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Sans trop me préoccuper, je l'avoue, de la réunion de l'Eurogroupe du 12 février présidée par M. Jean-Claude Juncker je réunissais ces derniers jours une documentation sur les comptes publics français depuis 25 ans.
Il faut, hélas, reconnaître que, dans le contexte de l'Union monétaire, autour d'une devise unique et monopoliste, l'attitude de l'État français, dans le dernier quart de siècle peut paraître étrange et même affligeante. Dans la décennie 1980 le solde négatif du Budget central tournait autour de 20 milliards d'euros. Et puis au milieu des années 1990 cette inconséquence, pour ne pas dire cette incontinence financière récurrente de Paris, est passée à un niveau de 40 milliards, sans jamais s'en écarter vraiment.
On a donc multiplié par 2 le déficit de l'État français, au moment où des technocrates français, MM. Delors et Lamy en particulier, rédigeaient à Bruxelles les clauses du traité négocié à Maastricht en 1991. La partie monétaire des accords, confirmée à Amsterdam en 1997, comportait notamment l'obligation de limiter à 3 % du PIB, grand maximum, les besoins de financement des administrations publiques de chaque pays adhérent à l'Euro.
On se souviendra que, dans ce contexte, M. Alain Juppé suggéra un peu plus tard d'exclure de la future zone monétaire continentale des pays comme l'Italie, l'Espagne, la Grèce et le Portugal jugés alors par lui structurellement déficitaires.
Depuis, chacune de ces nations a, l'une après l'autre, tant bien que mal, accompli les efforts nécessaires pour rentrer dans les fameux critères de convergence.
Au contraire le gouvernement de Paris n'a rempli depuis 15 ans aucun de ses engagements ni aucun des impératifs que nos énarques entendaient imposer aux autres.
De la sorte, la réunion du 12 mars s'est trouvée dans l'obligation de rappeler à M. Éric Wœrth, ministre du Budget et à Mme Christine Lagarde, ministre de l'Économie et des Finances, les promesses de l'équipe précédente. Il s'agit de réduire, et même de liquider le déficit à l'horizon 2010 et ceci indépendamment de la campagne présidentielle de 2012. Les ministres français ont d'ailleurs acquiescé à ce rappel à l'ordre qualifié par eux "d'équilibré".
Globalement, on ne saurait attribuer aux alternances politiques apparentes la moindre signification de ce point de vue : les gouvernements élus par des majorités classées à droite n'ont guère fait mieux, et parfois ils se sont révélés pires que les socialistes. Il est vrai que les idéologies et les technocrates en place n'ont jamais changé. Les cabinets ministériels reflètent les rapports de force au sein des réseaux administratifs et non la volonté d'appliquer des politiques nouvelles.
Ainsi la rupture, annoncée, promise et désirée de 2007, n'a entraîné aucune conséquence de ce point de vue. Le déficit de la loi de finances initiale pour 2008, votée par la majorité UMP, a été fixé à 41,8 milliards d'euros, et ceci sur la base d'une prévision de croissance très supérieure aux estimations raisonnables. Ce chiffre repart donc résolument à la hausse. Il peut être comparé, en effet, à celui de 2007 qui fait apparaître un solde d'exécution négatif de 38,4 milliards contre 39 en 2006 et 43,5 en 2005.
Rappelons incidemment que de telles valeurs devraient toujours être rapportées aux comptes de l'Etat plutôt qu'aux estimations de ce qu'on appelle produit intérieur brut, agrégat plus ou moins fictif et contestable de l'activité nationale : 41,8 milliards de déficit pour un budget de 271,8 milliards d'euros cela représente une impasse de l'ordre de 15,4 %. Ce trou considérable se situe à un niveau désormais supérieur à celui de notre effort de défense nationale évalué à 37 milliards d'euros.
Nos hommes de l'État peuvent donc se dire des champions du déficit.
On soulignera aussi que cette situation s'inscrit dans le cadre du retour des discours qualifiés de keynésiens, théorisant la "relance budgétaire" comme M. Dominique Strauss-Kahn s'est permis de le faire le 28 janvier à Davos (1), s'écartant singulièrement de sa mission à la tête du FMI. Il se trouve en accord avec Mme Lagarde, elle-même apparemment en phase avec les propos tenus par M. Fillon le 24 janvier allant jusqu'à annoncer "une deuxième révolution française caractérisée par l'innovation, le dynamisme et l'ouverture" (3).
L'affirmation de la doctrine catastrophique du déficit par GW Bush dans son dernier discours sur l'état de l'Union du 28 janvier a contribué à faire plonger les marchés financiers.
N'importe : elle représente encore la loi et les prophètes de l'économie dirigiste à la française, chère au calamiteux conseiller économique présidentiel M. Guaino, ancien commissaire au plan qui avait fait inclure début 2007, dans le programme de l’UMP des choix économiques, qui non seulement ne prévoyaient pas d’effacer le déficit avant 2012, mais prétendaient alors le stabiliser passée cette date à 1,5 % du PIB.
Si les dirigeants parisiens entendent pouvoir se dire "de retour en Europe" selon le propos affirmé par le chef de l'État le 10 février lors de son allocution télévisée, il faudra bien s'en tenir aux engagements pris, et renoncer au déficit et à ses champions.
JG Malliarakis
Notes
- Aux applaudissements du Figaro du 29 janvier.
- "Il faut envisager la politique monétaire en regardant la croissance et pas seulement la stabilité des prix", a-t-elle osé déclarer.
- cf. Le Monde daté du 26 janvier.
Et pourquoi pas une petite ligne de publicité de bon goût…… pour les Éditions du Trident.
D'après ces chiffres ,nous sommes les derniers de la classe (devant les Roumains et les Bulgares).
Jusqu'à quels chiffres de deficit nos partenaires européens peuvent ils nous laisser descendre sans remettre en cause leur propre credibilité?
Rédigé par : GOURBETIAN | jeudi 14 fév 2008 à 01:08
Les parlementaires européens profitent amplement des largesses offertes par les déficits des Etats nationaux. La presse nationale passe complètement sous silence cette incroyable affaire de corruption à laquelle sont mêlés plusieurs centaines de députés européens. Ceux-ci ont cru bon d'inclure dans leurs émoluments exemptés d'impôts les rémunération du personnel fictif à leur service, plus d'autres avantages de fonction abusivement perçu (frais de représentation, mobilier ancien, etc). Fait extraordinaire: le parlement a fait voter une motion spéciale interdisant au public l'accès au rapport publié par l'OLAF, l'organe anti-corruption européen. Cette sombre histoire n'est pas sans rappeler celles d'Eurostat et de sa double comptabilité permettant de dissimuler des rémunérations indues derrière des dépenses de financement de projets bidon. Romano Prodi avait alors ordonné l'étouffement de l'affaire qui sortait juste avant les élections européennes, permettant à seulement quelques députés anglais baillonés, en guise de parodie, de consulter le rapport dans une pièce à huis clos. Ce n'est pas du roman feuilleton mais la réalité quotidienne des institutions européennes, qui en pleine guerre anti-terroriste a voté un budget d'un milliard d'euros au titre du soutien à l'état mafieux du Kosovo et à l'organisation terroriste UCK! L'Europe en la personne de ses représenatnts se comporte comme une folle héritière dépensant sans compter devant la foule admiratrice de ses bailleurs de fonds pris sous le charme de son regard hypnotique: Europe, Europe, Europe!
Voir à propos du dit rapport passé à la trappe http://www.timesonline.co.uk/tol/news/politics/article3441659.ece
ou http://euobserver.com/9/25728
Rédigé par : Bertrand | mercredi 27 fév 2008 à 22:49