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Hier 17 février, surprise annoncée, les autorités du Kossovo proclamaient l'indépendance de cette ancienne province serbe, encore reconnue formellement comme telle par la résolution 1 244 du Conseil de sécurité des Nations-Unies et adoptaient un nouveau drapeau. Le nouveau chef de l'exécutif de Pristina, Hachem Thaci lui-même ancien dirigeant de l'UCK affirmait le caractère laïc et multiethnique de la nouvelle république.
Et il exprimait son désir de rejoindre la grande famille européenne.
Rappelons que si la majorité descend d'Européens de très ancienne souche, ces anciens Illyriens que nous nommons Albanais se sont formellement convertis à l'islam au XVIIe siècle. Actuellement 3 % des habitants albanais du Kossovo seraient catholiques, 65 000 d'après les statistiques du Vatican et, d'autre part, 6 % de la population, soit 120 000 personnes sont aujourd'hui encore des orthodoxes serbes. Ces derniers sont demeurés difficilement depuis 1999 et l'arrivée de l'OTAN, les moines dans leurs magnifiques monastères, les paysans dans quelques enclaves, potentiellement sécessionnistes à leur tour.
La réaction et l'affliction de nombreux amis, généralement pro-serbes, mais pas tous, m'amènent à préciser quelques points.
Je me sens incapable, contrairement à tant d'experts, de prévoir à long terme les conséquences de cet événement que semblent redouter les 4 capitales balkaniques de l'Union européenne et dont les plus gros États-Membres de l'Union ne semblent guère se préoccuper se contentant de donner, peut-être dans le vide, des conseils de modération.
M. Kouchner qui fut procurateur de la province de 1999 à 2001 exprime sa satisfaction.
Beaucoup craignent des réactions en chaîne. Rien ne permet de dire que la Catalogne, pour ne citer qu'un exemple ne suivra pas le conseil tant soit peu provocateur que lui donne la diplomatie du grand frère russe. La dernière fois que Moscou a exercé une influence à Barcelone cela n'a pas laissé que de bons souvenirs. La Flandre n'a pas attendu cette affaire, par exemple non plus, pour évoluer vers une demande de séparation de la Belgique.
J'ose espérer par ailleurs, qu'au 24 février le second tour de l'élection présidentielle à Chypre ne verra pas, de ce fait, une poussée des votes communistes. Je me contenterai de signaler que cette affaire sert de prétexte à un approfondissement du fossé entre l'ouest et l'est de l'Europe, la Russie passant pour la protectrice des Serbes. Et par exemple on a vu immédiatement apparaître le 17 février 2008 à 15 h 58 cette dépêche AFP de Moscou selon laquelle : "L'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, deux régions séparatistes de Géorgie, ont annoncé dimanche dès la proclamation d'indépendance du Kosovo qu'elles allaient demander à la Russie et à l'ONU de reconnaître leur indépendance".
M. Vojislav Kostunica premier ministre de Serbie a fustigé quant à lui ce 17 février devant le parlement de Belgrade ce qu'il considère comme la faiblesse de l'Union européenne.
Sur ce terrain je le suivrais, hélas, bien volontiers ou plutôt je le précède.
J’ai commencé pour ma part à exprimer cette préoccupation dès 1991.
À l’époque la bonne droite française se voulait globalement pro croate à proportion qu'on y supposait les Croates tous d’excellents catholiques.
Je me suis pour ma part rendu à Belgrade en 1994 au moment de l’embargo. J'y ai pris en notes des entretiens très éclairants, pour moi, avec des représentants de diverses tendances, allant de l'écrivain Dobritsa Tchossitch, éphémère président de la fédération au gouverneur de la banque centrale yougoslave Dragoslav Avramovic, et quelques véritables anticommunistes. Je publierai ces notes un jour ou l'autre leur temps. Ne parlons même pas des amis émigrés vivant à Paris. J'éprouve à vrai dire, depuis lors, beaucoup de scepticisme quand j'entends parler "des Serbes" comme s'il s'agissait d'une tribu pensant à l'identique et au pas cadencé.
À ceux que les questions actuelles du Sud-est européen préoccupent je voudrais simplement rappeler qu’elles ont commencé à se dessiner sous leur forme actuelle, celle d'une rivalité profonde entre l'Angleterre et la Russie, au cours de la guerre de Crimée de 1853-1856 puis de la guerre russo-turque de 1877-1878.
Le Kossovo avait été attribué arbitrairement à la Serbie par la conférence de Londres de 1912, c’est-à-dire par les ambassadeurs des 6 grandes puissances de l’époque, qui ont cru pouvoir dessiner les frontières balkaniques en l’absence des pays intéressés et encore moins en consultant les populations.
Cette époque est révolue. L’indépendance du Kossovo en représente une sorte de dernier acte, tout en annonçant des développements ultérieurs. Depuis deux siècles il s’agissait de se partager les dépouilles (le plus lentement possible selon les desiderata de l’Angleterre) d'un “homme malade de l'Europe” terme qui désignait alors l’Empire ottoman.
Présentement cette expression pourrait bien convenir à la France.
Aujourd’hui par ailleurs la grande aspiration de la “communauté internationale” tendrait presque à reconstituer l’Empire turc dans un arc de cercle allant, selon la formule de Turgut Ozal, de l'Adriatique à la muraille de Chine.
Et l’indépendance du Kossovo pourrait alors représenter aussi le premier acte de ce nouveau drame, surtout si elle s'écarte de principes européens et si elle déclenche un mouvement symétrique de la part des Serbes de la province ou de Bosnie.
Un de mes correspondants me parle de la nécessité d'une "réaction de grande ampleur".
Pense-t-il à l'Europe ou pense-t-il à la France ?
Certes, à Bratislava comme à Vienne, à Athènes, comme à Sofia à Nicosie comme à Bucarest et même à Madrid les chancelleries semblent sur la défensive.
Certes, au Vatican, Benoît XVI dans son allocution au corps diplomatique du 7 janvier et lors de sa rencontre le 3 février avec le président du Kossovo M. Fatmir Sejdiu mettait en garde l'Europe. Mais qui donc écoute Benoît XVI, même chez les catholiques ?
Pour ce qui est de la France je voudrais souligner la contradiction de ces souverainistes qui se disent aujourd'hui adversaires de la sécession du Kossovo et qui voudraient bien que la France se retire des institutions européennes et reprenne un petit jeu anti-allemand et anti-anglais.
Je voudrais simplement rappeler que le petit jeu anti-allemand de la France avait conduit à l'invention de la “Yougoslavie” après 1919. Mais c’est aussi la France qui (sous Mitterrand) a inventé la doctrine Badinter. Puis la France la première (par la voix de M. Juppé ministre des AE de Balladur) a officiellement diabolisé “les Serbes”. Ensuite la France (toujours Juppé) a imposé à l’Europe - contre l’avis du parlement de Strasbourg - l’Union douanière avec la Turquie. Enfin c'est la France qui (sous Chirac) a lancé l’idée des bombardements sur Belgrade.
Peut-on imaginer de “réveiller l’opinion française” ? Je ne sais.
JG Malliarakis
Et pourquoi pas une petite ligne de publicité de bon goût…… pour les Éditions du Trident.
La contradiction dans ce processus de creation du Kosovo, c'est qu'a l'heure ou on parle sans cesse d'integration dans le grand machin europeen (cf. Traite de Lisbonne), on se perd en conjectures louangeuses a propos de la creation d'un micro-Etat dote d'une micro-population.
Bien a vous
Rédigé par : Pierrot de la Luna | mardi 19 fév 2008 à 22:16
Dans le cas du Kosovo, je me garderais bien de proposer une analyse que mes lacunes rendraient improbable.
Cependant, j'y vois une confirmation du principe général qui veut qu'une colonisation réussie se fait avec des ventres et/ou des valises, et non avec des armées.
C'est une leçon à méditer pour nos compatriotes.
Le kosovo préfigure ce qu'un certain nombre de régions Françaises pourraient connaitre d'ici à 50 ans.
Faire des enfants et les élever dans nos traditions culturelles et spirituelles constitue la seule réponse viable à cette menace.
Rédigé par : Marc | mardi 19 fév 2008 à 23:23
Pourquoi parler d'impuissance alors qu'il s'agit au contraire d'un volonte deliberee, concertee meme entre l'UE et les Etats-unis, sous l'egide de leur homme lige Xavier Solana, ex secretaire general de l'OTAN reconverti en plenipotentiaire charge des affaires exterieures de l'UE? Celle-ci a meme cru opportun d'envoyer une force de police renforcee de juristes et de tout l'arsenal represif necessaire a la mise en place d'un Etat legaliste, sion legal,au nez et a la barbe des nations opposees au nouvel modele de societe voulu par l'UE dans cette region. Le Pentagone qui a deja cree la plus importante base militaire americaine d'Europe precisement au Kosovo lui prete main forte en envoyant une bonne centaine de contractors places au cote des ex terroristes de l'UCK. Heureusement la Russie a la ferme intention de ne pas perdre la face. Une intervention armee de la part des Russes marquerait un coup d'arret aux diktats de l'UE et des mondialistes qui nous preparent une Europe islamique.
Rédigé par : bertrand | vendredi 22 fév 2008 à 15:17