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À 48 heures de la grève annoncée pour le 29 janvier, les directions des services publics de transport, dont tout va dépendre, comptabilisent les intentions déclarées de personnels grévistes. On doit savoir que, finalement seule l'heure d'embauche leur sera déduite si, le jour venu, ils se contentent de pointer avec 59 minutes de retard, et le reste de la journée leur sera rémunéré, pratiquement à ne rien faire. Ce maquignonnage explique largement les oscillations des évaluations du pourcentage de grévistes.
Remontons, pour mieux comprendre, six années en arrière.
Conduite par François Fillon, alors ministre des Affaires sociales, la nième réforme des retraites promulguée en août 2003, ne mérite certes pas de marquer les mémoires. En revanche les conditions dans lesquelles le mouvement de grève unitaire fut vaincu cette année-là méritent d'être rappelées.
Annoncée début février, le projet gouvernemental vit d'abord de prétendues négociations entre les 5 centrales réputées représentatives, le Medef, et le pouvoir traîner en longueur. Non sans aplomb le ministre finira par déclarer le 24 avril que sa réforme devait être tenue pour "la seule possible". Entendez par là : le seul texte concevable aux yeux des autistes de Bercy, seuls maîtres à bord de ce Titanic appelé en France, depuis 1945, la sécurité sociale (1).
Il restait donc dès lors assez peu d'espace pour le dialogue et le débat.
Le mois de mai vit par conséquent la montée en puissance de manifestations intersyndicales regroupant la CGT, bien entendu, Force ouvrière, la CFDT, mais aussi la CFTC et la CGC, élargies à l'UNSA et au "G10 Solidaires", c’est-à-dire en clair la gauche et l'extrême-gauche.
Une première déclaration du chef du gouvernement Jean-Pierre Raffarin va cependant provoquer à mi-parcours une fissure, dont la direction CFDT de François Chérèque porte une grande part de responsabilité aux yeux de ses alliés d'un moment qui, aujourd'hui encore, cherchent à la lui faire payer.
"Ce n'est pas la rue qui gouverne" avait en effet rappelé le Premier ministre. Et le 15 mai les forces demeurant dans le mouvement (CGT, FO et CFTC) refusent d'avaliser le "relevé de résultats" de pourparlers avec les représentants de l'Etat. Les manifestations se durcissent et le 25 mai, on assiste à l'apparition d'une revendication aussi aberrante que significative : "37 annuités et demie pour tous". Le mot d'ordre est ici inspiré par les éléments les plus obtus de la fonction publique. Le discours cynique consiste à poser comme modèle les privilèges du secteur monopoliste et subventionnaire, avantages d'une minuscule minorité supportés pourtant par les consommateurs et les contribuables.
Premier succès du gouvernement Raffarin : une directive très ferme donne désormais consigne contrairement à ce qui se pratiquait depuis un demi-siècle, de refuser de payer les jours de grève.
Deuxième donnée : à partir de juin s'est développé un courant de manifestations hostiles à la grève et aux blocages illicites. Au départ, l'initiative était venue des sympathiques militants de Liberté chérie (2) indépendants du pouvoir et qui parviendront le 15 juin à rallier dans les rues de Paris plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Rappelons qu'un contraire en 1995, confronté au mythologique "mouvement social" le gouvernement Juppé, conseillé par des libéraux d'opérette tel M. Guy Sorman, avait tout fait pour empêcher les contre-manifestations en dépit de l'exaspération des 14 millions de Français contraints de se déplacer à pied deux ou trois heures par jour. Il avait même saboté la mise en place de transports collectifs de substitutions. Tout cela par crainte de se voir débordé par les redoutables ultra-libéraux, amis d'Alain Madelin ou militants du CDCA de Christian Poucet. Bien oublié ce jeu gouvernemental : Poucet est mort et Madelin est enterré.
Ces deux données de l'an de grâce 2003 ont permis, au contraire, de faire reculer et de diviser les bureaucraties syndicales. Et depuis six ans on assistait à un recul progressif des tentatives de grèves des services publics. Cette tendance aurait dû et pourrait encore s'accentuer normalement. Si l'on accepte de tabler encore sur les deux données indiquées – non-rémunération des jours de grèves et liberté de mobilisation pour les usagers, indépendamment du parti majoritaire – on peut espérer un lent déclin de la gréviculture à la française ;
En revanche, on doit désormais redouter une érosion de la fermeté de 2003 : déjà les directions de la RATP, d'abord, puis de la SNCF ont accepté discrètement de céder au chantage de la CGT, leurs alliés contre Sud-Rail, et de payer les grévistes, en dépit des consignes gouvernementales.
Et dire qu'il s'agit de deux entreprises dépendant aux 2/3 de subventions publiques. La SNCF par exemple reçoit 17 milliards d'euros par an de financements directement ou indirectement étatiques sur 24 milliards de recettes.
Et dire qu'un arrêt très important de la cour de Luxembourg en date de décembre 2007 permettrait d'interdire une fois pour toutes les grèves thrombose comme celle de Saint-Lazare du 13 janvier, à raison de la disproportion des moyens que ces mouvements mobilisent et des fins dont ils se réclament.
Ah ! mais direz-vous, il s'agirait alors d'invoquer au profit de la Liberté l'abominable droit européen. Quelle horreur n'est-ce pas aux yeux de la droite la plus souverainiste du monde, la plus jacobine, et, j'allais encore oublier de le rappeler la plus intelligente.
L'un des mérites essentiels du livre de Georges Lane "La Sécurité sociale et comment s'en sortir" est de montrer comment au fil des années s'est échafaudé un "modèle" caricatural innervant toute la société et toute l'économie française. Songeons par exemple, à cet égard, que cette organisation de droit théoriquement privé a légalisé la polygamie, accepté de subventionner l'avortement de commodité, etc.
Véritable petit manuel permettant de naviguer dans cet océan de "régimes", de base ou complémentaires, général ou particuliers, a priori incompréhensibles, ce livre s'est trouvé naturellement occulté y compris par ceux qui auraient logiquement dû en saluer la qualité et la précision.
JG Malliarakis
Notes
- cf À redécouvrir "La Sécurité sociale et comment s'en sortir" par Georges Lane
L'un des mérites essentiels du livre de Georges Lane "La Sécurité sociale et comment s'en sortir" est de montrer comment au fil des années s'est échafaudé un "modèle" caricatural innervant toute la société et toute l'économie française. Songeons par exemple, à cet égard, que cette organisation de droit théoriquement privé a légalisé la polygamie, accepté de subventionner l'avortement de commodité, etc.
Véritable petit manuel permettant de naviguer dans cet océan de "régimes", de base ou complémentaires, général ou particuliers, a priori incompréhensibles, ce livre s'est trouvé naturellement occulté y compris par ceux qui auraient logiquement dû en saluer la qualité et la précision. - Cf l'entretien réalisé en juin 2007 avec Vincent Ginocchio "Liberté chérie : mobilisations pour la liberté du travail"
Et pourquoi pas une petite ligne de publicité de bon goût… pour les Éditions du Trident
Vient de paraître
LA FIN DE L'EMPIRE D'OCCIDENT
Le Ve siècle, si oublié, si lointain, et cependant si proche du nôtre,
à tant d'égards, représente une période essentielle dans l'histoire de
l'Europe. L'effondrement de la partie occidentale de l'empire romain ne
s'y résume nullement en une simple “conquête barbare". De nombreux
facteurs entrent en ligne de compte et notamment la décomposition de la
société. Le parti pris des hommes des Lumières, relayé par celui des
historiens marxistes, a construit un certain nombre de mythes. Grand
spécialiste de la Gaule et de l'Antiquité tardive, Amédée Thierry
répond, non par l'Histoire idéologique, mais par des faits, sur la base
de sources solides, dans une langue claire.
Fascinante se révèle la survie de cet empire qui n'en finit pas de
mourir : "Les rouages administratifs continuèrent à fonctionner. Les
lois restèrent debout ; les coutumes séculaires ne furent point brisées
; enfin le vieil attirail des césars environna le mi-patrice sous les
lambris du palais de Ravenne. Odoacre eut un préfet du prétoire, un
maître des milices, un questeur pour préparer ses lois ou les rapporter
au sénat, etc." ••• 370 pages 25 euros ••• Pour commander ce livre •
par correspondance : ••• vous pouvez telécharger et imprimer notre catalogue en pdf et un bon de commande
LE PÉRIL SOCIALISTE
par Vilfredo PARETO
préface de Georges Lane.
Vilfredo Pareto ne fut pas seulement le père de la sociologie moderne.
Ingénieur brillant, puis directeur des chemins de fers italiens, ses
écrits remarqués lui vaudront d'enseigner l'économie à Florence, puis
de succéder à Walras dans sa prestigieuse chaire de l'université de
Lausanne.
Dans ces écrits, il souligne, après la période romantique de
l'unification de l'Italie, combien les réseaux de pouvoirs
interviennent de plus en plus dans la banque, dans la "protection"
démagogique de l'industrie nationale, ayant pour effet de la détruire,
et de provoquer le marasme du pays. Et le socialisme d'État alimente le
“péril socialiste”. Sa formation technique et scientifique permet à
l’auteur de donner des preuves tangibles des faits qu'il analyse ainsi.
Or, les lois qu'ils dégage, et de son observation, et de sa
connaissance de la théorie économique, s'appliquent singulièrement à
l'Europe contemporaine et aux fausses solutions que les politiques
imaginent d'apporter aujourd'hui à la crise. ••• 426 pages 29 euros •••
Pour commander ce livre • par correspondance : ••• vous pouvez imprimer notre catalogue en pdf et un bon de commande
Je termine aujourd'hui ma DADS1 2008 pour l'URSSAF et les caisses. Le délire bureaucratique atteint son maximum (quoique il y ait toujours une marge de progression) et de nouvelles rubriques ou nomenclatures apparaissent encore, au fil des décrets et lois intarissables.
Ils sont devenus fous.
Rédigé par : Catoneo | mardi 27 jan 2009 à 18:22
Rappelons que le 29 janvier sera le jour anniversaire de la mort, par balles, de CHRISTIAN POUCET - R.I.P.
http://www.sitego.fr/poucetchristian/
Rédigé par : Dominique Dutour | mardi 27 jan 2009 à 21:02
29 janvier 2001-29 janvier 2009
Christian POUCET toujours dans nos coeurs et dans nos mémoires.
Papa je ne t'oublie pas.
http://christian-poucet.forumperso.com/
Alexandra POUCET
Présidente
de l'Association Christian POUCET
Rédigé par : Alexandra POUCET | mercredi 28 jan 2009 à 21:30