger le rôle du "méchant" : le ton et le fond des propos syndicaux était beaucoup plus sévère vis à vis de Laurence Parisot, la présidente du Medef, que du chef de l'État. Un peu comme si l'Élysée et les confédérations avaient passé une alliance objective sur le dos des patrons.
En effet le "Nouveau parti anticapitaliste" d'Olivier Besancenot, actuellement crédité de 9 % d'électeurs potentiels en cas de présidentielle, se voit largement désavoué. Déjà traité de "rapace" par François Chérèque en mars, il est accusé par Mailly de "mélanger les genres" (3).
"Il y a des partis d'extrême gauche, ils ont le droit d'exister. Ce que je n'apprécie pas, c'est qu'un parti d'extrême gauche essaie en même temps d'être un syndicat, par exemple le NPA."Ah comme les relations entre lambertistes et krivineux demeurent de bonne qualité dans la famille trotskiste ! Le coup de grâce, le coup du mépris, vient des "stals" qui lui reprochent de se prendre pour un "simili-syndicat". (4)
"L'indépendance syndicale, j'y tiens."
"S'il considère qu'un parti politique c'est pas suffisant, qu'il fasse du syndicalisme et qu'il ne fasse plus de politique".
"Il faut choisir dans la vie, car il y a toujours un danger quand on mélange les genres."
Mais cette attitude ne tend pas seulement à marginaliser l'extrême gauche. Elle vise aussi les sociaux-démocrates du PS, et elle explique le jeu trouble de Mme Aubry, qui déclarait pompeusement dans la mini-manif des politiques rue Soufflot :
"Nous sommes à un endroit que nous n'aurions jamais dû quitter. (…) Les socialistes sont derrière les syndicats pour porter leurs revendications et aux côtés des Français qui souffrent"(…) C'est une grande journée parce que les Français disent collectivement, avec l'ensemble des organisations syndicales pour la première fois unies depuis 1947, au président de la République : 'Nous ne pouvons pas rester les bras ballants face à la crise, vous devez réagir, vous devez interdire les licenciements financiers, les inégalités dans les salaires et surtout relancer l'économie'(1)."Se prétendant "de retour pour redonner espoir aux Français", le cortège socialiste fut néanmoins régulièrement sifflé par les manifestants, et contraint de rester en retrait du cortège principal. Pendant le même temps, et alors que la direction du PS voulait donner l'image d'un parti rassemblé, Mme Royal prétendait se montrer aux côtés des salariés d'Heuliez dans les Deux-Sèvres.
Je préfère mentionner tout cela sans ironie excessive. En effet, je note que le discours commun de cette gauche divisée, consiste à demander un peu plus d'interventions à l'État. Et les faux experts et autres docteurs Diaforus du keynésianisme se montrent eux-mêmes en parfaite symbiose avec ce programme destructeur, aux conséquences fiscalistes inéluctables.
Apostilles
- Les réactions des chefs syndicaux et politiques dans la manif du 1er mai ont été rapportées heure par heure dans Le Monde en ligne au cours de cette journée du 1er mai 2009.
- cf. "L'Express" du 19 février 2009
- cf. iTélé le 30 avril.
- cf. AFP le 30 avril à 11 h 31.
JG Malliarakis
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A mon avis, les syndicats ne sont pas plus populaires que les partis, … mais plus riches ; ce n'est pas une question de popularité mais de moyens car l’argent est le nerf de la guerre.
Mais vous avez raison : il y a une montée en puissance des forces syndicales qui se déroule en partenariat avec le gouvernement, du moins ce que les media appellent un gouvernement.
La délirante et complice volonté du gouvernement cache au peuple que le calamiteux " système social que le monde (ne) nous envie (pas)" est le Serial Killer des emplois salariés en France…
RIEN, il ne restera RIEN de l’économie française ; j'en vois trop, de par ma profession de nos entreprises naître, espérer, lutter, végéter, souffrir, mourir parfois... et des investisseurs : industriels européens, ou financiers internationaux blindés de pétro dollars, se détourner de notre pays. ils nous prennent pour un pays devenu sous développé, avec des rois fainéants jouissant et endettant son peuple. Ils ont raison, nous le savons.
Notre fameux système social ruine les salariés et les entreprises, et… enrichit les Centrales Syndicales dont les dirigeants puisent dans les " caisses sociales ". Ces caisses, imposées, (qui accepterait de ne pas pouvoir choisir sa compagnie d'assurance auto) prélèvent près de 100 % des salaires versés !
Les dirigeants des "centrales syndicales historiques " sont nommés à la tête des URSSAF, ASSEDIC, organismes de formation, etc. et très grassement payés. Ce ne sont plus leurs fromages mais leurs cavernes d'Ali Baba ! Voilà pourquoi ils sont si forts, pas besoin de s'accrocher ni de résister : ils ont le "fric" que les partis n'ont pas... d'où cette alliance possible avec les hommes de l'Etat, lesquels ont la puissance que leur donne la "signature- France " et nous endettent quotidiennement chez des banques étrangères ; nous payons la note et nos enfants ne finiront pas de la payer !
Les deux groupes, Etat et Syndicat, sont également immigrationnistes : ce sont les charges dites sociales qui financent la pompe à immigration... allocations familiales, allocations chômages, rmi, cmu, ame, etc.
L'alliance est ainsi devenue totale entre ministères et syndicats qui forment une nouvelle mafia ; car les poids insupportables (dans une économie ouverte, avec une monnaie qu’on ne peut plus dévaluer) de ces charges dites sociales, fiscales, administratives, plus les obstacles de l’Administration, des Prud'hommes, et la honteuse collaboration des Chambres de Commerce et des Métiers etc., ont tué en quelques décennies les artisans, les commerçants, les paysans, les hôteliers, les restaurateurs, et également les industriels.
RIEN, il ne restera RIEN de l’économie française ; même les étrangers s’enfuient: depuis quelques semaines, chaque jour un groupe étranger liquide le dernier établissement qu'il conservait en France – plus pour des raisons stratégiques qu'économiques – ainsi : 3M, Continental, Caterpillar, etc. Ce sont des établissements de 500 à 1.500 salariés, ruinés par ces coûts de la mafia syndicalo-étatique française, qui ont fermé leurs portes définitivement...
C'est un crime d'Etat soutenu par des syndicats. A partir de quand une politique volontairement destructrice d’un peuple devient elle un crime ? Il faudrait que des juristes se penchent sur cette question.
Un jour en tout cas, le tribunal de l’Histoire jugera ces ministres!
Ce débat des charges sociales semble évanoui : quel journal, quelle radio, quel homme poltique en parle ?
Rédigé par : Dominique Dutour | samedi 02 mai 2009 à 23:27
Une petite enveloppe Monsieur Thibault?
Rédigé par : minvielle | lundi 04 mai 2009 à 12:43