Écoutez l'enregistrement "pot-de-caste" de cette chronique :
La chose appartenait à la sphère du prévisible. Elle va bientôt se transformer en hypothèse probable : les premiers heurts entre la nouvelle majorité et les forces de gauche ne viendront pas du monde ouvrier, mais de celui de l'enseignement.
Certes les premières rencontres programmées par le nouveau président auront été destinées aux centrales syndicales. La rupture annoncée à l'automne 2006 par le président de l'UMP ne concerne pas, pour le moment cette étrange Loi n° 2007-130 dite de modernisation du dialogue social. Ce texte a été inventé pourtant par son ennemi Villepin, cosigné par le radical-socialiste Borloo et promulgué par Chirac au 31 janvier 2007. Les articles L-101 et suivants insérés au commencement du Code du travail bafouent clairement les droits du Parlement. Ils font écho d'ailleurs à ces fameuses procédures d'arbitrage obligatoire qui avaient assuré dans les années 1920 la renommée d'un certain Benito Mussolini en Europe. Mais leur abrogation n'est pas pour demain et le camarade Thibault "en prenait acte" dès le 12 mai, sachant pourtant très bien qu'un "troisième tour social" constituerait la meilleure manière de conforter la majorité de droite au Parlement.
Les syndicats d'enseignants ne se sentent pas tenus à de telles traditions. Certes, ils appartiennent désormais à la même orientation idéologique que la CGT, encore que le public n'en ait qu'une notion un peu vague. La centrale actuellement majoritaire, cette FSU, dirigée par Gérard Aschieri a été créée dans l'orbite du parti communiste en 1993 par les 13 syndicats exclus ou en dissidence avec la vieille FEN socialo-maçonnique, elle-même transformée depuis lors en UNSA-Éducation. Force plus jeune que la CGT, la Fédération syndicale unitaire de l'Éducation nationale a, dès le départ exercé sa pression sur le ministre Bayrou. Ce dernier demeurat cantonné à l'immobilisme, fasciné par son dialogue personnel avec la secrétaire générale de la FSU de l'époque Mme Monique Vuaillat. Il en retira une sorte de prospérité politique paradoxale. Sa longévité ministérielle exceptionnelle couvrit la durée des deux gouvernements successifs d'Édouard Balladur (1993-1995) puis d'Alain Juppé (1995-1997). Cela a dû engendrer une part de nostalgie chez le candidat Bayrou. Et l'examen de ses discours en donne une bonne mesure : pour ce professeur agrégé, la question sociale se résume à la glorification conventionnelle du corps enseignant de notre pays.
Ancien conseiller puis de directeur de cabinet de Bayrou en 1993, l'actuel ministre Xavier Darcos semble, au contraire, décidé à rompre avec le souvenir probablement désagréable de cette ligne déprimante dans laquelle on a englué depuis quelque 15 années l'Éducation nationale.
La friction, actuellement encore à l'état virtuel, se focalise sur une partie très explicite du projet présidentiel du candidat Sarkozy : l'évolution de la carte scolaire. Celle-ci se verrait assouplie dès la rentrée 2007, en attendant d'être franchement supprimée à la rentrée 2008.
Ne croyons pas d'ailleurs, que, dans l'esprit de M. Darcos, il puisse s'agir de promouvoir "un grand marché libéral de l'Éducation". Il a encore écarté le spectre le 19 mai à Aix-en-Savoie devant les instances de la PEEP. Désireux que "l'excellence soit la même partout et pour tous", notre nouveau ministre se propose de "construire une école plus juste". Il s'en voudrait de pouvoir être soupçonné de "libéralisme". Ce serait trop affreux, n'est-ce pas ?
Sa trajectoire politique l'a conduit successivemnt, après quelques années de vie professionnelle consacrée à l'enseignement, puis à partir de 1992 à l'inspection générale, puis dans le cabinet du ministre, enfin dans le sillage politique d'Alain Juppé et du clan chiraquien. Son discours paraît inattaquable : personne n'a jamais réclamé "moins de justice".
Ah certes, la carte scolaire fait partie des bêtes noires de la droite politique ! Mais au fond cette nuisance concerne un système où l'école publique tourne sur un quasi-monopole de l'État, dont le secteur privé sous contrat est envisagé depuis la loi Debré de 1959 en tant que simple et docile sous-traitant chichement mais sûrement subventionné.
Les vraies solutions de liberté, certes, rendraient inopérante la notion même de carte scolaire. Mais elles commenceraient d'abord par le chèque scolaire au profit des familles, rendues libres de leurs choix éducatifs, par l'autonomie des établissements et par le démantèlement de la gestion centralisée du personnel du "mammouth".
Tant qu'on ne s'orientera pas vers ce type de solution les escarmouches avec les bureaucraties syndicales de l'enseignement nous paraîtront relever d'un jeu de dupes.
JG Malliarakis
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Autant je suis d'accord avec vous concernant la nécessité quant à l'omniprésence des héritiers de la pensée stalinienne dans le milieu de l'enseignement, autant je suis assez méfiant quant à la libéralisation complète du système éducatif.
En effet, si c'est pour appliquer le schéma des écoles de commerce (dont les frais de scolarité sont exhorbitants) à tout le milieu des universités par exemple, cela deviendrait extrêmement pervers. Doit-on nécessairement sombrer dans le modèle américain où un "pauvre" ne peut pas faire d'études supérieures? (bon d'accord ils ont toujours le principe des bourses, mais reconnaissons le, elles ne sont pas automatiquement attribuées à tous les futurs einstein ou hegel!) Le système français peut avoir du bon...
Contrairement à ce que l'on peut entendre dans la première scène de la folie des grandeurs, les pauvres ne sont pas nécessairement fait pour rester très pauvres et les riches pour rester très riches (le talent de papa ne fait pas le talent du fiston, et vice versa).
Enfin... c'est ce que je pense...
Merci pour cette bouffée (quasi-)quotidienne d'air frais sur un Internet applati par la déferlante conformiste!
Rédigé par : Antoine | mercredi 23 mai 2007 à 09:41
Bravo à JGM qui a raison de rappeler que le vrai pb en matière d'éducation réside dans le fait que les parents n'ont pas le choix de l'école de leurs enfants (puisqu'ils finance par la contrainte le monopole communiste de l'éducation antinationale par leurs impôts).
Le chèque scolaire, voilà ce qui aurait dû figurer sur le programme du petit Nicolas de Neuilly. On en est bien loin.
Ce serait encore plus simple s'il n'y avait pas d'impôt et pas d'école publique communiste à prépayer d'ailleurs.
L'intervention de Monsieur Antoine m'a bien amusé. Ce Monsieur colporte en gros ce que l'on entend tous les soirs sur TFI, c'est dire son utilité.
Il devrait réfléchir au fait que s'il n'y avait pas d'Etat, pas d'impôt pour payer les fonctionnaires superflus du mammouth, il y aurait peut-être moins de pauvre en France...Mais cela requiert un sens critique que l'on n' a pas quand on est issu dudit monopole communiste.
Je trouverai toujours impayable que l'on puisse présenter comme un modèle ce qui ne marche plus. Ce Monsieur gagnerait à se pencher sur les classements de la France (en général et sur l'éducation en particulier) depuis 20 ans : le « coefficient directeur » est clairement négatif.
Ce sera un progrès aussi quand on arrêtera de présenter la première puissance mondiale économique, politique, militaire et scientifique comme un pays du tiers-monde. C'est plutôt pour l'avenir de la France du petit Nicolas de Neuilly que j'exprimerais quelques inquiétudes.
Ce sera un grand progrès quand on jugera les choses à leur résultat et pas à l'aune d’obscurs intérêts de monopoles syndicaux ou de poncifs télévisuels.
Je pense, mon cher Antoine, que si les Etats-Unis n'avaient pas le meilleur système éducatif, ils ne seraient pas la première puissance mondiale. Peut-être auriez-vous intérêt à vous concentrer sur nos problèmes et sur le fait que votre système qui coûte deux fois plus que dans les pays normalement gérés ne produit globalement plus que des analphabètes…
Sans concurrence, le consommateur de services éducatifs comme de téléphone paye un maximum et bénéficie d’un service médiocre. Est-ce si compliqué à comprendre ? Allez-vous toujours dans le même restaurant ? Et quand c’est immangeable ou trop cher, vous forcez-vous à y retourner sous prétexte que les pauvres ne peuvent aller ailleurs (les « vrais » pauvres ne vont pas au restaurant de toute façon). Pourquoi voulez-vous qu’il en aille autrement pour l’éducation de vos enfants ? Pourquoi voulez-vous leur imposer cela ?
Je vous pose la question.
Bav.
Rédigé par : Victor le banni | mercredi 23 mai 2007 à 10:55
Cher Victor,
Je suis effectivement issu de votre système communiste dans le sens où j'ai fait mes études en France. Cela dit je ne vous cache pas que l'école publique je ne peux pas dire que j'ai vraiment connu ca.
Ensuite, ce que je me permets de dire c'est qu'actuellement une année de scolarité à HEC coûte 7900 euros contre en gros 600 euros dans une grande école d'ingéniérie.
Et on voit plus de jeunes issus de milieux "défavorisés" (mais qui ne sont pas des demeurés pour autant) que dans les écoles de commerce (souvent repères de "fils à papa").
Evidemment, il y a des systèmes pour que des "pauvres" puissent y accéder. Mais, si je puis me permettre, un fils de pauvre a peut être les capacités d'être plus compétent qu'un fils de "riche" et ne devrait pas avoir à s'endetter pour cela. Et ce, sans sombrer dans un discours communiste ou socialisant.
Après pour ce qui est des collèges ou lycées je ne saurais vous dire étant donné que je n'ai pas encore d'enfants à scolariser.
Et je ne crois pas au théorème du "tous égaux" à la naissance. Je dis juste que certains se retrouvent à faire des études que d'autres auraient pu faire de facon plus efficace si leurs parents en avaient eu les moyens (ou si le système les y avaient aidé).
Oui à la libéralisation de l'école. Non au système du "si ton papa a plein de sous, tu gagneras plein de sous automatiquement et sans rien faire".
"Travailler plus pour gagner plus" ;) (Je sais l'expression se galvaude...)
Cdt
Rédigé par : Antoine | mercredi 23 mai 2007 à 11:57
"Loin d'effacer les distinctions sociales et de rapprocher les fortunes, l'instruction tend, au contraire, à rendre plus saillantes les différences que la nature a mises entre les hommes."
Félix du Marhallac'h (in Revue de l'Armorique, 1844)
Rédigé par : Philippe JOSSELIN | mercredi 23 mai 2007 à 15:14
Tout cela me rappelle la petite feuille jointe à la déclaration de revenus qui nous donne pour 80% d'investissement dans l'enseignement (et la recherche). Ça fait beaucoup quand même. Par contre les écoles islamiques pullulleront si on ouvre les vannes de "chacun son école". C'est déjà assez de bazar.....
Rédigé par : minvielle-sebastia | mercredi 23 mai 2007 à 15:39
C'est extraordinaire ces gens qui pensent que ce sont les autres qui devraient leur payer un investissement dont ils attendent des revenus plus élevés.
Cependant, la raison première de la pseudo-gratuité, c'est la CENSURE : au départ, voler l'argent de contribuables à 90 % catholiques pour donner le butin de ce vol à une école sans Dieu.
Ce nazisme anti-catholique perdure mais l'instrument de censure, d'autant plus efficace qu'il manie plus d'argent volé et que pas un individu sur cent ne le perçoit pour ce qu'il est, d'autres essaient de développer son étendue.
Il suffit que le prétendu "service public" de l'enseignement soit peuplé de gens qui trouvent normal de vivre d'argent volé aux autres, pour que celui-ci devienne automatiquement un instrument de propagande esclavagiste-socialiste.
Bien sûr, quand il faut payer deux fois (en subventionnant l'idéologie de ses oppresseurs) pour choisir l'école de ses enfants, l'école est mauvaise. Il faut être stupide ou malhonnête pour prétendre que le monopole, quel qu'il soit, soit une bonne affaire pour qui que ce soit.
Même les défenseurs du prétendu "service public" qui croient profiter parce qu'ils en sont les receleurs et les maîtres temporaires de son oppression et de sa censure, seraient plus heureux s'ils vivaient honnêtement car leur statut de Parasites Sociaux Institutionnels les diminue au sens moral et intellectuel du terme : la nature humaine est ainsi faite que l'"homme nouveau socialiste" n'est qu'un sous-homme.
Rédigé par : Hunden | mercredi 23 mai 2007 à 17:36
merci Hunden
Rédigé par : SaintCast | jeudi 24 mai 2007 à 09:35
Le système des universités indépendantes, et donc payantes, n'est pas "américain", il est propre à la plupart des grandes démocraties.
Engluée dans sa tradition jacobine,la France laisse ses universités devenir des dépotoirs, véritables fabriques à intermittents du spectacle et autres "sociologues du monde du travail", par refus d'appliquer les méthodes qui fonctionnent ailleurs.
Le système actuel reproduit, à l'amplifiant, la domination symbolique de la bourgeoisie "de robe" (magistrats, universitaires, "créatifs") de gauche sur l'ensemble de la société.
Suite à la loi de 1905 et à l'interdiction d'enseigner pour les congrégations, le jeune Charles De Gaulle partit en Belgique pour terminer ses études secondaires...
Rédigé par : Marc | jeudi 24 mai 2007 à 20:48