Écoutez l'enregistrement "pot-de-caste" de cette chronique :
Les professionnels du livre ont reçu ces jours-ci, comme toutes les entreprises de ce pays, leur formulaire habituel de déclaration relative à la Taxe à la valeur ajoutée, à déposer accompagnée du règlement correspondant avant le 17 juillet, sous peine d'une majoration de 10 % de la taxe due. Banal. Et puis, dans la partie blanche appelée "cadre réservé à la correspondance" on remarque, en cette occasion, le petit texte suivant surimprimé au lasère :
"N'oubliez pas : si vous exercez une activité d'édition d'ouvrages de librairie vous êtes redevable de la Taxe sur l'édition des ouvrages de librairie" prévue à l'article 1609 duodecies du Code général des impôts. Vous devez la déclarer semestriellement sur l'annexe 3310A (ligne 51) et en reporter le montant sur la ligne 29 des deux déclarations de TVA 3310-CA3 afférentes aux opérations : -de juin souscrite au mois de juillet – et de décembre souscrite au mois de janvier ; accompagnées du paiement, auprès du service des impôts des entreprises."
N'oubliez pas !
J'ai donc téléchargé le formulaire annexe 3310A, et la ligne 51 ne donnant aucune indication d'assiette, de seuil ou de taux je me suis renseigné.
Cette taxe résulte d'un décret daté du 1er janvier et dont le lecteur appréciera la rédaction gracieuse et claire :
"Décret n° 2007-2 du 1er janvier 2007 relatif à la taxe sur l'édition des ouvrages de librairie et à la taxe sur les appareils de reproduction ou d'impression et modifiant l'annexe III au code général des impôts
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
Vu le code général des impôts, notamment ses articles 1609 undecies, 1609 duodecies, 1609 terdecies et 1609 quaterdecies et les articles 331-L et 331-M de l'annexe III à ce code ;
Vu la loi no 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006, notamment son article 105,
Décrète :
Article 1 Aux premier et quatrième alinéas de l'article 331 L de l'annexe III au code général des impôts, le mot : « redevance » est remplacé par le mot : « taxe ».
Article 2 L'article 331 M de l'annexe III au code susvisé est ainsi modifié :
a) Au premier et au quatrième alinéas, le mot : « reprographie » est remplacé par les mots : « reproduction ou d'impression » ;
b) Aux deuxième, troisième et quatrième alinéas, le mot : « redevance » est remplacé, cinq fois, par le mot : « taxe ».
Article 3 Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 1er janvier 2007.
Par le Premier ministre : Dominique de Villepin. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, Thierry Breton
Le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, Jean-François Copé ."
Autrement dit le grotesque Villepin a pondu un décret transformant l'ancienne taxe destinée à frapper ce que la corporation du livre qualifie de "photocopillage" par une taxe pénalisant l'édition. Bravo. Bien fait pour les syndicats protectionnistes diront les méchants : en tous cas une excellente illustration du principe de retournement contre les bénéficiaires supposés de tous les systèmes d'assistance et de péréquation. Dans la pratique cette nouvelle taxe frappe au-dessus de 76 000 euros de chiffre d'affaires à concurrence de 0,2 % toutes les ventes de livres réalisées par les éditeurs français. Parafiscale elle est perçue au profit d'un prétendu "Centre national du livre", corporation d'État, pardon : "établissement public administratif" qui, d'après son site internet :
"a vocation à soutenir l’ensemble de la chaîne du livre (auteurs, éditeurs, libraires, bibliothèques, promoteurs du livre et de la lecture), et notamment la création et la diffusion des œuvres les plus exigeantes sur le plan littéraire. Il attribue des prêts et des subventions après avis de commissions spécialisées. Le montant global des interventions du Cnl, y compris les prêts, représente un budget annuel d’environ 22 millions euros".
Petit éditeur indépendant, n'ayant aucune relation avec cet organisme, je retiens simplement, je l'avoue, tant que ce décret signé de MM. Villepin, Breton et Copé sera en vigueur que je devrais travailler un peu plus pour payer plus, au profit de gens qui ne me rendent, à ma connaissance, aucun service.
JG Malliarakis
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Il serait utile de rappeler les éventuelles différences autres que juridique entre ladite "redevance" et la "taxe" qu'elle est devenue.
De toutes manières, il est lamentable que l'État prétende se substituer à la corporation pour gérer l'argent récolté...
Cordialement
Note : LASER serait francisé par ALESR, pas "lasère"
Rédigé par : gros chat | mardi 03 juil 2007 à 18:56
Mais peut-être devriez-vous demander à bénéficier de l'aide du Centre National du Livre ?
La promotion des travaux de mémoire historiques, par exemple — je pense aux textes du procès du maréchal Pétain — devraient parfaitement rentrer dans leurs critères de subvention.
Si ce n'était pas le cas, cela rendrait le CNL suspect des pires choses.
Petite réponse :
Vous ne manquez pas d'humour, à vos heures, cher Nicolas.
Rédigé par : Nicolas | mardi 03 juil 2007 à 21:12
Les subventions etant attribuées après avis de commissions où siegent des gens designés par le "pouvoir local" , il n'y a aucune chance que quoique ce soit vous soit attribué.
Par pouvoir local je designe un syndicat, que meme le directeur du Nouvel Obs n'ose pas nommer.(cf l'emission de Lundi à 8h15 sur FranceCulture, consacrée aux difficultés de la presse en France)
Rédigé par : GOURBETIAN | mercredi 04 juil 2007 à 19:00