Où se situe dès lors la relation ? À la fois dans la marche du temps présent et dans l'idéologie implacable, de l'Utopie inchangée.
À Pnomh Penh aujourd'hui, donc 30 ans après les faits, on prétend juger. On se réfère à des critères onusiens donc approximatifs, et on met en branle une procédure internationale, par hypothèse véreuse. Les crimes commis par certains tortionnaires sont examinés avant ceux des dignitaires du régime dont dispose encore l'accusation. Le premier sur la liste, le fameux et sinistre Douch dirigeait le centre S-21 à l'époque de la dictature maoïste. Son choix illustre à la fois l'horreur des crimes commis et l'impuissance, voire la vanité, d'un procès aussi tardif. On voit une fois de plus pourquoi le Droit romain, matrice des systèmes civilisés, avait institué le principe de la prescription trentenaire. En dépit de certaines exceptions, telle a longtemps demeuré la règle dans nos systèmes juridiques occidentaux (par ex. en France : 10 ans en matière criminelle, 3 ans en matière délictuelle, 1 an en matière contraventionnelle, mais 30 ans, jusqu'à une date récente, en matière civile.) Car, au bout de 30 ans, le temps d'une génération s'est largement écoulé. Les hommes mûrs sont passés de 50 à 80 ans. Les gens de moins de 40 ans se souviennent à peine de ce dont il s'agit. Ainsi, en ce moment même, au Cambodge, bien des jeunes apprennent avec effarement ce que leurs parents leur avaient caché, en grande partie par pudeur. Il fallait aussi reconstruire le pays, et partiellement oublier. Même lorsque l'on passera des exécutants aux dirigeants du Régime on demeurera dans des critères difficilement applicables. Et on se gardera bien d'entrer dans l'examen de l'idéologie du système concentrationnaire d'alors puisque, finalement, l'actuel premier ministre Han Sun avait bel et bien été choisi par le "libérateur" Vietnamien pro-soviétique dans les poubelles du système pro-chinois.
Pire encore : on prétend maintenant déformer entièrement l'histoire, pourtant assez limpide dans sa folie homicide, de la dictature de Pol Pot. Dirigeant communiste, marxiste-léniniste jusqu'au bout des ongles, il s'est montré adepte convaincu de la prétendue loi d'accumulation socialiste primitive de Préobrajensky. Il fallait à tout prix, coûte que coûte produire et exporter du riz. Il imaginait comme Guevara ministre de l'industrie à Cuba, développer le tiers-monde sur la base du monopole du commerce extérieur et de "l'État commercial fermé". Mais de ce fanatique de la lutte des classes, comme tous ses coreligionnaires communistes, on ne saurait faire une sorte de nationaliste attaché à l'identité du Cambodge.
Il faut une bonne dose, soit de naïveté, soit d'ignorance, soit de perversion cynique, pour soutenir que l'identité historique des peuples se retrouve dans les régimes communistes, ou plus généralement révolutionnaires, qu'ils subissent. Ceci tient à une première raison : de La Havane à Pékin, en passant évidemment par Moscou, et jusqu'à Pnomh Penh, les partis communistes ont toujours recruté des gens qui, au bout du compte, "crachaient" [expression de Lénine à propos de la Russie] sur leur pays et ses traditions. Quand ils se rengorgent de patriotisme les révolutionnaires le font toujours par rapport aux "temps nouveaux" qu'ils prétendent instituer. Ils ne s'intéressent jamais au terroir, jamais à la culture, jamais à la patrie "de chair et d'os" et encore moins à la liberté concrète de leurs compatriotes, qu'en définitive ils méprisent et haïssent, et qu'ils massacrent donc allégrement, au nom de l'Utopie.
Je ne prétends pas ici qu'il eût fallu instituer effectivement, comme certains l'ont demandé, à l'échelon international un "Nuremberg du communisme". Les deux systèmes totalitaires qui ont endeuillé le XXe siècle, ne se sont pas écroulés de la même manière. En dépit de ressemblances évidentes, et de connivences dont leur alliance entre 1939 et 1941 ne constitue que la partie émergée de l'iceberg, ils ne relèvent donc pas nécessairement du même traitement. Et surtout ce qui a débarrassé le monde du national-socialisme ne tient ni seulement à la défaite militaire allemande, ni au jugement des dignitaires du IIIe Reich, ni même à la répression, parfois contre-productive, de toute manifestation de nostalgie mais avant tout à la manière dont on a inculqué aux générations suivantes l'horreur de cette idéologie totalitaire-là.
On n'a, de toute façon, rien fait de pareil pour sa sœur jumelle. On ne s'interrogera pas ici sur la nature de leur gémellité, homozygote ou hétérozygote, ou même de leur cousinage. Peu importe en l'occurrence. Non seulement le communisme a survécu après 1945, mais il a prospéré idéologiquement parlant jusqu'en 1991. Et depuis 18 années que l'Union soviétique s'est effondrée, aucune entreprise institutionnelle d'envergure à l'échelon international, et très peu d'initiatives locales ont été développées pour rappeler les racines idéologiques de ses erreurs, de ses crimes – et pas seulement de son échec économique.
Au passage on relèvera que les bons esprits camouflent leur ancienne sympathie pour ces systèmes. Ainsi, un Michel Rocard, ancien laudateur de l'autogestion yougoslave, cette grande réussite, et qui passe lui-même pour une référence intellectuelle "indiscutable", a trouvé le moyen de regretter, au lendemain de la faillite de Lehman Brothers qu'on ne puisse faire juger par le Tribunal pénal international l'économiste Milton Friedmann, décédé quelques mois plus tôt. Comme si on pouvait tenir Friedmann pour responsable des crédits hypothécaires américains dont il percevait le danger, et comme si la crise financière pouvait se comparer aux crimes du communisme, eux-mêmes impunis rappelons-le. hélas le pré-gâteux Rocard ne détient pas le monopole de ce genre de déclarations. Or elles alimentent la réapparition de l'utopie révolutionnaire.
De la sorte, le camarade Besancenot, intouchable, rarement contredit [sur ce point] par ses voisins de palier idéologiques peut continuer à se réclamer de Lénine et de Guevara. Il persistera donc à faire l'apologie d'une violence toujours excusable puisque fondée sur la lutte des classes et la haine de la société dite de consommation.
Oui Frédéric Lefebvre a eu raison de voir en lui la "vitrine légale" des casseurs. Le chef du NPA n'a pas eu un mot pour condamner leurs déprédations. De même, en octobre 2008, il n'en avait même pas recherché pour se démarquer des provocations verbales misérables de Rouillan. Accessoirement d'ailleurs le facteur de Neuilly porte ainsi une certaine part de responsabilité dans l'incarcération rétablie de l'ancien chef d'Action directe. Car sans le satisfecit imbécile qui lui a été maladroitement décerné, il aurait pu passer pour isolé donc insignifiant et inoffensif.
Non, jamais de regret. Rien de cela ne fait pas partie du vocabulaire de Besancenot et de ses semblables. Après tout les pompistes et les salariés de l'Hotel Ibis travaillaient pour le capitalisme, ne parlons même pas des automobilistes et autres clients ou tenanciers des petites boutiques : les voilà les coupables ! Le message se lit clairement sur le visage des arrogants gauchistes : pas d'innocents chez les misérables petits bourgeois, fils de koulaks, ils peuvent crever.
Comme chacun le sait quand il se produit de la délinquance, dans cette rhétorique, la faute en incombe toujours aux policiers, au préfet, au gouvernement, au système, jamais au délinquant lui-même ! Et on nous explique qu'il ne faut pas punir ces actes, déterminés par de justes raisons, quand on ne trouve d'excuses dans les traumatismes de l'enfance.
Voila la parenté logique que je distingue pour ma part entre l'impunité des Khmers rouges et les violences de Strasbourg.
JG Malliarakis
Sur le même sujet
3.4.09 Le grand retour du gauchisme international.
Que ce gauchisme exclusivement destructeur et délirant ait pu rassembler à Londres des dizaines milliers de manifestants enragés, comptant déjà un martyr et qu'il se soit retrouvé à Strasbourg contre le sommet de l'OTAN, voila une information avec laquelle il faudra apprendre à compter de nouveau.
La fausse jeunesse de BesancenotOn le présente comme le porte-parole d'une nouvelle extrême gauche. D'autres veulent y voir le meilleur allié du gouvernement.
Articles des jours précédents
6. 3.09 Nouvelles concessions faites aux TurcsLes historiens du futur retiendront peut-être l'image du président du Conseil italien téléphonant sur les bords du Rhin ce 4 mars au matin.
2.4.09 Situation mondiale et maladies hexagonales.
Au moment où s'ouvre le sommet du G20, qui se tient à Londres ce 2 avril, on nous assure que le gouvernement de Paris voudrait faire monter la pression.
1er.4.09 Quand le Liechtenstein menace notre bonheur.
Attention : aucune des informations sur la principauté du Liechtenstein ne relève du poisson d'avril.
31.3.09 Autisme politicien.
La principale réforme manque à l'appel : la diminution de la dépense publique et des gaspillages de l'État.
Si vous avez apprécié ce bulletin de l'Insolent prenez le temps d'accéder au site de Wikio en cliquant d'abord sur ce bouton : puis en "votant" (en tout 2 ou 3 secondes)
Vous pouvez écouter l'enregistrement de cette chronique sur le site de
Parallèle (17ème) intéressant.... deux poids deux mesures. Il faudra donc se rendre à l'évidence, la télé est aux mains de Polpotte. Mais vous ne semblez pas remarquer ce "marxisme par le haut" induit par le "gouvernement" et les "médiats" qui consiste simplement à appuyer là où ça fait mal, et entretenir les ressentiments : impunité, brutalité, lutte des classe, et la starac des carla et autres koushner s'engraisse...
Déprimant!
Je vais donc essayer d'oublier devant un bol d'alcool de riz.
PMS.
Rédigé par : minvielle | mardi 07 avr 2009 à 11:49