Écoutez l'enregistrement "pot-de-caste" de cette chronique :
L'insouciance des Français vis-à-vis de leur politique extérieure conforte assurément la frivolité de leurs dirigeants et l'incompétence de leurs journalistes. Un récent sondage en confirmait le poids. Il donnait le prisme suivant : 33 % des Français approuveraient le rapprochement franco-américain, 26 % souhaiteraient au contraire une politique plus antiaméricaine et 40 % accepteraient le statu quo. On pourra interpréter de différentes manières de tels pourcentages riches en contradictions. Et on gagnerait d'ailleurs à ne pas en surestimer la portée. Mais on ne perdra pas de vue, d'autre part, la charge considérable de cette relation transatlantique contrariée dans l'héritage du gaullisme.
Un souvenir de la campagne présidentielle de 1969 me revient souvent. La seule déclaration du candidat Pompidou relativement aux Affaires internationales consistait alors en une promesse de continuité. Mais quel but allait-il persister à poursuivre s'il devenait chef de l'État ? Il s'agissait, affirmait-il sans rire : "du rapprochement désiré par le général De Gaulle avec nos alliés américains". Une telle proclamation n'empêchera pas ce président, une fois élu, d'essuyer, quelque mois plus tard, le 27 février puis le 1er mars 1970 à San Francisco et à Chicago, manifestations hostiles et jets de tomates.
Orageuses et fluctuantes depuis les années 1940, les relations entre le gaullisme et les États-Unis allaient donc le demeurer encore pendant les 33 années qui se sont écoulées depuis l'élection en 1974 de Valéry Giscard d'Estaing.
Le paroxysme aura sans doute été atteint par la politique extérieure en dents de scie de M. Chirac, si semblable au vol d'un stupide hanneton toujours entêté à se cogner contre la même vitre. Mentionnons les innombrables discours gauchisants et les embrassades tiers-mondistes du président. Mais le sommet de l'inconséquence sera représenté par l'intervention brillante de Villepin volant aux Nations-Unies en février 2003 à la rescousse de Saddam. En avril, après la chute de Bagdad son maître déclarera le monde "enfin débarrassé d'un abominable dictateur" (1). "Saddam sera le De Gaulle du Moyen-Orient" avait-il pourtant prophétisé, le Chirac, en 1975.
Observons donc qu'aujourd'hui M. de Villepin, mis en examen, déshonoré par l'affaire Clearstream, se voit écarté sans doute pour très longtemps de toute influence. Ses comparses et ses soutiens, comme le présumé "corbeau" Gergorin, réincarnent à la Ville de grimaçantes gargouilles. Ils évoquent l'excellent film de Hitchcock "l'Étau" où apparaissaient à l'Écran ces sombres succubes et ces âmes damnées du gaullisme de gauche d'il y a quelque 40 ans travaillant hypocritement alors pour les Soviétiques.
Certains font aujourd'hui profession de redouter d'abord que la diplomatie française se mette à l'école des cow-boys. Pour rester dans un pareil registre, je trouverais, quant à moi, essentiel à la dignité de la France que le complexe militaro-industriel subventionnaire hexagonal cessât de nous attacher à la remorque putride de ces belles âmes toujours prêtes à vendre des winchesters aux Indiens. En dressant le bilan des 63 années qui ont fait suite à la "belle et bonne alliance", que De Gaulle croyait avoir conclue avec Staline à Moscou en 1944, on ne discerne pas seulement les oripeaux d'un archaïque "souverainisme" d'État frileusement substitués à la flamme de la Liberté et de l'Identité, on y constate aussi le rabougrissement étatique d'une nation et l'autodestruction sociale d'un peuple.
JG Malliarakis
Notes
- On doit souligner à ce sujet que nous avons TOUS été abusés par les sources françaises d'information qui nous présentaient à l'unisson ce personnage comme une sorte de grand réformateur appelé à moderniser monde arabe, un peu comme on persiste à considérer (à tort, d'ailleurs) Mustapha Kemal. En 1991 le parti baath irakien se voyait invité au congrès de Rennes du parti socialiste. Je reconnais moi le premier avoir longtemps pris au sérieux la biographie du maurrassien Charles Saint-Prot. J'ai personnellement commencé à prendre la mesure de cette désinformation française à jet continu, qu'en recevant les représentants de l'Institut kurde de Paris. On consultera à ce sujet les excellents dossiers fournis, mais hélas après coup, par FR3 ou par La Croix" (du 31 décembre 2006 "Saddam Hussein, l'inexorable chute d'un tyran").
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On ne peut pas plus imposer en Irak la modernité au sens où nous l'entendons que l'on ne peut y importer la démocratie. On pourrait faire des remarques du même ordre concernant le kémalisme. Faire abstraction des mentalités est une grave erreur, hélas très commune. La domination économique de l'occident a sans doute aidé à faire illusion, laissant penser aux occidentaux qu'ils seraient imités en tout. Ce n'est que manifestation éthnocentriste et oubli des leçons de l'Histoire, souvent accompagnés de suffisance voire d'arrogance.
Rédigé par : gros chat | lundi 13 août 2007 à 19:55
On pourrait aussi gloser sur les inconséquences d'une politique monétaire qui persiste dans ses erreurs, malgré toutes les crises successives causées par l'impéritie de nos gouvernants et de leurs financiers. N'est-il pas étonnant en effet d'entendre les politiques jouer les redresseurs de conscience après chaque coup de grisou sur les marchés financiers, alors qu'ils sont les premiers à encourager le marché lucratif des titres de dette et de leurs produits dérivés. Les banques comme les gouvernements ont massivement recours au refinancement par l'endettement. Les banques se refinancent en vendant au marché des titres de dette basés sur les actifs de leur bilan comme l'État prend la richesse de la nation en otage pour emprunter toujours plus. C'est ainsi que l'on crée sans fin des liquidités sur un marché déjà surchargé en titres de crédit. Jusqu'au moment où la misère de l'économie réelle et des administrés devient impossible à cacher. Les investisseurs sont alors saisis de panique et plus personne ne souhaite rattraper au vol les patates chaudes envoyées par les banques aux vendeurs de couverture du risque crédit. Il devient impossible d'évaluer des actifs qui perdent toute valeur de marche, malgré tous les modèles censés évaluer leur valeur marchande. Souhaitons que la débandade n'aille pas trop loin, car le public ne sait encore rien des milliards d'actifs bidon inscrits par les banques dans leur bilan (et hors bilan avec les opérations de marche sophistiquées sur les dérivés de crédit). Craignons pourtant d'assister un jour pas très lointain à la ruée sur les guichets de banques institutionnelles menacées de faillite parce que les injections des banques centrales ne suffiront pas à combler les trous béants laisses par les actifs fictifs - je veux dire mathématiques - des banques.
Rédigé par : Nicolas | jeudi 16 août 2007 à 16:08
Franchement, j'ai pas tout compris dans ce que vous écrivez, mais moi, j'irai pas manger des hamburgers avec Bush si c'était pas un pote, parce qu'on est loin de notre gastronomie, quand même! Washington vaut bien une viande prémâchée dans de la brioche. Et puis on devrait plutôt les mettre, eux, à notre régime, en douceur, bien sûr. PMS.
Rédigé par : minvielle | dimanche 19 août 2007 à 19:20