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La sortie en salle ce mercredi 7 janvier d'un double navet hollywoodien consacré au révolutionnaire argentin Ernesto Che Guevara ne saurait ni passer inaperçu ni être tenue pour innocente. Elle correspond en effet au 50e anniversaire d'un des pires régimes oppresseurs, exploiteurs et affameurs de notre époque.
Affameur ? Il faut le rappeler, pour commencer. Déjà avec le prétendu "Journal de voyage" du personnage, un mot d'ordre sous-jacent est propagé en toute impunité : celui de la responsabilité du Nord dans les malheurs du Sud. En l'occurrence la faute de la misère latino-américaine incomberait principalement aux États-Unis, et secondairement bien sûr aux oligarchies locales supposées de connivence avec l'impérialisme. Ce sophisme envahissant n'est presque jamais démonté. Or il prétend justifier la "révolte" des "jeunes", des "patriotes", des hommes de "justice" et de "liberté", voire même la "théologie" de la "libération" : autant de concepts manipulés, autant de slogans mensongers, autant de nécessaires guillemets.
S'agissant de Cuba rien de plus faux que de parler d'une éventuelle arriération antérieurement à l'arrivée du castrisme : La Havane, jusqu'en 1959 aura été une des capitales les plus évoluées et les plus prospères du Continent américain. Si elle s'est trouvée réduite à l'état de délabrement et de ruine, de prostitution et de saleté qui la caractérise aujourd'hui, la faute n'en incombe certainement pas au malheureux Fulgencio Batista mais aux équipes staliniennes. Idem pour l'Argentine d'ailleurs, pays fort riche avant de tomber sous la coupe du péronisme.
Exploiteur et oppresseur, ce régime le doit notamment à Guevara ministre calamiteux de l'Industrie qui, le premier, proclama l'interdiction du droit de grève des ouvriers, au nom de ce que ce fils de bourgeois, étudiant raté en médecine, appelait le socialisme.
Le film de Steven Soderbergh, de pure propagande castriste, officiellement agréé par ce régime liberticide n'innove pas vraiment. Il reprend tous les poncifs du mythe, en les portant simplement à une puissance supérieure.
Commençons par l'épisode final de la première partie : il prétend relater, et magnifier la bataille de Santa Clara du 28 décembre 1958, un épisode surfait, dont les "terribles combats" ont fait en tout et pour tout un mort unique : le jeune militant "El Vaquerito", tombé pour avoir stupidement paradé devant les mitrailleuses adverses ! Il serait bon de souligner aussi que ni le "Che" ni sa future épouse ne semblent y avoir participé.
On pourrait considérer cette anecdote pour un point de détail s'il ne s'agissait pas, pour la propagande du régime communiste actuel de surestimer les aspects qui l'arrangent dans la légende dorée de l'opposition au gouvernement de Batista. Il faut faire accroire que le "Mouvement du 26 juillet" et les "barbudos" de la Sierra Maestra détenaient en quelque sorte une légitimité populaire intrinsèque, éclipsant les démocrates de l'époque et justifiant, ou prétendant expliquer, que pendant des décennies la dictature de Castro n'ait même pas jugé nécessaire de faire semblant de procéder à des élections, sans que pratiquement personne ne proteste dans le monde et surtout pas en France.
Le film pose l'hypothèse que les victimes de la répression castriste et guevariste auraient pu être condamnées par de vrais tribunaux, de vrais juges, ou même des faux. La réalité va complètement contre cette légende rose. Guevara avait adopté la formule : "ne traînez pas pour dicter les sentences, ceci est une révolution, n’utilisez pas les méthodes légales bourgeoises, les preuves sont secondaires. Il faut procéder par conviction. C’est une bande de criminels, d’assassins… Si je le pouvais, je prendrais une mitrailleuse et ta, ta, ta…"
On présente aussi ce personnage comme une sorte de héros romantique, violent certes mais attachant. Sa révolution procéderait d'un "immense acte d'amour mal investi". Contresens absolu. Le sentiment de haine l'habitait probablement en permanence, mais, bien plus, sa démarche se voulait à l'écart de toute forme de sentimentalisme.
D'une manière générale on accorde trop facilement à Castro un brevet de romantisme. Pendant 30 ans, un tiers du revenu national de Cuba dépendit des subsides soviétiques (1). Puis, en 1987, La Havane supprime les échanges d'étudiants avec l'URSS, pas assez totalitaire à son goût. En 1991, le putsch de Ligatchev semble avoir été l'œuvre de gens ayant en commun d'avoir passé une partie de leur carrière à Cuba. Mais que Fidel Castro, et plus encore son frère Raul actuellement au pouvoir à La Havane se soit montré plus communiste encore que les gens de Moscou n'exonère pas le "Che", bien au contraire.
Stalinien jusqu'au bout des ongles, encore plus que Castro lui-même, Guevara semble s'être écarté du système et de la sphère soviétique dès le milieu des années 1960 en raison et à proportion de la "déstalinisation" de l'URSS et de la "coexistence pacifique" mise en œuvre par le bloc de l'Est. Sa mise à l'écart de Cuba ne reflétait pas seulement son échec "industriel" patent et ruineux mais aussi sa disgrâce en tant qu'il s'impliquait dans l'aventure sans lendemain de la "Tricontinentale" révolutionnaire tiers-mondiste. Sa disparition sanctionne non seulement son incapacité à "soulever" contre leur gré les masses latino-américaines, en l'occurrence les paysans de Bolivie, mais aussi son largage par les réseaux du communisme international de stricte obédience, non du fait de son "trotskisme" mais de son "stalinisme".
Que les néo-staliniens actuels, que le régime cubain, qu'Hollywood, que les alter-mondialistes, le récupèrent ne fait qu'ajouter une nouvelle imposture, un nouveau mensonge.
Même son héroïsme pue la fabrication : on le montre soignant une blessure – en omettant de faire comprendre au spectateur que celle-ci résultait d'une luxation accidentelle de l'épaule. Il ne meurt pas les armes à la main mais tout simplement liquidé par les Boliviens, etc.
On demeure fasciné par la puissance de reconstitution d'un tel mythe, entièrement factice.
De ce personnage sanguinaire et cruel, on veut faire un gentil défenseur de la veuve et de l'orphelin, lui qui porte froidement la responsabilité de si nombreuses morts de pères et de maris innocents.
De cet incapable autopropulsé à la tête de l'industrie cubaine étatisée qu'il contribua à ruiner on veut faire un modèle pour apprendre le développement aux pays du tiers-monde. On continue à parler comme si précisément, depuis 30 ans, les pays du "sud" qui sont sortis de la misère n'étaient pas précisément ceux qui ont choisi la voie capitaliste.
De cette très vieille image de l'oppression on veut faire une icône de la jeunesse et de la liberté. Je trouve cette inversion, dans sa persévérance même, proprement diabolique.
JG Malliarakis
Notes
- Aujourd'hui il dépend des pétrodollars du Venezuela.
Et pourquoi pas une petite ligne de publicité de bon goût… pour les Éditions du Trident
Vient de paraître
LA FIN DE L'EMPIRE D'OCCIDENT
Le Ve siècle, si oublié, si lointain, et cependant si proche du nôtre,
à tant d'égards, représente une période essentielle dans l'histoire de
l'Europe. L'effondrement de la partie occidentale de l'empire romain ne
s'y résume nullement en une simple “conquête barbare". De nombreux
facteurs entrent en ligne de compte et notamment la décomposition de la
société. Le parti pris des hommes des Lumières, relayé par celui des
historiens marxistes, a construit un certain nombre de mythes. Grand
spécialiste de la Gaule et de l'Antiquité tardive, Amédée Thierry
répond, non par l'Histoire idéologique, mais par des faits, sur la base
de sources solides, dans une langue claire.
Fascinante se révèle la survie de cet empire qui n'en finit pas de
mourir : "Les rouages administratifs continuèrent à fonctionner. Les
lois restèrent debout ; les coutumes séculaires ne furent point brisées
; enfin le vieil attirail des césars environna le mi-patrice sous les
lambris du palais de Ravenne. Odoacre eut un préfet du prétoire, un
maître des milices, un questeur pour préparer ses lois ou les rapporter
au sénat, etc." ••• 370 pages 25 euros ••• Pour commander ce livre •
par correspondance : ••• vous pouvez telécharger et imprimer notre catalogue en pdf et un bon de commande
LE PÉRIL SOCIALISTE
par Vilfredo PARETO
préface de Georges Lane.
Vilfredo Pareto ne fut pas seulement le père de la sociologie moderne.
Ingénieur brillant, puis directeur des chemins de fers italiens, ses
écrits remarqués lui vaudront d'enseigner l'économie à Florence, puis
de succéder à Walras dans sa prestigieuse chaire de l'université de
Lausanne.
Dans ces écrits, il souligne, après la période romantique de
l'unification de l'Italie, combien les réseaux de pouvoirs
interviennent de plus en plus dans la banque, dans la "protection"
démagogique de l'industrie nationale, ayant pour effet de la détruire,
et de provoquer le marasme du pays. Et le socialisme d'État alimente le
“péril socialiste”. Sa formation technique et scientifique permet à
l’auteur de donner des preuves tangibles des faits qu'il analyse ainsi.
Or, les lois qu'ils dégage, et de son observation, et de sa
connaissance de la théorie économique, s'appliquent singulièrement à
l'Europe contemporaine et aux fausses solutions que les politiques
imaginent d'apporter aujourd'hui à la crise. ••• 426 pages 29 euros •••
Pour commander ce livre • par correspondance : ••• vous pouvez imprimer notre catalogue en pdf et un bon de commande
Les médias ne parleront jamais assez de ce personnage diabolique et de son influence malheureuse autant en Amérique du Sud qu'en Afrique. Dans le politiquement correct, il faut faire croire à la masse que certains personnages ont été les héros de l'installation actuelle de cette forme de pensée. La majeure partie de français qu'ils soient de souche ou pas adhère à cette forme de pensée: se laisser guider par la désinformation permanente des TV et journaux qui ne reprennent les nouvelles de l'AFP. Les 35 heure ont rendues ces gens paresseux, lymphatiques et pourvu que le WE arrive pour aller se promener dans les centres commerciaux. Plus rien ne les intéressent à part ce que dit les médias officiels. Je ne suis donc pas étonné que ce film fera une recette auprès de nos jeunes et de nos 68'tard pour qui à l'attention de ces derniers la révolution est permanente. Faut-il souligner pour ces derniers, qu'ils sont tous pratiquement en retraite et bien payés car ils ont largement profité du système qu'ils ont instauré. Pour ma part, un seul souhait: que ce film ne fasse pas l'audience que leur réalisateur espère.
Rédigé par : JD | mercredi 07 jan 2009 à 16:36
Bravo pour cet excellent article.
A mes yeux ce qui est le plus terrible c'est la permanence de toute cette mythologie chez les jeunes.
Et pire que tout : chez les jeunes censés être les mieux éduqués, ceux qui "font des études" et que l'on voit régulièrement se faire embrigader derrière les drapeaux rouges de la LCR et manifester dans Paris avec les mêmes idées et les mêmes slogans que dans les années 60...
Et toutes ces caricatures de gauchistes bornés qui sont "bac + 4 ou 5"... En 2009... C'est vraiment dingue...
Rédigé par : williamson | jeudi 08 jan 2009 à 10:12
Ouais, il fait un peu Jesus avec une mitraillette et un béret. Quel méli-mélo dans les têtes pensantes.... ou bien ses admirateurs ont peut être un crime à ne pas avouer, qui sommeille en leur tréfonds? Qui répondra à cela? Un meurtre par procuration? Allez, c'était pour leur bien! Même Ségo a parlé de révolution dans sa campagne, alors c'est dire...
Rédigé par : pierre mInvielle | mardi 13 jan 2009 à 14:35