Vous pouvez écouter l'enregistrement de cette chronique sur son lien permanent sur le site de Lumière101.com
La venue d'un Pape à Paris représente toujours un événement pour la conscience française. Celle-ci prend un caractère encore plus significatif dans l'actuel débat à propos de la laïcité. Dois-je dire, que dans cette controverse on ne peut qu'approuver la volonté enfin affirmée au sommet de l'État de l'interpréter désormais de manière "positive" ?
Oui, nous pourrions pour une fois citer le général De Gaulle. Il aurait souligné que "la république est laïque, mais la France est chrétienne". La phrase a été souvent entendue citée mais j'en ignore la référence. Que la citation se révèle vraie ou fausse, le jugement me convient : attaquer, radicalement ou sournoisement, le christianisme et les racines judéo-chrétiennes revient à nier, non moins dangereusement, l'identité de la France et celle de l'Europe.
Certes, les campagnes contre Benoît XVI se sont un peu calmées. Mais leur feu couve sous les cendres depuis septembre 2006. Elles s'étaient alors saisies du prétexte du discours de Ratisbonne déjà consacré aux rapports de la Foi et de la Raison.
Le piège scolastique ferait presque de l'existence de Dieu un objet de démonstration. Orgueilleuse tentation, elle a été refutée bien évidemment par la plupart des croyants, qu'ils aient été nourris de Pascal, ou de Dostoïevski, ou de saint Jean Chrysostome, ou d'une manière générale par la théologie dite apophatique. Et il n'y tombe pas le moins du monde, le philosophe de tradition allemande qu'est demeuré l'ancien cardinal Joseph Ratzinger. Il nous rappelle seulement, et à juste titre que la religion chrétienne s'articule aussi sur la pensée grecque, et qu'elle s'honore de recevoir cet héritage commun à toute l'Europe.
Les esprits libres peuvent partager aujourd'hui cette conviction de manière sereine.
Mais, si l'on regarde deux ans seulement en arrière, on doit savoir qu'à tout moment la mêche peut être rallumée, et que la confrontation peut reprendre.
Pour rappeler le contexte dans lequel je me suis senti obligé de publier une tribune libre de soutien à Benoît XVI je citerai d'abord simplement la situation décrite par Le Monde du 16 septembre 2006.
Le Vatican peine à faire retomber la colère des musulmans
Le Vatican peine à faire retomber la vague de colère qui s'est emparée du monde musulman après les déclarations de Benoît XVI sur l'islam, malgré un communiqué, publié jeudi soir [15 septembre], affirmant qu'il n'avait pas voulu offenser une autre religion.(…)
Évoquons quand même quelques réactions positives d'alors
De son côté, l'archevêque de Paris, Mgr André Vingt-Trois, a estimé sur Radio Notre-Dame que "déduire de là que le propos du pape était de porter un jugement sur l'islam, c'est réduire l'intérêt des débats universitaires et la liberté d'expression caractéristique de l'université".
Autre soutien plus inattendu pour Benoît XVI : celui de sa compatriote, la chancelière allemande Angela Merkel, de confession protestante."Celui qui critique le pape méconnaît l'intention de son discours qui était d'inviter au dialogue entre les religions", affirme la chancelière dans un entretien au quotidien Bild à paraître samedi 16 septembre.
Mais le fond de la vague islamiste s'exprime de la manière suivante :
Les propos de Benoît XVI sur l'islam et le djihad, posant la question du rapport entre religion et violence, tenus mardi [12 septembre] durant son voyage en Allemagne, ont provoqué une vague d'indignation dans le monde musulman et les demandes d'excuses se sont multipliées. À Gaza, des engins explosifs ont été lancés par des inconnus vers une église orthodoxe à Gaza, vendredi matin [15 septembre] tandis que dans la soirée, 2 000 manifestants se sont rassemblés devant les locaux du Parlement palestinien, à Gaza, en brandissant une forêt de drapeaux verts du Hamas.
L'une des réactions les plus courageuses et significatives est alors venue du philosophe, parfaitement "laïque" et classé "à gauche", Robert Redecker. Elle sera publiée par Le Figaro le mardi 19 septembre 2006. Je la cite ici dans son intégralité.
Face aux intimidations islamistes doit faire le monde libre ?
Les réactions suscitées par l'analyse de Benoît XVI sur l'islam et la violence s'inscrivent dans la tentative menée par cet islam d'étouffer ce que l'Occident a de plus précieux qui n'existe dans aucun pays musulman : la liberté de penser et de s'exprimer. L'islam essaie d'imposer à l'Europe ses règles : ouverture des piscines à certaines heures exclusivement aux femmes, interdiction de caricaturer cette religion, exigence d'un traitement diététique particulier des enfants musulmans dans les cantines, combat pour le port du voile à l'école, accusation d'islamophobie contre les esprits libres.
Comment expliquer l'interdiction du string à Paris-Plages, cet été ? Étrange fut l'argument avancé : risque de "troubles à l'ordre public". Cela signifiait-il que des bandes de jeunes frustrés risquaient de devenir violents à l'affichage de la beauté ? Ou bien craignait-on des manifestations islamistes, via des brigades de la vertu, aux abords de Paris-Plages ?
Pourtant, la non-interdiction du port du voile dans la rue est, du fait de la réprobation que ce soutien à l'oppression contre les femmes suscite, plus propre à "troubler l'ordre public" que le string. Il n'est pas déplacé de penser que cette interdiction traduit une islamisation des esprits en France, une soumission plus ou moins consciente aux diktats de l'islam. Ou, à tout le moins, qu'elle résulte de l'insidieuse pression musulmane sur les esprits. Islamisation des esprits : ceux-là même qui s'élevaient contre l'inauguration d'un Parvis Jean-Paul-II à Paris ne s'opposent pas à la construction de mosquées. L'islam tente d'obliger l'Europe à se plier à sa vision de l'homme.
Comme jadis avec le communisme, l'Occident se retrouve sous surveillance idéologique. L'islam se présente, à l'image du défunt communisme, comme une alternative au monde occidental. À l'instar du communisme d'autrefois, l'islam, pour conquérir les esprits, joue sur une corde sensible. Il se targue d'une légitimité qui trouble la conscience occidentale, attentive à autrui : être la voix des pauvres de la planète. Hier, la voix des pauvres prétendait venir de Moscou, aujourd'hui elle viendrait de La Mecque ! Aujourd'hui à nouveau, des intellectuels incarnent cet œil du Coran, comme ils incarnaient l'œil de Moscou hier. Ils excommunient pour islamophobie, comme hier pour anticommunisme.
Dans l'ouverture à autrui, propre à l'Occident, se manifeste une sécularisation du christianisme, dont le fond se résume ainsi : l'autre doit toujours passer avant moi. L'Occidental, héritier du christianisme, est l'être qui met son âme à découvert. Il prend le risque de passer pour faible. À l'identique de feu le communisme, l'islam tient la générosité, l'ouverture d'esprit, la tolérance, la douceur, la liberté de la femme et des mœurs, les valeurs démocratiques, pour des marques de décadence.
Ce sont des faiblesses qu'il veut exploiter au moyen "d'idiots utiles", les bonnes consciences imbues de bons sentiments, afin d'imposer l'ordre coranique au monde occidental lui-même.
Le Coran est un livre d'inouïe violence. Maxime Rodinson énonce, dans l'Encyclopédia Universalis, quelques vérités aussi importantes que taboues en France. D'une part, "Muhammad révéla à Médine des qualités insoupçonnées de dirigeant politique et de chef militaire (...) Il recourut à la guerre privée, institution courante en Arabie (...) Muhammad envoya bientôt des petits groupes de ses partisans attaquer les caravanes mekkoises, punissant ainsi ses incrédules compatriotes et du même coup acquérant un riche butin".
D'autre part, «Muhammad profita de ce succès pour éliminer de Médine, en la faisant massacrer, la dernière tribu juive qui y restait, les Qurayza, qu'il accusait d'un comportement suspect". Enfin, "après la mort de Khadidja, il épousa une veuve, bonne ménagère, Sawda, et aussi la petite Aisha, qui avait à peine une dizaine d'années. Ses penchants érotiques, longtemps contenus, devaient lui faire contracter concurremment une dizaine de mariages". Exaltation de la violence : chef de guerre impitoyable, pillard, massacreur de juifs et polygame, tel se révèle Mahomet à travers le Coran. De fait, l'Église catholique n'est pas exempte de reproches. Son histoire est jonchée de pages noires, sur lesquelles elle a fait repentance. L'Inquisition, la chasse aux sorcières, l'exécution des philosophes Bruno et Vanini, ces mal-pensants épicuriens, celle, en plein XVIIIe siècle, du chevalier de La Barre pour impiété, ne plaident pas en sa faveur. Mais ce qui différencie le christianisme de l'islam apparaît : il est toujours possible de retourner les valeurs évangéliques, la douce personne de Jésus contre les dérives de l'Église.
Aucune des fautes de l'Église ne plonge ses racines dans l'Évangile. Jésus est non-violent. Le retour à Jésus est un recours contre les excès de l'institution ecclésiale. Le recours à Mahomet, au contraire, renforce la haine et la violence. Jésus est un maître d'amour, Mahomet un maître de haine. La lapidation de Satan, chaque année à La Mecque, n'est pas qu'un phénomène superstitieux. Elle ne met pas seulement en scène une foule hystérisée flirtant avec la barbarie. Sa portée est anthropologique. Voilà en effet un rite, auquel chaque musulman est invité à se soumettre, inscrivant la violence comme un devoir sacré au cœur du croyant.
Cette lapidation, s'accompagnant annuellement de la mort par piétinement de quelques fidèles, parfois de plusieurs centaines, est un rituel qui couve la violence archaïque.
Au lieu d'éliminer cette violence archaïque, à l'imitation du judaïsme et du christianisme, en la neutralisant (le judaïsme commence par le refus du sacrifice humain, c'est-à-dire l'entrée dans la civilisation, le christianisme transforme le sacrifice en eucharistie), l'islam lui confectionne un nid, où elle croîtra au chaud. Quand le judaïsme et le christianisme sont des religions dont les rites conjurent la violence, la délégitiment, l'islam est une religion qui, dans son texte sacré même, autant que dans certains de ses rites banals, exalte violence et haine. Haine et violence habitent le livre dans lequel tout musulman est éduqué, le Coran. Comme aux temps de la guerre froide, violence et intimidation sont les voies utilisées par une idéologie à vocation hégémonique, l'islam, pour poser sa chape de plomb sur le monde. Benoît XVI en souffre la cruelle expérience. Comme en ces temps-là, il faut appeler l'Occident "le monde libre" par rapport à au monde musulman, et comme en ces temps-là les adversaires de ce "monde libre", fonctionnaires zélés de l'œil du Coran, pullulent en son sein.
Ce texte était signé de Robert Redecker.
Or, à la suite de cet article, il s'est effectivement produit ce que décrit son auteur. Et Robert Redecker fut lui-même menacé de mort, cependant que les manifestations islamistes se multipliaient contre le pape et contre les chrétiens, à commencer par Gaza contre les chrétiens locaux, c'est-à-dire orthodoxes.
Dans un tel climat, et face à certains désaveux franco-français pitoyables, inspirés par les équipes de la Chiraquie mourante, je me suis permis le 30 septembre de la publier, à titre évidemment personnel, le texte ci-dessous dans la revue l'Homme nouveau.
Retrouver la primauté d'amour
Point de vue d'un orthodoxe
Depuis le discours de Benoît XVI pape de Rome, le 12 septembre, tant de choses ont été dites ! Un fleuve noir, d'encres et de propos irrationnels ou déraisonnables, a coulé dans toutes les capitales du monde. On a donc scrupule à y apporter une nouvelle alluvion, et à le faire au nom d'une orthodoxie, elle-même si plurielle, et si proche, et à le faire sans mandat ni titre, seulement comme un pèlerin en quête millénaire d'unité.
"Ouvre ma bouche Seigneur nous enseigne le Psaume, et ma bouche proclamera ta louange". N'est-ce pas cependant le commencement de notre liturgie ? Et notre prière, doit accompagner aujourd'hui l'Église sœur, dans sa démarche de vérité.
Avant de réagir on doit considérer pleinement le texte en lui-même et dans son contexte. Prononcé en un lieu, dans l'Allemagne concordataire, où cohabitent théologie et sciences profanes, le discours du pape est d'abord l'apologie de ce voisinage. On prolonge l'esprit d'un autre document connu sous le nom d'encyclique Fides et Ratio (1998). Si on ne part pas de cette constatation, autant ne rien dire.
Benoît XVI a donc prononcé à Ratisbonne une vibrante apologie, remarquablement charpentée et nuancée, de la pensée grecque, et plus encore de la cohérence entre la foi et la raison. Dans un tel registre, s'il y a place pour des nuances on ne peut pas dire qu'il y ait la moindre rupture entre ce propos et la tradition apostolique dont il est le continuateur, depuis le discours de Paul devant l'aréopage d'Athènes : "Athéniens, à tous égards vous êtes, je le vois, les plus religieux des hommes. (...) Et bien ! Ce que vous adorez sans le connaître, je viens, moi, vous l'annoncer" (Ac 17,16-28).
On aurait pu concevoir d'ailleurs, en terre germanique, que la réaction vînt d'héritiers de Luther et de sa "révolte de l'individu contre l'espèce" s'ils s'étaient montrés littéralement attachés à sa fameuse fulmination contre la raison qui serait, tonnait-il, "la putain du diable".
On aurait pu aussi imaginer qu'un certain fondamentalisme textuel ait pu prendre à la lettre, sans en comprendre le mystérieux et salvateur message, de l'Écriture : "Je détruirai la sagesse des sages, et l'intelligence des intelligents je la rejetterai." Nous le savons, la Croix demeurera éternellement "scandale pour les Juifs folie pour les païens". Cela aussi se trouve dans Paul (1Co, I 16 à 24) et cela n'est nullement absent, on le sait, de la pensée pontificale.
Les procès d'intention ne sont pas venus du monde chrétien et c'est presque dommage puisque cela pourrait indiquer un affadissement de la foi chez nos frères luthériens ou calvinistes.
Les réactions sont venues de là où on ne les attendait pas. Elles sont venues de la part de gens qui s'honorent, abusivement, en prétendant avoir porté au Moyen âge les lettres grecques : je ne parle pas, évidemment, des mollahs eux-mêmes et autres barbus extrêmes, je parle ici de leurs thuriféraires occidentaux.
L'orthodoxie en général se rit de cette légende, sachant bien évidemment que le grec était sa langue et que les manuscrits anciens étaient recopiés par ses moines dans tous les ateliers de l'Empire.
Faut-il "rappeler" ? Oui, certes il faut dire la vérité historique. Trop de gens l'ignorent. Au temps du petit empire résiduel reconstruit au XIIIe siècle par les Paléologues, dont l'économie exsangue était tranquillement pillée par les marchands monopolistes de Venise et de Gênes, un immense courant de travail et de réflexion sur l'héritage grec était l'œuvre de savants, qui continueront leur travail à Florence. Ce que l'occident appelle la Renaissance est le prolongement de cet effort, à partir de 1396 et de l'ouverture par Manuel Chryssolaris, dans la capitale "étrusque", d'une école de langue grecque. Toujours dans la cité des Médicis, la filiation de la peinture byzantine peut se découvrir, au couvent de Saint-Marc et aux Offices, où, partant de l'art des icônes, on est invité à en suivre la trace, enrichie du génie de l'occident, avec Cimabue, Fra Angelico, Botticelli.
Quel orthodoxe bien né pourrait ne pas être touché par cette convergence entre le catholicisme romain et nos propres églises si attachées elles-mêmes à leurs différentes cultures nationales ?
S'il est bien donc une rumeur à ne pas laisser propager, ce serait que l'orthodoxie pourrait se montrer lâchement indulgente envers les crimes et les menaces des barbus de l'islamisme. La vérité géographique et politique, au contraire, c'est que le monde orthodoxe réel se situe aux premières loges de la confrontation à la poussée islamiste.
Ce que l'occident, l'occident en général, l'occident actif et hâtif, a retenu des propos de Benoît XVI me semble certes réducteur.
Mais tout de même cet entretien de Manuel Paléologue dont est extraite la fameuse citation est lui-même disponible en France depuis 1966, depuis 40 ans (Sources Chrétiennes numéro 115).
La question posée ici est troublante : Mahomet et le Coran ont-ils apporté une seule nouveauté en dehors de l'hypothèse que la foi dans le Dieu unique puisse être propagée, non par la contrainte légale formelle mais tout simplement par le glaive de la guerre.
L'idée de guerre sainte constitue certes une novation radicale par rapport à l'Évangile puisque celui-ci proclame exactement le contraire "Quiconque se sert de l'épée périra par l'épée", après la Genèse "Tu vivras de ton épée, et tu seras asservi à ton frère"(Ge 27,40).
Cette question apparaît donc doublement troublante.
Elle interpelle les chrétiens puisqu'au fond elle reconnaît, et c'est un propos très particulier à Manuel Paléologue dont il convient de lire les fameux Entretiens, que providentiellement peut-être, mystérieusement en tout cas, les musulmans sont nos frères en monothéisme.
Également, elle déstabilise le musulman lui-même puisque cette novation semble par définition contraire à l'islam, car elle est considérée impie en elle-même ("bid'a").
Oui la raison grecque, sa dialexis, est mise bel et bien ici au service de la foi.
Osons aussi remercier le pape de Rome d'avoir eu recours aux services de ce fils de l'Église grecque.
Car sur ce terrain il existe en effet un discord, un écart de sensibilité, entre l'héritage des Croisades et l'expérience historique de l'orthodoxie. Non que la délivrance de Jérusalem pût être tenue en tant que telle pour illégitime en 1099, mais on y a peut-être, parfois, abusé de la formule "Dieu le veult".
De la sorte, on l'a, éventuellement, quelque peu profanée.
Pour un chrétien orthodoxe la guerre ne se révèle, au fond, jamais "juste" : seule est permise la guerre défensive, face aux "barbares qui veulent la guerre".
On le voit donc : Manuel Paléologue est bel et bien un orthodoxe, au sens courant du terme, et ce texte de Benoît XVI l'est tout autant.
Et j'espère qu'aucun professeur de théologie ne viendra amicalement me tirer, sur ce point, les oreilles.
Mais il faut encore aller au-delà et cette crise de l'automne 2006 nous offre l'occasion de dissiper certaines ambiguïtés.
D'abord l'orthodoxie ne considère nullement l'évêque de Rome comme dépourvu de charisme : on a même vu quelques touchantes protestations lorsque Benoît XVI a renoncé au titre de patriarche d'Occident.
Les divergences, — et il ne faut pas se dissimuler : elles existent, — entre l'église de Rome et le monde orthodoxe ont été construites au cours des siècles de séparation historique. Des rameaux ont poussé. D'un côté la scolastique, mais aussi l'esprit franciscain, également l'aventure spirituelle des jésuites, etc. de l'autre le palamisme, la spiritualité hésychaste, la théologie apophatique, la philocalie etc. Mais ils demeurent fils d'une même Mère et d'un même Père ! Ils sortent de la même souche !
Il est de coutume de faire remonter à Ignace d'Antioche (né au Ciel en 107 fête le 17 octobre) la formule et la doctrine de la "primauté d'amour" dont bénéficierait l'église de Rome.
Une telle primauté, on doit la tenir tout de même pour plus belle que toutes les gloires fugaces et tous les pouvoirs temporels, politiques, circonstanciels : "ne mettez pas votre foi dans les princes, dans un fils d'homme impuissant à sauver, son souffle s'en va et retourne à sa glèbe, avec lui périssent ses pensées" chantons-nous dans toutes les langues et tous les dimanches.
"Primauté d'amour" : cela ne vous semble-t-il pas beaucoup plus fort que tous les droits écrits, codifiés, constitutionnalisés ?
Mais pour que cela soit, en vérité, il faut évidemment que cela soit vérifiable, et précisément quand notre sœur est en péril, attaquée par les esprits faux.
Nous devons la défendre en humbles serviteurs de la Vérité. "Je suis venu pour témoigner de la Vérité, quiconque est de la vérité écoute ma Voix" dit le Seigneur.
Voila, aujourd'hui, je persiste et je signe, deux ans plus tard, en ce 12 septembre 2008.
Pour conclure maintenant, et témoigner de l'aggravation de mon cas, je voudrais donner encore une précision sur cette primauté d'amour. On la rattache au nom de saint Ignace d'Antioche. Or l'honnêteté philologique m'amène à avouer l'étroitesse de la source. De ce vénérable Père de l'Église grecque du IIe siècle, dans le recueil dont je dispose pourtant édité par une maison catholique, je n'ai su trouver qu'un seul texte mentionnant cette qualification. Elle se trouve elle-même insérée dans une liste d'eulogies adressées aux frères romains. Cela me semble bien vouloir dire que la Tradition a pieusement repris et amplifié pendant quelque mille ans de vie commune, ce beau concept honorant la sœur occidentale. Elle le manifestait de la sorte depuis un orient alors bercé du complexe de sa supériorité et de son antériorité, à tous points de vue. Autrement dit l'amour ineffable rapprochait les deux poumons.
Seules des contingences politiques en ont brouillé le message, il y a de cela neuf siècles et demi.
Nous ne devons pas seulement prier, nous ne devons pas seulement agir, nous devons savoir que le nouveau millénaire en rétablira l'unité, appelée par le Seigneur lui-même dans sa prière sacerdotale, comme signe de la tunique sans couture de Jésus le Christ.
JG Malliarakis
Et pourquoi pas une petite ligne de publicité de bon goût…… pour les Éditions du Trident
Les commentaires récents